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    Revue d'histoire des sciences etde leurs applications

    Les premiers linéaments de la science géologique : Agricola,Palissy, George Owen.Pierre Brunet

    Citer ce document Cite this document :

    Brunet Pierre. Les premiers linéaments de la science géologique : Agricola, Palissy, George Owen.. In: Revue d'histoire

    des sciences et de leurs applications, tome 3, n°1, 1950. pp. 67-79.

    doi : 10.3406/rhs.1950.2770

    http://www.persee.fr/doc/rhs_0048-7996_1950_num_3_1_2770

    Document généré le 19/10/2015

    http://www.persee.fr/collection/rhshttp://www.persee.fr/collection/rhshttp://www.persee.fr/doc/rhs_0048-7996_1950_num_3_1_2770http://www.persee.fr/doc/rhs_0048-7996_1950_num_3_1_2770http://www.persee.fr/author/auteur_rhs_506http://dx.doi.org/10.3406/rhs.1950.2770http://www.persee.fr/doc/rhs_0048-7996_1950_num_3_1_2770http://www.persee.fr/doc/rhs_0048-7996_1950_num_3_1_2770http://dx.doi.org/10.3406/rhs.1950.2770http://www.persee.fr/author/auteur_rhs_506http://www.persee.fr/doc/rhs_0048-7996_1950_num_3_1_2770http://www.persee.fr/doc/rhs_0048-7996_1950_num_3_1_2770http://www.persee.fr/collection/rhshttp://www.persee.fr/collection/rhshttp://www.persee.fr/

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      es premiers

    l inéaments

    de

    la science géologique :

    Agricola,

    Palissy,

    George Owen

    1° Indépendamment du traité Des pierres

    de

    Théophraste, duivre V du traité De la

    matière

    médicale

    de

    Dioscoride

    et

    des

    ivres XXXIII-XXXVII

    de l Histoire

    naturelle

    de

    Pline (1) ainsi

    que

    de quelques

    remarques

    intéressantes,

    mais

    éparses, de certains

    géographes

    tels que

    Hérodote, Strabon, etc. (2), l Antiquité n avait

    guère

    légué au Moyen-âge, concernant

    la

    minéralogie et

    la

    géologie,

    si l on

    excepte

    les vues théoriques (généralement développées

    de

    façon

    trop

    abstraite),

    qu une double série

    d observations

    : les

    unes

    plus spécialement techniques

    sur

    l exploitation des mines (3), les

    (1) Sur

    la

    minéralogie et

    la géologie

    de

    Théophraste, nous

    avons donné

    quelques

    indications

    bibliographiques

    dans notre volume

    concernant l Antiquité {chap. XV, n.

    4,

    p.

    295). Sur l ensemble

    du problème

    géologique et

    minéralogique

    dans l Antiquité, on

    pourra utilement

    consulter

    les

    ouvrages

    de K. A.

    von

    Zittel, K.

    Hummel,

    A.

    Geikie

    et E.

    von

    Lasaulx,

    cités

    dans

    la

    Bibliographie

    générale

    de

    notre

    volume rappelé plus

    haut (p. 1 143). On y ajoutera, pour la période antique et

    les

    suivantes,

    Sainte-Claire Deville,

    Coup ďozil

    historique

    sur la géologie, Paris, 1878, mais certaines de

    ses

    interprétations

    sont fantaisistes.

    Rappelons

    aussi,

    de notre Bibliographie générale pour

    l Antiquité

    (p. 1137),

    l ouvrage de

    K.

    Mieleitner,

    Geschichte der

    Mineralogie in Alterlum und

    Mitte-

    laller,

    2

    vol., Jena, 1922. Voir Précisions pour une

    histoire des

    origines de la Paléontologie,

    par

    G.

    Bugler, Revue ď Histoire

    des Sciences,

    1949, fasc.

    3.

    (2) Nous aurons

    à y

    revenir plus

    loin.

    (3)

    Voir

    à

    ce

    sujet

    les

    études

    de

    L. de

    Launay,

    L industrie

    du cuivre

    dans

    la

    région

    ďHuelva {Annales des mines, nov. 1899). — Histoire de V industrie, minière en Sardaigne

    (ibid., mai 1892). —

    Les

    mines du Laurion dans V Antiquité (ibid., juill. 1899). —

    Les

    mines

    d or

    de V Antique

    Egypte

    (La Nature, 20 déc. 1903). Sur ces mines d or, le même auteur

    a donné, dans ses Richesses minérales de l Afrique (Paris, 1903,

    p. 119) la

    traduction

    d un passage de

    Diodore

    de

    Sicile. On trouvera dans notre volume concernant

    l Antiquité

    (p.

    519

    et

    suiv.) la traduction

    d un texte

    de

    Photius

    (érudit byzantin du

    ixe

    siècle)

    reproduisant, comme celui de

    Diodore,

    mais

    avec quelques

    variantes, la description faite

    de ces mines

    d or

    de

    l ancienne Egypte,

    par

    Agatharchide

    (sur cet auteur,

    voir notre

    volume cité, chap. XXVII,

    p.

    515). Rappelons aussi

    de Ed.

    Ardaillon,

    Les

    mines du

    Laurion

    dans

    ГAntiquité,

    Paris, 1897.

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    REVUE D HISTOIRE DES SCIENCES

    autres,

    assez souvent

    fantaisistes, ou plus ou moins mêlées de

    croyances d origine magique sur les

    talismans, ayant

    trait aux

    pierres précieuses (1). Encore faut-il remarquer

    que

    les premières

    elles-mêmes

    n étaient

    pas

    exemptes

    d une

    certaine empreinte

    astrologique, qui

    avait amené non seulement à établir des

    correspondances entre les divers métaux et telle ou

    telle

    planète (2),

    mais

    encore à

    expliquer par

    des influences astrales

    la

    génération

    des

    métaux.

    Cette

    fâcheuse

    tendance se retrouve au

    Moyen-âge,

    aussi bien

    chez

    Albert

    le Grand

    que

    chez des

    auteurs

    de moindre

    valeur, et

    jusque

    chez Agricola, dont

    nous aurons pourtant

    à

    signaler,

    sur nombre de

    points,

    les excellentes observations et les

    ingénieuses explications (3).

    Il

    ne

    nous

    semble

    pas

    opportun

    de

    retracer

    avec quelques

    détails

    l histoire des

    écrits qui

    jalonnent

    la

    marche des idées

    dans

    cette

    double direction.

    Dans

    la

    première

    surtout

    nous

    ne

    rencontrons

    guère

    avec l œuvre

    de

    Marbode

    et à côté d elle,

    que

    des essais de

    répertoires,

    plus ou moins

    exacts dans la description

    et plus ou

    moins complets

    dans

    le dénombrement, des

    pierres considérées

    comme précieuses.

    De

    ces lapidaires, où abondent

    surtout

    les

    considérations

    de

    caractère

    extra-scientifique,

    l influence se fait

    sentir

    jusqu à

    notre époque, dans

    certaines croyances absurdes où

    se donnent libre cours l imagination et la crédulité

    des

    foules

    ignorantes

    ;

    mais

    on

    en

    décèle

    des

    marques

    certaines

    dans

    toute

    la

    production,* sinon vraiment

    scientifique, du

    moins pseudo-scienti-

    (1) Sur les lapidaires

    de l Antiquité,

    voir

    F.

    D. de Mély,

    Les

    lapidaires de ГAntiquité

    et du

    Moyen-âge,

    3 vol.,

    Paris, 1902. Spécialement

    en

    ce

    qui concerne les Lithica,

    attribué

    à Orphée,

    consulter notre

    volume

    sur l Antiquité, p. 1071,

    n. 4.

    Étude

    récente

    de

    Max

    Wellmann, Die Stein- und

    Gemmenbiícher

    der Antike (Quellen u. Studien, 1935).

    (2)

    La

    liste planétaire

    des

    métaux que

    nous

    avons

    reproduite,

    en suivant le

    texte

    de

    Berthelot, dans notre volume concernant l Antiquité (p. 1026-1027) peut donner une

    idée de ces correspondances supposées.

    (3) Sur les lapidaires du Moyen-âge, consulter, outre Leopold Pannier (Biblioth.

    de

    l École

    des

    Hautes

    Études,

    1882),

    qui

    traite

    spécialement

    des

    lapidaires

    français

    (dont le

    premier

    en

    date

    a paru, sous le nom de Jean de Mandeville, dans

    les vingt

    premières

    années du xvie siècle, Lyon, s.

    d. ; une autre

    édition en fut imprimée

    à Paris,

    vers

    1540),

    l important ouvrage

    de F.

    D.

    de

    Mély, Les lapidaires

    de l Antiquité

    et du

    Moyen-âge, 3 vol., Paris, 1902.

    Par

    certains côtés, le Speculum lapidum,

    publié à

    Venise,

    en

    1502, par

    С

    Leonardi

    (de

    Pesaro), marque un progrès sur nombre d ouvrages

    similaires

    ;

    il

    n y en reste pas

    moins

    des

    traces profondes de

    préjugés astrologico-magiques.

    Aussi ne faut-il pas

    s étonner

    qu en le

    rééditant, en

    1610,

    Scudalupi ait présenté

    de prétendus

    rapports

    entre

    les planètes

    et

    les métaux.

    Notons encore

    que

    le Livre des Gemmes (Strasbourg, 1530)

    d Érasme

    Stella

    n est guère qu un commentaire de Pline.

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    AGRICOLA,

    PALISSY, GEORGE OWEN

    69

    fique

    des xvie et xvne siècles en ce domaine. C est ainsi qu en 1669

    Robert

    de

    Berquen,

    renchérissant en cela

    sur

    Boèce

    de

    Boodt

    (1),

    qui

    se

    contentait de répartir les pierres

    précieuses d après

    leurs

    propriétés

    bienfaisantes ou

    nuisibles

    au

    point

    de vue

    médical

    célébrait

    avec

    enthousiasme

    les vertus

    de

    l émeraude touchant

    l heureuse transformation

    des caractères de ceux

    qui la portent.

    En ce

    qui

    concerne

    l exploitation minière et

    l étude

    des

    métaux

    il

    n y a

    guère

    à retenir,

    avant

    de

    considérer l ouvrage fondamental

    d Agricola,

    que

    le

    petit traité

    de

    Calbus

    Fribergius

    intitulé Berg-

    buchlein

    et

    publié

    en

    1505

    (2).

    Né à Glauchau, en 1493, Georg Agricola (3), dont le

    nom

    latinisé

    est une traduction de son patronyme Bauer, fit, après des études à

    Zwickau, puis à

    Leipzig, plusieurs

    séjours

    en

    diverses universités

    allemandes

    et

    italiennes, pour

    y

    apprendre

    la

    médecine.

    Après

    avoir poursuivi,

    en 1526,

    des

    recherches minéralogiques dans les

    Riesengebirge,

    il s installa,

    l année suivante, à Joachimsthal, où,

    tout en exerçant

    la

    médecine,

    il

    continua

    de

    se livrer à

    l étude

    des

    minéraux. Bourgmestre de

    Chemnitz, en 1531,

    et

    appelé

    à exercer

    sa profession en même temps

    qu à

    occuper ses loisirs,

    dans

    un

    milieu

    de techniciens des

    mines,

    il

    ne

    tarda pas à travailler à

    la

    rédaction de son

    grand

    ouvrage De

    re melallica, qui,

    paru (posthume)

    en 1556,

    avait

    été précédé d un certain nombre d autres

    sur des

    questions

    analogues

    ou connexes

    (4). Les

    dernières

    années d Agricola

    (1)

    Et pourtant son Historia gemmarum

    et

    lapidum (Hanau, 1609) présente, à bien

    des égards, une incontestable valeur,

    récemment

    mise en relief dans

    un article

    de

    J.-E. Hiller, Boèce de Boodt, précurseur de la minéralogie moderne {Annales

    Guébhard-

    Séverine, 11e année, Neuchâtel, 1935).

    (2) Sur ce traité,

    signalons

    l étude

    de

    G. A.

    Daubrée,

    La

    génération des minéraux

    métalliques

    ďapres

    le Bergbûchlein

    (Journal

    des

    savants,

    juin

    1890),

    dans laquelle on

    trouve, outre une traduction, un résumé d autres écrits anciens sur la même question.

    Pour

    tout

    ce

    qui

    concerne

    les

    recherches minéralogiques

    et

    géologiques faites en

    Saxe

    à

    cette époque,

    il convient de se référer à

    l étude

    d ensemble de P. Wagner, Die minera-

    logisch-geologische

    Durchforschung

    Sachsens

    in

    ihrer geschichllichen Entwicklung (Isis,

    1922, p.

    63).

    (3) Parmi les

    études sur Agricole (on

    trouvera

    une

    bibliographie dans

    l article

    de

    P. Wagner cité dans la

    note

    précédente), signalons celles de

    G. H.

    Jacobi, Der Mineralog

    Georgius

    Agricola

    und sein Verhàllnis zur

    Wissenschaft

    seiner Zeit,

    Leipzig, 1889,

    de

    Ivor

    B. Hart, Georgius

    Agricola

    et

    les débuts de la

    science métallurgique (Scientia, 1932).

    (4) En

    laissant

    de côté les

    ouvrages

    d un tout

    autre

    caractère

    nous donnerons la

    liste suivante

    : Bermannus,

    sive

    de

    re metallica,

    1528 ;

    De

    ortu

    et causis

    sublerraneorumt

    1544

    ;

    De

    nátura eorum, quae effluunl e terra, 1545 ;

    De

    nátura fossilium, 1546

    ;

    De

    veleribus

    et

    novis metallis, 1546 ;

    De

    animanlibus

    subterraneis,

    1548.

    Ces

    ouvrages

    furent traduite

    en

    italien par Michèle Tramezzini,

    Vinegia,

    1550. Le

    De re

    metallica, paru seulement

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    REVUE D HISTOIRE

    DES

    SCIENCES

    furent très agitées,

    du

    fait

    des passions religieuses

    alors

    surexcitées

    en Allemagne

    ;

    on

    peut dire qu il

    fut

    persécuté

    même

    après sa

    mort, puisque la

    sépulture

    lui

    fut refusée à

    Chemnitz, où depuis

    un certain temps

    il

    n avait plus

    de

    fonctions

    officielles,

    et que

    son

    corps dut

    être

    transporté

    à Zeitz

    (1555).

    Le dialogue intitulé Bermannus, sive de re metallica (1528) est

    plutôt un essai avant tout destiné à attirer l attention sur

    la

    technique minière,

    en en montrant les avantages (1)

    ;

    il

    est

    loin

    d avoir

    dans

    l œuvre scientifique d Agricola

    la

    même importance

    que

    les ouvrages

    postérieurs,

    et au

    premier

    rang

    de

    ceux-ci le

    De re metallica. Cependant, au point

    de vue

    historique, il prend

    un

    relief spécial

    du

    fait

    que, par sa date, c est le

    seul

    qui ait pu

    avoir

    quelque influence

    sur Biringuccio.

    Il

    est vrai

    que, si

    celui-ci a

    peut-être

    reçu

    du

    Bermannus

    l idée

    du premier

    livre

    de

    son

    ouvrage

    De la pirotechnia, il a envisagé le

    problème

    d une

    manière tellement

    plus

    élaborée

    et

    avec

    des vues

    si nouvelles, que

    l on

    ne

    peut

    en rien

    parler

    d emprunts,

    ni même reconnaître dans

    le second écrit

    une

    sorte de continuation et de développement

    du

    premier.

    Par

    contre,

    en

    tenant compte,

    comme il convient, du

    fait

    que les

    œuvres

    importantes d Agricola sont

    postérieures

    d au moins quatre ans au

    livre

    de Biringuccio,

    on est admis à

    considérer

    que

    le savant

    de

    Chemnitz s est, à

    plusieurs

    reprises,

    inspiré

    de

    la Pirotechnia,

    dont

    il

    cite d ailleurs l auteur dans la préface

    de son

    traité De re

    metallica

    (2).

    Du

    reste,

    le

    De

    nátura

    fossilium,

    dans

    lequel

    on trouve une

    sorte de

    catalogue

    raisonné

    et systématique

    de

    tous les

    minéraux

    alors

    connus et d une grande partie des roches, peut, en

    un

    certain

    sens,

    être

    regardé

    comme une

    étude

    plus détaillée

    du sujet

    des

    deux premiers livres

    de

    l œuvre

    de Biringuccio.

    Certes,

    dans

    sa

    dissertation

    De animantibus subterraneis,

    Agricola se

    montre

    beaucoup

    trop crédule à

    l égard

    des fables

    concernant les bons et les

    mauvais

    génies

    que

    recèleraient

    les mines ;

    mais

    cette complaisance à

    l égard

    de certaines croyances populaires

    en 1556 (posthume), fut traduit en italien par

    Michelangelo

    Florio, Bâle, 1563. Pour les

    traductions

    de l ensemble en

    allemand,

    citons

    celle de E. Lehmann (Freiberg,

    1806).

    Signalons aussi Georg

    Agricola, Zwôlf

    Bûcher vom

    Ber

    g-

    und

    Hiittenwesen, Berlin,

    1928.

    (1) Sur l exploitation

    des

    mines et

    la

    métallurgie,

    rappelons l ouvrage historique de

    Friedr.

    Freise,

    Geschichte der

    Bergbau-

    und Hiitentechnik, Berlin,

    1908.

    Dans notre volume

    concernant l Antiquité,

    nous

    en

    avons déjà

    signalé le t. I, Alterlum.

    (2)

    Plusieurs

    passages de l ouvrage manifestent cette influence de Biringuccio, que

    nous

    nous contentons

    de signaler ici, faute d en

    pouvoir

    examiner plus longuement les

    aspects.

    Voir E. O.

    von

    Lippmann,

    Biringuccio

    und

    Agricola

    (Isis, 1936).

  • 8/17/2019 Fossili Leonardo Da Vinci

    6/14

    AGRICOLA,

    PALISSY,

    GEORGE

    OWEN 71

    ne l empêche pas

    de

    se

    montrer,

    dans

    son

    De ortu et causis subter-

    raneorum, fort sévère pour les alchimistes, et

    de

    s attaquer, dans

    le De

    nátura

    fossilium, à

    la pratique alors

    courante

    (et qui n a pas

    complètement

    disparu même

    de nos

    jours)

    de

    la rhabdomancie.

    C est dire qu il y a déjà chez ce savant, encore

    pénétré

    de

    la

    mentalité

    médiévale

    (dans

    ce que ce

    terme implique de résistance aux

    explications positives) un

    effort pour donner

    à

    l expérience bien

    comprise

    la place qui lui revient

    dans

    les

    sciences de

    la

    nature.

    Quand on cherche

    à

    prendre une

    vue

    d ensemble

    de

    l œuvre

    d Agricola,

    on

    peut

    remarquer, qu en dehors

    de

    ce

    qu elle

    contient

    de

    connaissances

    plus proprement chimiques

    appliquées

    aux

    problèmes

    techniques

    de

    la métallurgie (1), elle se développe surtout

    en deux

    directions

    étroitement connexes : d une part

    la

    minéralogie

    proprement

    dite

    et

    d autre

    part,

    la géologie

    et

    la

    physique

    du

    globe, au sens large

    de

    ces termes.

    Bien

    que

    ses ouvrages

    ne

    puissent pas être strictement

    répartis

    suivant cette division

    bipartite, qui d ailleurs

    n a ici, de toute

    évidence,

    qu une

    valeur

    de commodité

    (étant

    donné

    que la

    minéralogie entre dans

    le

    groupe des sciences géologiques), on peut dire

    cependant que le

    Bermannus

    et le

    De

    re metallica doivent

    plutôt

    être rangés dans la première

    catégorie de

    recherches, et les De orlu

    et causis subterraneorum

    et

    De

    nátura

    fossilium,

    dans la

    seconde.

    Dans

    l une

    et

    l autre

    de

    ces

    directions,

    Agricola

    s inspire, notons-le

    (1) Sur l histoire

    de

    ces problèmes, consulter, outre les

    ouvrages de

    B.

    Neumann,

    de L. Beck, de F.

    Freise,

    de O. Johannsen, de J. N. Friend et de

    K.

    Mieleitner, cités dans

    la

    Bibliographie générale

    de notre volume

    sur

    l Antiquité (p.

    1137),

    L. Bapst,

    Les

    métaux

    dans l Antiquité et au Moyen-âge,

    Paris,

    1884 ; et aussi Th. Schafer, L industrie du

    fer

    dans la région

    ďAllevard

    au Moyen-âge, Grenoble,

    1926. Pour

    la bibliographie, se référer

    à Leonardo

    Olschki,

    Die Literatur

    der Technik und der angewandten Wissenschaften vom

    Mittelalter bis

    zur

    Renaissance,

    2

    Bd., Heidelberg, 1919-1922.

    Parmi les contemporains

    d Agricola,

    on

    peut mentionner spécialement Christ.

    Encelius

    (Engel), dont

    le De re

    metallica (1557) est loin

    d avoir

    la valeur de celui du

    savant

    de

    Chemnitz :

    on

    y

    trouve

    notamment maintes explications renouvelées de l alchimie ou

    même

    directement

    tirées

    d elle.

    Un ouvrage

    qui

    a

    quelque

    analogie

    avec

    le

    précédent

    est le

    De re

    metallica (Madrid, 1569) de Perez de Vargas

    qui

    a le mérite de

    fournir,

    outre

    des

    indications intéressantes sur

    le

    manganèse (apparemment

    les premières fournies

    sur

    le

    peroxyde

    de

    manganèse),

    certain procédé

    de

    trempe, etc.

    On

    en

    doit encore

    rapprocher l ouvrage publié en espagnol par Villa Feina, en

    1572.

    Pour la docimastique

    (analyse chimique et dosage

    des

    minerais), les

    ouvrages

    suivants, bien que portant profondément l empreinte

    de l alchimie,

    ne manquent

    cependant pas d intérêt : Lazare Erckern, Aula subterranea (Francfort, 1573) ; et Libavius-

    Alchemia...,

    Francfort,

    1597.

    Pour les

    textes spécialement,

    voir N. Gobet, Anciens minéralogistes de

    France,

    2 vol.,

    Paris, 1779.

  • 8/17/2019 Fossili Leonardo Da Vinci

    7/14

    72

    revue d histoire des sciences

    expressément, des mêmes directives

    et

    use de

    la même méthode,

    à

    savoir le recours à l expérience, qu il a,

    tout

    naturellement, maintes

    fois

    conseillé

    et

    préconisé.

    2° Dégagée

    des nombreuses anecdotes qui tendaient à faire de

    Bernard Palissy une sorte de personnage énigmatique, presque

    légendaire

    (1), la vie

    de

    ce

    savant,

    indépendamment

    de

    son

    activité

    dans

    les questions religieuses agitées à son

    époque (ce

    qui

    lui

    valut

    sa mort tragique

    en prison, vers 1590), apparaît

    dominée par

    une

    véritable

    fièvre

    de travail.

    Né vers

    1510, très vraisemblablement

    en

    Agenois,

    mais fixé dès son enfance en Saintonge, qu il

    ne

    quitta

    que

    pour des voyages d étude, et plus tard pour Paris,

    ses

    fonctions le firent loger

    aux

    Tuileries, cet

    arpenteur, devenu

    finalement, en raison de sa technique artistique,

    «

    inventeur des rustiques

    fîgulines

    du

    roi

    et

    de la

    reine

    sa

    mère

    »,

    c est-à-dire émailleur

    officiel

    de

    la

    cour,

    fut avant

    tout un

    artisan ingénieux et

    un

    artiste habile

    ;

    mais aussi, par suite

    de

    son esprit curieux,

    un investigateur

    méthodique

    sur

    bien

    des questions

    scientifiques fort obscures

    à

    son

    époque, et, pour

    tout

    dire,

    un

    savant original,

    dont

    la sagacité devait

    être

    reconnue plus tard par les spécialistes les plus qualifiés

    (2).

    C est

    à

    ce dernier titre

    seulement

    qu il nous intéresse

    ici, et

    qu il

    convient de

    lui

    faire une

    place dans

    cette étude.

    Tout

    d abord, en ce qui concerne la façon

    dont

    furent

    présentées

    à

    leur

    époque,

    les

    idées

    de

    Bernard

    Palissy

    sur

    les

    problèmes

    scientifiques,

    signalons que, pour atteindre, selon sa propre

    expression

    «

    les

    plus doctes et

    les

    plus curieux

    », le savant autodidacte,

    dépourvu de

    titres et

    de fonction

    universitaire, et ne remplissant pas

    les

    conditions

    pour

    l obtention

    d une

    chaire au Collège

    Royal

    (fondé

    par François

    Ier

    en 1530),

    eut

    l heureuse idée d organiser des cours

    ou plutôt des conférences publiques, dont le début se place au

    printemps de 1575.

    Pour n être

    pas absolument neuve, une telle

    initiative

    rompait toutefois

    suffisamment

    avec les

    usages

    pour

    (1) Cette révision

    scrupuleuse de la tradition à la

    lumière

    des

    documents, favorisée

    d ailleurs

    par les

    recherches d érudits locaux,

    a été

    entreprise successivement

    par

    Louis Audiat, Bernard Palissy. Élude

    sur sa

    vie et

    ses

    travaux,

    Paris, 1868,

    et Ernest

    Dupuy,

    Bernard Palissy. L homme, Г

    artiste,

    le savant, V écrivain,

    Paris,

    1894 ;

    nouv.

    éd., revue et

    augmentée,

    1902. Parmi

    les, biographies

    plus

    récentes,

    D.

    Leroux,

    La vie de BernardPalissy,

    Paris, 1927.

    (2)

    Contentons-nous

    d indiquer ici

    les

    jugements de

    Cuvier,

    qui trouve, chez

    Palissy,

    « le commencement, l embryon

    de la

    géologie moderne » {Histoire des sciences naturelles,

    Paris,

    II,

    p.

    231), et de Dumas, qui

    ne

    craint pas de le mettre au nombre

    des

    créateurs

    de la

    chimie.

  • 8/17/2019 Fossili Leonardo Da Vinci

    8/14

    AGRICOLA,

    PALISSY,

    GEORGE

    OWEN 73

    mériter

    d être signalée.

    Ajoutons

    que, pour mieux illustrer son

    enseignement, Palissy

    avait

    réuni,

    dans

    une sorte

    de

    cabinet

    d histoire naturelle,

    bon

    nombre

    de

    spécimens minéralogiques,

    parmi les

    plus

    intéressants

    de

    ceux

    dont

    il

    avait

    à

    traiter.

    Observateur,

    il ne se contentait pas

    de

    l être, il voulait encore

    que

    les

    autres

    le fussent.

    Nous insisterons particulièrement ici sur

    ce que lui

    doivent

    la

    géologie, la

    minéralogie

    et,

    si l on veut bien accepter

    l emploi

    peut-être

    un peu prématuré

    du

    terme,

    la

    cristallographie.

    En ce

    domaine,

    comme dans les

    autres, laissons délibérément de

    côté les

    erreurs,

    dont on

    pourrait

    dresser une

    liste

    fastidieuse et

    inutile, pour ne considérer

    que

    les idées fécondes, dont le temps

    mettra

    plus

    tard en valeur le caractère original

    et

    novateur.

    A ce

    point

    de

    vue,

    il

    est vrai,

    il

    nous

    faudra

    faire

    des réserves

    sur

    quelques

    points et nous garder

    d un

    enthousiasme

    que ne

    justifierait pas

    tout à fait

    la prise en

    considération de tous

    les

    antécédents

    au

    moins possibles. Cependant,

    mis de

    côté les emprunts à Vitruve, et

    plus

    encore

    à Cardan,

    il

    reste, dans

    la

    pensée de Palissy, une

    nouveauté incontestable ; à savoir

    que

    ce qui, chez les autres,

    fait

    figure

    d aperçus

    plus ou

    moins

    nets,

    se

    hausse, chez lui, à

    la

    valeur

    d une

    explication

    scientifique

    présentée

    comme

    telle. C est

    le cas,

    par exemple, pour

    la

    théorie des

    fossiles

    qui, pour avoir été, en

    dépit

    des

    trop

    fameuses

    railleries

    de Voltaire,

    reprise

    par

    Reaumur

    et acceptée par Fontenelle

    (1),

    avant d être développée par

    Buffon

    (2),

    puis par Cuvier

    (3),

    s impose pour ainsi

    dire,

    d elle-même

    à l attention,

    dès qu on entreprend

    un

    examen

    de l œuvre

    scientifique

    du potier

    saintongeois.

    Hérodote,

    voulant

    établir

    que l Egypte

    était un

    ancien golfe

    comblé

    par alluvions du Nil, en donnait entre

    autres

    preuves

    l existence de coquillages

    marins dans

    le sol de ce pays

    (cf. II, 10).

    Strabon,

    s il

    discute contre

    Ératosthène

    (I,

    chap.

    Ill, 3 à 20) au

    sujet

    de

    l explication

    de

    ce fait, ne met pas en doute la réalité

    de

    (1)

    Réaumur

    présenta,

    en 1720, à l Académie

    des

    Sciences de Paris

    des

    Remarques

    sur les

    coquilles fossiles

    de

    quelques cantons

    de la Touraine

    (Mém.

    de

    VAcad. des

    Se, 1720,

    p. 400

    et

    suiv.) ; ce

    qui

    donna à

    Fontenelle

    l occasion

    d écrire,

    dans YHisioire de

    cette

    Académie

    (1720, p.

    5-6), quelques

    lignes fort élogieuses à l égard de Palissy

    «

    aussi grand

    physicien que

    la Nature seule en puisse former

    un ».

    (2)

    Voir sa Théorie de la

    terre

    (1749)

    et les Époques

    de la nature (1778).

    (3)

    Voir

    spécialement,

    outre

    ses Recherches sur

    les

    ossements fossiles (4 vol.,

    Paris,

    1812),

    le

    Discours sur la

    théorie de

    la

    terre

    (Paris, 1821)

    et le

    Discours sur les révolutions de la

    surface du globe (Parie, 1825).

  • 8/17/2019 Fossili Leonardo Da Vinci

    9/14

    74 revue

    d histoire des

    sciences

    celui-ci, et

    signale

    même

    que,

    selon

    Ératosthène,

    cette existence

    de

    coquilles

    marines à l intérieur de

    l Egypte

    est une question qui a

    « particulièrement exercé

    la

    sagacité des philosophes ». Des

    remarques

    analogues

    se

    rencontrent chez

    Plutarque,

    et aussi chez

    quelques

    auteurs

    romains,

    spécialement Lucrèce, Sénèque,

    et

    même Ovide.

    Aussi est-ce vraisemblablement

    un

    écho

    de

    ces

    écrits,

    plus ou moins

    recueilli et peut-être

    déformé à

    travers

    tout

    le

    Moyen-âge,

    que nous

    trouvons encore

    chez

    Boccace, dont la pensée

    sur

    ce point est même

    formulée

    avec

    une précision

    qui

    ne va pas sans étonner.

    Dès

    lors

    il

    n est sans doute pas impossible de rattacher

    encore

    à

    une influence

    antique les idées

    exprimées

    avec une remarquable netteté par

    Leonardo da

    Vinci sur

    l origine

    marine des

    coquillages fossiles

    ;

    d autant plus

    qu à

    la même époque, en Italie, d autres savants se

    trouvaient

    d accord

    sur

    ce

    point

    avec

    leur

    grand

    compatriote.

    Qu il nous suffise

    de citer

    Fracastoro

    dont

    les études

    sur

    les fossiles

    de

    Vérone se placent vers 1517,

    et

    Alessandro degli Alessandri

    (1460-1523),

    qui

    allait jusqu à supposer

    que

    l émergence de certaines

    régions autrefois recouvertes par la

    mer pourrait

    être due à quelque

    changement

    dans l axe

    de rotation de

    la

    terre.

    Quant

    aux remarques

    de

    Cardan

    sur

    l origine animale

    des

    fossiles

    elles tirent,

    selon

    toute

    vraisemblance

    leur inspiration de

    Leonardo da

    Vinci ;

    et, comme il

    est

    assez probable d autre

    part

    que la lecture du

    De subtilitate (dans

    la traduction française

    publiée

    par Richard

    Le

    Blanc,

    en

    1556,

    à

    Paris) n a pas été sans faire sentir assez profondément son influence

    sur Palissy,

    il se

    pourrait

    que

    celui-ci

    ait

    indirectement emprunté

    au savant

    italien

    le thème général

    de

    sa théorie des fossiles.

    Quoi qu il en soit,

    il

    importe de bien remarquer que

    la

    méthode

    même

    de Palissy, essentiellement basée sur

    l expérience, ne pouvait

    lui

    laisser

    accepter

    des

    opinions

    dont il

    n eût

    pas personnellement

    vérifié dans

    les faits le

    bien-fondé. Rien n est

    plus significatif à cet

    égard

    que

    la façon dont Pratique, dans les dialogues qui

    forment

    le

    cadre des Discours admirables,

    triomphe

    des objections opposées à

    ses

    arguments essentiellement

    tirés

    de

    l expérience, par Théorique,

    tout

    imbue des explications abstraites, si

    chères

    à bien des

    penseurs

    du

    Moyen-âge. A tel point

    que

    l on s est plu à

    voir

    dans le savant

    saintongeois,

    en même temps qu un

    adversaire des

    spéculations

    scolastiques

    et des

    recettes

    alchimiques, un champion de

    la

    véritable méthode

    expérimentale. Nous verrons ailleurs ce qu il faut

    penser sur ce point, mais nous pouvons actuellement en retenir

    que

    Palissy,

    d ailleurs

    admirablement

    placé en

    Saintonge

    pour étudier

  • 8/17/2019 Fossili Leonardo Da Vinci

    10/14

    AGRICOLA,

    PALISSY, GEORGE

    OWEN

    75

    les fossiles qui abondent, en cette contrée, dans des terrains

    crétacés

    ou tertiaires, ne s est pas dispensé

    de

    faire lui-même les

    recherches

    nécessaires. De

    fait, on

    constate

    qu il

    a

    poussé

    plus

    loin

    que

    tous

    ses

    prédécesseurs

    le

    détail

    des

    observations,

    reconnaissant

    par exemple, de manière précise, l identité avec des formes actuelles

    pour

    toute

    une

    série de

    formes fossiles et

    allant jusqu à établir,

    avant

    Colonna, à

    qui

    on

    en attribue couramment le

    mérite,

    la

    distinction entre

    les formes

    lacustres ou fluviatiles

    et les formes

    marines. Sans doute avait-il été poussé

    à

    le

    faire

    par la répugnance

    qu il éprouvait à admettre l action

    de

    sédimentation des mers

    même

    dans

    les

    endroits fort éloignés des côtes actuelles.

    Il faut

    reconnaître que, sur

    ce

    dernier

    point,

    ses vues

    manquent d ampleur

    et manifestent une certaine timidité dans la construction théorique.

    Que,

    sur

    cette

    question,

    il

    ait

    été

    retenu

    par

    le

    souci

    de

    ne

    faire

    intervenir

    dans ses

    explications

    que

    des causes dont il pouvait

    encore

    voir l action se

    prolonger

    sous

    ses

    yeux, il

    n en

    reste pas

    moins

    que sa prudence coutumière

    en

    face de toute hypothèse

    jugée

    trop

    audacieuse l a

    empêché de formuler

    jusqu au

    bout un

    des grands principes de

    la

    science géologique.

    Car,

    au

    lieu

    d attribuer

    à l action de

    la

    mer

    les dépôts

    de

    fossiles si loin qu ils soient

    à

    l intérieur des terres, il a préféré,

    tout

    en parlant des « eaux salées

    de

    la

    terre

    »,

    ne pas supposer une communication entre

    les

    vastes

    lacs

    intérieurs

    et

    la

    mer

    ;»bref,

    il

    a

    éliminé,

    dans

    ses

    explications,

    tout

    appel

    à une variation de forme des

    continents.

    Bien

    que la

    pensée

    scientifique

    de Palissy

    n ait

    pas exercé sur

    ses

    contemporains

    une

    véritable

    influence, et

    que

    ses idées aient

    attendre

    plusieurs

    siècles avant

    de

    pénétrer

    tout

    à

    fait dans l édifice

    de

    la science,

    on voit que

    par l effort

    systématique

    pour se

    dégager

    des explications fantaisistes,

    et

    pour progresser dans la voie dont

    les

    perspectives

    avaient

    été

    à

    peine

    entrevues, l expression

    de

    cette

    pensée mérite d être considérée comme

    un

    moment important

    de

    l évolution de

    la

    géologie. En effet,

    il

    ne

    faut

    pas oublier

    qu à

    son

    époque,

    en

    dépit

    des précurseurs

    proches

    ou

    lointains

    que

    nous

    avons signalés, l œuvre de Palissy

    en

    ce domaine, tranche

    avec la

    plupart des recherches

    alors

    poursuivies.

    Car on se bornait

    généralement

    à

    dresser des catalogues

    descriptifs

    des fossiles (1) ou

    à

    en

    (1)

    Notons d ailleurs que

    le

    terme

    fossiles, déjà employé

    dans l Antiquité, sous sa

    forme latine

    fossilia

    (l expression se

    trouve

    notamment

    chez

    Pline), avait

    conservé,

    encore

    à

    cette

    époque,

    le sens

    très large que pouvait

    lui assigner

    son

    etymologie. On

    entendait par

    là tout ce que l on tirait

    des profondeurs

    de la

    terre, et par conséquent

  • 8/17/2019 Fossili Leonardo Da Vinci

    11/14

    76 REVUE D HISTOIRE

    DES

    SCIENCES

    attribuer la formation

    à de prétendues conditions réalisées

    indépendamment

    de

    toute action marine. Et ce n était pas là

    seulement

    le

    fait de

    gens

    peu

    versés dans l étude

    de

    la nature :

    on

    voit, par

    exemple, Agricola, qui,

    sur

    d autres

    points,

    nous venons

    de

    le

    dire,

    a tant contribué au progrès de

    la

    géologie, supposer (1)

    que

    cette

    imitation

    de

    formes

    organiques par certaines pierres

    pouvait être

    due

    à des fermentations d une sorte de matière grasse sur

    la

    nature

    de

    laquelle il

    éprouvait

    quelque difficulté à donner

    des

    précisions.

    Mattioli

    ne faisait

    guère

    que répéter cette pseudo-explication (2)

    ;

    tandis

    que Fallope

    faisait intervenir quelques tumultueuses

    exhalaisons

    de

    la

    terre, et

    que

    Mercati, chargé par Sixte-Quint de

    cataloguer la

    collection de

    fossiles

    constituée au

    Vatican, restait

    fort embarrassé dans son interprétation de

    l influencé

    terrestre

    en

    ces matières

    (3).

    Il ne

    peut

    évidemment être question

    ici de

    relever les unes après

    les

    autres

    les exactes descriptions

    de

    roches et minéraux

    divers qui

    abondent

    spécialement

    dans le traité Des pierres. L auteur ne se

    borne pas d ailleurs à présenter des définitions qui, malgré

    l imprécision du vocabulaire,

    étonnent par leur

    netteté

    ;

    il

    s efforce

    en

    outre

    de

    mettre en lumière, comme pour les fossiles

    le mode de

    formation.

    C est par là surtout

    que

    sa façon d étudier les terrains

    apparaît

    neuve ; et c est aussi dans cette direction, pensons-nous, qu il

    convient

    de

    chercher

    l idée

    dominante de Vensemble de

    cette

    œuvre.

    On a parlé

    d un

    «

    système

    » de Palissy ; l expression est

    parfaitement exacte,

    si

    l on entend désigner seulement par elle

    le

    fait, que,

    selon une remarque glissée par lui dans son traité Des sels, «

    toutes

    ces

    matières (d enseignement)

    sont si

    bien

    concatenées

    ensemble

    que l une donne intelligence

    de l autre

    » (II, 135), bref que

    toute

    la

    pensée s organise autour d un thème

    fondamental.

    Effectivement

    bien autre chose que ce à quoi nous

    réservons

    actuellement la désignation de fossiles.

    Aussi ne faut-il pas s étonner de voir ces catalogues descriptifs s étendre bien au

    delà

    des

    limites

    que

    leur

    assignerait un

    travail

    analogue

    entrepris

    de

    nos

    jours.

    Citons

    parmi

    eux,

    Valerius

    Cordus,

    De fossilibus

    Germaniae, 1561 ; Conrad Gessner,

    De

    omni rerum fossilium

    génère,

    gemmis, lapidibus,

    metallis, 1565 ; Kentmannus,

    Nomenclatura

    rerum fossilium,

    quae in

    Misnia

    inveniuntur,

    1565.

    Ajoutons

    ici que les fossiles, dans leur

    acception actuelle,

    étaient assez couramment dénommés

    alors pierres

    figurées.

    Notons

    toutefois

    que

    Gessner

    se préoccupe

    aussi

    de classer (et

    non

    seulement de

    décrire) et

    se demande si

    les fossiles

    ne seraient pas

    des

    restes d animaux.

    (1) Voir son

    étude

    De

    nalura

    fossilium, citée plus haut.

    (2)

    Mattioli, Discorsi sopra

    Dioscoride,

    Lib. V, 1551.

    (3) L ouvrage

    de

    Fallope

    a

    pour titre : De Fossilibus, 1557. Celui

    de

    Mercati

    Metallotheca.

  • 8/17/2019 Fossili Leonardo Da Vinci

    12/14

    AGRICOLA,

    PALISSY,

    GEORGE

    OWEN 77

    il

    n est

    guère

    d explications où

    n apparaisse pas le rôle

    primordial

    des eaux dans les phénomènes naturels. D après une

    intéressante

    expression

    de

    Leonardo da

    Vinci

    «

    l eau

    est le voiturier

    de

    la

    nature

    (il

    vetturale

    délia nátura)

    »

    (1)

    ;

    l opinion

    de

    Palissy

    se

    trouverait, croyons-nous,

    assez bien

    résumée,

    au moins

    dans

    un de

    ses

    aspects

    par cette formule concise ; mais il faudrait, pour tenir

    compte

    de

    tous ses traits essentiels,

    ajouter qu elle

    ne

    l est

    pas

    seulement par son pouvoir

    d érosion

    et de sédimentation

    (ce que

    considérait

    surtout Leonardo),

    mais

    aussi par

    son

    pouvoir

    de

    dissolution à

    l égard

    des sels, dont elle fait ainsi une

    constante

    redistribution. En examinant les contributions apportées par

    le

    potier

    saintongeois à

    la chimie,

    nous aurons à dire quelques mots

    de

    l importance

    qu il

    a reconnue

    aux

    sels

    ;

    nous

    pouvons

    nous

    contenter pour le moment

    de

    signaler combien parla considération

    de

    son

    action sur eux le

    rôle

    de l eau

    se trouve considérablement accru.

    Est-ce

    à

    dire

    que

    l on

    doive regarder Palissy comme

    le

    précurseur (les anciens n ayant

    guère

    développé que des vues

    théoriques)

    de

    la

    théorie

    «

    neptunienne

    » qu opposèrent aux explications

    dites «

    plutoniennes

    » certains géologues

    de

    la

    fin

    du xvine siècle,

    et

    spécialement Werner ?

    Il

    y aurait

    exagération

    à aller jusque-là ;

    mais les remarques

    qui

    précèdent nous

    amènent

    à considérer

    que

    c est

    loin

    d être par

    hasard que

    les Discours admirables s ouvrent,

    suivant

    l indication

    même

    fournie

    par

    leur

    titre,

    sur un

    traité

    De

    la

    nature

    des

    eaux

    et

    fontaines.

    L eau,

    véhicule des

    sels

    (le terme étant

    d ailleurs pris dans

    un

    sens

    très

    large),

    finit

    par

    apparaître, tout

    au

    long des écrits

    du

    savant potier, comme

    le principe

    générateur des

    roches et

    des minerais ;

    d autant mieux que les phénomènes

    d infiltration, qui s y trouvent

    minutieusement

    étudiés, étaient

    particulièrement

    de

    nature à

    étayer

    une

    telle idée. Remarquons, à

    ce

    propos,

    que

    ce

    que

    dit

    Palissy

    de

    l origine des fontaines et

    spécialement des

    puits appelés

    plus tard

    artésiens,

    de

    la

    constitution des

    nappes

    souterraines, du mode de

    formation

    des

    stalactites,

    stalagmites

    et

    tufs

    calcaires, etc., n est

    pas

    autre

    chose

    que

    ce qui

    a été

    confirmé

    par les recherches ultérieures, au moins en ce

    qui

    concerne

    les

    affirmations essentielles.

    Pour

    ce

    qui

    est

    de

    la cristallisation, Palissy ne s est pas borné

    à

    la

    distinguer

    de

    la

    congélation,

    alors

    que

    les

    alchimistes,

    trop

    peu

    (1) Sur

    la

    géologie

    de Leonardo,

    on consultera utilement : Mario Baratta, Leonardo

    da

    Vinci ed i

    problemi

    délia

    perra,

    1903,

    et P. Duhem, Études sur

    Léonard

    de Vinci,

    I

    et II,

    1906-1909.

  • 8/17/2019 Fossili Leonardo Da Vinci

    13/14

    78

    revue d histoire des sciences

    attentifs

    à

    la

    dissolution

    préalable des

    matières

    dans l eau, ne

    voulaient voir dans le phénomène qu une « transmutation

    de

    l eau »

    ; mais

    en outre, en

    étudiant

    la

    cristallisation

    du salpêtre, et

    en

    comparant

    les

    cristaux

    ainsi

    obtenus

    à

    ceux du

    cristal

    de

    roche,

    il réussit en même temps

    à

    déterminer la nature

    de celui-ci

    et

    à

    entrevoir au moins une des lois

    de

    la cristallisation, à savoir

    que

    la

    forme des cristaux varie suivant le

    genre

    de ceux-ci, tandis

    qu elle

    est constante pour

    un

    même genre. Qu importe dès lors qu il se

    soit trompé sur

    la

    forme exacte de

    tel

    ou

    tel

    d entre eux,

    et

    qu il

    n ait connu

    que

    la

    cristallisation par voie humide ;

    il

    n en a pas

    moins

    fait le premier pas sur une voie où

    il

    ne sera

    suivi

    que fort

    tard.

    Encore

    sera-t-on

    alors obligé,

    faute d avoir au

    cours du temps

    recueilli l écho

    de

    sa découverte,

    de

    retrouver les résultats déjà

    acquis par

    lui

    et trop

    vite oubliés.

    Signalons

    enfin qu une erreur

    commise

    par

    lui

    dans une

    tentative

    d explication des

    couleurs

    irisées présentées par les coquilles

    marines

    (sa comparaison des fossiles avec les formes vivantes l avait

    conduit à examiner celles-ci avec une particulière attention, encore

    redoublée par l intérêt

    qu elles

    présentaient pour l artiste émailleur)

    lui permit d ébaucher une théorie exacte

    de

    Г arc-en-ciel, puisqu il

    en vint à considérer, comme

    il

    nous en informe lui-même, «

    que la

    cause

    de l arc céleste n estoit

    sinon d autant

    que

    le

    soleil

    passe

    directement

    au

    travers des

    pluyes

    qui

    sont

    opposites

    de

    l aspect

    du soleil

    ».

    Pour

    avoir été devancé, sur

    ce

    point, par Vitello, Palissy

    n en conserve

    pas moins

    un

    mérite certain.

    3° George

    Owen (1552-1613),

    de

    Henllys,

    beaucoup

    moins

    connu

    que les auteurs

    précédents,

    nous arrêtera

    aussi

    beaucoup

    moins

    dans cette rapide

    revue

    historique des efforts

    réalisés en

    vue

    de

    constituer

    sur

    des bases solides,

    un

    ensemble systématique

    de

    connaissances géologiques, première ébauche

    de

    la géologie

    scientifique qui prendra

    plus

    tard

    son

    épanouissement. Il importe

    toutefois

    de

    ne pas passer

    sous

    silence, comme

    on

    le fait trop

    communément, l œuvre de ce savant, à qui l on doit les premières

    remarques méthodiques concernant la stratigraphie.

    En effet,

    dans

    un essai de History of Pembrokeshire, qui, rédigé

    en 1570, ne devait être publié

    que

    deux

    siècles

    plus tard, dans le

    Cambrian Register pour 1796

    (1), Owen faisait explicitement remar-

    (1)

    Le

    fait que

    ce

    mémoire soit resté si longtemps dans l ombre ne doit pas nous inciter

    à en

    méconnaître,

    sinon

    1 intluence, du

    moins

    l antériorité

    sur

    les

    autres recherches du

    même genre.

    L histoire de la pensée

    scientifique

    ne doit pas se désintéresser tout à fait

  • 8/17/2019 Fossili Leonardo Da Vinci

    14/14

    AGRICOLA,

    PALISSY, GEORGE OWEN 79

    quer l ordre

    régulier

    selon lequel se

    trouvaient

    arrangées les couches

    superposées des

    masses

    minérales constituant

    la surface

    de

    la

    terre ;

    vue

    singulièrement

    nouvelle à

    cette époque, même en tenant

    compte

    des

    idées

    de

    Palissy

    sur

    la

    sédimentation.

    Si, en

    raison

    même

    de

    la publication si

    tardive de

    ce mémoire

    particulièrement important,

    Stenon

    n a pu s en inspirer dans la

    rédaction de

    ses propres

    travaux,

    il

    n en

    reste pas moins que les

    premières perspectives

    de

    la voie ouverte,

    de

    façon indiscutable,

    dans la seconde moitié du xvne

    siècle,

    avaient

    été entrevues

    par ce

    minutieux observateur

    du

    sol anglais, un siècle

    auparavant, avec

    une netteté de coup d œil remarquable

    et

    un sens très aigu des

    conditions générales de

    l histoire

    de

    la

    terre.

    Dès

    lors

    il

    ne restera plus

    qu à

    attendre

    que

    toutes ces vues,

    encore

    éparses

    malgré une

    relative systématisation,

    soient reprises

    dans

    leur

    ensemble par

    un

    savant

    génial

    tel

    que Stenon

    (1631-1686),

    pour

    que

    se dégage dans

    tout

    son

    jour

    la

    conception rationnelle

    d une vaste science aux

    multiples

    ramifications : la

    géologie

    avec

    le

    cortège de ses disciplines

    annexes

    :

    minéralogie,

    stratigraphie,

    paléontologie,

    cristallographie,

    etc. Pour,

    avoir

    été

    réservée à un

    âge

    ultérieur, cette mise en valeur d un immense domaine scientifique

    lentement

    découvert et inventorié

    n en a

    pas moins

    été

    pressentie

    par ce xvie siècle

    finissant,

    si riche

    de

    pensée, à

    tant de

    points

    de

    vue.

    Pierre Brunet.

    des essais isolés

    et

    momentanément ignorés, quand, de façon

    certaine, leur

    consideration

    rétrospective

    fait apparaître en

    leur

    faveur une priorité

    marquée. S il convient, par

    exemple,

    de

    signaler que les manuscrits

    de

    Leonardo da

    Vinci sont

    restés fort longtemps

    sans

    répercussion

    immédiate

    dans le

    développement

    des

    idées

    scientifiques,

    sur

    bon

    nombre

    de

    points importants, il importe toutefois d en réintroduire,

    à

    leur date

    de

    composition le schéma

    général

    et les principes directeurs dans le

    courant

    du développement

    des

    sciences. Il

    y a là une

    question

    de méthode historique qu il est

    bon

    de préciser de

    temps en

    temps.

    On

    trouvera, sur ce mémoire de

    G. Owen,

    dans

    les

    Geol.

    Soc.

    Transactions, sér. II,

    vol.

    I,

    1824,

    une étude intéressante

    de

    Buckland

    and

    Conybeare.