N° 54 Edition française - Décembre 2002 - Sodalitium

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Edition française - Décembre 2002 Tassa Riscossa - Taxe Perçue. TORINO CPM N° 54 Anno XVIII n. 5 - Dicembre 2002 - Sped. a. p. - art. 2 - comma 20/c, Legge 662/96 - Filiale di ASTI - Organo ufficiale del Centro Librario Sodalitium - Loc. Carbignano, 36. 10020 VERRUA SAVOIA (TO) Tel. +39.0161.839.335 - Fax +39.0161.839.334 - IN CASO DI MANCATO RECAPITO, RINVIARE ALLUFFICIO C.R.P. ASTI PER RESTITUZIONE AL MITTENTE CHE SI IMPEGNA A CORRISPONDERE LA RELATIVA TARIFFA

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Anno XVIII n. 5 - Dicembre 2002 - Sped. a. p. - art. 2 - comma 20/c, Legge 662/96 - Filiale di ASTI - Organo ufficiale del Centro Librario Sodalitium -Loc. Carbignano, 36. 10020 VERRUA SAVOIA (TO) Tel. +39.0161.839.335 - Fax +39.0161.839.334 - IN CASO DI MANCATO RECAPITO, RINVIARE

ALL’UFFICIO C.R.P. ASTI PER RESTITUZIONE AL MITTENTE CHE SI IMPEGNA A CORRISPONDERE LA RELATIVA TARIFFA

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EditorialEditorialOnze octobre 1962: Jean XXIII procè-

de à l’ouverture solennelle duConcile Vatican II. Pour Angelo

Giuseppe Roncalli le Concile doit être une“nouvelle Pentecôte”; dans son discoursd’ouverture il dénonce même les “prophètesde malheur” qui ne partagent pas son opti-misme sur les temps modernes. Onze oc-tobre 2002: quarante ans après cet événe-ment. Tout le monde peut le constater, la“prophétie” de Jean XXIII ne s’est pas réali-sée, et, qui plus est, aucun prophète de mal-heur n’aurait imaginé une telle désolation.Au lieu d’une Pentecôte, ce que nous vivonsest un nouveau Vendredi Saint.

Le plus prestigieux quotidien nationalitalien, le Corriere della Sera de Milan, aconfié à Vittorio Messori la tâche de com-mémorer, en première page, cet événementhistorique (Deux âmes et un Pape, Corrieredella Sera, 12 octobre 2002). Messori n’estpas seulement un écrivain à succès et unbrave apologiste du catholicisme (encore

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qu’il ait des tendances fidéistes); il a égale-ment été choisi comme interlocuteur privilé-gié par le Cardinal Ratzinger (Rapportosulla fede, Paoline 1985, Enquête sur la foi)et par Jean-Paul II lui-même (Entrez dansl’espérance, Plon-Mame, 1994). Cela ne l’apas empêché, dans le passé, de manifesterpubliquement ses doutes et ses critiques nonseulement sur un “esprit du Concile” qui entrahirait la lettre (ce qui était là le but mêmedu livre-interview de Ratzinger), mais égale-ment sur les actes mêmes de Jean-Paul II; enfait foi un autre article publié dans leCorriere della Sera et en partie rapporté parSodalitium dans son éditorial de janvier2002, il n’y a pas même un an (n° 52).

Aussi une certaine stupeur a-t-elle été dé-clenchée par le fait que l’éditorial de Messorine contienne aucune critique – ne serait-ceque modérée – de Vatican II, mais plutôt unacte dur d’accusation contre la FraternitéSaint Pie X, fondée par Mgr Lefebvre, pour-tant si proche de la sensibilité de Messori etde certaines de ses prises de position. Cettestupeur a trouvé un écho fidèle en l’abbéMichel Simoulin, supérieur du district italiende la Fraternité, dont une lettre d’éclaircisse-

Editorial p. 2L’élection du Pape p. 5Don Camillo, Guareschi et le Concile p. 18“Le Pape du Concile”: documents p. 33La “canonisation” de Mgr Escrivà de Balaguer. Bref commentaire de Sodalitium p. 36Massimo Introvigne et Roberto De Mattei. Documents p. 38Le pardon des injures dans la parabole des deux débiteurs p. 41Quelle est – actuellement – la loi du jeûne ecclésiastique? p. 49RECENSIONS p. 51Controverses p. 53Vie de l’Institut p. 56

“Sodalitium” Périodiquen° 54, Anno XVIII - n. 5 Dicembre 2002

Editore: Centro Librario SodalitiumLoc. Carbignano, 36. 10020 VERRUA SAVOIA TO Italie

Tel.: +39.0161.839.335 Fax: +39.0161.839.334INTERNET: www.plion.it/sodali

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Direttore responsabile: don Francesco Ricossa Autorizzazione Tribunale di Ivrea n. 116 du 24-2-1984

Tipografia: Ages - Torino

Sur la couverture: L'adoration des Rois Mages. SimonPeterzano, 1578, Chartreuse de Garegnano à Milan.

✍ Sommaire

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ment a été publiée le 21 octobre dans leCorriere avec une réponse de Messori.

Mais quelle est l’accusation de Messori?Elle peut se résumer en un mot: le “traditio-nalisme” impliquerait une négation de l’in-défectibilité de l’Eglise. “A moins d’émettrel’hypothèse d’un Dieu sadiquement farceur –écrit Messori – est-il pensable que le peupleauquel le Christ a promis une assistance per-manente ait été si longtemps et si gravementfourvoyé?” [pour être exact, l’assistance,c’est à la Hiérarchie qu’elle a été promise].La hiérarchie, insiste-t-il, “ne peut pasconduire hors du chemin le troupeau qui luiest confié”. Elle possède en effet un “mysté-rieux charisme, garanti par le Saint-Esprit”[nous voyons là une allusion à l’infaillibilité]qui lui consent d’approfondir et d’actualiser,sans jamais trahir le “Credo de toujours”.D’où un paradoxe: les “traditionalistes” quiaccusent l’Eglise de s’être protestantisée,poursuivent un procès “qui risque de s’appa-renter à la pensée de Luther, de Calvin, deZwingli selon laquelle il y aurait eu une trahi-son de l’orthodoxie par le Magistère, un éloi-gnement de la lettre de l’Evangile et de l’en-seignement des Pères, une pollution litur-gique et pastorale”. Messori aurait pu citer àce sujet une proposition du Conciliabule jan-séniste de Pistoie, proposition condamnéeen tant qu’hérétique par le Pape Pie VI; lavoici: “Dans ces derniers siècles un obscurcis-sement général a été répandu sur des véritésde grande importance relatives à la religion etqui sont à la base de la foi et de la doctrinemorale de Jésus-Christ” (D.S. 2601). Si à“derniers siècles” nous substituons “quaranteans”, n’avons-nous pas l’analyse des “tradi-tionalistes”?

On n’échappe pas à l’objection en dimi-nuant la portée des critiques adressées par laFraternité à Vatican II, comme a tenté de lefaire l’abbé Simoulin; ce à quoi Messori ré-pond, à raison, le 21 octobre: “le mouvementsuscité par Mgr Lefebvre représente la plusgrande force organisée qui s’oppose non seu-lement à l’‘esprit du Concile’ [comme le fontRatzinger et Messori lui-même] mais aussi,souvent, à la lettre des documents de ceVatican II qu’il voudrait, s’il était possible,déclasser pour le mettre à un niveau pastoral,donc caduc et qui n’engage pas. La polé-mique contre l’Eglise actuelle ne concernepas seulement certains aspects (la ‘Messe enlatin’, par exemple) mais va en profondeur et

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elle est en collision insoluble semble-t-il, avecla théologie, l’exégèse, l’ecclésiologie du ca-tholicisme actuel”. Donc, la Fraternité“tombe dans des contradictions insolubles.(…) Comme le confirme aussi l’exode queconnaît la Fraternité Saint Pie X: ou bien leretour à la communauté ecclésiale ‘officielle’[issue probablement souhaitée par l’abbéSimoulin lui-même, qui craint que laFraternité ne devienne, si elle ne l’est déjà,une “petite église”], ou bien le passage auxgroupes sédévacantistes’, en toute logiqueplus cohérents, dans leur radicalisme”.

Nous acceptons bien volontiers l’éloge deMessori (“plus cohérents”) et partageonsfondamentalement sa critique de la Fra-ternité Saint Pie X (“contradictions inso-lubles”), sans toutefois nous faire illusion surle soutien de notre écrivain: la critique faiteà la Fraternité – mutatis mutandis – ne vaut-elle pas aussi pour nous, “sédévacantistes”(même si seulement formaliter)? Messorin’invite pas à délégitimer Jean-Paul II, il in-vite à le suivre.

Mais nous voudrions, nous aussi, poser àMessori et à ceux qui pensent comme lui,quelques questions.

Il pense – et il ne peut pas ne pas penser– que le “magistère” de Vatican II et dupost-concile est seulement un “approfondis-sement” et une “actualisation” du “Credo detoujours”; qu’aucune contradiction ne peutexister [ce qui serait certainement vrai si ce“magistère” provenait d’une autorité légiti-me, divinement assistée] avec la doctrine ca-tholique précédente. Très bien. Vatican II

Il y a 40 ans: une séance du Concile Vatican II

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lui-même lorsqu’il parle de la liberté reli-gieuse déclare reprendre la doctrine tradi-tionnelle (Dignitatis humanæ, n. 1). Mais si,‘a posteriori’, il n’en était pas ainsi? La hié-rarchie actuelle, “les Pasteurs du moment”,n’auront certainement aucune difficulté,alors, à reconfirmer et inculquer des docu-ments comme l’encyclique Quas primascontre le laïcisme et l’état non confessionnel,l’encyclique Quanta Cura et le Syllabuscontre la liberté religieuse, l’encycliqueMortalium animos contre l’œcuménisme, lesnombreuses bulles papales sur les juifs déi-cides et peuple non plus élu mais réprouvépar Dieu… Je m’arrête là, mais la liste seraitinfinie. Il y a plus. Dans le cadre des “meaculpa” à répétition, Jean-Paul II a déclarécombien dans le passé la praxis de l’Egliseavait “offusqué le visage du Christ”. N’est-cepas faire sienne – mais en ce qui concerne lepassé et non le présent – cette propositioncondamnée du Synode de Pistoie? DéjàVatican II doit admettre, toujours dans ladéclaration sur la liberté religieuse que dansle passé “il y a eu des manières d’agir moinsconformes voire même contraires à l’espritévangélique” (n. 12), tandis que la déclara-tion conciliaire Nostra Ætate est peut-être leseul document “ecclésiastique ” qui n’a paspu apporter en sa propre faveur – au moinspour le chapitre 4 sur les juifs – une seule ci-tation du magistère. Toutes ces choses nesont-elles pas des indices, pour ne pas diredes admissions implicites, de l’“impossible”contradiction? Messori écrit, à juste titre,qu’il est impossible que l’Eglise “à laquelle leChrist a promis une assistance permanente”ait “si longtemps et si gravement” détournédu chemin le peuple de Dieu. Mais pourquoiest-ce que, s’il est impossible que ce soit arri-vé dans ces dernières quarante années, ceserait advenu dans les siècles passés? Serait-ce que l’Eglise hiérarchique, quand elle niait– Papes et Evêques unanimement – toutdroit à la liberté religieuse, demandant àl’Etat l’intervention du bras séculier, aurait“si longtemps et gravement conduit hors duchemin” le peuple chrétien? Ou bien, si ellene l’a pas fait, (et elle ne l’a pas fait) com-ment doit-on juger ceux qui – dans les docu-ments officiels du “magistère” – condam-nent au moins implicitement l’Eglise dupassé? S’il n’est pas licite d’accuser l’Eglisedu présent de donner du poison à ses en-fants (comme le disait Mgr Lefebvre, attri-

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buant à l’Eglise l’œuvre de Paul VI) il n’estpas non plus licite de le dire de l’Eglise dupassé qui était – alors – l’Eglise du présent,assistée elle aussi de l’Esprit Saint.

Bref, l’indéfectibilité de l’Eglise est miseen péril aussi bien par le “traditionalisme”de Mgr Lefebvre, que par le “progressisme”de Jean-Paul II. Dans les “contradictions in-solubles”, ils y tombent tous les deux.

En faisant nôtre tout l’enseignement et ladiscipline de l’Eglise du passé, nous évitonsla contradiction de Jean-Paul II, que cepassé condamne implicitement. En démon-trant que les erreurs de Vatican II, de PaulVI et de Jean-Paul II ne sont pas attri-buables à l’Eglise, nous évitons la contradic-tion du “traditionalisme”. Mais il reste uneobjection, terrible celle-là, que l’on peutadresser à tout “sédévacantisme”: les portesde l’enfer ont donc prévalu contre l’Eglise?Jésus-Christ n’est donc plus avec elle, alorsqu’il a promis de l’être jusqu’à la fin dessiècles? Alors Dieu peut permettre que lesfidèles soient ainsi trompés?

La réponse est évidente: non. Les portesde l’enfer ne peuvent prévaloir. Jésus-Christne peut abandonner l’Eglise. Il ne peut paspermettre que tous les fidèles soient trompés.

Cette dernière contradiction, le “sédéva-cantisme” strict ne sait pas la résoudre, luinon plus. Mais il semble que la thèse théolo-gique du Père Guérard des Lauriers sur l’au-torité, et c’est celle de Sodalitium, le puissefaire.

L’Eglise, le Pape, ne peuvent enseignerl’erreur, tromper les fidèles: Messori a rai-son. Mais l’élu d’un Conclave qui n’est pascependant Pape légitime, peut enseignerl’erreur et tromper (beaucoup) de fidèles:c’est ce qu’enseigne le magistère de l’Eglise(Pape Paul IV, Bulle Cum ex apostolatus).Dieu ne peut permettre que les fidèlessoient tous attirés dans le piège en suivantun faux Pape: Messori a raison. Mais dansnotre cas les fidèles peuvent avec certitudeéviter le piège, en adhérant justement à l’en-seignement déjà défini infailliblement parl’Eglise, ce qui les préserve d’accepter l’er-reur qui contredit (au lieu d’approfondir etd’actualiser) l’enseignement précédent.Dieu ne peut permettre que l’Eglise soitvaincue par l’enfer, soit finie, soit totalementprivée de hiérarchie: Messori a raison. MaisDieu peut permettre que – sans que l’Eglisesoit vaincue, ou privée totalement et défini-

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tivement de la hiérarchie (la permanencematérielle des sièges nous garantit la conti-nuité) – l’Eglise traverse des périodes detempête, comme à l’époque du GrandSchisme où la légitimité de nombreux Papesétait douteuse. Un Dieu qui ne maintientpas les promesses qu’il a faites à l’Eglise se-rait “sadiquement farceur” (nous dirions,nous: faux et menteur), c’est sûr. Mais queSon Fils meure sur la Croix, notre Dieu l’aaussi permis et bienheureux ceux qui ne s’ensont pas scandalisés…

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Nous ne voulons pas “un pur Evangile”,une “Tradition antique” ou une “Eglise spi-rituelle” sans ou contre l’Eglise hiérar-chique. C’est justement au nom de l’Eglisehiérarchique, et de ses définitions in-faillibles et irréformables, que nous nousopposons à toute déformation de ce patri-moine de notre foi.

Ces déformations sont-elles seulementapparentes? Voilà une nouvelle qui nousrendrait heureux. Mais celui qui le dit etl’écrit, le pense-t-il vraiment?

Doctrine

L’ELECTION DU PAPEPar M. l’abbé Francesco Ricossa

Périodiquement, Mgr Marc PivarunasC.M.R.I. (évêque consacré par Mgr

Carmona) envoie à ses fidèles une lettre inti-tulée Pro grege (1). Celle du 19 mars 2002 aparticulièrement attiré mon attention. Leprélat américain (U.S.A.) – qui suit la thèsedu siège vacant – y répond (à la p. 5) à deuxobjections du supérieur de district local de laFraternité Saint Pie X, l’abbé Peter Scott.“Il est cependant absurde de dire, comme le

font les sédévacantistes, qu’il n’y a pas eu dePape depuis plus de 40 ans, car cela détruiraitla visibilité de l’Eglise, et la possibilité mêmed’une élection canonique d’un futur Pape”.

Les objections ne sont pas nouvelles (2);plus intéressante est la réponse de MgrPivarunas.

Pour ce qui est de la première difficulté(le fait pour la vacance apostolique de seprolonger) Mgr Pivarunas répond en allé-guant l’exemple historique du GrandSchisme d’Occident. Le Père EdmundJames O’Really S.J. (3), dans son livre TheRelations of the Church to Society [Les rela-tions de l’Eglise avec la Société] édité en1882, écrivait à ce propos:

“Nous pouvons maintenant cesser d’en-quêter sur ce qui a été dit à cette époque de laposition des trois prétendants et de leursdroits vis-à-vis de la papauté. En premierlieu, depuis la mort de Grégoire XI en 1378,il y a toujours eu un Pape – à l’exception na-

turellement des vacances entre les décès et lesélections. Je pense qu’à tout instant il y a euun Pape réellement investi de la dignité deVicaire du Christ et de Chef de l’Eglise,même si les opinions diffèrent quant à sa légi-timité; non pas dans le sens qu’un interrègnecouvrant toute la période aurait été impos-sible ou inconciliable avec les promesses duChrist, parce que ceci est évident, mais en cesens que, de fait, il n’y a pas eu cetinterrègne” (Pivarunas, p. 5).

La chose est tellement évidente qu’il estinutile d’insister.

Il est plus difficile, par contre, de ré-pondre à la seconde difficulté. Voyons cequ’écrit Mgr Pivarunas à ce sujet.

«Pour ce qui est de la seconde ‘difficulté’proposée par la Fraternité Saint Pie X contrela position sédévacantiste, c’est-à-dire l’impos-sibilité de l’élection d’un futur Pape si le siègeest vacant depuis Vatican II, voici ce qu’onpeut lire dans l’‘Eglise du Verbe Incarné’ deMgr Charles Journet: “Pendant la vacance dusiège apostolique, ni l’Eglise ni le Concile nesauraient contrevenir aux dispositions prisespour déterminer le mode valide de l’élection(Card. Gaetano o.p., De comparatione…,cap. XIII, n. 202). Cependant, en cas de per-mission, par exemple si le Pape n’a rien prévuqui s’y oppose, ou en cas d’ambiguïté, parexemple si l’on ignore quels sont les vraiscardinaux, ou qui est vrai Pape, comme celas’est vu au temps du grand schisme, le pou-voir d’‘appliquer la papauté à telle per-sonne’ est dévolu à l’Eglise universelle, àl’Eglise de Dieu (ibid., n° 204)”» (4).

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Avec cette citation, Mgr Pivarunas penseavoir suffisamment répondu à l’abbé Scott:en l’absence de cardinaux – et uniquementen ce cas (5) – le Pape peut être élu, par dé-volution (6), par l’Eglise.

Mais en réalité la difficulté change seule-ment d’objet: qu’entend-on, en effet, dans cecontexte par ‘Eglise universelle’ ?

Dans sa lettre, Mgr Pivarunas ne le pré-cise pas. Pas plus que Journet à l’endroitcité. Mais puisque Journet fait sienne la po-sition du Cardinal Cajetan (7), citant son ou-vrage De comparatione auctoritatis Papæ etConcilii cum apologia eiusdem tractatus (8),nous pouvons facilement établir la significa-tion de cette expression en consultantCajetan lui-même.

Le Cardinal Cajetan, par le terme ‘Egliseuniverselle’, entend désigner le Concile gé-néral

Nous avons vu que, dans des cas extraor-dinaires, le Pape peut, en l’absence de cardi-naux, être élu par l’‘Eglise universelle’; maisqu’entend donc le Cardinal Cajetan par ceterme ?

Il suffit de feuilleter le De comparationepour trouver la réponse – indubitable – ànotre question. Déjà le titre nous l’indique:De comparatione auctoritatis Papæ etConcilii, seu Ecclesiæ universalis (n° 5) (Surla comparaison de l’autorité du Pape et duConcile, c’est-dire de l’Eglise universelle):l’Eglise universelle et le Concile ne fontqu’un. Mais c’est au chapitre V (n° 56) queCajetan procède à une définition explicitedes termes:

“Après avoir examiné la comparaisonentre le pouvoir du Pape et celui des apôtresen raison de leur apostolat, nous devonsmaintenant comparer le pouvoir du Pape et lepouvoir de l’Eglise universelle, autrement ditdu Concile universel, maintenant d’un pointde vue général, ensuite, comme nous l’avonsannoncé, dans certains cas et événements(particuliers). Et comme les opposés, mis enconfrontation, deviennent plus clairs, j’appor-terai avant tout les raisons principales danslesquelles se trouve la valeur (des arguments)par lesquels il est prouvé [par les adversaires,n.d.t.] que le Pape est soumis au jugement del’Eglise, c’est-à-dire du Concile universel.Et afin [que je n’ai plus à] mettre ensembleEglise et Concile [je précise qu’] ils sont pris

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comme synonymes, car la seule distinctionentre eux est que l’un représente et l’autre estreprésenté” (9). Par ailleurs le contexte géné-ral de l’ouvrage nous indique clairement queCajetan par “Eglise universelle” entendConcile général; le De comparatione réponden effet aux objections des conciliaristesselon lesquels le Pape est inférieur à l’Eglise,c’est-à-dire au Concile (9). Mais il y a plus.Précisément lorsqu’il parle de l’élection duPape, Cajetan utilise indifféremment lestermes d’“Eglise” et de “Concile”: “inEcclesia autem seu Concilio” (n° 202). Etmême quand il s’agit de présenter le casconcret de l’élection extraordinaire d’unPape, Cajetan ne parle pas tellementd’“Eglise universelle” il parle plutôt deConcile général: “si Concilium generale cumpace Romanæ ecclesiæ eligeret in tali casuPapam, verus Papa esset ille qui electus sicesset” (n° 745) (“si en ce cas le Concile géné-ral élisait le Pape avec la paix [l’acceptationpacifique] de l’Eglise romaine, celui qui seraitélu de cette manière serait vraiment Pape”).

Il est donc évident que, pour MgrJournet et le Cardinal Cajetan, c’est leConcile général imparfait (10) qui, en l’ab-sence de cardinaux, a la charge d’élire leSouverain Pontife.

Les évêques résidentiels, en tant quemembres de droit de ce Concile général,pourraient élire le Pape

Etant établi que ce sont les membres duConcile général qui sont les électeurs extra-ordinaires du Pape (en l’absence de cardi-naux), reste à voir qui peut participer, dedroit, au Concile général. Le Code de droitcanon – traitant du Concile œcuménique –énumère les membres de droit du Concileavec vote délibératif, au canon 223:

§ 1. Sont appelés au Concile et y ont ledroit de vote délibératif:

1° Les Cardinaux de la Sainte EgliseRomaine, même s’ils ne sont pas évêques;

2° Les Patriarches, Primats, Archevêqueset Evêques résidentiels, même non consacrés;

3° Les Abbés ou prélats nullius;4° L’Abbé Primat, les Abbés Supérieurs

de Congrégations monastiques, les Su-périeurs généraux des congrégations cléri-cales exempts, mais pas des autres religions,à moins que le décret de convocation n’endispose différemment;

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§ 2. Les Evêques titulaires appelés auConcile ont eux aussi le vote délibératif, àmoins que ne soit explicitement prévu lecontraire dans la convocation.

§ 3. Les théologiens et canonistes éven-tuellement invités au Concile ont seulementun vote consultatif.

Ce canon n’exprime pas seulement ledroit positif mais aussi la nature même deschoses. Notons, en effet, que les Evêques ti-tulaires, privés de juridiction, peuvent ne pasêtre convoqués au Concile ou ne pas avoirdroit de vote. Au contraire, les Cardinaux,les Evêques résidentiels, les Abbés ou lesprélats nullius (11) même non consacrésévêques participent de droit au Concile,parce qu’ils ont juridiction sur un territoire(12). Ce qui signifie qu’en soi le critère pourêtre membre du Concile est d’appartenir à lahiérarchie en raison de la juridiction et nonde l’ordre sacré (pour cette distinction, dedroit divin, voir le can. 108§3).

Les choses étant ce qu’elles sont, il noussemble que Mgr Pivarunas (et avec lui, tousles sédévacantistes simpliciter, ceux parconséquent qui ne suivent pas la thèse duPère Guérard des Lauriers) n’ont pas répon-du suffisamment à la difficulté posée par laFraternité Saint Pie X. En effet, dans uneposition strictement sédévacantiste, on nevoit pas où sont les évêques résidentiels

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catholiques qui pourraient et voudraientélire un Pape, étant donné que tous lesévêques résidentiels (et autres prélats quiauraient juridiction) ou bien ont été nom-més invalidement par les antipapes ou biensont de toute façon formellement hérétiqueset hors de l’Eglise – adhérant aux erreurs deVatican II – ou encore sont de toute façonen communion avec Jean-Paul II, chef de lanouvelle “Eglise conciliaire”. L’Eglise hié-rarchique aurait, en somme, totalement dis-paru, non seulement en acte et formelle-ment, mais aussi en puissance et matérielle-ment (13).

Les Evêques sans juridiction ne peuventélire le Pape

Nous avons vu que dans des circons-tances anormales l’élection du Pape – selonla pensée des théologiens qui ont traité de laquestion – revient au Concile général impar-fait, autrement dit aux Evêques et prélatsqui jouissent, dans l’Eglise elle-même, d’unejuridiction. Le Pape est, en effet, Evêque del’Eglise universelle: il est donc normal qu’ex-ceptionnellement ce soient les prélats del’Eglise universelle gouvernant, comme luiet au-dessous de lui, une portion du trou-peau qui l’élisent. Nous avons vu aussi quepar la nature même des choses, et en consé-quence de ce qui a été dit, sont exclus dunombre des électeurs per accidens du Pape,les Evêques titulaires, Evêques consacrésavec le mandat romain mais privés de juri-diction dans l’Eglise.

A plus forte raison sont exclus du nombredes électeurs – précisément parce qu’exclusdu Concile général – les Evêques consacréssans mandat romain dans les conditions ex-ceptionnelles de la vacance actuelle (for-melle) du Siège Apostolique. Ces Evêquesont en effet été consacrés validement etmême, à notre avis, – au moins dans certainscas – licitement; mais cependant ils sont – dela façon la plus absolue – privés de juridic-tion par le fait que l’Evêque reçoit de Dieu lajuridiction seulement par l’intermédiaire duPape, intermédiaire exclu dans notre cas (14).Etant privés de juridiction, ils n’appartien-nent pas à la hiérarchie de l’Eglise selon lajuridiction, ce pour quoi ils ne sont pasmembres de droit du Concile et ne sont doncpas habilités à élire validement le Pape, pasmême dans des cas extraordinaires.

Jésus-Christ est le Chef invisible de son Eglise (peinturede Masaccio, chapelle Brancacci,

église Santa Maria del Carmine, Florence)

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Ce point de doctrine, déjà établi en soi,est confirmé par l’impossibilité pratiqued’élire un Pape sûr et non douteux en sui-vant cette voie. Qui pourra établir de façoncertaine, parmi les nombreux Evêques quiont été et seront encore consacrés de cettemanière, ceux qui ont le droit de participer àl’élection et ceux qui ne l’ont pas ? Qui a ledroit de convoquer le Conclave et qui ne l’apas ? Qui peut être considéré comme légiti-mement consacré et qui non ? En l’absencede critère de discernement (le mandat ro-main, le siège résidentiel) il n’y a pas de li-mites en soi à ces consécrations ni de la partde qui les peut autoriser (le Pape) ni en cequi concerne la portion de territoire à gou-verner (le diocèse). Le nombre des électeurspeut donc croître démesurément sans au-cune garantie de leur catholicité, comme ilest advenu concrètement. Et de fait il a déjàété procédé à diverses élections qui n’ont euaucune suite, pas même parmi les partisansdu ‘conclavisme’, toujours prêts à ‘faire lepas’, mais seulement en théorie.

A plus forte raison, les laïcs ne peuvent élirele Pape

Si les Evêques titulaires, pourtant nomméspar le Pape, ne peuvent élire le Pape, si ne lepeuvent pas non plus les Evêques purementconsacrés, sans mandat romain, de simplesprêtres le peuvent encore moins. Quant auxlaïcs, ils sont exclus de façon plus radicale en-core de toute élection ecclésiastique.

Cette conclusion est confirmée par le droitpositif de l’Eglise, tant pour ce qui regardetoute élection ecclésiastique en général quepour ce qui concerne l’élection du Pape.

A propos de toute élection ecclésias-tique, le canon 166 stipule que “si des laïcss’immisçaient d’une façon quelconque dansune élection ecclésiastique, de manière à en-traver la liberté canonique, l’élection seraitnulle de plein droit” (Si laici contra canoni-cam libertatem electioni ecclesiasticæ quoquemodo sese immiscuerint, electio ipso iure in-valida est).

Pour l’élection papale, c’est la constitu-tion Vacante Sede Apostolica du 25 dé-cembre 1904, promulguée à cet effet parSaint Pie X, qui fait autorité. Le principe gé-néral est exprimé au n. 27: “Le droit d’élirele Souverain Pontife revient uniquement etexclusivement (privative) aux Cardinaux de

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la Sainte Eglise Romaine, l’intervention detout autre dignitaire ecclésiastique ou pouvoirlaïc de quelque grade ou ordre que ce soit,étant absolument exclue et écartée”. Au n. 81,saint Pie X renouvelle la condamnation dusoi-disant droit de Veto ou d’Exclusive dupouvoir laïc déjà sanctionnée par lui-mêmedans la Constitution Commissum nobis du20 janvier 1904, et il conclut: “Cette interdic-tion, nous voulons qu’elle soit étendue à touteintervention, intercession ou autre moyen parlequel les autorités laïques, de quelque ordreou grade qu’elles soient, voudraient s’immis-cer dans les élections du Pontife”. Le saintPontife fait allusion à ce qui arriva durant leConclave qui l’élit au Souverain Pontificat,lorsque l’Empereur François-Joseph, parl’entremise du Cardinal Archevêque deCracovie, mit son veto à l’élection du cardi-nal Mariano Rampolla del Tindaro, anciensecrétaire d’Etat de Léon XIII. Dans laConstitution Commissum, saint Pie X af-firme que ce présumé droit de “Veto” déjàcondamné par ses prédécesseurs Pie IV (Ineligendis), Grégoire XV (Æterni Patris),Clément XII (Apostolatus officium) et PieIX (In hac sublimi, Licet per Apostolicas etConsulturi) est contraire à la liberté del’Eglise. Son office, écrit le Saint Pontife, estcelui de faire en sorte que “la vie de l’Eglisese déroule de manière absolument libre, étantéloignée toute intervention externe, comme levoulut son Divin Fondateur, et comme lerequiert absolument sa mission sublime.Or, s’il est une fonction dans la vie de l’Eglisequi requiert plus que toute autre cette liberté,on doit considérer sans aucun doute que c’estcelle concernant l’élection du PontifeRomain; en effet ‘il ne s’agit pas d’unmembre, mais de tout le corps, quand il s’agitdu chef’ (Grégoire XV, Æterni Patris)”.L’exclusion de l’intervention des autoritésciviles inclut naturellement celle de toutmembre du laïcat quel qu’il soit: “Nous éta-blissons qu’il n’est licite à personne, pasmême aux chefs d’état, quel qu’en soit le pré-texte, de s’interposer ou de s’ingérer dans lesgraves questions de l’élection du PontifeRomain”.

Comme on voit, l’exclusion de toute in-tervention laïque est considérée par saintPie X non comme une disposition transi-toire, mais comme absolument nécessairepour que l’Eglise soit comme l’a voulu sonFondateur, Jésus-Christ.

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Ce qui est établi par le Code de DroitCanon et par saint Pie X est parfaitementconforme à toute la tradition. Le Code lui-même renvoie au Corpus Iuris canonici(l’ancien droit ecclésiastique) où les décré-tales de Grégoire IX (livre I, titre VI, deelectione et electi potestate) prévoient l’invali-dité de l’élection faite par les laïcs: le cha-pitre 43 cite le IVème Concile du Latran de1215 (Constitution XXV: Quiconque consentà sa propre élection faite abusivement par lepouvoir séculier, contre la liberté canonique,perd l’élection et devient inéligible…”); auchapitre 56 est cité un document deGrégoire IX de 1226 par lequel est déclaréeinvalide l’élection d’un évêque faite par leslaïcs et par les chanoines, selon une habitudeappelée plutôt “corruption”.

Nous pourrions citer d’autres documentsecclésiastiques à ce propos, parmi lesquelsdivers Conciles œcuméniques: le secondConcile de Nicée de l’an 787 (DS 604), le se-cond de Constantinople de l’an 870 (DS659), le premier Concile du Latran, de 1123,contre les investitures des laïcs (DS 712)…

Si, dans le passé, l’Eglise avait à défendresa liberté de l’influence des Princes dans lesélections, avec la Révolution elle eut à la dé-fendre de la prétention démocratique de faireélire les Evêques par le peuple. C’est ainsique le Pape Pie VI, par le Bref Quod aliquan-tulum du 10 mars 1791, condamna la Cons-titution civile du clergé votée par l’As-semblée nationale. Ce n’est pas un hasard sile Pape Braschi reliait les décisions des révo-lutionnaires français en la matière avec lesplus anciennes erreurs de Wyclif, Marsile dePadoue, Jean de Jandun et Calvin (cf.Enseignements Pontificaux – l’Eglise, 81-82,et Pie VI, Ecrits sur la Révolution française,Ed. Pamphiliennes, pp. 16-20).

Quelle est alors la valeur de la participa-tion populaire à certaines anciennes élec-tions ? C’est encore Journet qui le rappelle:“Au cours du temps ont pris part à l’élection,à des titres divers: le clergé romain (par untitre qui semble premier et direct), le peuple(mais pour autant qu’il donnait sonconsentement et son approbation à l’élec-tion faite par le clergé), les princes séculiers(soit d’une manière licite en donnant simple-ment leur consentement et leur appui à l’élu;soit d’une manière abusive en interdisant,comme fit Justinien, que l’élu fût consacréavant l’approbation de l’empereur), enfin les

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cardinaux, qui sont les premiers parmi lesclercs romains, en sorte que c’est au clergé ro-main qu’aujourd’hui l’élection du pape est denouveau confiée” (op. cit., p. 977) (15).

Donc, pour le peuple des fidèles, un voteseulement consultatif ou approbatif; et il enest ainsi par une exigence dogmatique fon-dée sur la distinction et la subordination quiexistent dans l’Eglise entre clergé et fidèles,distinction qui est de droit divin. C’est ceque rappelle, entre autres, le CardinalMazzella, théologien romain:

“En troisième lieu, des mêmes documents,ressort et la distinction entre Clercs et Laïcs,et le fait que la hiérarchie constituée dansl’ordre clérical soit de droit divin; et parconséquent que par le même droit divin, laforme démocratique est exclue du gouverne-ment de l’Eglise. Cette forme démocratiquesubsiste quand l’autorité suprême se trouvedans toute la multitude; non en ce sens quetoute la multitude commande et gouverne enacte, ce qui serait impossible; mais en ce sensque – comme dit Bellarmin (de Rom. Pont.L. 1, c. 6) – là où le régime populaire est envigueur, les magistrats sont constitués par lepeuple même, et reçoivent de lui leur autorité;ne pouvant légiférer lui-même, le peuple doitau moins instituer des représentants qui lefont en son nom’. Mais, étant supposée unehiérarchie divinement constituée dans l’ordreclérical, c’est à elle et non à tout le peuple quel’autorité a été communiquée par le Christ; etpar conséquent c’est par institution duChrist que le droit de constituer les gouver-nants ne réside pas dans le peuple, et queceux-ci ne gouvernent pas l’Eglise au nom dupeuple. Pour une meilleure compréhensionde ceci, observons:

1) comme dit Bellarmin (de mem. Eccles. L.1 c. 2), ‘dans la création des Evêquessont contenues trois choses: l’élection,l’ordination et la vocation ou mission;l’élection n’est rien d’autre que la dési-gnation d’une personne déterminée à laprélature ecclésiastique; l’ordination estune cérémonie sacrée par laquelle, aumoyen d’un rite déterminé, le futurEvêque est oint et consacré; la missionou vocation confère la juridiction, et parle fait même fait le pasteur et le prélat’.

2) Aussi le fait d’élire, de demander et derendre témoignage sont choses très diffé-rentes. En effet, qui rend témoignage enfaveur de quelqu’un ou demande qu’un

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tel soit élu, ne lui confère pas un droit àobtenir une dignité; il joue seulement lerôle d’une personne qui loue et de-mande. Celui par contre qui élit, appellecanoniquement à la dignité, et confèreun vrai droit à la recevoir (…)” (16).

En résumé, dans les élections ecclésias-tiques le peuple peut rendre témoignage desqualités d’un sujet (testimonium reddere) eten demander l’élection (petere) mais il nepeut absolument pas voter dans un électioncanonique, et donc élire un candidat à unecharge ecclésiastique en lui donnant le droitde recevoir – en tant que personne élue –cette charge. Et cette conclusion se fondesur un principe qui appartient à la foi et à lavolonté du Seigneur: c’est-à-dire le fait quel’Eglise n’est pas une société démocratique,mais hiérarchique (et même monarchique)(17) fondée sur la distinction – de droit divin– entre Clergé et Laïcs. ¨Les “traditiona-listes” qui attribuent à des personnes qui nefont pas partie de la hiérarchie de juridic-tion, et même à de simples fidèles, le pou-voir d’élire jusqu’au Souverain Pontife, sontparadoxalement pollués par l’hérésie d’uneEglise démocratique très répandue parmi les“modernistes” style “communauté de base”ou “l’Eglise c’est nous”.

Le Clergé romain et l’élection du Pape

Nous avons exclu du pouvoir d’élire lePape les laïcs et les Evêques sans juridiction(à plus forte raison les simples prêtres). Ilnous reste à voir un sujet particulier du droitd’élire le Pape: le clergé romain. Si “le pou-voir d’élire le Pape appartient, de par la na-ture des choses, et donc de par le droit divin”– écrit Journet à la p. 977 – “à l’Eglise priseavec son chef, le mode concret dont se feral’élection, dit Jean de Saint-Thomas, n’a nullepart été marqué dans l’Ecriture: c’est lesimple droit ecclésiastique qui détermineraquelles personnes dans l’Eglise pourront vali-dement procéder à l’élection”.

Le droit ecclésiastique actuel (et ce à par-tir de 1179) prévoit que seuls les Cardinauxpeuvent élire validement le Pape. C’est ainsique se maintient la plus ancienne traditionecclésiastique qui veut que l’Evêque soit élupar son clergé et les Evêques voisins. LesCardinaux sont en effet les membres princi-paux du Clergé romain (diacres et prêtres),unis aux Evêques des diocèses limitrophes,

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dits suburbicaires (eux aussi Cardinaux).Cajetan écrit qu’il est normal que le Papesoit élu par son église qui est l’église romaineet l’Eglise universelle, parce que le Pape estl’Evêque de Rome et l’Evêque de l’EgliseCatholique (n° 746). Cajetan prévoit mêmeque «tous les Cardinaux étant morts, leur suc-cède de façon immédiate [dans le pouvoird’élire le Pape] l’Eglise Romaine, par laquellefut élu [le Pape saint] Lin avant toute disposi-tion de droit humain à notre connaissance»(n° 745). “L’Eglise Romaine” en effet “repré-sente l’Eglise universelle dans le pouvoir élec-tif” (n° 746). Comme nous avons fait au sujetde l’“Eglise universelle”, nous devons nousdemander qui sont les membres de l’“EgliseRomaine” qui pourraient élire le Pape à dé-faut des Cardinaux qui, de cette Eglise ro-maine, sont les membres principaux. Cajetanexplique (n° 202): le fait que l’élection re-vienne à tel ou tel diacre ou prêtre deséglises romaines, dits Cardinaux, et non àd’autres (comme par exemple les chanoinesde Saint-Pierre ou de Saint-Jean-de-Latran),ou à tel ou tel autre Evêque suburbicaire, etnon à d’autres, est disposition de droit positifecclésiastique et non de droit divin. L’Eglisene peut changer ces dispositions de droit ec-clésiastique (n° 202), mais en cas de dispari-tion de tous les cardinaux on peut supposerque les autres membres du clergé romainpourraient élire leur propre Evêque. Il estévident que pour être membres du clergé ro-

Saint Pierre en la personne de ses successeurs est le Chefvisible de l’Eglise (Masaccio, église del Carmine,

Florence)

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main il ne suffit pas d’être nés ou de résider àRome ! Il faut être incardiné dans le diocèseet probablement avoir la charge pastorale dupeuple romain ou des diocèses limitrophes. Ilest facile de se rendre compte que même ence cas on ne voit pas qui pourrait, concrète-ment, pouvoir ou vouloir élire le Pape, vuque le clergé romain (curés, évêques limi-trophes, etc.) est actuellement en commu-nion avec Jean-Paul II.

Le Pape ne peut être désigné directementpar le Ciel (parce que Dieu ne le veut pas)

Face à la situation si grave que vitl’Eglise, et qui a mené à la privation del’Autorité, certains ont pensé que la solutionne pouvait venir que d’une intervention –exceptionnelle – de Dieu. Cette pensée sefonde sur une intuition vraie: l’histoire etl’Eglise sont entre les mains de Dieu, et“rien n’est impossible à Dieu” (Lc I, 37).Parmi eux certains ont pensé à une interven-tion d’Enoch et Elie, identifiés (à tort, àmon avis) aux deux témoins de l’Apo-calypse. D’autres ont émis l’hypothèse de lasurvivance de l’Apôtre Jean. D’autres enco-re ont imaginé une élection papale faite di-rectement par le Christ et par les ApôtresPierre et Paul (18). Et il ne manque pas degens à avoir publié des prophéties de Saintsen faveur de cette opinion (19).

Mgr Guérard des Lauriers, dans son in-terview à Sodalitium (n° 13, p. 22) affirme àpropos du sédévacantisme complet: “La per-sonne physique ou morale qui a, dansl’Eglise, qualité pour déclarer la vacance tota-le du Siège Apostolique est identique à cellequi a, dans l’Eglise, qualité pour pourvoir àla provision du même Siège apostolique. Quidéclare actuellement ‘Mgr Wojtyla n’est paspape du tout’ [pas même materialiter], doit:ou bien convoquer le Conclave [!] ou bienmontrer les lettres de créance qui l’instituentdirectement et immédiatement Légat deNotre-Seigneur Jésus-Christ [!!]”. Nousavons démontré jusque là l’impossibilité,rebus sic stantibus, de convoquer unConclave; voyons dans le présent chapitres’il est possible à quelqu’un de se présenteravec les lettres de créances qui le constitue-raient Légat de Jésus-Christ ou son Vicaire.

Au-delà de l’improbabilité factuelle d’unsemblable événement, soulignée par lesdeux points d’exclamation apposés par Mgr

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Guérard après son exposition de cette hypo-thèse, il me semble qu’en ce qui concerne sapossibilité théologique, Mgr Sanborn adonné une réponse correcte:

“Les sédévacantistes complets avancentune seconde solution à la crise actuelle: c’estle Christ Lui-même qui, par une interventionmiraculeuse, désignera un successeur. SiNotre-Seigneur agissait ainsi, et à coup sûr Ille pourrait, l’homme qu’il choisirait pour êtrepape serait très certainement son vicaire surla terre, mais il ne serait pas le successeur desaint Pierre. L’apostolicité disparaîtrait,parce que cet homme ne pourrait remonter salignée jusqu’à saint Pierre par une ligne desuccession légitime ininterrompue. Certes, ilserait, comme saint Pierre, choisi par leChrist. Mais en réalité, Notre-Seigneur crée-rait une nouvelle Eglise”.

Q. Mais Notre-Seigneur ne serait-Il pasun électeur légitime ? Pourquoi ne pourrait-Il pas choisir un pape qui serait aussi succes-seur de saint Pierre ?

R. Oui, de toute évidence, NotreSeigneur pourrait choisir un pape, exacte-ment comme il a choisi saint Pierre ? Maisune intervention divine du type de cellequ’imaginent les sédévacantistes completséquivaudrait à une nouvelle révélation pu-blique, ce qui est impossible. La révélationpublique est définitivement close avec lamort du dernier apôtre. C’est un article defoi. Toutes les révélations qui ont eu lieuaprès la mort du dernier apôtre sont du do-maine des révélations privées. Pour les sédé-vacantistes complets, c’est donc une révéla-tion privée qui révèlerait l’identité du Pape.

Il va sans dire qu’une telle solution dé-truit la visibilité et la légalité de l’Eglise ca-tholique, et rend son existence même dépen-dante de voyants. Il va sans dire aussi qu’ellelivre la papauté aux élucubrations des appa-ritionistes.

La mission de l’Eglise, c’est de faireconnaître la divine révélation au monde. Sila désignation du pape – celui-là même quifait connaître cette révélation – dépendaitd’une révélation privée, tout le système s’ef-fondrerait. La plus haute autorité de l’Egliseserait alors le voyant, qui pourrait faire oudéfaire les papes. Il n’y aurait plus aucunprincipe d’autorité par lequel déterminer sile voyant est un mystificateur ou non. Toutacte de foi dépendrait en fin de compte del’honnêteté d’un voyant.

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Au contraire, l’Eglise catholique est unesociété visible, et elle a une vie légale.Notre-Seigneur est la tête invisible del’Eglise. L’Eglise ne pourrait plus prétendreà la visibilité si sa hiérarchie était désignéepar un personnage invisible, fût-ce Notre-Seigneur Lui-même.

Même en admettant un seul instant cettepossibilité, il ne fait aucun doute que celuique Notre-Seigneur désignerait ne serait pasun successeur légitime de saint Pierre. Lasuccession n’est légitime que si elle remplitles exigences du droit ecclésiastique ou del’usage établi. Mais une succession par inter-vention divine ne remplit ni l’une ni l’autrede ces exigences. Par conséquent, le papeainsi désigné ne serait pas le successeur légi-time de saint Pierre” (20).

Jésus pourrait donc (de “puissance abso-lue”) choisir de nouveau un Pape, mais Il nele fera jamais (21) (c’est impossible de “puis-sance ordonnée”) parce que c’est Lui-mêmequi a établi que Son Eglise, fondée sur Pierre,serait indéfectible; “les portes de l’enfer neprévaudront pas contre elle”. Et cette véritéde l’indéfectibilité de l’Eglise nous donnedéjà le motif de fond de ce que nous soute-nons dans le titre du chapitre suivant.

L’ Eglise ne peut rester totalement privéed’électeurs du Pape

Le Concile Vatican I a solennellementdéfini:

“Si donc quelqu’un dit que ce n’est paspar l’institution du Christ ou de droit divinque saint Pierre a, et pour toujours, des suc-cesseurs dans sa primauté sur l’Eglise univer-selle, ou que le Pontife romain n’est pas suc-cesseur de saint Pierre en cette primauté: qu’ilsoit anathème” (D.S. 3058, Const. Dogm.Pastor Æternus, canon du chap. 2).

Qu’il y aura “toujours” un successeur dePierre est donc vérité de foi; cette vérité faitpartie intégrante de celle concernant l’indé-fectibilité de l’Eglise: si l’Eglise était privéede Pape, elle n’existerait plus telle que l’afondée Jésus. Pour revenir au cardinalCajetan, “Christus Dominus statuit Petrumin successoribus perpetuum: Le SeigneurJésus-Christ a établi (que) Pierre (soit fait)perpétuel en ses successeurs” (n. 746).

Naturellement, cette définition ne peut etne doit pas être entendue dans le sens qu’il yaura toujours, à chaque instant, en acte, un

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Pape assis sur la Chaire de Pierre: pendant lavacance du Siège (par exemple dans la pé-riode entre la mort d’un Pape et l’élection deson successeur) cela n’arrive pas. En quel sensfaut-il alors entendre la définition vaticane ?

C’est encore Cajetan qui nous l’explique:– par anticipation – “impossibile estEcclesiam relinqui absque Papa et potestateelectiva Papæ: il est impossible que l’Eglisesoit laissée sans Pape et sans le pouvoird’élire le Pape” (n. 744). Par conséquent,pendant la vacance du Siège, il doit rester enquelque façon la personne morale qui peutélire le Pape: “papatus, secluso Papa, non estin Ecclesia nisi in potentia ministraliter elec-tiva , quia scilicet potest, Sede vacante,Papam eligere, per Cardinales, vel per seip-sam in casu: la papauté, une fois enlevé lePape, se trouve dans l’Eglise seulement enune puissance ministériellement élective, carelle [l’Eglise] peut, durant la vacance duSiège, élire le Pape par l’intermédiaire desCardinaux ou, en circonstance (accidentelle)d’elle-même” (210).

Il est donc absolument nécessaire que –pendant la vacance du Siège – subsiste en-core la possibilité d’élire le Pape: ce sontl’indéfectibilité et l’apostolicité de l’Eglisequi l’exigent (22).

L’élection du Pape dans la situation actuellede l’Eglise

C’est là précisément l’objection soulevéepar Mgr Lefebvre aux sédévacantistes, et re-prise par l’abbé Scott contre Mgr Pivarunas.Certes, une objection ne peut annuler unedémonstration, et Mgr Pivarunas a raison –et l’abbé Scott tort – sur le fait que le Siègeest actuellement vacant. Mais nous avons vuque si le sédévacantisme simpliciter est ca-pable de démontrer la vacance du Siège, ilne peut, par contre, expliquer comment sub-siste encore aujourd’hui le pouvoir d’élireun successeur. De toutes les diverses tenta-tives d’explication analysées jusqu’ici,aucune n’est concluante: ni les simples fi-dèles, ni les simples prêtres, ni même lesEvêques non résidentiels ne peuvent élire lePape. Par ailleurs, dans la perspective stric-tement sédévacantiste, il n’y aurait plus ac-tuellement ni cardinaux ni Evêques résiden-tiels catholiques, puisque tous ceux qui exis-tent ont adhéré à l’“Eglise conciliaire”, de-venant ainsi formellement hérétiques.

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L’unique solution possible à cette diffi-culté vient, à notre avis, de la Thèse dite deCassiciacum, exposée par le Père Guérarddes Lauriers, Thèse que les sédévacantistess’obstinent à refuser sans se rendre comptequ’elle est la seule qui permette de défendrevraiment la thèse du Siège vacant.

Selon cette Thèse, dans la situation ac-tuelle de l’autorité dans l’Eglise, le pouvoird’élire le Souverain Pontife subsiste encoredans l’Eglise, non en acte, formellement,mais en puissance, matériellement, et c’estsuffisant pour assurer la continuité de laSuccession Apostolique et pour garantir l’in-défectibilité de l’Eglise.

Pour le moment, une élection du Papeest impossible et parce que le Siège est enco-re occupé matériellement et légalement parJean-Paul II, et parce que, comme nousl’avons démontré dans cet article, il n’y apas, en acte, d’électeurs capables de procé-der à cette élection.

L’élection est cependant possible en puis-sance, d’une part parce qu’en principe il nepeut en être autrement, comme nous l’avonsvu, d’autre part parce que, de fait, les élec-teurs canoniquement habilités à élire le Papeexistent matériellement. Selon la Thèse, eneffet, les Cardinaux créés par des “papes” ma-terialiter conservent le pouvoir d’élire lePontife, de même que les Evêques nomméspar des “papes” materialiter aux divers siègesépiscopaux, les occupent matériellement etpourraient, une fois revenus à la professionpublique et intégrale de la Foi, être électeursdu Pape en l’absence de Cardinaux. Le“pape” lui-même qui n’occupe que matériel-lement le Siège, pourrait, anathémisant toutesles erreurs et professant intégralement la Foi,devenir à tous les effets Pape formellement.Comme on peut voir, la Thèse de Cassiciacumrépond aux objections soulevées contre le sé-dévacantisme par les “modernistes” et par les“lefebvristes”, alors que les autre thèses sédé-vacantistes n’en sont pas capables. Pour la dé-monstration de ce point de la Thèse, nous ren-voyons le lecteur à ce que nous avons déjàécrit à ce sujet (23).

Le devoir des catholiques

Arrivés à la fin de cette exposition, som-maire évidemment, de la question de l’électiondu Pape dans la situation actuelle de l’Eglise,nous pouvons tirer quelques conclusions.

Quel est actuellement le devoir des ca-tholiques ? Avant tout, conserver la foi. Cedevoir (de conserver la foi) en implique (ensoi) immédiatement un autre: celui de nepas reconnaître “l’autorité” de Jean-Paul IIet du Concile Vatican II. Reconnaître “l’au-torité” de Jean-Paul II et du Concile VaticanII implique en effet l’adhésion à leur ensei-gnement qui est – sur certains points – encontradiction avec la foi catholique infailli-blement définie par l’Eglise.

Mais le simple catholique ne peut et nedoit pas aller au-delà. Ce n’est pas au simplefidèle (pas même aux prêtres et aux évêquessans juridiction) de déclarer avec autorité, of-ficiellement et légalement, la vacance duSiège apostolique et de pourvoir à l’électiond’un Pontife authentique. Mais le devoir ducatholique est de prier et de travailler, chacunà sa place et selon ses compétences, afin quecette déclaration officielle – par le collège descardinaux ou du concile général imparfait –devienne possible. La tragédie de notreépoque – qui dicte la gravité de la crise pré-sente – consiste justement dans le faitqu’aucun des membres de la hiérarchie n’ajusqu’à ce jour rempli ce rôle. Actuellement,il semble impossible que les évêques ou lescardinaux arrivent à condamner les erreursde Vatican II et mettent l’occupant du Siège

Après le conclave et l’élection, les cardinaux prêtentobéissance au nouveau Pape (ici Pie XII)

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apostolique dans la condition d’anathémiserlui aussi ces erreurs, sous peine d’être déclaréformellement hérétique (et donc déposé,aussi matériellement, du Siège); mais, rappe-lons-le, ce qui est impossible aux hommes estpossible à Dieu. Et pour ce qui est de notrequestion, nous savons que Dieu ne peutabandonner Son Eglise, puisque les portes del’enfer ne prévaudront pas contre Elle, etqu’Il sera avec Elle jusqu’à la fin du monde.

APPENDICE

Restent deux problèmes, toujours à pro-pos de l’élection du Pape, ne se rattachantpas directement à notre question (la possibi-lité d’élire un Pape dans l’état actuel deschoses): celui de la certitude de la validité del’élection à cause de l’acceptation pacifiquede cette élection du Pape par l’Eglise, etcelui de la sainteté de l’élection. Journet enparle dans l’œuvre citée. J’en dirai quelquesmots, moi aussi, car il y a là deux argumentspouvant servir d’objection à notre position(la vacance formelle du Siège apostolique).

L’acceptation pacifique comme certitude dela validité de l’élection du pape

Une élection, fût-elle même l’élection duPape, peut être invalide ou douteuse; dans laligne de Jean-de-Saint-Thomas, le mêmeJournet nous le rappelle (L’élection du Pape.V. Validité et certitude de l’élection).“L’Eglise – écrit Journet – possède le droitd’élire le pape, et donc le droit de connaîtreavec certitude l’élu.Tant que persiste le doutesur l’élection et que le consentement tacite del’Eglise universelle n’est pas venu remédieraux vices possibles de l’élection, il n’y a pasde pape, papa dubius, papa nullus. En effet,fait remarquer Jean-de-Saint-Thomas, tantque l’életion pacifique et certaine n’est pasmanifeste, l’élection est censée durer encore”(p. 978). Toutefois, toute incertitude sur lavalidité de l’élection est dissipée par l’accep-tation pacifique de l’élection faite parl’Eglise universelle: “L’acceptation pacifiquede l’Eglise universelle s’unissant actuellementà tel élu comme au chef auquel elle se sou-met, est un acte où l’Eglise engage sa desti-née. C’est donc un acte de soi infaillible, et ilest immédiatement connaissable comme tel.(Conséquemment et médiatement, il apparaî-tra que toutes les conditions prérequises à la

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validité de l’élection ont été réalisées” (pp.977-978). Ce qu’affirme Journet se retrouvechez presque tous les théologiens.

Cette doctrine inclut une objection trèsgrave contre tout sédévacantisme (y comprisnotre Thèse). L’abbé Lucien ne cachait pascette difficulté lorsqu’il écrivait: “Sans ré-pondre à notre argumentation, quelques-unsdéclarent qu’elle [notre thèse] est certaine-ment fausse, car sa conclusion, selon eux, estcontraire à la foi ou au moins proche de l’hé-résie. Ils rappellent en effet que la légitimitéd’un Pape est un fait dogmatique, et ils ajou-tent que le signe infaillible de cette légitimitéest l’adhésion de l’Eglise universelle. Or,font-ils remarquer, pendant plusieurs annéesaprès le 7 décembre 1965 [date à partir de la-quelle Paul VI n’était certainement plusPape formellement], personne n’a mis encause publiquement, dans l’Eglise, la légiti-mité de Paul VI. Il est donc impossible,concluent-ils, qu’il ait cessé d’être Pape légiti-me à cette date, puisque l’Eglise universelle lereconnaissait toujours. Ces objecteurs affir-ment également qu’aujourd’hui encorel’Eglise universelle adhère à Jean-Paul II, -puisqu’aucun membre de la hiérarchie ma-gistérielle ne l’a récusé: or cette hiérarchie(l’ensemble des évêques résidentiels unis aupape) représente authentiquement l’Egliseuniverselle” (24). Je renvoie le lecteur à la ré-ponse magistrale que donne l’abbé Lucien àcette objection. D’un côté, il rappelle que laConstitution Cum ex apostolatus du PapePaul IV – qui, même si elle n’a plus valeurjuridique, reste toujours un acte du magis-tère – enseigne une doctrine contraire (lathèse de l’acceptation pacifique de l’Eglisecomme preuve certaine de la validité d’uneélection, est donc seulement opinion théolo-gique). Par ailleurs, il souligne que cette opi-nion se fonde sur le fait qu’il est impossibleque l’Eglise entière suive une fausse règle defoi, adhérent à un faux pontife: ce serait encontradiction avec l’indéfectibilité del’Eglise. Or, dans notre cas, parmi ceux quireconnaissent la légitimité de Paul VI et deJean-Paul II, il en est beaucoup qui n’adhè-rent pas aux nouveautés de Vatican II; defait, ils ne reconnaissent pas Paul VI et Jean-Paul comme règle de la foi et donc, toujoursde fait, ils n’en reconnaissent pas la légitimi-té (cf. pp. 108-111). Bref, le fait que de nom-breux catholiques, implicitement ou ex-plicitement, n’aient pas accepté Vatican II

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enlève à la thèse de l’acceptation pacifiquede l’Eglise sa force démonstrative quant à lalégitimité de qui a promulgué le Concile.

La sainteté de l’élection

Si l’objection précédente est effective-ment importante, celle fondée sur la saintetéde l’élection ne l’est pas du tout; maispuisque de nombreux fidèles me l’on citée, ilme semble opportun de répondre, et avecles paroles mêmes de Journet. Beaucoup degens, en effet, croient à tort que c’est leSaint-Esprit qui garantit l’élection en inspi-rant les cardinaux, ce pour quoi l’élu duConclave serait choisi directement par Dieu.Journet rappelle que, lorsqu’on parle desainteté de l’élection papale, “On ne veutpas dire par ces mots que l’élection du papese fait toujours par une infaillible assistancepuisqu’il est des cas où l’élection est invalide,où elle demeure douteuse, où elle reste doncen suspens. On ne veut pas dire non plus quele meilleur sujet soit nécessairement choisi.On veut dire que, si l’élection est faite valide-ment (ce qui, en soi, est toujours un bienfait),même quand elle résulterait d’intrigues etd’interventions regrettables (mais alors ce quiest péché reste péché devant Dieu), on est cer-tain que l’Esprit Saint qui, par-delà les papes,veille d’une manière spéciale sur son Eglise,utilisant non seulement le bien, mais encore le

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mal qu’ils peuvent faire, n’a pu vouloir, oudu moins permettre cette élection que pourdes fins spirituelles, dont la bonté ou bien semanifestera parfois sans tarder dans le coursde l’histoire, ou bien sera gardée secrètejusqu’à la révélation du dernier jour. Mais cesont là des mystères dans lesquels la foi seulepeut pénétrer” (pp. 978-979). Bref, la divineProvidence veille de manière toute spécialesur l’Eglise, mais cela n’empêche pas queparfois l’élection du pape puisse être nulle,douteuse, ou bien, si elle est valide, qu’elleait pour objet une personne moins digne decette charge qu’une autre. Aux derniersconclaves, Dieu a donc pu permettre, pourdes motifs impénétrables, que soient élusdes sujets qui n’avaient pas objectivement lavolonté habituelle de procurer le bien et lafin de l’Eglise, et que par conséquent, touten étant les élus du Conclave (“papes” ma-terialiter), ils aient mis et mettent encore unobstacle à la réception, de la part de Dieu,de l’assistance divine et de l’autorité pontifi-cale (ils ne sont pas “papes” formaliter), au-torité qui, sans cet obstacle, aurait été confé-rée à l’élu du conclave qui accepte réelle-ment l’élection.

Notes

1) Il est possible de se procurer La lettre Pro grege àl’adresse suivante: Most Rev. Mark A. Pivarunas,Mater Dei Seminary, 7745 Military Avenue, Omaha,NE 68034-3356, U.S.A.

2) Peter Scott ne fait que reprendre les deux objec-tions déjà adoptées par Mgr Lefebvre en 1979: “Laquestion de la visibilité de l’Eglise est trop nécessaire àson existence pour que Dieu puisse l’omettre durant desdécades. Le raisonnement de ceux qui affirment l’inexis-tence du Pape met l’Eglise dans une situatuion inextri-cable. Qui nous dira où est le futur Pape ? Commentpourra-t-il être désigné puisqu’il n’y a plus de cardi-naux ?”.

3) Le Père O’Really était professeur à l’Universitécatholique de Dublin.

4) Mgr Pivarunas ne donne pas les références de lacitation de Journet. Il s’agit de l’Excursus VIII, L’élec-tion du pape, de l’œuvre L’Eglise du Verbe Incarné, vol.I La Hiérarchie apostolique, p. 976, Ed. Saint Augustin,Saint-Just-la-Pendue 1998. Les caractères gras sont deMgr Pivarunas.

5) Après avoir convoqué le Concile Vatican I, PieIX, par la Constitution apostolique Cum RomaniPontificibus du 4 décembre 1869, prit soin de préciserles conditions de l’élection pontificale, pour le cas où ilmourrait durant le Concile. A l’exemple de Jules II(pendant le cinquième concile du Latran) ainsi que dePaul III et de Pie IV (à l’occasion du Concile deTrente), il établit que l’élection était du ressort exclusifdu Collège des Cardinaux, avec exclusion explicite desPères Conciliaires (Enseignements Pontificaux,

Après l’élection par le conclave, le nouveau Pape est ac-clamé par le peuple de Rome

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L’Eglise, n° 326). Cette prescription a été reprise parsaint Pie X (Vacante Sede Apostolica, n. 28) et par PieXII (Vacantis Apostolicæ Sedis, du 8 décembre 1945, n.33). La prescription n’est pas seulement disciplinaire,elle a aussi un fondement dans le refus des théoriesconciliaristes.

6) Journet explique: “Au cas où les conditions pré-vues seraient devenues inapplicables, le soin d’en déter-miner de nouvelles échoirait à l’Eglise par dévolution, cemot étant pris, comme le note Cajetan (Apologia decomparata auctoritate papæ et concilii, cap. XIII, n° 745),non pas au sens strict (c’est à l’autorité supérieure qu’il ya, au sens strict, dévolution en cas d’incurie de l’infé-rieur), mais au sens large, pour signifier toute transmis-sion, même faite à un inférieur” (op. cit. pp. 975-976).

7) Tommaso de Vio, dit Gaetano (Cajetan) du lieude sa naissance Gaète, 1468-1533, entré chez les domini-cains en 1484, commence l’enseignement en 1493. Il estMaître général de l’ordre de 1508 à 1518, il participe auVème Concile du Latran, est nommé Cardinal en 1517.En 1518 il est nommé légat du Saint-Siège pour procé-der contre Luther, et travaille à la rédaction de la bullede Léon X, Exsurge Domine, contre l’hérésiarque.Evêque de Gaète en 1519, il est de nouveau légat, enHongrie cette fois, de 1523 à 1524. Il est enseveli àRome dans l’église de Santa Maria Sopra Minerva.“Cajetan est célèbre pour ses commentaires classiquesde toute la somme théologique de saint Thomas, com-mentaires auxquels demeurent liés et son nom et sa ré-putation impérissable… Particulièrement attaché auSiège Apostolique, Cajetan en défendit en profondeuret avec brio les prérogatives dans son célèbre traité Deauctoritate Papæ avec l’Apologie du même traité quibrisa les velléités conciliaristes de Pise (1511) et préparapar avance la condamnation de l’erreur gallicane. (…)Saint Robert Bellarmin le définit comme un “hommed’intelligence supérieure et de non moins grande piété”L’Enciclopedia cattolica, rubrique De Vio.

8) «Le premier opuscule intitulé De comparatione auc-toritatis Papæ et Concilii, fut composé par le CardinalCajetan – qui l’acheva le 12 octobre 1511 – en l’espace dedeux mois. C’est à l’occasion du Concile schismatique dePise, induit à cette époque par quelques cardinaux contrele Pape Jules II, qu’il fut composé; c’est pourquoi l’auteurs’évertue à réfuter les thèses dites gallicanes, soutenuesdès le XVème siècle à l’occasion du Concile de Constance;et surtout la thèse d’Occam et de Gerson affirmant la su-périorité du Concile sur le Pape. Contre (cette thèse),Cajetan démontre (…) que le Pape en tant que successeurde Pierre, jouit du primat, c’est-à-dire du plein et suprêmepouvoir ecclésiastique avec toutes les prérogatives qui luisont annexes. Le Roi de France Louis XII soumit cetteœuvre à l’examen de l’Université de Paris qui confia la dé-fense [de sa propre position] au jeune et éloquent auteurJacques Almain. A l’opuscule composé par ce dernier,‘De auctoritatæ Ecclesiæ, seu sacrorum Concilium eam re-présentantem, contra Thomam de Vio, Dominicanum’(Paris, Jean Granjon, 1512), Cajetan répondit par un autreopuscule, l’Apologia de comparata auctoritate Papæ etConcilii, achevé le 29 novembre 1512» (traduction du latinfaite par nos soins de l’introduction du Père Pollet, o.p., àla réédition des deux opuscules de Cajetan, faite parl’Angelicum, à Rome, en 1936).

9) “Examinata comparatione potestatis Papæ adApostolos ratione sui apostolatus, comparanda modoest Papæ potestas Ecclesiæ universalis seu Concilii uni-versalis potestati, nunc quidem absolute, postmodum

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vero in eventibus et casibus, ut promisimus. Et quoniamopposita iuta se posita magis elucescunt, afferam primorationes primarias in quibus consistit vis, quibus proba-tur Papam subesse Ecclesiæ seu Consilii universalis iu-dicio. Et ne contigat sæpius Ecclesiam et Consilium iun-gere, pro eodem sumantur, quoniam non nisi sicut re-præsentans et repræsentatum distinguuntur”.

10) Nous disons “imparfait” parce qu’en l’absencedu Pape, un Concile général est précisément imparfait(cf. De comparatione, n° 231, où il est parlé du Concilede Constance qui se réunit pour l’élection de MartinV), en ce qu’il est privé de son Chef, lequel est le seul àpouvoir convoquer, diriger et confirmer un Concileœcuménique (can. 222; Cajetan, op. cit., chap. XVI).Nous rappelons que – selon Cajetan – c’est à ce Concilegénéral imparfait que revient la charge de déposer lePape hérétique (n° 230).

11) “Les prélats qui sont à la tête d’un territoirepropre, séparé de tout diocèse avec clergé et peuple,sont appelés Abbés ou Prélats ‘nullius, (c’est-à-diren’appartenant à aucun diocèse…” (can. 319). LesPrélats ou Abbés nullius doivent avoir les mêmes quali-tés que celles requises en l’évêque (can. 320§2) et ont lemême pouvoir ordinaire et les mêmes obligations quel’évêque résidentiel (can. 323§1) dont ils portent l’habitet les insignes liturgiques (can. 325) même s’ils sont pri-vés du caractère épiscopal.

12) Les autres Abbés et les supérieurs de religionscléricales exempts, quoique sans juridiction sur un terri-toire, ont juridiction sur des personnes (leurs propres su-jets) indépendamment de l’Evêque diocésain. Ce sontdonc des Ordinaires, même si non Ordinaires de lieu(can. 198). Dans ce cas également, le critère pour partici-per au Concile est la juridiction et non l’ordre épiscopal.

13) Vu que cette position refuse la succession maté-rielle sur les sièges épiscopaux, admise au contraire parle sédévacantisme ‘formaliter’ mais non ‘materialiter’du Père Guérard des Lauriers.

Le couronnement du nouveau Pape (ici Pie XII)

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14) Comme je l’ai déjà prouvé ailleurs (F. RICOSSA,Les consécrations épiscopales, C.L.S. Verrua Savoia1997) l’Eglise enseigne que ce n’est pas par l’intermé-diaire de la Consécration mais seulement par l’intermé-diaire du Pape que l’Evêque reçoit de Dieu la juridic-tion, même si Vatican II enseigne le contraire. Il ne sertà rien d’objecter contre cette doctrine enseignée à plu-sieurs reprises par le magistère ordinaire, en donnantdes exemples historiques d’élections (et consécrations)épiscopales pendant la vacance du siège. Ces élections-là démontrent seulement la non illicéité – en cas desiège vacant par exemple – de consécrations épisco-pales, mais ne démontrent pas que les élus aient joui dela juridiction épiscopale, qu’ils ne reçurent, en fait, avecla confirmation de leur élection canonique, que duPape. Ce qui n’empêche pas qu’ils aient pu croire debonne foi avoir juridiction déjà avant la confirmationpapale, étant donné que la doctrine que nous défendons(selon laquelle la juridiction épiscopale vient du Pape etnon de la consécration) a été précisée par le magistère àdes périodes postérieures à ces faits historiques, tandisqu’elle était encore discutée au Concile de Trente. Je si-gnale entre autres que la doctrine de Cajetan à ce pro-pos – en cela aussi, fidèle disciple de saint Thomas – estcelle que nous venons de rappeler (cf. n° 267).

15) Journet conclut en renvoyant au Dictionnaire dethéologie catholique, à la rubrique Election des papes,pour “une exposition historique des diverses conditionsdans lesquelles les papes ont été élus”. J’en profite pournoter combien le DTC est décevant sur la question quenous sommes en train de traiter (et ce n’est pas un casunique). Le rédacteur de la rubrique “élection despapes” se limite en effet à une exposition historiqueomettant par contre les points de vue théologiques etdogmatiques qui sont bien plus importants: un point devue qui a induit en erreur – par omission – beaucoup delecteurs et de chercheurs.

16) Camille Card. MAZZELLA, De Religione etEcclesia, Prælectiones Scolastico-Dogmaticæ, Roma1880. Je remercie Mgr Sanborn qui m’a signalé cette ci-tation voilà des années (alors que c’est à moi que re-vient toute la faute pour les erreurs de la traduction).

17) Cf. SAINT PIE X, E.P. Ex quo nono, 26/12/1910,Ds 3555, où est condamnée l’erreur opposée professéepar les schismatiques orientaux. Récemment JosephRatzinger, préfet de la Congrégation pour la Doctrinede la Foi, a par contre nié que l’Eglise soit une monar-chie.

18) Ce fut le cas – entre autres – du “voyant” dePalmar de Troya, Clemente Dominguez, qui aurait étéélu Pape directement par le Ciel après la mort de PaulVI.

19) Par exemple l’éditeur Delacroix qui a publié les“Visions de la Vénérable Elisabeth Canori Mora surl’intervention de Saint Pierre et Saint Paul à la fin destemps” et qui présente le livre comme une confirmationdes conclusions du livre de l’abbé Paladino, L’Egliseéclipsée ?, publié par le même éditeur, où il est fait allu-sion (p. 274) à ces visions et à d’autres prophéties.

20) Pour être complet, je rapporte la réponse queMgr Sanborn donne aux sédévacantistes qui – implicite-ment ou explicitement – considèrent par contre, commepossible la solution du Conclave: “Q. Pourquoi le sédé-vacantisme complet n’est-il pas viable?

R. Parce qu’il prive l’Eglise du moyen d’élire un suc-cesseur légitime de saint Pierre. Il détruit fondamenta-lement l’apostolicité de l’Eglise.

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Les sédévacantistes complets essaient de résoudre leproblème de la succession apostolique de deux ma-nières. La première est le conclavisme. Ils avancent quel’Eglise est une société qui a le droit intrinsèque d’élireses propres chefs. Par conséquent le petit reste de fi-dèles pourrait se réunir et élire un Pape. En supposantque pareille tâche puisse être menée à bien, elle soulèveplusieurs problèmes. Premièrement: qui serait légale-ment désigné pour voter ? Comment désignerait-on lé-galement ces électeurs ? Deuxièmement: au nom dequel principe pourrait-on obliger les catholiques à re-connaître comme successeur légitime de saint Pierrecelui qui gagnerait pareille élection ? Le conclavismen’est en fait qu’un élégant euphémisme pour désigner lerègne de l’anarchie où ce sont les plus féroces qui mè-nent la meute. L’Eglise catholique n’est pas une meute,mais une société divinement constituée régie par sespropres règles et ses propres lois. Troisièmement, etc’est le plus, on ne peut pas passer du droit naturel deshommes à se choisir des chefs, au droit d’élire un Pape.L’Eglise n’est pas une institution naturelle au mêmetitre qu’une société civile. Les membres de l’Eglise ca-tholique n’ont en propre aucun droit naturel à désignerle Pontife romain. C’est le Christ lui-même qui, à l’ori-gin,e a choisi saint Pierre pour être le pontife romain etles modalités de désignation ont ensuite été fixées léga-lement”. MGR DONALD J. SANBORN, Explanation of theThesis of Bishop Guérard des Lauriers, 29/06/2002.S’adresser à l’auteur: Most Holy Trinity Seminary 2850Parent Warren, Michigan 48092 USA; [email protected].

21) Ce que nous avons affirmé n’est pas en contra-diction avec ce qu’a écrit Mgr Guérard des Lauriersdans la même interview publiée dans le n° 13 deSodalitium: “faute de M. [c’est-à-dire de la personnemorale, donc des Evêques résidentiels habilités àconvoquer un Concile général imparfait où l’on adres-serait à Jean-Paul II les monitions canoniques], pas derésolution ‘canonique’ ! Jésus seul remettra l’Eglise enordre, dans et par le Triomphe de Sa Mère. Et il seraévident pour tous que le salut sera venu d’en-Haut” (p.33). Cette intervention divine ne sera pas en effetcontraire à la divine constitution de l’Eglise telle qu’ellea été établie par Jésus Lui-même. Un retour desEvêques et/ou du “pape” materialiter à la professionpublique de la Foi serait (sera) par ailleurs un miracled’un ordre moral tellement extraordinaire qu’il serait àmettre sur le même plan que la conversion de saintPaul. En quelles circonstances cela adviendra – t-il,nous l’ignorons.

22) Sur le sujet, le lecteur pourra lire avec profit cequ’a écrit le Père Goupil s.j. (L’Eglise, 5ème éd., Laval1946, pp. 48-49) et le commentaire qu’en fait B. Lucien(La situation actuelle de l’autorité dans l’Eglise ,Bruxelles 1985, p. 103, n° 132). Voir aussi F. Ricossa,L’abbé Paladino et la Thèse de Cassiciacum, VerruaSavoia, pp. 12-22).

23) B. LUCIEN, La situation actuelle de l’autorité dansl’Eglise. La Thèse de Cassiciacum, Bruxelles 1985, chap.X. D. SANBORN, De Papatu materiali, Verrua Savoia,2001. La revue Le sel de la terre conteste, dans son n° 41,la démonstration donnée par Mgr Sanborn. Nous revien-drons sur la question dans le prochain numéro.

24) B. LUCIEN, op. cit., p. 107.

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DON CAMILLO,GUARESCHI ET LE

CONCILEPar M. l’abbé Ugolino Giugni

Tout le monde connaît certainement la fi-gure de don Camillo, le prêtre du Bas-

Pays en lutte continuelle avec le maire com-muniste Peppone, créé par GiovanninoGuareschi. Si l’on n’a pas lu ses livres, on acertainement vu les films magistralement in-terprétés par Fernandel et Gino Cervi.

Giovannino Guareschi est mort en 1968et a eu le temps de voir le Concile Vatican IIqui s’est déroulé à Rome de 1962 à 1965.Dans cet article nous essayons de com-prendre à travers ses écrits ce que Guareschipensait du Concile et de la révolution qu’ilapporta dans l’Eglise. En somme, donCamillo a-t-il survécu au Concile? Et si ouide quelle manière? A-t-il dû faire lui aussi un“aggiornamento” ou bien a-t-il rejoint lesrangs du clergé traditionaliste et clandestin?Vous verrez que la lecture de ces lignes nesera pas dépourvue de surprises, et nous per-mettra de passer un agréable moment ac-compagné par la fine ironie du grand écri-vain émilien.

Lettre à don Camillo

Le premier texte (et peut-être le plus signi-ficatif) est une lettre que Guareschi écrit dansles années 60 à don Camillo, qui à cause deses excès et de son refus de se mettre au goûtdu jour, a été relégué dans une paroisse demontagne perdue du diocèse. Son poste dansle Bas-Pays a été pris par le jeune prêtre mo-derniste don Chichì, qui a vendu tout le mobi-lier de l’église et met en pratique de manièreimpitoyable les directives du Concile. Il est in-téressant de noter comment don Camillo, unefois déraciné de sa terre et transféré dans lamontagne devient lui-même “révolutionnaire”et comment, en se rappelant les paroles dedon Chichì, il essaye d’expliquer aux monta-gnards la réforme liturgique et de quelle ma-nière ils la refusent en bloc et désertent euxaussi l’église (les réparties du vieil Antonio etde la vieille Romilda à don Camillo sont devraies perles d’antimodernisme), prouvantainsi que le peuple est fondamentalement atta-ché à ses traditions et “traditionaliste” (idée

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très chère à Guareschi), qu’un homme “déra-ciné” perd ses points de repère et que la “ré-volution” est toujours imposée d’en-haut parles “gens des villes” et les intellectuels.

« Mon Révérend,j’espère que ma lettre atteindra le reculé

exil montagnard dans lequel vous a reléguévotre impétuosité qui ne diminue pas avec lenombre des années.

Je connais l’histoire qui a commencéquand le camarade maire, Peppone, s’estmis à vous saluer en public: “Bonjour, cama-rade Président!”

Ensuite il est venu vous visiter à la cureavec Smilzo, Bigio et Brusco pour vous direque, puisqu’il avait l’intention d’embellir laMaison du Peuple avec un beau balcon pourles discours, il achèterait volontiers les co-lonnes de marbre de la balustrade de l’autelmajeur, ainsi que les deux anges placés auxcôtés du tabernacle. Il aurait voulu, dit-il (simon informateur est digne de foi), les placerau-dessus de l’arche du portail d’entrée,pour orner l’emblème du PCI (1).

Don Camillo, vous avez décroché du murle fusil et l’avez braqué devant Peppone etses amis en leur faisant trouver rapidement lechemin de la porte. Mais, croyez-moi, ce nefut pas une réponse de bon joueur.

Vous êtes dans le pétrin jusqu’aux yeux,mon Révérend, mais cette fois c’est de votrefaute. Le jeune curé que vos supérieurs ontenvoyé pour vous instruire sur le Rit Bolonais(2) et pour vous aider à mettre l’église au goûtdu jour, n’est pas un Peppone quelconque etvous ne pouviez pas le traiter ainsi.

Il venait à vous avec un mandat précis et,puisque votre église n’a aucune valeur artis-tique ou touristique particulière, le jeune etdigne prêtre avait tout à fait le droit de pré-tendre à l’abattage de la table de commu-nion et de l’autel, à l’élimination des cha-pelles latérales et des niches avec leurssaints ridicules, tout comme les ex-voto, leschandeliers et, en somme, de toute la paco-tille de ferblanterie, de bois et de plâtredorés qui, depuis la Réforme, transfor-maient les églises en autant d’arrière-bou-tiques de brocanteurs. Don Camillo, vousavez sans doute vu à la télévision le“Lercaro Show” et la concélébration de laMesse dans le Rit Bolonais. Vous avez bienvu la pauvreté suggestive du décor et la tou-chante simplicité de l’autel réduit à une

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table prolétaire. Comment auriez-vous puprétendre placer au milieu de cette humbletable sacrée un machin haut de trois mètrescomme votre fameux (quasi tristement cé-lèbre) Crucifix que vous aimez tant?

Vous avez peut-être vu à la Télé,quelques jours après, comment était dresséela sainte Table autour de laquelle le Pape etles nouveaux Cardinaux ont concélébré leBanquet Eucharistique. Ne vous êtes-vouspas aperçu que le Crucifix situé au centre dela Table était si petit et discret qu’il seconfondait avec deux micros?

Vous n’avez pas vu, en somme, commetout, dans la Maison de Dieu, doit êtrehumble et pauvre de manière à faire ressor-tir au maximum le caractère communautairede l’Assemblée Liturgique dont le Prêtre estseulement un concélébrant avec des fonc-tions de Président?

Et vous n’avez pas vu, dans le second“Lercaro Show” télévisé (rubrique “Cor-dialmente”), combien sont satisfaits, enthou-siastes même, les fidèles bolonais pour lanouvelle Messe en Rit Bolonais?

N’avez-vous pas vu comme ils étaienttout excités, spécialement les jeunes et lesfemmes, par le plaisir de concélébrer laMesse au lieu d’y assister passivement, subis-sant la brimade du mystérieux latin du célé-

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brant, et par la légitime satisfaction de neplus devoir s’humilier en s’agenouillant pourrecevoir l’hostie et de pouvoir la déglutir de-bout, traitant Dieu d’égal à égal comme atoujours fait le député Fanfani?

Don Camillo: ce jeune prêtre avait raisonet se battait pour la Sainte Cause parce quel’aggiornamento a été voulu par le Grand PapeJean afin que l’Eglise “Epouse du Christ, puis-se montrer sa face sans tache ni ride”.

C’est l’Eglise qui, jusqu’à hier simple-ment Catholique et Apostolique, devient(rappelle toujours Lercaro) “Eglise deDieu”. Et vous, don Camillo, vous êtes restéen arrière de quelques siècles; vous êtes en-core arrêté au dernier Pape médiéval, à cePie XII qui aujourd’hui est publiquement in-sulté sur les scènes avec l’approbation (cf. lareprésentation du Vicaire à Florence) (3) desEtudiants Universitaires Catholiques, et qui,quand le producteur aura obtenu la subven-tion de l’Etat sera également insulté par lesgrands et les petits écrans.

Don Camillo: vous ne vous en êtes mêmepas aperçu en assistant, à travers la Télé, à laconsécration des nouveaux Cardinaux?

Vous n’avez pas entendu les applaudisse-ments fracassants adressés au nouveauCardinal-ouvrier Cardijn?

N’avez-vous pas entendu le RévérendPrésentateur de télévision préciser que lenouveau Cardinal tchécoslovaque Beran estsimplement sorti de son “état d’isolement”?

Don Camillo, ne vous êtes-vous pasaperçu comment les Supérieurs Hiérar-chiques de l’Eglise évitent de parler de ceCardinal Mindszenty de Hongrie qui, avecune indiscipline blâmable, persiste dansl’ignorance de la Conciliation entre EgliseCatholique et Régime Soviétique et dansl’accusation de payer l’hommage dû au soi-disant “Communisme Athée”, en considé-rant carrément valide une ExcommunicationPapale qui est aujourd’hui occasion de plai-santerie dans tous les patronages?

Pourquoi, don Camillo, refusez-vous decomprendre?

Pourquoi, quand le jeune prêtre qui vous aété envoyé par l’Autorité Supérieure vous aexpliqué qu’il fallait nettoyer l’église et vendreanges, chandeliers, Saints, Christs, SaintesVierges et toutes les autres pacotilles parmilesquelles aussi votre fameux Christ crucifié,pourquoi, dis-je, l’avez-vous empoigné par lesnippes en le flanquant contre le mur?

Fernandel interprétant don Camillo

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N’avez-vous pas compris que sont en jeules principes de base de l’Economie? Quesont en jeu des milliards et des milliards et lasacrée intégrité de la Monnaie?

Quelle famille “bien”, aujourd’hui, vou-drait se priver du plaisir de décorer sa mai-son avec un objet “sacré”? Qui peut renon-cer à avoir dans son entrée un Saint Michelutilisé comme portemanteau, ou dans sachambre un couple d’anges dorés en guisede lampadaire, ou, dans son séjour, un ta-bernacle en guise de petit bar?

Don Camillo, la mode est une puissancequi touche des milliers d’usines et des mil-liers de milliards: la mode exige que chaquemaison respectable possède un objet “sacré”et la recherche est tellement enragée que sinous n’introduisons pas sur le marché del’ameublement Saints, Anges, rétables,chandeliers, crucifix, Tabernacles, Christs,Vierges et ainsi de suite, les prix atteindrontdes chiffres hyperboliques. Et ceci sera pré-judiciable à la sacrée intégrité de la Lire, ho-norée par les étrangers par l’Oscar desMonnaies.

L’Eglise ne peut plus se détourner de lavie des laïcs et en ignorer les problèmes.

Don Camillo, ne me faites pas perdre lenord. Vous êtes donc dans le pétrin maisc’est entièrement de votre faute.

Nous savons ceci: le petit prêtre qui vousa été envoyé par les supérieurs, vous a pro-posé, une fois démoli le vieil autel, de leremplacer non par une table communecomme celle du “Lercaro Show”, mais parun banc de menuisier que le camaradePeppone lui avait vilement fait offrir en ca-deau en lui en suggérant l’utilisation. Et cecien rappelant que le Père Putatif du Christétait charpentier et que le petit Jésus, en-fant, l’avait souvent aidé à scier et à raboterdes planches.

Don Camillo: il s’agit d’un jeune prêtre,ingénu, plein de touchant enthousiasme.Pourquoi n’en avez-vous pas tenu compte etl’avez-vous chassé de l’église à coups de pieddans le derrière?

Beau résultat, don Camillo. Maintenant,dans votre église, c’est le petit prêtre qui faitce qui lui semble et vous vous trouvez confinéici, dans la dernière misérable paroisse de lamontagne. Un pays sans vie puisque hom-mes, femmes et enfants valides travaillenttous à l’étranger et qu’ici habitent seulementles vieillards avec les enfants en bas âge.

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Et vous, mon Révérend, vous avez dûinstaller l’église selon les nouvelles direc-tives et ensuite, après avoir concélébré lapremière messe dans le Rit Bolonais, vousvous êtes entendu dire par des personnesâgées que, tant que vous resterez dans lepays, ils ne viendront plus à la messe.

Don Camillo, tout se sait. Rappelant lesparoles du petit prêtre, vous avez expliquépourquoi, maintenant, la Messe doit être cé-lébrée de cette façon et le vieil Antonio vousa répondu:

“J’ai quatre-vingt-quinze ans, et pour lepeu qui me reste encore à vivre, la réserve desMesses en latin que je me suis faite en quatre-vingt-dix années me suffit”.

“Histoire de fous”, a ajouté la vieilleRomilda. “Ces citadins voudraient nous fairecroire que Dieu ne comprend plus le latin!”

“Dieu comprend toutes les langues”,avez-vous répondu, “la Messe est célébrée enitalien parce que vous devez la comprendre.Et, au lieu d’y assister passivement, vous par-ticipez au rite sacré avec le prêtre”.

“Quel monde!” a ricané Antonio. “Lesprêtres ne sont plus capables de dire la Messetout seuls et veulent se faire aider par nous!Mais nous, nous devons prier pendant laMesse!”

“Justement; ainsi, vous priez tous ensembleavec le prêtre”, avez-vous essayé d’expliquer.Mais le vieil Antonio a secoué la tête:

“Mon Révérend, chacun prie pour soncompte. On ne peut pas prier in comuniorum.Chacun a ses affaires personnelles à confier àDieu. Et on vient à l’église exprès parce que leChrist est présent dans l’hostie consacrée etque, par conséquent, on le sent plus près.Faites votre métier, Révérend, et nous, faisonsle nôtre. Autrement si vous êtes pareil quenous, à quoi donc sert le prêtre? Tout lemonde est capable de présider une assemblée.Ne suis-je pas président de la coopérative desbûcherons? Et puis: pourquoi avez-vous sortide l’église toutes les choses que nous avions of-fertes à Dieu avec nos sacrifices? Pour sculp-ter ce Saint Antoine de châtaigner que vousavez mis au grenier, mon père a mis huit ans.On comprend qu’il n’était pas un artiste, maisil y a mis toute sa passion et toute sa foi. C’estsi vrai que lui et ma pauvre mère ne pouvantpas avoir d’enfants, dès que la statue a été ter-minée et bénie, Saint Antoine lui a accordé lagrâce et je suis né. Si vous voulez faire la révo-lution allez la faire chez vous, Révérend”.

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Don Camillo, je comprends ce que vousavez dû ressentir. Mais c’est de votre faute sivous vous êtes mis dans ce pétrin.

Quoi qu’il en soit, je ne vous écris passeulement pour vous dire des méchancetés,mais pour vous réconforter un peu.

Le petit prêtre qui est maintenant à votreplace a déjà démantelé l’église. Il n’a pas ins-tallé à la place de l’autel le banc de menui-sier mais une table normale parce que, poli-ment, les Autorités Supérieures lui ont faitcomprendre que, bien que l’idée était trèsbelle et très noble, cette préférence donnéeà la menuiserie aurait pu offenser les ou-vriers et les autres artisans.

Table de communion, anges, chandeliers,ex-voto, statues de Saints, Saintes Vierges,tableaux et petits cadres, tabernacle et tousles autres objets liturgiques ont été venduset le profit a servi à installer dans l’église lenouvel autel, le combiné radio-phono sté-réophonique, les micros, les haut-parleurs,l’installation de chauffage, etc.

Votre fameux Christ a aussi été venduparce que trop encombrant, menaçant, spec-taculaire et profane. Mais soyez tranquille:tous ces objets n’ont pas été loin. C’est levieux notaire Piletti qui les a achetés et les aapportés et installés dans la chapelle privéede sa villa de Brusadone.

Vous savez que, bien qu’ayant la réputa-tion d’être un farouche réactionnaire ennemidu peuple, Peppone avec moi se laisse aller àdes confidences et m’a fait comprendre qu’ilserait disposé à traiter. Il voudrait, en échan-ge de la table de communion, la mitrailletteque vous lui avez enlevée en 1947. Il dit qu’iln’a pas la moindre intention de l’utiliserparce que désormais lui aussi est convaincuque les cléricaux réussiront à tromper lescommunistes en les envoyant au pouvoir sansleur donner la satisfaction de faire la révolu-tion. Il la reveut parce que c’est un souvenir.

Don Camillo, je suis sûr que quand d’icipeu vous reviendrez (et on vous fera revenirvite parce que, maintenant, à l’église n’yvont que pour vous faire bisquer, Peppone,Smilzo, Brusco et Biglio) vous trouvereztoutes vos chères fanfreluches parfaitementinstallées dans la chapelle du notaire.

Et vous pourrez célébrer une MesseClandestine pour quelques-uns de vos amisfidèles.

Une Messe en latin, vous comprenez,avec de nombreux oremus et kirieleison.

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Une Messe à l’ancienne, pour consoler tousnos Morts qui, bien que ne connaissant pasle latin, se sentaient, durant la Messe, prèsde Dieu, et n’avaient pas honte si, en enten-dant s’élever les anciens cantiques, leursyeux se remplissaient de larmes. Peut-êtreparce qu’alors le Sentiment et la Poésien’étaient pas péché et que personne ne pen-sait que le doux et éternellement jeune visa-ge de l’Epouse du Christ pouvait un jourmontrer des taches ou des rides.

Alors qu’aujourd’hui elle se présente ànous à travers la télévision, avec le visagedésagréable et antipathique du CardinalRouge de Bologne et de ses fidèles activis-tes, gentiment prêtés à la Curie par laFédération Communiste locale.

Don Camillo, tenez bon: quand les géné-raux trahissent, nous avons plus que jamaisbesoin de la fidélité des soldats.

Je vous salue affectueusement et vousenvoie, pour votre consolation, une petiteimage du très Révérend Pietro Nenni, ex-pert en Encycliques Papales, appelé par sesamis et ceux qui l’estiment Peter Pan etSalam.

Votre paroissienGuareschi »

(d’après Il Borghese années 1961-68)

La Messe clandestine

Voici un autre texte très intéressant: il faitpartie d’une série de nouvelles publiées tou-jours sur Il Borghese de ces années-là, dans le-quel est représentée la famille de la moyennebourgeoisie italienne: il y a le père (MonsieurBianchi), de gauche et progressiste, sa femmeMaria, de droite, très pratique et pleine de bonsens et les deux enfants: la fille Giusy très mo-derne et un peu stupide et le fils Gypo, de droi-te, un peu fasciste et certainement traditionalis-te. En le lisant on ne peut moins faire que depenser à nos petites chapelles traditionalistes,où les fidèles se réunissent de dimanche en di-manche pour assister aux messes “clandes-tines” en latin. Ce qui est le plus extraordinaireest que ces lignes ont été écrites à la fin des an-nées soixante quand Mgr Lefebvre était encoreun inconnu et que les centres de messes tradi-tionalistes n’étaient pas encore consolidés, bienque, en ces années il y eut effectivement encorebeaucoup de curés de la vieille garde à la donCamillo. C’est pourquoi on peut dire queGuareschi a été presque prophète en ayant l’in-

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tuition de ce qui est réellement arrivé les annéessuivantes.

«(…) Monsieur Bianchi s’insurgea: “Jene permettrai pas que l’on traite avec une lé-gèreté si déplorable des sujets aussi graves!Souviens-toi que Nenni est vice-président duConseil et que maintenant, avec U Thant (4),ils sont en train de résoudre de très impor-tants problèmes mondiaux”.

“U Thant”, ricana Gypo. “Celui qui anormalisé la situation du Congo. Main-tenant, il se met avec Nenni, il règle aussi leVietnam. Quoi qu’il en soit, je ne peux pasdigérer l’idée de Nenni qui va en Amériquepour illustrer une Encyclique avec la béné-diction papale. Et pour que tu le sachesbien, papa, dimanche je n’irai pas au précep-te dominical”.

“Quel précepte dominical?”“La Messe en italien”.“Tant que je serai le chef de cette - jusqu’à

aujourd’hui - respectable et honorée famille,des choses de ce genre n’arriveront jamais.Dimanche tu viendras à la Messe avec nous!”

“Non, pater! Je ne veux pas courir lerisque de trouver en chaire un fonctionnairede la Fédération Socialiste. Oui, j’irai à laMesse, mais où bon me semble. Je suis l’undes fondateurs de l’ACP.”

“ACP?, qu’est-ce à dire?”“Association des Catholiques Pacelliens.

Nous nous sommes réunis à trente-trois gar-

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çons, nous avons divisé la région autour deMilan en secteurs et chacun a effectué sesrecherches. C’est ainsi que nous avons trou-vé, dans un village, un vieux prêtre de ceuxnon réformés, qui célèbre la Messe en latin,enseigne que tous les hommes sont égauxdevant Dieu et, donc, qu’il y a des bons nonseulement dans le prolétariat, mais aussichez les bourgeois. Et il explique qu’il nesuffit pas d’être laids, stupides et pauvrespour avoir droit au Royaume des Cieux,mais qu’il faut aussi être bons et honnêtes.C’est un vieux curé qui croit encore en Dieu,dans les Saints, au Paradis et à l’Enfer etqui, quand il confesse les filles, ne leur faitpas des dissertations sexuelles et qui, quandil nous confesse, nous les garçons, ne nousrefuse pas l’absolution si nous lui disons quenous sommes libéraux, monarchistes ou mis-sini (5). C’est un vieux curé qui considère en-core valide l’excommunication ducommunisme. Et entre autres il a une petiteéglise à l’ancienne, avec beaucoup de fleurs,beaucoup de cierges allumés et, pendant laMesse, c’est le chœur qui exécute les ancienschants traditionnels. On peut allumer uncierge à la Sainte Vierge ou à un Saint: il nedit pas, comme ce fameux curé social qu’ilsont fait cardinal maintenant, que les pla-teaux avec des veilleuses allumées sont unspectacle de rôtisserie. Et contrairement à ceque fait toujours ce curé-cardinal, il ne faitpas quarante millions de dettes pour organi-ser la paroisse, disant ensuite aux créditeursde se faire payer par la Divine Providence.Et il ne se servirait jamais des deniers desparoissiens pour payer l’acompte du cyclo-moteur du pauvre camarade pour qu’il puis-se continuer à distribuer les opuscules depropagande communiste.

Ce pauvre vieux curé, il ne deviendra ja-mais cardinal, ou évêque et pas même mon-seigneur. Bienheureux s’ils ne le suspendentpas a divinis pour philocatholicisme antiso-cial. Nous avons tout organisé: ils ont pres-que tous une voiture, on part tôt le matin enempruntant différentes routes. Il faut éviterde se faire remarquer pour ne pas mettredans l’embarras ce pauvre curé. Les monti-nistes (6) ont des moyens et, par l’intermé-diaire des prêtres-ouvriers, sont liés aux cel-lules communistes qui contrôlent tout ettout le monde. Nous sommes déjà plus desoixante-dix, garçons, filles, pères et mèresde famille”.

Giovannino Guareschi (photo archive photographique Guareschi)

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“Mais”, se préoccupa Madame Bianchi,“en voyant tant d’étrangers à la Messe, ceuxdu pays seront en état d’alerte et espion-neront”.

“Non, maman”, répondit Gypo; “ils sonttous pacelliens et anticommunistes”.

Monsieur Bianchi se leva d’un bond: “Icinous sommes en pleine Vendée!” hurla-t-ilhorrifié.

“Gypo, fais-moi garder ma place, je viensmoi aussi”, dit tranquillement MadameBianchi qui, dans le fond, avait toujours étéune supporter de la Vendée.

“Fais comme tu crois”, lui dit sèchementMonsieur Bianchi. “Je continuerai à aller àl’église habituelle”.

“Moi aussi”, ajouta Giusy. “Ces jeunesprêtres qui nous font le sermon et se déchaî-nent contre les industriels, les capitalistes,les libéraux, etc. m’excitent beaucoup. Ilsfont penser à la révolution française, la prisede la Bastille et ainsi de suite. Et en plus,maintenant, ils ont commencé à démystifierl’église. Il était temps d’en finir avec lesveilleuses qui sentent mauvais, avec lessaints de plâtre et les Saintes Vierges cara-mélisées. Il devra seulement rester la croixtoute nue. C’est-à-dire le symbole du Pro-létariat exploité et torturé par les riches”.

“Et le Christ”, demanda MadameBianchi, “ils l’ont expulsé lui aussi?”

“Le Christ demeure toujours, non debois ou de bronze, mais vivant et opérantdans les Evangiles, spécialement dans celuide Pasolini qui est le plus en forme de tousles Evangiles. Il faut démystifier, tu com-prends?”

“Bien sûr que je comprends”, réponditGypo. “Il faut un travail de révision rigide.Par exemple: maintenant que l’on a décou-vert que les juifs n’ont aucune responsabilitédans le supplice du Christ, il faudra dédra-matiser aussi l’épisode de la Crucifixion. Aufond, il s’agit d’un cas normal de mort appa-rente. La Résurrection...”

“Pas de blasphème!” cria MonsieurBianchi.

“Je ne blasphème pas, papa: je raisonneselon la mentalité des nouveaux prêtres.Regarde: pendant la Messe ils feront chanterGaber, Maria Monti, Ornella Vanoni et lesautres chanteurs sociaux. Au fond, mainte-nant qu’il a inspiré les sublimes chanson-nettes de Gino Paoli, le chant Grégorien n’aplus de raison d’exister”.

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“Fate vobis”, dit avec sarcasme MonsieurBianchi. “Giusy et moi restons sur la voiejuste qui est la voie légale et qui conduit àl’Eglise de l’avenir”.

“Vous faites bien”, ricana Gypo. “Quiplus est, vous avez l’avantage, vous les mon-tiniens, que, quand le confesseur vous as-signe une pénitence trop lourde, vous pou-vez toujours recourir à la CGIL (7). Giusy, sidimanche à la Messe ils vous distribuent lesimages pieuses bénites avec l’image deNenni, apporte m’en une”».

Les prêtres ouvriers

Dans ces deux textes, qui ont pour prota-goniste toujours la famille Bianchi (à laquelles’ajoute la vieille grand-mère fasciste), appa-raît pour la première fois don Giacomo,prêtre-ouvrier ou prêtre-plombier modernisteet socialiste, qui entre à la maison pour réparerun robinet et qui essaye, comme il confesse lui-même, d’“éloigner de la maison de Dieu lesbrebis galeuses et les loups déguisés en brebis:les vieilles bigotes grenouilles de bénitier, lesriches hypocrites et égoïstes, les nationalistesfanatiques, les militaristes, les fascistes. Ensomme, tous les ennemis du peuple travailleuret de la coexistence pacifique”. Une véritableperle quand le fils Gypo pose la question siparmi les prêtres-ouvriers existent aussi les“prêtres-prêtres” et que le jeune curé progres-siste répond que oui, que ce sont les “vieuxcurés conventionnels”. Evidemment, le prêtre-ouvrier n’est pas non plus un bon plombier,puisque après son passage “le robinet perd en-core”, à chacun son métier… dit sagement leproverbe. A noter que le prêtre-ouvrier portaitrigoureusement la soutane sous le bleu de tra-vail puisque le clergyman et encore plus l’habitbourgeois était inconcevable pour les prêtresde cette époque. Dans le second passage lemoderne don Giacomo “téléphone la bénédic-tion pascale” des maisons.

«Madame Cristina, la vieille maman deMonsieur Bianchi - qui avait fait le tradition-nel voyage de Noël en ville - alla ouvrir. Ellereparut aussitôt dans la petite salle à man-ger: “C’est une vilaine tête à lunettes en bleude travail”, expliqua-t-elle à MonsieurBianchi. “Il paraît que c’est au sujet de lasalle de bains”.

“Maria, le plombier est arrivé!” annonçaà son tour Monsieur Bianchi à sa femme.

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“Enfin!” se réjouit la dame. “Dieu soitloué!”

“Dieu n’a rien à voir la-dedans”, précisale plombier qui était arrivé à la porte de lapetite salle à manger. “Soit remercié leplombier, en l’occurence”.

“Personne ne voulait vous offenser”, ex-pliqua humblement Madame Bianchi. “C’estseulement une façon de parler”.

“Oui”, admit le plombier. “Mais surtoutcela révèle une attitude déviée de la petitebourgeoisie pseudocatholique. Sous le pré-texte de rendre grâce à Dieu de vous avoirprocuré un bienfait, vous m’enlevez à moi,ouvrier, tout mérite. Et, si je répare l’instal-lation, vous direz “Dieu soit loué, çamarche!” comme si les robinets ce n’étaitpas moi qui les ai réparés”.

“Par contre, nous ne nous en prendronspas à Dieu si les robinets ne fonctionnentpas”, répliqua Madame Cristina.

“Dieu ne s’occupe pas des installationsde plomberie”, déclara le jeune homme.

“Le problème est là, à la salle de bains”,coupa court Gypo.

Le plombier alla faire son travail etMadame Cristina dit: “L’habituelle verminecommuniste”.

“Non”, répondit Monsieur Bianchi.“C’est un ouvrier sérieux et évolué, avec lesens de sa fonction dans la société et de sadignité de travailleur”.

On entendit de la salle de bains le bruitinquiétant d’un jet d’eau accompagné de ra-geuses imprécations. Gypo et MonsieurBianchi coururent voir: en dévissant un robi-net, le plombier avait été assailli par un vio-lent jet d’eau. Le mal fut aussitôt réparéparce que Gypo ferma le robinet généraldont l’existence n’avait peut-être pas été in-diquée au plombier. Mais l’eau avait trempéle bleu du jeune homme.

“Enlevez-le pour que je le fasse sécherquelques minutes” dit Madame Bianchi. Leplombier sortit du cabinet et aidé de Gypo,ôta la salopette bleue. Ce fut une surprise ex-traordinaire car du bleu de travail ne sortitpas, comme on pouvait s’y attendre, un plom-bier, mais un prêtre avec une soutane noire.

“Que c’est beau!” s’écria Giusy. “Unprêtre-ouvrier!” “un prêtre-artisan”, précisale jeune homme ajustant sa soutane. “Lesprêtres-ouvriers agissent dans les usines.Nous, nous nous occupons du secteur bour-geois et pratiquons des activités qui nous

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permettent d’être en contact direct avecl’élément bourgeois. Nous avons donc desprêtres-électriciens, des prêtres-chauffeurs,des prêtres-vernisseurs, des prêtres-storistes,des prêtres-tapissiers, des prêtres-menuisierset j’en passe”.

“Y-a-t-il aussi des prêtres-prêtres?” s’in-forma Gypo.

“Naturellement”, expliqua le jeune vicai-re. “Ce sont les vieux curés conventionnels,les prêtres bourgeois; les prêtres patriotardset militaristes, comme les aumôniers mili-taires, les prêtres bigots, les prêtres de droiteet ainsi de suite. Nous, les nouveaux prêtres,nous sommes les troupes de choc del’Eglise”.

“Très intéressant”, approuva MonsieurBianchi. “Et quel serait la tâche de cestroupes de choc?”

“Les troupes qui opèrent dans le milieuprolétaro-marxiste s’occupent de la capturedes âmes à mener, ou à ramener, à l’Eglise.Notre détachement qui œuvre dans le milieudes catholiques pratiquants, s’occupe de l’as-sainissement et de la démystification”.

“En quel sens?” demanda MadameCristina.

“Madame, avant d’amener des gens à lamaison, il faut la nettoyer, la désinfecter,l’améliorer, l’assainir”.

“Les gens?” (7bis)“Non: la maison. Il faut, autrement dit,

éloigner de la maison de Dieu les brebis ga-leuses et les loups déguisés en brebis: lesvieilles bigotes grenouilles de bénitier, lesriches hypocrites et égoïstes, les fanatiquesnationalistes, les militaristes, les fascistes. Ensomme, tous les ennemis du peuple tra-vailleur et de la coexistence pacifique”.

“Je comprends”, conclut MadameCristina. “Vous rejetez ce qui existe pourfaire place à ce qui n’existe pas. La tactiquedu ‘mieux vaut un œuf demain qu’une pouleaujourd’hui’” (8).

“Exactement, Madame. Parce que, enl’occurence, il s’agit d’une poule teigneuse,véreuse, infecte, à moitié en putréfactionalors que l’œuf frais et sain deviendra la ma-gnifique poule de demain”.

“Pour vous aussi”, ricana MadameCristina, “le prolétariat est toujours l’habi-tuel poulet” (9).

“N’essayez pas de brouiller les cartes,Madame”, s’insurgea le jeune homme.“Mon raisonnement est sans équivoque:

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nous devons démasquer et éliminer les mau-vais catholiques. Tous ceux qui ne veulent nine peuvent comprendre que, aujourd’hui,l’initiative a été prise par les masses”.

“Les masses ne peuvent jamais prendred’initiatives, mais seulement les subir”, dé-créta Madame Cristina.

“Et les révolutions?” demanda le jeuneprêtre.

“Elles portent toutes le nom d’un hom-me. Elles s’appellent Spartacus, Robes-pierre, Lénine, etc.”, répliqua Madame Cris-tina. “Mais vous, Révérend, dans quelle sou-tane (ou mieux: dans quel bleu de travail)travaillez-vous ici?” (10)

“Je suis le prêtre Giacomo Ganassa, lenouveau vicaire de votre curé et j’agis dansvotre paroisse qui est composée debourgeois”.

“Mais si quelqu’un avait besoin non duplombier, mais de l’électricien?” demandaGypo.

“Nous sommes tous reliés, nous les nou-veaux prêtres, et nous nous aidons récipro-quement. Les gens, quand ils sont à l’église,ont tous un comportement identique. Ils secachent sous une impénétrable écorce derespectabilité, de crainte de Dieu-isme et iln’est pas possible de savoir qui ils sont vrai-ment et ce qu’il y a dedans”.

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“Mais s’ils viennent se confesser à vous!”objecta Madame Cristina.

“Oui: mais un même péché doit être éva-lué différemment en fonction des sujets. Onpeut pécher par vice, par méchanceté, parignorance, par faiblesse, par faim, par incons-cience, par excessive bonté, même. Pour pou-voir évaluer la gravité effective d’un péché, ilfaut connaître intimement le pécheur. Et onne peut le connaître qu’en l’observant dansson milieu. A l’église aussi le loup est déguiséen agneau: pour le démasquer, il faut aller lesurprendre dans sa tannière”.

“Vous êtes formidable!” s’enthousiasmaGiusy. “Vous n’avez même pas l’air d’unprêtre, don Giacomo”.

“Appelle-moi donc Jack et tutoyons-nous. Et laisse tomber le don”, s’exclamatrès cordial don Giacomo.

Il s’était installé dans un fauteuil de lapetite salle à manger, à côté de l’étagère deslivres. Il étudia les titres et se félicita: “Jevois qu’ici on respire un air propre! Teilhardde Chardin, Soldati, Bernari, Quasimodo,Moravia, Pasolini: très bien! Mondadori estun éditeur sérieux, engagé”.

“Certainement?” ricana Gypo. “Il a étéle premier à envoyer une couronne pour lesfunérailles de Togliatti” (11).

“Je l’ai remarqué moi aussi”, dit donGiacomo. “Un geste vraiment courageux”.

“Oui, comme quand, à l’époque fasciste,il publiait les discours de Mussolini”, mar-monna Madame Cristina.

Monsieur Bianchi intervint: “DonGiacomo, nous sommes tous parfaitementorientés. Lors des dernières élections, nousavons même voté en faveur du centre-gauche, pour la DC et le PSI” (12).

“Pas moi!” précisa Madame Cristina.“Moi j’ai voté pour les libéraux”.

Don Giacomo eut un mouvement d’indi-gnation: “Je comprends ceux qui votentpour le PCI. Je ne comprends pas qu’onvote pour les libéraux, pour les représen-tants du MSI (5) ou pour les monarchistes”.

“Pourquoi?” demanda Gypo.“Parce que le pire pécheur est celui qui

fait obstacle, par d’inavouables intérêts per-sonnels ou par méchanceté pure à la saintebataille que les honnêtes gens de tous lespartis combattent pour l’amélioration de lacondition humaine. Le pire ennemi de Dieuest l’ennemi séculaire du pauvre. C’est leriche qui défend ce qu’il a volé”.

Peppone et don Camillo se serrent la main…

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“Mon Révérend, vous avez découvertvous aussi que la propriété est un vol?” in-terrogea Madame Cristina.

“Avant même celui qui a écrit que lapropriété est un vol, quelqu’un avait écrit:‘Que celui qui ne travaille pas ne mangepas’. Mais je n’avais pas besoin que l’onm’enseigne ces vérités élémentaires parceque je me fais un point d’honneur d’être népauvre. Je m’en fais même un mérite”.

“Si naître riches n’est pas un mérite”, décla-ra Madame Cristina, “ça ne l’est pas non plusde naître pauvres. C’est simplement une chan-ce pour celui qui est intelligent et une malchan-ce pour celui qui a une araignée au plafond”.

“Madame”, s’écria don Giacomo, “seulle pauvre sait ce qu’est le bien et le malparce qu’il est victime de l’injustice et est as-soifé de justice!”

“Il est assoifé de vengeance comme lebossu qui hait tous ceux qui ont le dos droitet considère responsable la société de sa dis-grâce”, dit Madame Cristina.

“Vous ne pouvez pas connaître la nobleâme du peuple parce que vous avez été éle-vés dans du coton et que vous ignorez lasouffrance. Jésus comprenait le peuple parcequ’il était le fils d’un pauvre ouvrier”.

“Dieu est quelque chose de plus qu’unpauvre ouvrier”, ricana Gypo.

“Tu as envie de plaisanter, jeunehomme!” cria don Giacomo. “Mais il n’y apas de quoi rire. Est-il admissible que, àl’ère atomique, une pauvre femme doivefaire allaiter sa créature par une chienne?”

“Non”, répondit Gypo. “La société pro-tectrice des animaux devrait l’empêcher”.

“Gypo”, cria Monsieur Bianchi. “Tafaçon de parler est dégoûtante. Rappelle-toique tu as devant toi un prêtre digne et tudois le respecter!”

“Quand il aura réparé le robinet du lava-bo, je le respecterai comme plombier”, ré-pondit Gypo qui, bien que n’étant pas enco-re appelé sous les drapeaux, possédait déjàla mentalité tordue du “para” colonialistesauveur des otages blancs capturés par lescommunistes congolais.

Don Giacomo remit sa salopette et allacontinuer son travail dans la salle de bains.

Quand il eut fini et s’apprêta à sortir,Monsieur Bianchi lui demanda combien illui devait.

“Vous recevrez la facture”, répondit donGiacomo. “Et toi aussi, jeune homme, et

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vous aussi, Madame, vous recevrez en tempsutile la facture”, ajouta-t-il menaçant, tour-né vers Gypo et ensuite vers MadameCristina. “Vous ne pourrez jamais arrêterl’avancée du prolétariat. Nous nous rever-rons. Mais pas à l’église. Je vous foudroieraidu haut de la chaire”.

“Peu importe, Révérend”, dit MadameCristina. “Je resterai catholique quandmême. Et, quand je me sentirai près demourir, je ferai appeler le plombier”.

Don Giacomo sortit la tête haute.“Maman”, dit avec amertume Monsieur

Bianchi, “tu as été injuste. Tu n’as pas tenucompte de son admirable foi et de son en-thousiasme”.

“Pas grave”, marmonna Madame Cri-stina. “Les communistes en tiendront comp-te. Ils le feront chef de cellule”.

Le robinet de la salle de bains perdaitencore plus qu’avant»

(Idraulica [Plomberie], d’après IlBorghese).

Aggiornamento de la Liturgie: bénédictionpar téléphone…

«Le téléphone sonna et Madame Bianchirépondit. “C’est le jeune prêtre-artisan vicai-re du curé”, expliqua-t-elle après avoir rapi-dement liquidé l’affaire.

“C’est pour la Bénédiction pascale de lamaison: il voulait savoir si nous sommes dis-posés à la recevoir. Il attend notre coup detéléphone”.

“Bien sûr!” s’écria Monsieur Bianchi.“Cette maison est toujours une maison debons chrétiens. Tu devais lui dire de venirabsolument”.

“Il ne peut pas venir”, répondit MadameBianchi. “Il a beaucoup à faire. Il dit qu’ilfera la Bénédiction par téléphone”.

Comme d’habitude, Gypo gloussa bête-ment.

“Et l’eau bénite?” demanda-t-il. “Il la té-léphonera aussi ou a-t-il fait un accord avecl’Aqueduc Municipal?”

“Ne fais pas de l’esprit”, le reprit sévère-ment la mère. “Chaque famille de la paroissea été fournie en eau bénite en temps utile. Ilsl’ont donnée avec l’olivier béni, si tu te rap-pelles. Don Giacomo téléphone la Béné-diction et, au moment voulu, le chef de familleappuye sur le bouton du flacon d’eau bénite etdonne une giclée. Ça me semble bien pensé”.

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“C’est vrai”, reconnut Gypo. “S’il y a lacrème-spray pour la barbe, pourquoi n’y au-rait-il pas l’Eau bénite-spray?”

“Nous sommes en l’an de grâce 1965”,intervint avec autorité Monsieur Bianchi.“Les cosmonautes russes marchent à pieddans le cosmos comme s’ils étaient sur laroute goudronnée. Quelque chose est chan-gé, évidemment: l’Eglise aussi doit doncs’adapter au rythme trépidant de l’époque.C’est le moment de regarder plus à la subs-tance qu’à la forme. La Bénédiction de Dieupeut entrer dans les maisons même à traversle fil du téléphone, et l’eau bénite demeureeau et bénite même si elle n’est pas trans-portée dans l’habituel petit seau. Si la chré-tienté a accepté avec une grande facilité laSainte Messe radio et télévisée, pourquoitoi, Gypo, ne voudrais-tu pas accepter laBénédiction téléphonique?”

Gypo ne dit rien et paraissait avoir l’es-prit lointain.

“Gypo”, le secoua Giusy, “pourquoi neréponds-tu pas à papa? A quoi penses-tu?”

“Je pense que maintenant, probable-ment, Nenni tire du gousset de son gilet lamontre de Jean XXIII que lui a offerte lePape Paul VI, la consulte et dit: ‘Il estl’heure d’aller prendre les ordres du PCI’.

Monsieur Bianchi était un passionné ets’emporta:

“Maria”, hurla-t-il en indiquant d’undoigt frémissant d’indignation Gypo: “pour-quoi le destin m’a-t-il condamné à être lepère de ce malheureux?”

“Cesarino”, répondit en haussant sesbelles épaules Madame Maria, “probable-ment parce que, alors, ils n’avaient pas enco-re découvert la ‘pillule catholique’”.

Le téléphone sonna: Monsieur Bianchirépondit; il parla brièvement puis détacha deson oreille le combiné pour que toute la fa-mille, serrée autour de lui, puisse écouter.

La voix de don Giacomo était forte et lesparoles rituelles de la Bénédiction s’enten-daient distinctement.

Au moment voulu, Monsieur Bianchi ap-puya sur le bouton du flacon que sa femmelui avait remis en toute hâte. Tous se signè-rent.

Le rite fut rapide et fonctionnel, mais pasmoins touchant que le rite traditionnel.

La famille Bianchi se rassit émue.“Chouette, papa”, soupira Gypo qui était

un sentimental. “Dommage que maman, au

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lieu du flacon d’eau bénite, t’ait donné celledu produit pour les vitres”.

“Maria!” hurla horrifié Monsieur Bian-chi. “C’est un sacrilège!”

“Non, Cesarino”, lui répondit avec dou-ceur Madame Bianchi. “La substance est in-demne car, évidemment, ce matin j’ai lavéles vitres avec l’eau bénite. Errare humanumest. Dieu me pardonnera”.

“Sûrement, maman”, la rassura Gypo.“Ce sera plus difficile que Dieu pardonne àdon Giacomo”.

“C’est un digne prêtre!” protesta Mon-sieur Bianchi. “Ses idées sont justes, intelli-gentes et modernes” »

(Una feroce rappresaglia [une repré-sailles féroce], tiré de Il Borghese).

Liturgie au pas avec l’époque et modernestupidité…

La petite famille Bianchi s’apprête à allerà la messe, comme d’habitude Gypo en profi-

Vignette de Guareschi parue sur “Il Borghese” dans les années 60

ITALIE CHRISTIANO-MARXISTE

Qu’est-ce qu’ils font? Ils prennent d’assaut l’église?Non, ils vont chez le curé faire bénir le drapeau del’Association Internationale pour la Diffusion de l’Athéisme.

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te pour faire un peu d’ironie. Ici l’on touche àdes sujets tels que l’œcuménisme, la responsa-bilité du déicide, toujours dans le cadre de lanouvelle liturgie commençante.

« Dix heures sonnèrent à la pendule.“C’est l’heure de partir pour la Messe”, dé-

clara Monsieur Bianchi qui avait un besoin ur-gent de changer d’air. Giusy observa qu’il étaitencore tôt et Gypo lui répondit aussitôt:

“Dépêche-toi, papa a raison. Il faut arri-ver très en avance autrement nous trouvonstoutes les places occupées par les camaradesde la Fédération Internationale pour la diffu-sion de l’Athéisme (FIDA). Tu sais, ils vien-nent à cause du dialogue avec les catho-liques. Et puis il y a les mahométans. Ils sonttrès sensibles au fait que le Vatican a restituéà la Turquie le drapeau musulman conquis àLépante par la flotte pontificale commandéepar Marc-Antoine Colonna. On appelaitalors les turcs ‘chiens infidèles’ et on croyaitencore que c’étaient les juifs qui ont crucifiéJésus alors que par la suite il s’est révélé quece furent les libéraux. Il paraît que mainte-nant ils interdiront la vente de La JérusalemDélivrée (13) et que Godefroy de Bouillonsera jugé comme criminel nazi”.

Pour ne pas se compromettre, MonsieurBianchi décida de ne plus parler. Il reprit lesrelations normales avec la famille à la sortiede l’église. Alors il ne put se dispenser d’ex-primer sa vive satisfaction:

“Il n’y a pas de doute, sans le latin, laMesse c’est autre chose”.

“Je suis d’accord”, répliqua Gypo. “Parexemple, au lieu de l’incompréhensible ‘iteMissa est’ c’est mieux de dire ‘La Messe estfinie, allez en paix’. La formule aurait été en-core plus humaine et cordiale avec un petitajout: ‘La Messe est finie, allez en paix etfaites attention en traversant la rue’. Il fautcombattre la stupide et inutile concision lati-ne. Et puis, les nouveaux prêtres qui doiventétudier Karl Marx, Lénine, Staline, etc.n’ont pas de temps à perdre pour apprendrele latin. Toutefois, je ne trouve pas que leproblème soit résolu”.

“Je ne savais pas avoir un fils expert enliturgie, en théologie et ainsi de suite”, ditavec beaucoup de sarcasme MonsieurBianchi. “Qu’est-ce qu’il y a qui ne va pas?”.

“Il y a des millions de paysans en Sicile,Calabre, etc., qui ne connaissent pas un motd’italien. Alors, pour mieux encadrer la ré-

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forme de l’organisation régionale, la messedevrait aussi être dite dans le dialecte dechaque région”» (…) (Le vecchie zie [Lesvieilles tantes], d’après Il Borghese).

Œcuménisme et liberté religieuse

Il est important de relever ici commentGuareschi, avec son intuition et avec sa foicomprend que la liberté religieuse “mine lesfondements de l’Eglise” et que seul le vraiDieu “peut se donner des airs de PèreEternel”, autrement dit qu’il n’existe qu’unseul et unique vrai Dieu…

(…) “Le problème des pères conciliairesest uniquement celui de mettre l’EgliseCatholique en phase avec le progrès”.

“D’accord papa”, répliqua Gypo. “Maisil me semble un peu imprudent d’essayer demettre au goût du jour et de fortifier l’Egliseen commençant par en miner les fonde-ments”.

“Tu délires, mon garçon”!“Non, papa: les commandements disent:

‘je suis le Seigneur ton Dieu. Tu n’auras pasd’autre Dieu que moi’. Je comprends que c’estune manière de s’exprimer un peu dictatoria-le, mais dans le fond, Dieu est l’unique quipuisse se donner des airs de Père Eternel. Orsi nous admettons, comme le veulent les PèresConciliaires progressistes, la ‘liberté religieusesans réserve’, on admet qu’un Dieu vautl’autre et pour les fondements de l’Eglise ca-tholique c’est la fin des haricots!”

Monsieur Bianchi s’excita: “Mon gar-çon!”, s’écria-t-il avec un féroce sarcasme;“je ne savais pas que tu étais un théologien!Pourquoi ne vas-tu pas expliquer ta thèse auConcile?”

“Ils ne me laisseraient pas entrer; je n’aipas la carte du PCI”, expliqua Gypo» (LaFebbre dell’oro [La Fièvre de l’or], d’après IlBorghese).

“Sédévacantisme” avant la lettre… et anti-communisme

Ce texte de 1965 est extraordinaire; ils’agit d’une autre lettre à don Camillo. LeConcile et sa dérive philo-communiste quidoit amener les éternels amis-ennemis donCamillo et Peppone à être dépassés par lestransbordements idéologiques y sont encorecritiqués, avec un brin d’amertume et l’ironie

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habituelle… Après avoir fait remarquer quele Christ crucifié n’est plus en phase avecl’époque, Guareschi critique la réforme litur-gique avec ses excès “ad experimentum” deces dernières années (la célèbre expression“tavola calda” (14) pour désigner l’autel mo-derniste tourné vers le peuple a été inventéepar Guareschi dans ces lignes). Après avoirrappelé le martyre du cardinal Mindszenty,Guareschi se lance pour ainsi dire dans unesorte de “sédévacantisme” précoce en émet-tant l’hypothèse que le “Vrai pape” s’appelleJoseph (c’est-à-dire le cardinal hongroisMindszenty) et non Paul (VI)… Toujoursest-il que l’attitude de Paul VI posait des pro-blèmes aux consciences des catholiques lesamenant presque à douter de sa légitimité.

NB: on relève qu’en 1965 la communiondans la main (aujourd’hui chose ordinairepour les modernistes) n’était absolument pasconcevable et que Guareschi a dû imaginer la“petite machine à distribuer des hosties avecdes pinces”…

Cher Don Camillo, je sais que vous avezdes ennuis avec votre nouvel évêque.

J’ai eu connaissance que vous avez dûdétruire l’autel de l’église paroissiale et le

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remplacer par la fameuse “table à repasser”modèle Lercaro, reléguant votre cher Christcrucifié dans un angle, près de la porte, defaçon à ce que l’Assemblée lui tourne le dos.

Et j’ai également su que le dimanche, aprèsavoir célébré la “Messe du Peuple de Dieu”,vous alliez en célébrer une clandestine, enlatin, pour les catholiques dans la vieille et in-tacte chapelle privée de votre ami Piletti.

Or, les chefs de la DC vous ont espionnéet vous avez été fiché à la Curie parmi lesprêtres “subversifs” après avoir reçu del’évêque une dure admonition.

Mon Révérend, cela signifie que vousn’avez rien compris. Il est juste, en effet, quele Christ ne soit plus sur l’autel. Le Christcrucifié est l’image de l’extrémisme. LeChrist était un factieux, un fasciste et son“Ou avec Dieu ou contre Dieu” n’est qu’unecopie du tristement célèbre “Ou avec nousou contre nous” de mussolinienne mémoire.

Et ne se comportait-il pas en fascistequand il chassait à coups de fouet les mar-chands du temple?

Sectarisme, intransigeance, extrémismequi l’ont conduit sur la croix, alors que leChrist, s’il avait choisi la voie démocratiquedu compromis, aurait très bien pu se mettred’accord avec ses adversaires.

Don Camillo: Vous ne vous rendez pascompte que nous sommes en 1965. Les vais-seaux spatiaux arpentent le cosmos à la dé-couverte de l’Univers et la religion chrétien-ne n’est plus adaptée à la situation. LeChrist a voulu naître sur terre et si, quandl’ignorance et la superstition faisaient de laterre le centre ou même, l’essence de l’uni-vers, la traditionelle fonction du Christ pou-vait passer, aujourd’hui avec les explorationsspatiales et la découverte de nouveauxmondes, le Christ est devenu un phénomèneprovincial. Un phénomène qui, comme l’adéclaré solennellement le Concile, doit êtreredimensionné.

Pour vous les beatniks, les “chevelus”,sont des pouilleux à expédier chez le ton-deur, et leurs partenaires avec leurs jupescourtes couvrant tout juste l’aine, sont pourvous des petites gourgandines à soumettred’urgence à la Wassermann. Tandis qu’àRome, pour ces pouilleux et ces petitesgarces, l’Autorité Supérieure Ecclésiastiquea organisé une Messe spéciale, une Messebeat sonnée et hurlée par trois groupes musi-caux de pouilleux.

VATICAN II: LIQUIDATION

Les Pères Conciliaires ont absous les juifs de l’accusa-tion de déicide; par conséquent, selon le nouveau princi-pe de la liberté religieuse, cela n’est plus utile.

Une autre vignette publiée toujours sur “Il Borghese” de ces années-là

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Vous êtes resté à l’autre siècle, Révérend.Aujourd’hui l’Eglise s’adapte aux temps, semécanise. Et à Ferrare, dans l’église SaintCharles, sur la “table à repasser” fonctionnela petite machine distributrice d’hosties. Al’offertoire le fidèle qui souhaite communierdépose son offrande dans un plat à proximi-té de la machine, appuye sur un bouton et,annoncée par un joyeux tintement, une hos-tie tombe dans le calice.

Et, il n’est pas improbable, je crois, quedans les laboratoires d’expérimentation duVatican, on étudie des machines plus com-plètes, desquelles, après que le communiantaurait introduit une pièce de monnaie et ap-puyé sur un bouton, sortirait une petitepince qui poserait l’hostie, consacrée élec-troniquement, sur les lèvres du fidèle.

Don Camillo: l’année dernière, vousm’avez réprimandé parce que dans une demes saynètes de la maison Bianchi, j’ai ra-conté que le jeune prêtre de choc donGiacomo confessait par téléphone les fi-dèles, et, au lieu d’aller bénir les maisons,envoyait aux familles des flacons d’“eau bé-nite spray”. Vous m’avez dit que, sur ceschoses, on ne plaisante pas!

Eh bien, nous y sommes arrivés par l’initia-tive de l’Autorité Ecclésiastique Supérieure.Et il n’est pas éloigné le temps où, après laconfession par téléphone, le communiant re-cevra dans une enveloppe recommandéel’hostie consacrée qu’il pourra consommerconfortablement chez lui en se servant, pourne pas la toucher avec des doigts impurs,d’une pince spéciale consacrée fournie parl’“atelier de mécanique” de la paroisse. Jen’exclus pas que, pour arrondir les maigresentrées de la paroisse, le curé puisse faire im-primer sur l’hostie une publicité.

Don Camillo: je sais que, maintenant,Peppone se moque de vous furieusement.Cependant il a raison.

Il est vrai que, maintenant, Peppone semoque de vous! Je sais qu’il vous a ordonnéd’enlever de la cure le provocateur portrait dePie XII “Pape fasciste et ennemi du peuple”,menaçant de vous dénoncer à l’évêque. Pep-pone a raison: les positions se sont inverséeset le jour n’est pas loin où la Section Com-muniste vous ordonnera de déplacer l’horairedes cérémonies sacrées pour ne pas dérangerla “Fête de l’Unité” qui a lieu sur le parvis.

Don Camillo: si vous ne vous mettez pasau goût du jour et n’arrêtez pas d’appeler

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“sans Dieu” les communistes et de les décri-re comme les ennemis de la Religion et de laliberté, la Fédération Communiste Pro-vinciale vous suspendra a divinis.

Vous que je suis exactement depuis vingtans et à qui je suis attaché, je ne voudraispas vous voir finir de manière aussi triste.

Je sais très bien que beaucoup de vos pa-roissiens, et non seulement les vieux, sontavec vous, mais je sais aussi que vous vousen irez en silence, en cachette, pour évitertout incident ou discussion qui pourraienttroubler votre troupeau.En effet, vous avez la sainte terreur d’unedivision entre les catholiques.

Mais, hélas, cette division existe déjà.Je sais que cela vous horrifie, mais je le

dis quand même.Pensez, mon Révérend, quelle chose mer-

veilleuse cela aurait été et quelle force nou-velle l’Eglise en aurait retirée si, à la mortdu “Curé du Monde” (qui par sa bonté et sanaïveté a donné de nombreux avantages auxsans-Dieu) le Conclave avait eu le couraged’élire, comme nouveau Pape le CardinalMindszenty!

Entre autres, cela aurait été la seule ma-nière correcte, courageuse et virile pour lelibérer de sa prison: en effet, Mindszenty de-venu chef de l’Etat indépendant du Vatican,

“Mais jusqu’où irons-nous avec ce Concile…”

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les communistes hongrois auraient dû luilaisser la possibilité de rejoindre son Siège.

Avec Mindszenty Pape, le Concile auraitfonctionné bien différemment, l’Eglise duSilence aurait acquis une voix tonnante. EtGromiko n’aurait pas été reçu au Vatican etainsi n’aurait pas pu alimenter et consoliderl’équivoque qui, créée naïvement, pourconfondre les consciences des catholiquesdéjà rendues assez confuses par le PapeJean, rapporta le gain d’un million et deuxcent mille voix aux communistes et qui peut-être leur donnera la victoire aux prochainesélections politiques.

Quand les curés pourront expliquer auxvieilles femmes catholiques qu’il y a péchémortel uniquement si l’on vote pour les libé-raux et les missini (5), ce sera une fête pourles communistes!

Don Camillo, peu importe si, horrifié,vous crierez, mais je dois vous dire que, nonseulement pour moi, mais pour beaucoupd’autres catholiques “subversifs”, le Papeque nous regardons comme le phare lumi-neux de la Chrétienté ne s’appelle pas Paul,mais Joseph.

Joseph Mindszenty, le Pape des catho-liques qui éprouvent du dégoût face aux ma-chines distributrices d’hosties, à la “table àrepasser” qui a détruit les autels et chassé leChrist, aux “Messes yé-yé” et aux négocia-tions avec les excommuniés sans-Dieu.

Une autre des prophéties de Nostra-damus s’est avérée. Les chevaux cosaques sesont abreuvés aux bénitiers de St Pierre.Même s’il s’agissait des Chevaux-vapeur(HP) de la Limousine de Gromiko. Et on nepeut pas exclure que Mgr Loris Capovilla,pour rendre hommage à l’hôte de marque,ait refait le plein du radiateur de la voiturede Gromiko avec l’eau bénite.

Don Camillo, si j’ai blasphémé, je m’enrepens. Comme pénitence j’écouterai six foisle Pater Noster chanté par Claudio Villa.

Mais ne vous en faites pas: la diplomatievaticane travaille et, en menaçant de le sus-pendre a divinis, elle réussira à éteindre ladernière flamme resplendissante de chré-tienté, en obligeant Mindszenty à venir fairele bibliothécaire à Rome.

Oh! espérons que non. Si Dieu nousgarde.

GUARESCHI(Il Papa si chiama Giuseppe [Le Pape

s’appelle Joseph], d’après Il Borghese)

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Et qu’en pense don Camillo?

Et pour clore ce florilège de textes “conci-liaires” mais non “conciliants” de Gio-vannino Guareschi voici quelques brèves ci-tations (auxquelles on pourrait en ajoutertant et tant d’autres) qui complètent parfaite-ment la pensée de l’auteur sur le ConcileVatican II. Le concile est un “malheur” quine réussit qu’à vider l’église de don Camillo.Elles sont tirées pour la plupart du livre donCamillo e don Chichì qui était le titre origi-nal du dernier livre sur don Camillo plusconnu sous le titre de Don Camillo e i gio-vani d’oggi [Don Camillo et les jeunes d’au-jourd’hui]. Le dessin humoristique sur leConcile publié toujours sur Il Borghese d’il ya quelques années complète aussi remarqua-blement la pensée de Guareschi.

« - (Le Christ parlant à don Camillo) Jeviens de sortir du pétrin du Concile et tuveux m’y mettre à nouveau? (“È di moda ilruggito della pecora”, in don Camillo e donChichì).

- Ces maudits intellectuels sont la ruinedu parti! Pourquoi ils ne parlent pas italien?Maintenant que même les prêtres ont mis lelatin à la poubelle, faut-il que ce soit lesfonctionnaires de la fédération communistequi l’utilisent! (“Don Camillo e la pecorellasmarrita”, ibidem).

- Voici l’erreur de l’église traditionnelle:le monde divisé en bons et en mauvais (“Sivendetta…” ibidem).

- Don Camillo était un pauvre prêtre decampagne, à la différence de don Chichì, ilavait lu peu de livres et lisait très peu lesjournaux. Donc à part les réformes litur-giques, il ne comprenait pas quelle étaitcette nouvelle route prise par l’Eglise. Il nepouvait pas le comprendre car depuis vingtans déjà, et avant tout le monde, donCamillo cheminait pour son propre comptesur cette nouvelle route, et ceci lui avait pro-curé de gros ennuis. Il était donc logiquequ’il n’éprouvât pas de sympathie pour ceblanc-bec qui, venu pour lui enseigner àfaire le prêtre, ne parvenait qu’à vider sonéglise (“Vennero per suonare…”, ibidem).

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- (Parlant de Mindszenty) il faut leplaindre… il a été induit en erreur parl’autre type qui s’est fait clouer sur la croix.Toujours les mêmes extrémismes.

- L’église traditionaliste a besoin de ca-davres bien conservés. (Ricordo di un no-vembre lontano, ibidem).

- Il faut sauver la graine: la foi, donCamillo, il faut aider quiconque possède en-core la foi à la maintenir intacte. Le désertspirituel s’étend chaque jour davantage;chaque jour de nouvelles âmes se desséchentparce qu’elles sont abandonnées par la foi.Chaque jour davantage des hommes debeaucoup de paroles et d’aucune foi détrui-sent le patrimoine spirituel et la foi desautres. Des hommes de toute race, de touteextraction, de toute culture (“È di moda ilruggito della pecora” ibidem).

- Nous les vieux prêtres, nous avons en-core la manie des commandements ».

Conclusion

On pourrait continuer encore cette sym-pathique revue guareschienne, mais je penseque les textes cités jusqu’ici suffisent à nousfaire comprendre ce que GiovanninoGuareschi pensait réellement de Vatican II.Ne voulant pas nous approprier le grandécrivain nous laissons au lecteur le soin detirer les conclusions qui s’imposent… Qu’ilnous soit seulement permis d’émettre timi-dement l’hypothèse que si Guareschi avaitvécu un peu plus longtemps (il est décédé en1968) peut-être l’aurions-nous vu parfois au

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fond de nos églises et chapelles pour assisterà une “messe clandestine en latin” commelui-même aimait l’écrire à don Camillo.

En confirmation de cela, et pour conclu-re en montrant que notre idée est partagéeégalement par d’autres, voici ce qu’écrivait“Il Borghese” dans un éditorial présentantces derniers épisodes de la saga don camil-lienne:

«Don Camillo, même si les Italiens sonthabitués à le voir au cinéma et à la télévisionsous le masque de Fernandel, appartient àune race très rare et très sérieuse: celle de cer-tains traditionalistes catholiques qui ne secontentent pas de pleurer et de réciter des ro-saires, mais combattent pour leurs idées. S’ilétait né en Espagne, Don Camillo aurait étéun Saint et serait mort comme un martyr. Néen France, il aurait été un second Veuillot.Mais le destin décida de le faire apparaître enItalie [“le pays du mélodrame” comme aimel’appeler Guareschi dans ses récits, n.d.a.] etc’est pourquoi Don Camillo est le personna-ge que Guareschi a inventé: peut-être parceque dans le “berceau du catholicisme” seulun humoriste pouvait sentir aussi profondé-ment l’élan de la Foi; ou, peut-être, parce quela religion chez nous, en dépit de ce que di-sent les “innovateurs”, existe seulementcomme phénomène populaire».

Plusieurs commentateurs ont injuste-ment critiqué don Camillo, se fondant prin-cipalement sur son image édulcorée [et criti-quée par Guareschi lui-même] fournie par lecinéma, parce qu’ils ont voulu voir dans lepersonnage de Guareschi le précurseur du“dialogue” entre l’Eglise et le PCI. La véritéest tout à l’opposé. En fait, don Camillo, etavec lui Guareschi, comme nous venons dele voir, combat contre les “nouveauxprêtres” armé de son habituelle, vieille etunique arme, le Crucifix. Il sait que la reli-gion peut finir avec lui et le lecteur le com-prend; il a presque la sensation physique dudanger qui menace l’Eglise suite à l’accepta-tion du “dialogue”.

Après désormais quarante années d’ap-plication du Concile, en voyant les fruits dé-sastreux (vous les jugerez à leurs fruits, LucVI, 43) (églises qui se vident, perte de la foiet indifférentisme apporté par l’idée quetoutes les religions se valent) qu’il a pro-duits, et que Guareschi avait lucidementperçus, nous ne pouvons qu’être confortésdans notre bataille en pensant qu’à nos côtés

Fernandel et Gino Cervi avec l’auteur, grand-père émuau baptême de son petit-fils

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il y a aussi le “traditionaliste” “prêtre-prêtre” don Camillo qui célèbre des “messesclandestines en latin” et qui garde dans savieille église toutes “ces fanfreluches” queles nouveaux-prêtres, avec la foi, ont ven-dues ou jetées à la décharge.

Cher don Camillo, nous aussi noussommes vos paroissiens.

Notes

1) Parti Communiste Italien.2) Par le terme rit bolonais Guareschi veut désigner

les expériences d’application de la réforme liturgique,voulue par Vatican II, qui se faisaient à Bologne et auxalentours dans le diocèse du “cardinal rouge” Lercaroqui était justement président de la commission qui de-vait exécuter les réformes. Inutile de dire que ces expé-riences étaient très suivies et que les médias, y comprisla télévision, en faisaient la publicité.

3) Il faut remarquer comme à pratiquement qua-rante ans de distance cette œuvre blasphématoire deHocchulth, qui injurie Pie XII est à nouveau d’actualitéavec le récent film “Amen” de Costa Gravas, présentéd’abord en France et ensuite en Italie.

4) Le birman U Thant était à cette époque secrétai-re général de l’ONU, poste occupé aujourd’hui par leghanéen Kofi Annan.

5) Les missini étaient les adhérents du partiMovimento Sociale Italiano, aujourd’hui intégré dansAlleanza Nazionale (AN); actuellement, on pourraittraduire par “frontistes”.

6) Les montinistes sont les partisans de Paul VI(Montini).

7) Syndicat communiste (l’équivalent de la CGT enFrance).

7 bis) en italien, les gens - la gente - est féminin sin-gulier, de même que la maison; d’où la confusion en-traînant la question de Mme Cristina...

8) Expression équivalant à notre «Un bon “tiens”vaut mieux que deux “tu l’auras”».

9) Nous avons conservé le mot “poulet” pour ap-précier le jeu de mots italien, mais on dirait “pigeon”.

10) In quale veste (“dans quelle soutane”, dans lesens de “à quel titre”); là aussi, jeu de mots que l’on nepeut malheureusement pas rendre…

11) Togliatti était secrétaire du Parti Communisteet ministre de la Justice après la guerre.

12) DC: Démocratie Chrétienne; PSI: PartiSocialiste Italien.

13) La Jérusalem délivrée (œuvre du Tasse,XVIème siècle).

14) La célèbre expression italienne tavola calda dé-signe un self-service et, appliquée à la “nouvellemesse”, est traduite en français par “table à repasser”.

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Documents

Le 3 septembre 2000, pour nous fête deSaint Pie X, Pie IX et Jean XXIII ont été

“béatifiés” par Jean-Paul II. Nous rappelonsaux lecteurs de Sodalitium que, selon notreposition, Jean-Paul II n’est pas formellementPape; donc, que ces béatifications sont nulleset non avenues.

Mais voilà en difficulté ceux qui, parcontre, reconnaissent l’autorité de Jean-PaulII. Les progressistes, eux, – opposés jusqu’aubout à la béatification de Pie IX – se voientmaintenant dans l’obligation d’accepter lasainteté personnelle du Pape Mastaï Ferretti,tout en faisant une distinction (arbitraire)entre sa sainteté personnelle d’une part et del’autre son gouvernement et son magistèrequ’ils refusent. Arbitraire: parce quequelqu’un ne peut pas être saint si son ensei-gnement ou l’accomplissement de son devoird’état comporte de graves imperfections, et ceparticulièrement pour un Pontife. Jean-PaulII lui-même est du nombre de ceux qui ontcherché à opérer cette distinction, déclarantdans son homélie pour la béatification deJean XXIII et de Pie IX, à propos de ce der-nier: “En béatifiant l’un de ses fils, l’Eglise necélèbre pas des options historiques particu-lières accomplies par lui, mais elle le proposeplutôt à l’imitation et à la vénération pour sesvertus...” (O.R. 4-5 sept. 2000, pp. 6-7).

Ceux qui, par contre, ne souhaitaient pasla béatification de Jean XXIII – “le Pape duConcile” – ont réagi différemment. Certains,(par exemple les prêtres de la Fraternité SaintPie X) se faisant forts de la distinction entrebéatification et canonisation, ont durementcritiqué Jean XXIII, avec pour excuse qu’unebéatification est un acte non infaillible. Ils ou-blient que du jugement unanime des théolo-giens nier une béatification implique un gravepéché de témérité.

D’autres – comme Camilleri, Messori,etc.– ont cherché à donner de Jean XXIII unvisage traditionnel, contestant les exagéra-tions progressistes, et rappelant que JeanXXIII a été le Pape de la Veterum Sapientia(en faveur du latin) et même, pourquoi pas,qu’il a été un apologiste de Mussolini…

“Le Pape du Concile”

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Face à ces dernières interprétations le ju-gement de l’abbé Gianni Baget Bozzo nousoffre une contre-partie, à notre avis particu-lièrement intéressante: s’il pense – et là il setrompe – qu’avec Jean-Paul II l’Eglise sort dela crise commencée avec le Concile, il donne,par contre, de Jean XXIII un jugement péné-trant que nous sommes tentés de partagerpour une bonne part.

Sodalitium

I) Jean XXIII vu par l’abbé Gianni BagetBozzo

“Jean XXIII sera béatifié avec Pie IX.Pourquoi? C’est, paraît-il, pour avoir convo-qué Vatican II. Mais les fruits de Vatican II,quels sont-ils? C’est Paul VI son successeur,qui nous l’a dit: “L’autodémolition del’Eglise”. Si l’on regarde aux fruits de sonpontificat, on ne voit pas pourquoi JeanXXIII devrait être béatifié. Mais enfin,Angelo Giuseppe Roncalli était certainementun homme bon. Comme l’était Célestin V,Pierre de Morrone, qui fut béatifié parl’Eglise de la captivité en Avignon, captivitédont sa subordination totale aux Français futla cause (1). (…) Si l’Eglise devait béatifier lesPapes en tant que Papes, elle aurait dû béati-fier la grande figure tragique de la papauté,Boniface VIII, qui fit tous ses efforts pourempêcher ces malheurs que furent et la capti-vité en Avignon et la conséquence de cettecaptivité, le schisme d’Occident. Jean XXIIIest comme Célestin V: après lui le Pontificatromain est entré dans une nouvelle captivitéd’Avignon (2). Que reste-t-il de Jean XXIII?Le document le plus connu, l’encycliquePacem in terris, dans lequel il a promu la cé-lèbre distinction entre erreur et errant, entrecommunisme et communistes. Une distinc-tion appropriée et irréelle qui fit la joie descommunistes italiens: errants sans erreur.Quelle chance. Mais après Pacem in terris?on eut le 68 occidental et le 68 de Prague, lemaoïsme, on eut la guerrilla urbaine, lesBrigades Rouges. Pour béatifier AngeloGiuseppe Roncalli il faut oublier Jean XXIII(3). On lui doit le Concile? Oui, certainement.Mais on lui doit aussi l’abdication de laPapauté devant le Concile, l’annullation destravaux de la commission préparatoire.

Le Pape a choisi que le Concile s’autodi-rige; Paul VI changea de méthode, mais

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enfin le Concile était devenu comme la Salledu Jeu de Paume, les Etats généraux del’Eglise: et Paul VI eut bien du mal à dirigerce Concile. Et il lui fallut (4) abonder dans lesens de l’épiscopat franco-allemand dirigédésormais par ses propres théologiens.

Ce qu’a été Angelo Roncalli? Difficile àdire. Certes, ses origines modernistes comp-taient. Et elles déterminaient son anticuria-lisme acharné. On se demande si ses formesconservatrices (l’encyclique VeterumSapientia sur l’emploi du latin, le Synode ro-main si traditionaliste), étaient feintes ou sielles étaient réellement l’expression du papeRoncalli. D’où la thèse d’un pape Roncallinaïf, d’un conservateur ignare des choses dece monde. Mais un homme qui avait éténonce apostolique en France de 1944 à 1953devait connaître pas mal de choses du malfrançais de l’Eglise en France. C’est pour-quoi je crois à l’empreinte modernisted’Angelo Roncalli, pas à sa naïveté (…)”.

Tiré de l’article de l’abbé GIANNI BAGET

BOZZO, Pio IX, il “papa-re” padre del federalismo[Pie IX, le “pape-roi” père du fédéralisme], pu-

blié dans Il Giornale du 3 septembre 2000, p. 21.

II) Le visage incorrompu de Jean XXIII. Un miracle?

Les principaux quotidiens du 25 mars 2001ont donné la nouvelle suivante: “Presquetrente-huit ans après sa mort, le visage du ‘bonPape”, Jean XXIII, est encore intact. La dé-couverte a été faite en janvier dernier, à l’occa-

L’abbé Gianni Baget Bozzo

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sion d’une ‘reconnaissance’ de sa dépouillemortelle, à laquelle étaient présents tant le car-dinal Secrétaire d’Etat, Angelo Sodano, que lesubstitut à la sécrétairerie d’Etat, MonseigneurLeonardo Sandri” (La Stampa, 25/3/01, p. 9).La reconnaissance de la dépouille a été faite“en vue d’un transfert des restes des Grottes va-ticanes à un autre endroit de la basilique”Saint-Pierre. “Une procédure analogue fut sui-vie pour Saint Pie X et pour le bienheureuxInnocent XI”. Le Vatican ne parle pas de mi-racle: “Le fait est que le corps s’est conservé –dit le Père Ciro Benedettini, vice-directeur de lasalle de presse du Vatican – mais cela n’autori-se pas des commentaires et des hypothèses surdes faits surnaturels” (Corriere della Sera,25/3/01, p. 15). Et pourtant, Vittorio Messori,interviewé par Federica Cavedini du Corrieredella Sera, a déclaré qu’il s’agit d’un miracle“si par ce terme on indique tout ce qui va au-delà des lois de la nature” considérant commesignificatif le fait que soit demeuré intact le“sourire” du “Bon Pape”. Pour exclure un faitnaturel, Messori rappelle que ‘les reconnais-sances ont été faites devant des experts, méde-cins, spécialistes savants, notaires’” (CdS,25/3/01, p. 15). Puisque Messori invoque mé-decins et experts, nous rapportons ici l’avis dedeux d’entre eux – catholiques de surcroît – :le Professeur Pier Luigi Baima Bollone, direc-teur de l’Institut de Médecine Légale del’Université de Turin et directeur du CentreInternational de Sindonologie, et le Pro-fesseur Nazareno Gabrielli, directeur du Ca-binet de Recherches des Musées du Vatican.

Sodalitium

a) Interview du professeur Baima Bollone

Turin - Professeur Pier Luigi BaimaBollone, vous qui êtes un médecin légal degrande expérience, trouvez-vous étonnantque 38 ans après la mort de Jean XXIII, sonvisage se soit conservé “intact”? “Pas lemoins du monde. Je vous dis même: qu’il ensoit ainsi me paraît évident, étant donnée laréputation des frères Simonacci, il me semblequ’ils s’appelaient justement comme ça”. Lesfrères Simonacci? “Une famille romaine qui,durant des générations, s’est transmis lestechniques de salle anatomique. Je constateque sur le corps du pape Jean les Simonacciont fait un excellent travail. En magiciens dumétier. Cela peut sembler une banalité aux

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gens qui ne connaissent rien à ces travaux,mais l’habileté professionnelle d’un techni-cien de ce secteur est fondée sur le choix, caspas cas, des doses de formol et des dilutions,sans parler des parties de l’anatomie où faireles injections”. Et alors? “Le contraire m’au-rait étonné. Pour ce qui est du visage demeu-ré intact par rapport au reste du corps, onvoit qu’ils y ont mis un peu plus de soin”.Pouvez-vous nous parler de ces techniques?“Je vous résume la plus usuelle. Elle consisteà prendre une grosse artère, en général la fé-morale; à faire un ‘lavage du sang’ en déla-vant les vaisseaux et à le remplacer par unmatériel conservateur, en général à base deglycérine. Après un traitement de ce genre,un corps peut rester intact durant un siècle etdemi. C’est un travail de ce genre qui a étéfait sur le corps de Lénine: des collèguesm’ont rapporté à l’époque qu’il ne fut pasexécuté dans les règles de l’art, au point quela dépouille ne se serait pas bien conservée”.En somme, c’est toujours une question deprofessionnalisme. Même dans ce domaine.“Avant cette technique et celle qui emploiele formol, il y en avait d’autres: savoir les ap-pliquer a toujours été fondamental. Mais nondécisif par rapport au résultat espéré”. Celanous fait penser à la crypte des Capucins, àPalerme, où le corps d’une enfant apparaîtintact par rapport aux centaines de cadavresdécomposés dont sont bondés macabrementles couloirs. “Là les corps étaient placés surun treillis et exposés à un courant d’air; leprocessus donnait lieu à une momificationnaturelle des cadavres. Il est clair que le mi-lieu de conservation est aussi très important:il doit être très ventilé, et si l’air qui y afflueest chaud, c’est encore mieux”. Reste à com-prendre un problème: pourquoi certainscorps se conservent-ils mieux que d’autres.“Si vous allez au Musée Archéologiqued’Istambul, section des arts orientaux, vousvoyez la momie naturelle d’un satrape ayantvécu aux alentours du IIIème siècle avantJésus-Christ: elle est si bien conservée qu’onen distingue tous les muscles”. On en est ar-rivé à parler des satrapes. Mais les saintsalors? “Les saints se conservent bien. A l’ex-humation de leur corps, on a vu des chosesincroyables, bien au-delà du formol. Prenezle cœur de sainte Claire de Montefalco,morte en 1308: à sept siècles de distance, lastructure de l’organe est quasiment inalté-rée”. Alors? “J’ai écrit en 1987 qu’une con-

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La “canonisation” de MgrEscrivà de Balaguer.

Bref commentaire de Sodalitium

Le 6 octobre 2002, Place Saint-Pierre,Jean-Paul II canonisait Mgr Josemaria

Escrivà de Balaguer.Sodalitium a déjà exposé la doctrine ca-

tholique sur l’infaillibilité du Pape dans la ca-nonisation des Saints (n° 53, pp. 29-30 n° 40,pp. 45-46), infaillibilité bien exprimée dans laformule même de canonisation prononcéepar Jean-Paul II, formule qui implique unevéritable définition: “… nous déclarons et dé-finissons Saint le Bienheureux JosemariaEscrivà de Balaguer et l’inscrivons auCatalogue des Saints et établissons que danstoute l’Eglise, il soit dévotement honoré parmiles Saints” (O. R., 7-8 octobre 2002, p. 5).

Si Jean-Paul II jouissait de l’autorité pon-tificale divinement assistée, JosemariaEscrivà de Balaguer devrait être considérécomme Saint par tous les catholiques dumonde, et en tant que tel être imité dans lavie et vénéré sur les autels.

La position de l’Institut Mater BoniConsilii et de sa revue Sodalitium est bienconnue des lecteurs. D’une part, nous pen-sons qu’il est démontré que Jean-Paul IIn’est pas formellement Pape: doncJosemaria Escrivà de Balaguer n’a pas étéréellement canonisé. D’autre part, notre ju-gement sur l’orthodoxie d’Escrivà deBalaguer et de l’Opus Dei, fondée par lui,est négatif. En ce qui concerne ce jugement,nous renvoyons le lecteur à ce qui a déjà étépublié dans Sodalitium aux nn° 40 (A proposde l’Opus Dei) et 42 (Encore sur l’OpusDei), de 1996. Nous n’avons aucun motifpour rétracter ce qui y était affirmé (1).

servation aussi exceptionnelle posait le pro-blème de ses causes et de la recherche desmatériaux éventuellement utilisés. L’analysedes prélèvements a été faite, et tout ce qu’il aété possible de mettre en évidence se rédui-sait à une modeste augmentation de la quan-tité de souffre encore déchiffrable avec laprésence de l’hydrogène sulfuré de la décom-position. A ce jour, il y a un ‘quelque chose’qui demeure inexplicable”.

Article d’ALBERTO GAINO: “Excellent travailau formol”, La Stampa, 25 mars 2001

b) Interview de Nazareno Garielli

Rome - Nazareno Garielli est Directeurdu Cabinet de Recherches des Musées duVatican. Il a participé à la reconnaissance ducorps du Pape Jean. Il ne cache pas naturel-lement l’émotion du moment. Mais enmême temps il est “surpris” de la “surprise”suscitée par la reconnaissance. Il rappelleque dans le passé les Papes étaient embau-més. “Il n’y a rien de miraculeux dans lesconditions que nous avons relevées dans ladépouille du Pape Jean XXIII” - explique-t-il - “Quand il est mort, certaines mesures fu-rent prises pour l’exposition du corps à lavénération des fidèles durant les heures quisuivirent. Il ne faut pas oublier non plus quela dépouille a été conservée dans trois cer-cueils, dont l’un est en plomb et scellé. On acréé ainsi un vase anatomique offrant desconditions de conservation idéales”.

“Je l’ai vu, mais ce n’est pas un miracle”, tirédu Corriere della Sera du 25 mars 2001, p. 15

III) Jules Isaac

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Notes

1) La comparaison de l’abbé Baget Bozzo est boi-teuse. En effet Célestin V abdiqua, ce que ne fit pasJean XXIII. Nous ne pensons pas que Célestin auraitété canonisé s’il n’avait pas abdiqué, justement pour lesmotifs exposés par l’auteur de l’article.

2) Là aussi, hélas, la comparaison est boiteuse. Leproblème posé par Vatican II est avant tout théolo-gique, plus que politique.

3) Entreprise impossible!4) Il voulut.

Entrefilet parusur le “Figaro”du 6 septembre2000. La nouvellese passe de com-mentaire.

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une opinion licite bien que discutable commeil veut le faire croire à ses lecteurs.

C’est différemment que raisonnent lesdominicains lefebvristes (3) du couventd’Avrillé dans le n° 42 (automne 2002) deleur revue Le sel de la terre, dans laquelle estpubliée ce qu’avait déclaré Mgr Lefebvre le18 septmbre 1989 à propos de l’infaillibilité(mieux: de la non-infaillibilité) des canonisa-tions opérées par Jean-Paul II. Selon MgrLefebvre (approuvé par ses disciples), Jean-Paul II, n’ayant pas l’intention d’user de cepouvoir auquel lui-même ne croit pas, ne se-rait pas infaillible.

Nous ne pensons pas qu’il soit possiblede démontrer ce qu’affirmait Mgr Lefebvre(4). Mais en admettant que ce soit possible, ilfaudrait en conclure qu’en tout cas Jean-Paul II ne peut être le Pontife légitime. Eneffet, ou Jean-Paul II a voulu vraiment cano-niser Escriva, usant de son infaillibilité (etalors il ne peut être Pape, si Escrivà n’estpas un Saint), ou bien Jean-Paul II a refuséconsciemment d’utiliser le charisme de l’in-faillibilité qui intervient dans les canonisa-tions des Saints, mais alors il refuserait unevérité définie (se reconnaissant lui-mêmeformellement hérétique) ou pour le moinsdémontrerait ne pas vouloir procurer lebien/fin de l’Eglise, ce qui est incompatibleavec le fait d’être Pontife légitime.

La position de Mgr Lefebvre et de Mgr deCastro Mayer, consistant par ailleurs à nier lamoindre valeur à tous les actes accomplis par

Les partisans des positions de MgrLefebvre sont d’accord avec nous pour nierla sainteté de Mgr Josemaria Escrivà deBalaguer, mais il y a dissension entre eux etnous en ce qui concerne l’infaillibilité duPape dans les canonisation des Saints.

Le supérieur du district italien de laFraternité Saint Pie X, Michel Simoulin,écrit, par exemple, dans Roma Felix (n° 11,nov. 2002, p. 3): “Le fait de cette canonisa-tion de Mgr Balaguer n’est pas non plus unarticle de foi, pas plus que ne l’est le fait del’infaillibiblité du Pape dans les canonisa-tions. C’est ce que dit le Pape Benoît XIV:‘Les deux opinions doivent être laissées dansleur probabilité jusqu’à ce que le SiègeApostolique prononce un jugement’. Même sila majorité des théologiens pensent [sic] quele Pape est infaillible en [sic] la matière, il nesera donc pas téméraire d’avoir un avis diffé-rent si les arguments sont au moins aussi fortsque ceux de la majorité, et si cela ne pro-voque pas le scandale des fidèles”.

Selon l’abbé Simoulin il est licite de pen-ser que le Pape n’est pas infaillible dans lescanonisations, et tel serait l’avis de BenoîtXIV. Par contre l’Encyclopédie catholiqueécrit: “Benoît XIV enseigne qu’il est certaine-ment hérétique et téméraire d’enseigner lecontraire [de l’infaillibilité du Pape dans lescanonisations]” (rubrique Canonisations).Où est la vérité? Comme nous le rappelionsdans le numéro précédent, pour Benoît XIV,le fait que le Pape soit infaillible dans la ca-nonisation des Saints est une vérité de foi di-vine, comme l’est le fait que tel canonisé soitréellement un Saint. Mais il admet comme li-cite l’opinion de ceux qui pensent au contrai-re qu’il s’agit d’une vérité de foi ecclésias-tique (c’est-à-dire à croire non à cause del’autorité divine mais à cause de l’autorité del’Eglise infaillible); dans ce dernier cas, celuiqui nierait les vérités susdites serait seule-ment… suspect d’hérésie et défenseur d’uneproposition erronée méritant les plus gravescensures. Par contre aucun théologien catho-lique ne soutient que l’on puisse impuné-ment enseigner que le Pape peut errer enmatière de canonisation des Saints. Nous enconcluons donc que, selon la doctrine deBenoît XIV invoquée par lui (De servorumDei beatificatione et beatorum canonisatione,chap. XLV, n. 29) (2) l’abbé Simoulin, en ad-mettant qu’il n’enseigne pas l’hérésie, en-seigne pour le moins l’erreur, et pas du tout

L’abbé Escrivà en 1937 à Madrid, lorsque il s’était réfu-giè, à cause de la guerre civile, à la légation du Honduras

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Jean-Paul II, équivaut, au moins de fait etdans la pratique, à soutenir cette vacance (aumoins formelle) du Siège Apostolique enthéorie opiniâtrement niée (5).

Sodalitium

Notes

1) Et même, on pourrait de temps à autre alléguerde nouvelles accusations contre l’Opus Dei et son fon-dateur, ou pour le moins entreprendre de nouvelles re-cherches, comme par exemple évaluer le rôle que jouadans la fondation de l’œuvre le religieux syncrétiste,point de référence des ésotéristes chrétiens, RaimundoPannikar (cf. Il Foglio, oct. 2002, p. 4).

2) Nous reportons ici le texte de Benoît XIV(Prospero Lambertini): “Itaque, ut tantæ quæstionifinem denique imponamus; si non hæreticum, temera-rium tamen, scandalum toti Ecclesiæ afferentem, inSanctos injuriosum, faventem Hæreticis negantibus auc-toritatem Ecclesiæ in canonizatione Sanctorum, sapien-tem hæresim, utpote viam sternentem infidelibus ad irri-dendum Fideles, assertorem erroneæ propositionis, etgravissimis pœnis obnoxium dicemus eum, qui auderetasserere Pontificem in hac, aut illa Canonizatione erras-se, hunque, aut illum Sanctum ab eo canonizatum nonesse cultu duliæ colendum: quemadmodum assentiunturetiam illi, qui docent, de fide non esse Papam esse infalli-bilem in Canonizatione Sanctorum, nec de fide esse,hunc aut illum Canonizatum esse Sanctum”.

3) Nous l’écrivons sans y mettre d’intention péjora-tive, comme on parle de salésiens, de dominicains, dethomistes, de scotistes, etc...

4) Les lefebvristes eux-mêmes se contredisent lors-qu’ils attribuent une valeur infaillible à certaines décla-rations de Jean-Paul II (comme, par exemple, cellescontre le sacerdoce féminin).

5) Niée du moins par Mgr Lefebvre. Dans le der-nier numéro de Sodalitium, nous écrivions que Mgr deCastro Mayer n’était pas sédévacantiste. Nous devonscorriger cette affirmation sur la base de ce qui a été dé-claré à Ecône par l’évêque brésilien peu avant lesconsécrations épiscopales du 30 juin 1988. Le prélatbrésilien, accueilli à Ecône le 25 juin, déclara entreautres: “Le monde peut dire: cette consécration est faitesans le Chef visible de l’Eglise. Mais où est le Chef vi-sible de l’Eglise? Pouvons-nous accepter comme Chefvisible de l’Eglise un Evêque qui met sur le même planles divinités païennes et la divinité de Notre-SeigneurJésus-Christ? [Mgr de Castro Mayer fait allusion à larencontre interreligieuse d’Assise] Ce n’est paspossible”. (Trancription à partir de l’enregistrementd’une homélie de Mgr De Castro Mayer prononcée enportugais et traduite, en présence de l’évêque, par sonsecrétaire le Père Fernando Arias Rifan, actuellementévêque consacré avec mandat de Jean-Paul II).

Le 25 juin 1988 au moins, Mgr Antonio de CastroMayer NE reconnut donc PAS l’autorité de Jean-Paul II.

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Massimo Introvigne et RobertoDe Mattei. Documents

Sodalitium a déjà dédié de nombreux ar-ticles à l’association “Alleanza Cattolica”,

à son histoire, à ses positions doctrinales, àcertains personnages éminents de cette associa-tion, au Maître auquel elle se réfère, fondateurde la TFP, Plinio Corréa de Oliveira… Nousrappelons entre autres, les articles suivants:“Massimo Introvigne et la Franc-Maçonnerie”(n° 34, décembre 1993-janvier 1994);“Introvigne: des messes noires à la GrandeLoge” (n° 37, octobre 1994); “Le ‘démenti’ deMassimo Introvigne” (n° 38, février-mars1995); “Entre ésotérisme et dévotion ou rela-tions dangereuses de certains dévots…” (n° 40,janvier 1996); “Entre ésotérisme et dévotion.Les relations dangereuses continuent” (n° 42,octobre-novembre 1996); “Alliance… maçon-nique? ou la dérive de la TFP” (n° 46, mai1998); “Nous construirons encore des cathé-drales…” (n° 50, juin-juillet 2000). Sur unsujet plus général, rappelons encore les articles“Joseph de Maistre ésotérique?” (n° 49, no-vembre 1999); “Donoso Cortès” éd. it. n° 51,juillet 2000; et pour ce qui est des publications,deux opuscules sur la TFP brésilienne (…),ainsi que l’œuvre de caractère général del’abbé Nitoglia, L’ésotérisme.

Si Sodalitium estime devoir revenir briè-vement sur le sujet, c’est à cause de deux do-cuments que nous nous limiterons à repro-duire ci-dessous. Le premier consiste en unecirculaire interne des Témoins de Jéhovah,par laquelle les représentants de presse del’association sont invités, quoiqu’ils en disent,à difuser l’œuvre que leur a dédiée MassimoIntrovigne, dirigeant du CESNUR (maisaussi d’Alleanza cattolica et, ipse dixit, “col-laborateur du FBI”). Chose curieuse, le livredoit être commandé non pas auprès de l’édi-teur, mais directement au bras droitd’Introvigne, Pierluigi Zoccatelli (lui aussi duCESNUR et d’Alleanza cattolica). Après lesMormons, Introvigne aide maintenant lesTémoins de Jéhovah (lesquels visent, entreautres, à obtenir un accord économique avecle gouvernement italien actuel)…

Documents

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L’autre document est un document photo-graphique. Il représente le vice-président duconseil, Gianfranco Fini, sortant du 10Downing Street, à l’issue d’une rencontre avecson homologue John Prescott. A côté de Fini,surprise! le professeur Roberto De Mattei, an-cien directeur de Cristianità (organe officield’Alleanza cattolica) et fondatur du CentreCulturel Lepanto (une émanation de la TFP)!(Les lecteurs français ont vraisemblablemententendu parler du professeur De Mattei: un deses livres est diffusé par la DFP, il a été l’un desparticipants à la réunion liturgique présidée parle cardinal Ratzinger cet été dans les milieux del’indult, et il est le responsable du bulletin delangue française, Correspondance européenne).Au cours de son voyage à Londres, rapporte“La Stampa” qui publie la photographie (23octobre 2002, p. 10), Fini a appuyé la politiquedu gouvernement travailliste, politique de sou-tien aux Etats-Unis sur la crise irakienne. “On aécrit que Fini, qui n’a été invité encore officielle-ment dans aucune capitale européenne, ressentle besoin d’une sorte de légitimisation, peut-êtreaussi en vue du voyage si désiré en Israël”. Dessources bien informées assurent que leProfesseur Roberto De Mattei n’est pas étran-ger à la politique nettement philo-israélienned’Alleanza Nationale, qui s’est manifestée ré-cemment par les voyages en Israël de Gasparriet de Storace, et prélude à celui de Fini lui-même. De ce dernier, le ministre israélien sor-tant, Shimon Peres, a déclaré: “A part seconvertir et devenir juif orthodoxe, on ne voitpas quel autre pas Fini devrait faire pour serapprocher de nous” (Il Foglio, 24 octobre2002, p. 2). Le Centre Culturel Lepanto mèneune campagne anti-musulmane méritoire enItalie; mais à la lumière de tels et tels autres faits,la propagande anti-islamique de Lepanto,semble plutôt propagande israélienne.

Sodalitium

CONGREGATIONS CHRETIENNESDES TEMOINS DE JEHOVAHVia della Bufalotta 1281. 00136 ROMA ITALIA

4 février 2002-03-30

A TOUS LES REPRÉSENTANTS DE PRESSE

Chers frères

Suite à la demande de plusieurs frères,nous vous informons de la publication pro-

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chaine du livre “Les témoins de Jéhovah: déjàet pas encore” dont l’auteur est le ProfesseurMassimo Introvigne, directeur du CESNUR.Il s’agit d’une publication de 144 pages. C’estla première fois qu’une publication écrite parun auteur italien de prestige dans laquelle lestémoins de Jéhovah sont présentés sous unjour fondamentalement positif. Nous pen-sons que ce livre peut devenir une sourceutile d’information spécialement pour lesmedia, mais aussi pour les frères. Le livresera disponible à partir de mai prochain.

Nous ne voudrions pas, ce faisant, vousdonner l’impression de désirer promouvoir ladiffusion de ce livre. Là n’est pas notre inten-tion. Il nous a été demandé si, comme dans lepassé, le bureau a l’intention d’en acquérirune certaine quantité pour mettre à la dispo-sition des congrégations. Nous ne le feronspas, mais ceux qui désirent obtenir un ou plu-sieurs exemplaires devront faire leur com-mande selon les informations que nous vouscommuniquons plus loin. Nous n’informeronspas directement les congrégations mais nousvous invitons à informer les anciens descongrégations de la circonscription dans la-quelle vous servez afin qu’ils soient au cou-rant de la prochaine publication du livre men-tionné ci-dessus. Si à leur tour ils informentles proclamateurs de leurs congrégations res-pectives il sera donné à ceux qui le désirent lapossibilité d’acquérir le livre en question.

En ce qui concerne la commande du livreon devrait procéder de la manière suivante.Le secrétaire de chaque congrégation pour-rait recueillir les commandes des divers pro-clamateurs, et vous envoyer ensuite la com-mande avec la quantité de livres que lacongrégation voudrait commander. Une foisrecueillies les commandes de toutes lescongrégations de la circonscription vous de-vrez remplir les partie en jaune. La com-mande devra être envoyée en poste priori-taire directement à l’adresse suivante :

Dott. Pierluigi ZoccatelliCorso Orbassano 72

10136 Turin

N’envoyez pas de commandes à notrebureau. Les livres y seront envoyés par laposte avec paiement à la réception. Il ne de-vrait être envoyé qu’une seule commandepar circonscription. Assurez-vous doncd’avoir reçu les commandes de chaque

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congrégation avant de transmettre la com-mande. La date limite pour la commande estle 15 mars 2002. Assurez-vous de respectercette date.

Naturellement, avec la commande le se-crétaire de la congrégation devrait vous re-mettre également l’argent de l’achat dulivre, frais d’expédition compris. Commevous l’indique la lettre de commande jointe,les frais d’expédition pourront être calculéssur la base du nombre de livres commandés.Au cas où la congrégation n’enverrait pasl’argent vous ne devrez pas tenir compte dela commande qui vous aura été éventuelle-ment faite.

C’est à vous de décider si vous voulezfaire parvenir les commandes à votre nom etadresse ou utiliser une Association locale dela circonscription. Une fois décidé, et aprèsavoir consulté le président de l’Association,vous vous règlerez en conséquence pour lacompilation de la lettre de commande.Assurez-vous d’avoir rempli la lettre decommande dans toutes ses parties.

Une fois reçus les livres commandés vousdevrez veiller à informer les congrégationsafin qu’elles puissent retirer la quantité delivres demandés.

Les délégués de presse du Piémont Vald’Aoste et peut-être de la Lombardie oud’une partie de celle-ci, pourraient déciderde retirer leur commande directement et dene pas les recevoir par la poste. Natu-rellement dans ce cas il faudrait informer leDoct. Zoccatelli (cell. 347 2667387; email:[email protected]) que vous venez chercher la com-mande afin qu’elle ne soit pas expédiée parla poste.

Nous invitons les coordinateurs des re-présentants de presse à suivre la chose en setenant en contact avec les représentants depresse qui leur sont affectés à chacun afinqu’ils ne se créent pas de difficultés les unsles autres et que tous les frères aient la pos-sibilité, s’ils le désirent, de commander lelivre en question.

Pour tout éclaircissement vous êtes libresde nous consulter. Nous vous adressons nossalutations fraternelles.

Vos frères

Congrégation Chrétiennedes Témoins de Jéhovah

Annexe

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MessieursConseillers Associés s.a.s. de ZoccatelliPierluigi & CoCorso Orbassano 7210136 Turin

Lieu et date d’envoiObjet: commande de livres “Les Témoins

de Jéhovah: déjà et pas encore”

Messieurs,

Par la présente, nous passons commande den°XXX exemplaires du livre “Les Témoins deJéhovah: déjà et pas encore” de MassimoIntrovigne (Editions Elledici, Leumann – Turin2002, 144 pages, prix de couverture Euros 9,00),au prix convenu de Euros 5,40 l’exemplaire,que vous aurez la courtoisie de nous envoyeravec paiement à la réception (frais d’expéditionà notre charge*, dans l’ordre de Euros xxx)

L’expédition de la commande pourra sefaire en certains cas directement par la maisond’édition, qui procédera à l’envoi des exem-plaires commandés, à la facturation et à l’en-caissement du paiement à la réception duchiffre stipulé ci-dessus.

A cette occasion nous vous adressons nossalutations distinguées.

Signature et tampon

NB Pour toute communication relative àl’expédition ou aux formalités inhérentes, nousvous prions de faire référence à XXX (nom, n°tél ou e-mail)

* Les frais d’expédition sont échelonnésainsi: 46-70 exemplaires = Euros 6,50; 71-95 ex.= Euros 7,50; 96-145 = Euros 9,00; en cas decommande supérieure à 145 ex., les frais d’ex-pédition seront calculés sur la base du calcul(par exemple: 191 ex. = 1 expédition à Euros6,50 + 1 expédition à Euro 9,00).

Raison sociale de l’envoyeurAdresse

Eventuellement tel, fax, e-mailTVA ou Code fiscal

Annexe à la lettre des témoins de Jéhovah pour la com-mande du livre de Massimo Introvigne

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LE PARDON DES INJURESDANS LA PARABOLE DES

DEUX DEBITEURS

Par M. l’abbé Thomas Cazalas

«Pierre, s’approchant de Jésus, Luidit: “Seigneur, combien de foispardonnerai-je à mon frère, lors-

qu’il aura péché contre moi? Sera-ce jusqu’àsept fois?”» Jésus lui dit: “Je ne te dis pasjusqu’à sept fois, mais jusqu’à soixante-dixfois sept fois. C’est pourquoi le royaume descieux est semblable à un roi qui voulut fairerendre leurs comptes à ses serviteurs. Et lors-qu’il eut commencé à faire rendre compte, onlui en présenta un qui lui devait dix mille ta-lents. Mais, comme il n’avait pas de quoi lesrendre, son maître ordonna qu’on le vendît,lui, sa femme et ses enfants, et tout ce qu’ilavait pour acquitter la dette. Ce serviteur, sejetant à ses pieds, le priait en disant: Ayez pa-tience envers moi, et je vous rendrai tout.Touché de compassion, le maître de ce servi-teur le laissa aller, et lui remit sa dette. Maisce serviteur, étant sorti, trouva un de ses com-

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pagnons qui lui devait cent deniers; et le sai-sissant, il l’étouffait, en disant: Rends-moi ceque tu me dois. Et son compagnon, se jetant àses pieds, le suppliait en disant: Aie patienceenvers moi, et je te rendrai tout. Mais il nevoulut pas; et il s’en alla, et le fit mettre enprison, jusqu’à ce qu’il lui rendît ce qu’il de-vait. Les autres serviteurs, ayant vu ce quiétait arrivé, en furent vivement attristés, et ilsallèrent raconter à leur maître ce qui s’étaitpassé. Alors, son maître le fit appeler, et luidit: Méchant serviteur, je t’ai remis toute ladette, parce que tu m’en avais prié; ne fallait-il pas donc avoir pitié toi, aussi, de ton com-pagnon, comme j’avais eu pitié de toi? Et sonmaître, irrité, le livra aux bourreaux, jusqu’àce qu’il payât tout ce qu’il devait. C’est ainsique mon Père céleste vous traitera, si chacunde vous ne pardonne pas à son frère de toutson cœur» (Matth. XVIII, 21-35).

Cette parabole que St Matthieu rapportedans son évangile a été prononcée parNotre-Seigneur Jésus-Christ peu de tempsaprès Sa Transfiguration sur le montThabor, et est appelée communément la pa-rabole des deux débiteurs. L’Eglise l’a choi-sie comme évangile du XXIème dimanche

Gianfranco Fini sort du 10 Downing Street à l’issue d’uncolloque avec son homologue anglais John Prescott. Adroite, le professeur Roberto De Mattei “conseiller de

Gianfranco Fini à la Convention européenne” (LaStampa, 13/XI/2002, p. 4).

Tablier des rose-croix ayant appartenu à Joseph deMaistre (Tiré du livre de A. Cattabiani, Rusconi éd.,

Milan 1985)

Vie Spirituelle

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après la Pentecôte. Le divin Maître nous yenseigne le pardon des offenses ou des in-jures. Si nous ne pardonnons à notre pro-chain du fond du cœur les offenses qu’ilnous a faites, nous dit Notre-Seigneur, leBon Dieu ne nous pardonnera pas non plusles offenses que nous Lui avons faites. Si,par contre, nous ne refusons jamais d’accor-der notre pardon à notre prochain, Il nousassure du pardon de nos péchés: “Pardonnezet il vous sera pardonné”, nous dit-Il en unautre passage de l’évangile (Luc VI, 37).Notre-Seigneur nous promet donc la Vieéternelle à une condition qui ne dépend quede nous-mêmes: le pardon des offenses.

Avant de parler de la parabole elle-même, faisons deux précisions pour éviterdes équivoques.

Première précision: certains lecteurspourraient penser qu’il est superflu de parlerde la nécessité de pardonner à l’heure ac-tuelle. Le pardon, comme la tolérance, n’est-il pas un des mots que l’on entend le plus ré-péter à tort et à travers aujourd’hui?

Et pourtant non, il n’est jamais inutile derappeler le devoir de pardonner à son pro-chain, car le vrai pardon (celui qui ne consistepas uniquement dans des paroles, mais quiest accordé du fond du cœur à celui qui nousa offensé) a toujours été et restera toujoursune chose fort difficile à accorder, et cecid’autant plus que l’offense aura été grave etrépétée. Notre-Seigneur nous aurait-Il promisSon pardon à la seule condition que nous par-donnions toujours à nos frères, si cela étaitchose si facile à faire? Il semble que non, carce ne serait pas conforme à Sa Justice et à SaBonté infinies lésées par nos nombreux pé-chés. L’expérience, d’ailleurs, vient confirmerabondamment le fait qu’il est difficile de par-donner à celui qui nous a offensé. Il y aquelques années, je rencontrais avecquelques autres personnes un vieux mission-naire, plus qu’octogénaire, qui avait exercélongtemps son ministère en Afrique. Il racon-ta quelques souvenirs de mission et nous ditune chose, au premier abord, surprenante. Ilexpliqua en premier lieu que la conversiondes indigènes exige d’eux un changementcomplet de vie: ils ne respectaient pas, eneffet, auparavant la loi naturelle, pratiquaientsouvent la sorcellerie qui donne au démonune grande emprise sur eux, et vivaient dansl’immoralité (la polygamie sévit partout enAfrique). Mais pour ces indigènes, disait ce

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vieux missionnaire, la plus grande difficulté àsurmonter pour se convertir et donc pourpouvoir recevoir le sacrement du baptême,n’est pas en général tout ceci, mais l’obliga-tion de pardonner aux ennemis. Il y a detelles haines entre les tribus et même entreles familles ou les individus d’une même fa-mille et elles sont si profondément ancréesdans les cœurs qu’il est difficile de leur faireadmettre la nécessité du pardon des offenseset d’arracher la haine de leurs âmes.

La Foi catholique, la pratique de laCharité enseignée par Jésus, sont venuescorriger cette mauvaise tendance du cœur del’homme. Mais la nature, même restauréepar la grâce de Dieu, garde les suites dupéché originel, c’est-à-dire la tendance aupéché, et donc aussi à la jalousie, à l’envie, àla rancune et, si on ne les réprime, ces ten-dances peuvent se réveiller, engendrer lahaine et causer de graves dommages dansles âmes. Certaines divisions et séparationsau sein de familles par ailleurs profondé-ment catholiques auraient sans aucun doutepu être évitées si chacun s’était efforcé dechasser de son âme la rancune au sujet deparoles ou de faits passés afin d’arriver àune entente, comme il se doit entre chré-tiens. Notre-Seigneur ne nous-a-t-Il pas diten effet: “C’est en ceci que tous reconnaîtrontque vous êtes Mes disciples, si vous vousaimez les uns les autres” (Jn XIII, 35)?

Deuxième précison: il y a des divisionsinévitables (qui ne sont pas dues au refus depardonner) et des divisions coupables.

- Il y a tout d’abord les divisions aux-quelles les disciples de Notre-Seigneur nepeuvent échapper et que le Seigneur nous aprédites: les divisions à cause de la Foi. Ilnous a avertis qu’à cause de Lui, Ses dis-ciples seront calomniés, maltraités et persé-cutés et nous a dit qu’ils s’en réjouissentalors parce que le royaume des cieux leurappartient. Il y a d’autres divisions que nousdevons faire nous-mêmes, sous peine denous damner: Jésus nous a commandé derompre toute relation qui nous met en dan-ger prochain d’offenser Dieu. St DominiqueSavio, par exemple, refusa d’accompagnerses compagnons à la baignade: à leur de-mande pourquoi il ne voulait pas se joindreà eux, il leur répondit que la baignade étaitdangereux pour le corps et surtout pourl’âme, et qu’à cause de cela, il ne viendraitpas avec eux. Le devoir de toujours pardon-

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ner ne signifie donc pas pouvoir et devoiréviter toute division, puisque certaines sontinévitables et d’autres obligatoires suivantl’enseignement du divin Maître.

- Cependant: a) bien des divisions ontcomme origine, non pas les raisons vues plushaut (la Foi ou le salut de notre âme), maisdes mésententes, des jalousies, des rancunes,des refus de pardonner des offenses person-nelles, ou bien des manques de charité oud’éducation. Ces divisions, n’étant pas “pourla bonne cause”, il serait malhonnête de lesfaire passer pour telles. Quel sera alors le re-mède infaillible dans tous ces cas? Celuidonné par le Sauveur dans cette parabole: lepardon des offenses. b) De plus, il ne fautpas oublier que c’est manquer à notre devoirde chrétiens que de refuser de faire du bienà ceux qui vivent loin de Dieu, sous prétextequ’ils sont mauvais. Notre-Seigneur est venupour sauver ce qui était perdu et celui quiagirait ainsi n’est pas un vrai disciple duChrist. Le même St Dominique, parexemple, n’hésita pas à accompagner deuxde ses compagnons à l’endroit où ils vou-laient se battre à coups de pierres jusqu’ausang. Ils s’étaient disputés jusqu’à injurierleurs parents respectifs, et voulaient se ven-ger de cette grave offense. Dominique avaitl’intention de tout faire pour les en empê-cher, et il y réussit.

Fermons enfin ces deux longues paren-thèses pour aller à la parabole elle-même et endonner le commentaire des Pères de l’Eglise:nous l’avons tiré de la Chaîne d’or de StThomas d’Aquin et de La grande vie de Jésus-Christ par Ludolph Le Chartreux. Ensuite,quelques explications sur ce en quoi consiste lepardon à ceux qui nous ont offensé, lesmoyens à employer pour arriver à pardonnerdu fond du cœur, et la vertu de miséricorde ai-deront le lecteur à mieux comprendre ce quenous demande le Sauveur dans cette parabole.

Nous verrons que, si cette parabole estterrible pour celui qui ne met pas en pra-tique l’enseignement qu’il nous y est donnépar le Fils de Dieu, elle est par contre d’ungrand réconfort pour celui qui obéit au com-mandement qu’Il nous y donne de pardon-ner du fond du cœur à notre prochain.

Le commandement du Seigneur

Simon-Pierre vient de demander auSeigneur combien de fois il faut pardonner à

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son frère quand celui-ci vous a offensé:“Seigneur, combien de fois pardonnerai-je àmon frère lorsqu’il péchera contre moi?” Et ilLui donne son avis: “Jusqu’à sept fois?” C’estdéjà beaucoup, lui semble-t-il... Mais ce n’estpas du tout l’avis du Maître... Jésus lui répond:“Je ne vous dis pas jusqu’à sept fois, maisjusqu’à soixante-dix fois sept fois”, c’est-à-dire

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toujours... Jésus ne veut pas que nous met-tions une limite au-delà de laquelle nous refu-sions d’accorder le pardon à notre prochain.

A ce commandement du Seigneur, unequestion peut nous venir à l’esprit: ce pré-cepte vaut-il aussi vis-à-vis des ennemis,c’est-à-dire des personnes qui nous feraientou nous voudraient actuellement du mal?Jésus répond clairement à cette questiondans le sermon sur la montagne (Matth. V,43-48): “Vous avez appris qu’il a été dit : Tuaimeras ton prochain, et tu haïras ton enne-mi. Mais Moi, Je vous dis: Aimez vos enne-mis, faites du bien à ceux qui vous haïssent, etpriez pour ceux qui vous persécutent et quivous calomnient; afin que vous soyez les en-fants de votre Père qui est dans les cieux, quifait lever son soleil sur les bons et sur les mé-chants, et qui fait pleuvoir sur les justes et surles injustes. Car si vous aimez ceux qui vousaiment, quelle récompense aurez-vous? Lespublicains ne le font-ils pas aussi? Et si vousne saluez que vos frères, que faites-vous d’ex-traordinaire? Les païens ne le font-ils pasaussi? Soyez donc parfaits, vous, commevotre Père céleste est parfait”.

Le début de la parabole: la Misércorde infi-nie de Dieu envers le pécheur repentant

Jésus, après avoir dit à St Pierre qu’il doitpardonner à son frère autant de fois quecelui-ci l’offensera, ajoute une parabole.C’était une coutume en Palestine et en Syried’entremêler à tous les discours des para-boles (qui ne sont pas autre chose que descomparaisons ou des exemples) afin de gra-ver plus facilement dans les esprits la véritéque l’on vient de rappeler et qui, sans cela,aurait sans doute été bien vite oubliée. Jésusmontre aussi par cette parabole qu’au fondce n’est pas chose héroïque que de pardon-ner soixante-dix fois sept fois à son prochainsi l’on pense que Dieu nous assure en échan-ge de nous pardonner nos péchés...

“Le Royaume des cieux est semblable àun roi qui voulut demander des comptes à sesserviteurs”. Ce roi représente Dieu qui est leRoi des rois, le roi du Ciel et de la terre. Cesserviteurs sont tous les hommes que Dieu acréés afin qu’ils Le servent sur la terre etqu’ils méritent ainsi le royaume du Ciel.C’est le jour de notre mort que Dieu nousdemandera de rendre compte de toute notrevie: Il verra alors si nous l’avons employée à

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Son service, et Il rendra à chacun suivant sesœuvres en lui donnant la récompense ou lechâtiment éternel. Mais déjà, durant la viesur terre, Il voit nos œuvres et les juge.

“Et, ayant commencé à le faire, on luiprésenta un serviteur qui lui devait dix milletalents.” Ce serviteur est une figure non seu-lement de celui qui a commis de nombreuxet graves péchés, mais aussi de tout hommecar chaque péché est une offense faite àDieu Lui-même, Bonté infinie, et donc nouscharge envers Lui d’une dette importante deréparation. “Mais il n’avait pas le moyen deles lui rendre”, car il nous est impossible depayer tout seul au Bon Dieu la dettecontractée à cause de nos péchés, et encoremoins de nous relever tout seul si, par mal-heur, nous perdons la grâce de Dieu. Nousavons besoin pour cela des mérites deNotre-Seigneur et de la grâce de Dieu, quicependant ne peut manquer à celui qui lademande à Dieu avec Foi et humilité, maisqui requiert toujours notre coopération, lebon usage de notre libre-arbitre.

“Aussi, son maître commanda qu’on levendît, lui, sa femme et ses enfants”. La ventede cet homme avec tout ce qu’il possède etavec les siens est une figure du châtiment deDieu. L’esclavage auquel il est condamnéest une image de l’enfer. “Mais le serviteurse jeta à ses pieds et le conjurait en disant:‘Seigneur, ayez un peu de patience enversmoi et je vous rendrai tout’”. Nous avons làl’image de la prière d’un pécheur contrit: ilregrette ses péchés et en reconnaît la gravi-té, il en demande pardon du fond du cœur àDieu et Lui promet de les réparer par la pé-nitence et le changement de vie.

La miséricorde du Roi…

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La réaction du maître est une image(bien faible et éloignée) de la clémence deDieu à l’égard des pécheurs qui se convertis-sent: “Alors, le maître de ce serviteur, touchéde compassion, le laissa aller et lui remit toutesa dette”. Comme ce maître accorde bienplus que ce qui lui est demandé, le Bon Dieupardonne entièrement tous les péchés àcelui qui s’en repent véritablement. Il auraitvoulu lui pardonner dès le début mais IIvoulait que le pécheur contribuât à son par-don surtout par sa prière afin de ne pas lelaisser aller sans mérite.

La fin de la parabole: le refus de pardonnerdu serviteur et sa condamnation par le maître

Jusque là, le changement de conduite duserviteur est digne d’éloge: il s’humilie et ma-nifeste sa volonté de rembourser toutes sesdettes. Malheureusement, il ne persévéra paslongtemps dans ses bonnes résolutions: «Apeine sorti, il trouve un de ses compagnons quilui devait cent deniers et, le prenant à la gorge,il l’étouffait en disant: “Rends-moi ce que tume dois”». Tous deux devaient quelquechose, mais l’un était débiteur d’une sommeénorme et l’autre d’une toute petite: ainsi, lespéchés commis envers Dieu sont bien plusgraves que les offenses que peut nous fairenotre prochain, quelles qu’elles soient, carc’est tout autre chose d’offenser Dieu Lui-même que d’offenser un simple homme.

«Son compagnon, continua Jésus, se jetaà ses genoux et le conjura en disant: “Prenezpatience et je vous rendrai tout”, mais l’autrene voulut point l’écouter; il s’en alla, et il le fitmettre en prison pour l’y tenir jusqu’à ce qu’ilrendît ce qu’il devait». Celui qui se venge desoffenses qu’on lui a faites agit comme ce ser-viteur.

“Les autres serviteurs, voyant ce qui sepassait, en furent vivement attristés et averti-rent leur maître de tout ce qui s’était passé”.Les serviteurs représentent ici les anges etles fidèles qui s’affligent de la dureté de cethomme, dureté qui est le présage de saperte. “Alors, son maître le fit venir” : le BonDieu rappela son âme à sortir de ce mondeet «il lui dit: “Méchant serviteur”». La pre-mière fois, alors qu’il devait dix mille talents,le maître ne l’avait pas traîté de la sorte et ilne lui avait dit aucune parole outrageantemais il avait eu pitié de lui. Il n’en est plusainsi maintenant. Quand il s’aperçoit de l’in-

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gratitude de cet homme à l’égard de soncompagnon, il se met en colère et le livre aubourreau. La première fois, il avait agi paramour, il avait seulement menacé de le châ-tier dans le dessein de le rendre meilleur.Maintenant, il est obligé de le châtier réelle-ment. Voilà la conduite de Dieu envers celuiqui ne pardonne du fond du cœur à sonfrère. En effet, Jésus nous a dit:”Pardonnezet vous serez pardonné (Luc VI, 37). “Jevous ai pardonné le premier, pardonnez dumoins à Mon exemple car, si vous ne lefaites, quand Je vous rapellerai à Moi le jourde la mort, Moi non plus, Je ne vous pardon-nerai pas.” C’est le sens de la phrase suivan-te par laquelle Jésus conclut cette terribleparabole: “C’est ainsi que mon Père célestevous traitera, si chacun de vous ne pardonneà son frère du fond de son cœur” . LeSauveur ajoute“du fond de son cœur”, dit StJérôme, pour prévenir toute hypocrisie ettout faux semblant de réconciliation.

En quoi consiste le pardon à ceux qui nousont offensés

Cette question n’est pas une questionthéorique mais tout à fait pratique: end’autres termes, que suis-je tenu de fairepour pardonner du fond du cœur à mon pro-chain? Pour y répondre, définissons cequ’est pardonner et distinguons deux caté-gories d’offenseurs.

Pardonner, c’est déposer toute haine en-vers l’offenseur et “l’essence de la haine, selonSt Joseph Cafasso, consiste dans le fait de vou-loir ou de désirer du mal aux autres” (1).

D’autre part, on peut distinguer deuxsortes d’offenseurs (et donc de personnesauxquelles on doit pardonner): 1) l’offen-seur repentant, celui qui regrette le mal qu’ila fait et en demande pardon de quelque ma-nière, au moins par son changement deconduite envers la personne offensée; 2)l’offenseur non repentant, celui qui ne re-grette pas le mal fait à autrui.

Il est évident que le pardon concédé à cesdeux sortes de personnes (même s’il consistetoujours à déposer toute haine) ne pourra passe manifester de la même manière: le pre-mier, l’offenseur repentant, doit désormaisêtre considéré comme un ami. Il n’en est pasdu tout de même du second, c’est-à-dire decelui qui fait ou veut du mal à une personne,qui reste malheureusement un adversaire.

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Que devons-nous donc faire à cet offen-seur non repentant pour lui pardonner vrai-ment du fond du cœur, comme Jésus nous ledemande? Que suis-je tenu à faire pour par-donner véritablement à celui qui me veut dumal, c’est-à-dire pour déposer toute haineenvers lui?

Voici ce que disait St Joseph Cafasso:c’est un remède pour chasser toute haine(remède qui fut appelé merveilleux lors duProcès diocésain de sa Béatification):“Quand nous avons trouvé véritablement lahaine dans un pénitent, nous devons exigertrois choses: que le pénitent ne veuille plus,ne désire plus de mal à celui qui l’a offensé(1); au contraire, qu’il lui veuille du bien (2);qu’il manifeste les sentiments de son âmeavec ces signes de bienveillance que lesthéologiens appelent communs (3)” (2).

Quant aux deux premières choses (ne pasvouloir et désirer du mal à celui qui nous aoffensé, et lui vouloir du bien), une façonsimple et sûre de les remplir est la prièrefaite pour l’offenseur. Pour bien faire com-prendre que la haine n’est pas un sentimentque l’on ressent mais une volonté, un désirearrêté, le Saint ajoutait : “Si une personne adu dégoût ou de l’antipathie envers uneautre, et affirme ne pas pouvoir la voir, onne peut dire encore qu’elle porte de la haineenvers elle, tant qu’elle n’arrive pas au pointde lui désirer du mal” (2).

Quant aux signes extérieurs par lesquelsdoivent être manifestés la bienveillance et lepardon concédé (3), ce sont ceux que l’ondonne aux personnes de même condition:comme de se saluer quand on se croise ou,quand on est parent, de demander ou au

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moins de faire demander des nouvelles encas de maladie.

Les moyens pour arriver à pardonner etchasser toute haine

Don Cafasso, contemporain de donBosco, fut aumônier des prisons de Turin.On l’appelait “il prete della forca”, le prêtrede la potence, car il assistait chaquecondamné à mort jusqu’à l’échafaud commecela se faisait encore à cette époque. Il affir-ma avoir trouvé dans les prisons “des hainesprofondes comme l’enfer”, mais tous ceuxqu’il assista acceptèrent chrétiennement lamort en expiation de leurs péchés et mouru-rent en prédestinés. Quels arguments utili-sait-il donc pour réussir à calmer ceux quiétaient tourmentés par la haine? Ils peuventse ramener à trois.

1) L’utilité de la personne elle-même: cetargument partait d’une observation pleinede bon sens. Avoir de la haine envers unpersonne ne nuit en réalité qu’à celui qui l’adans son cœur, et ceci autant dans l’ordrenaturel que surnaturel. “Quand on trouvequelqu’un qui ne veut pas pardonner, disaitle Saint, qu’on lui mette sous les yeux qu’enhaïssant il fait un péché d’ignorant. Cela nechange peu ou rien à la personne haïe, tan-dis que celui qui hait est en train de mériterl’enfer, car celui qui hait ne va certainementpas au Paradis” (3). Don Cafasso n’hésitaitpas à appliquer telle quelle la parabole desdeux débiteurs aux personnes tourmentéespar ce vice: «Ou pardonner, ou ne pas êtrepardonné. Malheur à moi et malheur à voussi Dieu ne nous pardonne pas. Heureux aucontraire celui qui pourra dire un jour au tri-bunal de Dieu: “Seigneur, il est vrai que jevous ai offensé, j’en ai fait beaucoup... jemérite bien autre chose que la miséricorde...mais Vous le savez, en telle occasion, j’aipardonné ce tort, cette injure. Cela m’acoûté, Vous le savez, mais je l’ai fait pourVous: maintenant, c’est Votre tour de mepardonner comme j’ai pardonné auxautres”». Une telle prière faite par celui quiaura pardonné à son frère ne pourra pas nepas être exaucée par Dieu le jour de son ju-gement, puisqu’elle est fondée sur une pro-messe de Dieu Lui-même (”Pardonnez, et ilvous sera pardonné”). Quel est celui qui, eny réfléchissant, pourra encore refuser depardonner à son prochain?

… la dureté de cœur du serviteur

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«Une autre fois, ne pouvant avoir raisonde l’obstination dans la haine d’une person-ne, il lui dit: “Récitez le Notre Père”. Quandil eut prononcé les paroles: “Pardonnez-nous nos offenses comme nous les pardon-nons à ceux qui nous ont offensés”, donCafasso lui dit en souriant: “Oh, quelle bellepromesse avez-vous faite au Seigneur: vousavez dit que, vous aussi, vous pardonnerez.Eh bien êtes-vous content de l’avoir faite etd’être vous aussi pardonné à votre tour parle Seigneur?” “Oh! oui, répondit toutcontent l’offensé, j’ai pardonné et je pardon-ne du fond du cœur. Que Dieu bénisse mesennemis.” Et don Cafasso conclut cetteémouvante conversation en lui présentant lecrucifix à baiser».

Don Cafasso n’hésitait pas non plus àdescendre des motifs surnaturels à ceux na-turels: “Celui qui hait maigrit, celui qui esthaï grossit. Ne vous apercevez-vous pas quela haine n’apporte aucun dommage à votreennemi qui mange, boit, dort et s’amuse,tandis que vous vous rongez le cœur jour etnuit?”.

2) La grande loi de la charité: argumentplus noble que le premier pour exciter aupardon. Le bon Saint rappelait que celui qui aoffensé ne reste pas moins une image de Dieuet que cette image nous devons la respecter,même si elle est portée par quelqu’un quin’en est pas digne. A un pénitent plein dudésir de se venger de son ennemi, il dit:“Seriez-vous content si d’autres vous tuaient?Certainement non. Eh bien, rappelez-vous dece que vous avez appris au catéchisme: nefaites pas aux autres ce que vous ne voudriezpas que les autres vous fassent”.

3) L’exemple de Jésus-Christ: “Vous, ditun jour don Cafasso en prêche, qui éprouveztant de peine à digérer une parole, qui hési-tez tant à pardonner un affront, une injure,venez au pied de la Croix et regardez. Levoyez-vous? L’entendez-vous? Regardez, Iln’a plus de souffle, Il est moribond, mais Ils’efforce d’implorer le pardon, et pour qui?Pour celui qui L’a tant offensé, pour qui luia donné la mort, pour qui l’injurie même aumoment de l’agonie. Un Dieu donc padonneet vous qui êtes terre, vous qui êtes poussiè-re, vous ne voulez pas pardonner?...Comment? Vous ne pouvez pas? Et vousvoulez qu’un Dieu commande une choseque vous ne pouvez pas faire? Combien,avant vous l’ont fait et le font encore?... Il

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est allé trop loin!... Il n’est pas allé jusqu’àenlever la vie comme ils Lui ont fait... Maisil ne mérite pas le pardon!... Non, lui ne lemérite pas! mais Dieu le mérite pour lui.C’est Dieu qui vous le commande: c’estDieu qui vous en donne l’exemple”.

Mais celui qui pardonne ne doit pas s’in-quiéter s’il ressent encore un peu d’aversionpour celui qui l’a offensé par le passé: “Cetteaversion, disait le bon prêtre, ne vient pas dela haine, mais plutôt de la diminution del’amour. C’est chose naturelle en celui qui aété maltraité et il ne dépend pas de nous del’effacer d’un coup d’éponge. La haine n’estpas dans la mémoire mais dans le cœur quiveut se rappeler les torts reçus et en préparela vengeance”.

Le pardon, exercice de la vertu de miséricorde

Le pardon est un acte de la vertu de mi-séricorde: ceux qui pardonnent font en effetpartie des miséricordieux dont Jésus a ditqu’ils sont “bienheureux, parce qu’ils obtien-dront miséricorde”. Notre-Seigneur, commenous l’avons vu, nous ordonne de toujourspardonner à notre prochain. Cependant,tout exercice de la vertu se situe dans unjuste milieu entre deux excès: In medio, statvirtus, dit St Thomas d’Aquin. Ce juste mi-lieu pour la pratique de la miséricorde etdonc le pardon ne consiste certainement pasà mettre des limites au-delà desquelles on nedoit plus pardonner, puisque Jésus a dit àPierre qu’il fallait toujours pardonner. Enquoi consiste-t-il donc?

Pour le comprendre et éviter ainsi toutefausse interprétation de la parabole, rappe-lons tout d’abord qu’il ne peut jamais y avoird’opposition entre l’exercice des différentesvertus. Ainsi, les vertus de miséricorde et dejustice qui, à première vue, pourraient sem-bler pouvoir s’opposer dans leur exercice, secomplètent tout au contraire. Dieu, en effet,est à la fois infiniment juste et infiniment mi-séricordieux et exerce ces deux vertus d’unemanière parfaite. Cependant, à cause de lafaiblesse de notre intelligence, il arrive quenous ayons du mal à voir, dans certains caspratiques, où commence l’exercice de l’unede ces deux vertus et finit celle de l’autre, oucomment l’une peut être exercée sans léserl’autre: c’est là une preuve de nos limites,mais non de l’opposition des vertus entreelles, et c’est un motif de plus pour nous

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maintenir dans l’humilité et la prudence dansl’exercice des différentes vertus.

Le juste milieu à garder dans l’exercice dupardon à accorder à notre prochain signifiedonc que celui-ci n’empêche pas l’exercicenécessaire de la justice. Ici-bas comme dansl’autre monde, la vraie miséricorde ne peutexister sans la justice car, sans elle, la miséri-corde n’est que faiblesse; de même que la jus-tice n’existe pas sans la miséricorde car, sanscette dernière, la justice devient insuppor-table. Donnons un exemple pratique qui ai-dera à comprendre ce qui vient d’être dit. Lecommandement de toujours pardonner necontredit en rien, par exemple, l’obligationoù se trouvent les parents ou d’autres supé-rieurs de punir quand cela s’avère nécessaire:ils doivent alors le faire pour le bien de l’âmede l’enfant ou de celui dont ils ont la respon-sabilité devant Dieu, mais sans jamais perdreau fond de leur âme la bonté (qui est un actede la miséricorde ou charité).

Le contraire est tout aussi vrai: la justicene doit jamais être exercée sans la charité:Jésus ne condamne pas dans cette parabole lefait d’exiger de son prochain le paiement deses dettes (une parabole ne doit pas être com-prise au sens littéral, puisqu’elle est uneimage). Il ne condamne pas non plus, defaçon plus générale, la défense de ses propresdroits, comme de faire de justes remon-trances à ceux qui auraient blessé notre répu-tation. Mais Il condamne le fait d’exercer oud’exiger ses propres droits sans en tempérerl’exercice par la charité: c’est s’exposer àtrouver la même sévérité pour nous chez ledivin Juge. N’oublions pas: que le droit strict(la seule justice sans la charité) n’est pas ledroit aux yeux de Dieu; que Dieu exige tou-jours de nous la charité envers le prochain; etqu’il n’y a pas de cas où il ne faille pardonnerà celui qui nous a fait du mal.

La promesse du Seigneur

Si donc vous pardonnez avec toute la gé-nérosité dont vous êtes capables, disait SaintAlphonse de Liguori, si vous supportez vosfrères avec toute la patience qui vous est pos-sible - car ce n’est pas pardonner que de fairesentir et payer aux autres leurs défauts etleurs torts - Dieu vous pardonnera: voilà lapromesse de Jésus. Combien nous gagnonsau change! Nous décidons de notre sort éter-nel par notre attitude envers notre prochain!

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La conversion de Jean Gualbert est uneréalisation bien frappante de la promesse deJésus. Jean Gualbert avait reçu une solideéducation chrétienne mais il abandonna parla suite la voie des commandements. Voici lefait qui fut à l’origine de sa conversion: unVendredi Saint, il rencontra la personne quiavait tué son frère. Poussé par la vengeance,il s’apprête à le tuer de son épée quand lemalheureux se jette à terre, les bras en croixet le supplie de ne pas lui ôter la vie en souve-nir de la Passion du Christ. Gualbert ne peutrésister à cette demande: l’exemple duSauveur qui pria pour ses bourreaux amollitla dureté de son cœur, il tend la main au gen-tilhomme et lui dit: “Je ne puis vous refuser ceque vous me demandez au nom de Jésus-Christ. Je vous accorde non seulement la viemais mon amitié. Priez Dieu de me pardonnermon péché”. Ils s’embrassèrent, puis se sépa-rèrent. De là, Jean se dirigea vers l’églised’une abbaye voisine. Il s’agenouille au piedd’un crucifix et y prie avec une ferveur extra-ordinaire. Dieu lui fit savoir alors que sa priè-re était exaucée, qu’il avait obtenu le pardonde ses fautes: le crucifix devant lequel il priaitbaissa la tête comme pour le remercier dupardon qu’il avait généreusement accordépar amour de Dieu. Changé en un hommenouveau, Jean se convertit en effet et, peu detemps après, entra chez les bénédictins. Lagrâce d’un changement si radical lui fut obte-nue par le pardon généreux qu’il accorda degrand cœur à son ennemi.

Combien les Saints ont attaché d’impor-tance au pardon des offenses commandé parle Seigneur, on le comprend aux dernièresrecommandations de don Bosco aux Sa-lésiens sur son lit de mort: “...Voulez-voustous du bien comme à des frères: aimez-vous,aidez-vous et supportez-vous les uns lesautres comme des frères... Promettez-moi devous aimer comme des frères... Faisons tou-jours du bien à tous, du mal à personne!...Diligite... diligite inimicos vestros... Be-nefacite his qui vos persequuntur... (Aimezvos ennemis, faites du bien à ceux qui vouspersécutent)” (4).

Pardonnons donc toujours, faisons dubien à ceux qui nous font du tort, prions poureux et nous serons ainsi assurés que Jésusnous pardonne nos péchés et nous attend auCiel selon Sa promesse: “Bienheureux les mi-séricordieux car le royaume des cieux leur ap-partient, bienheureux les doux car ils possède-

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ront la terre (éternelle, qui est le Ciel), bien-heureux les pacifiques car ils seront appelésfils de Dieu” (Matth. V, 4, 7 et 9).

Notes

1) MGR ANGELO GRAZIOLI, La pratica dei confessorinello spirito di San Giuseppe Cafasso. Torino 1960. p.266.

2) Idem, loc. cit.3) Idem, p. 269. Les citations suivantes sont toutes

tirées des pages 269-70-71-72 de cet ouvrage.4) G. B. LEMOYNE, Vita di San Giovanni Bosco.

Vol. II. pp. 649, 651, 654.

Quelle est – actuellement – laloi du jeûne ecclésiastique?

Par M. l’abbé Francesco Ricossa

Dans le n° 27 de mars 1992 (pp. 58-60),Sodalitium avait publié un bref article sur

le jeûne eucharistique et sur le jeûne ecclésias-tique, afin d’expliquer aux fidèles – qui parta-gent la thèse de la vacance formelle du Siège àdater, au moins, du 7 décembre 1965 – quelleest actuellement la loi de l’Eglise.

Il nous a été objecté à plusieurs reprisesque la loi sur le jeûne ecclésiastique et surl’abstinence de la viande à laquelle nous nousréférons (canon 1252 du code de droit cano-nique promulgué par le Pape Benoît XV, le15 septembre 1917) est dépassée puisque cor-rigée par des documents pontificaux ulté-rieurs; que l’Institut Mater Boni Consilii im-poserait donc une loi qui n’existe plus dansl’Eglise, et ferait ainsi preuve de désobéissan-ce vis-à-vis de l’Eglise elle-même d’une partet de manque d’esprit pastoral d’autre part enfaisant peser sur les âmes un poids impossibleà porter ou, de toute façon, non prévu. A cesobjections – que certains amis nous soule-vaient à titre personnel – nous avons toujoursrépondu personnellement.

Un excellent article…

Un ami commun nous a récemment (1)présenté ses objections en s’appuyant sur unarticle consacré aux commandements del’Eglise, article dont l’auteur est notre con-frère l’abbé Hervé Belmont (Notre-Dame dela Sainte-Espérance, n° 28, septembre1988).– A l’époque, l’article m’avait échap-pé, mais maintenant que je l’ai lu, je puis as-

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surer le lecteur qu’il vaut la peine d’être dif-fusé étant données l’habituelle clarté d’ex-position et la typique sûreté de doctrine deson auteur.

Je me permets cependant d’apporter unéclaircissement important à propos juste-ment de la discipline du jeûne.

… qui mérite qu’on y apporte un éclaircisse-ment important

L’auteur écrit: “selon les décrets de la sa-crée Congrégation du Concile [28 janvier1949, 25 juillet 1957 et 1er décembre 1959],les jours pour lesquels le jeûne est demeuréstrictement obligatoire sont les 7 et 24 dé-cembre, le mercredi des Cendres et leVendredi saint. On peut, si l’on veut, rempla-cer le 24 décembre par le 23” (cit., p. 7).

Donc, selon l’abbé Belmont, la loi actuellesur le jeûne [étant donné que – je le rappelle– Paul VI n’était pas formellement Pape] neprescrirait plus que quatre jours de pénitence.

L’Institut, se basant sur le canon 1252,soutient par contre que la loi actuelle dujeûne oblige le jour des Cendres et duVendredi Saint, mais également tous lesjours de semaine du carême à l’exception desdimanches, les mercredis, vendredis et same-dis des quatre temps, et les quatre Vigiles dePentecôte, de Toussaint, de l’Immaculée etde Noël. Une belle différence!

Qui a raison?Tout dépend de la teneur des trois dé-

crets auquels se réfère l’abbé Belmont sanstoutefois les citer.

Le décret du 3 (et non du 1er) décembre1959 – sous Jean XXIII – étend seulement àtous les fidèles le privilège accordé à laFrance (décret du 27 août 1957) d’anticiperau 23 décembre le jeûne de la Vigile de Noëlfixé normalement au jour suivant (Cf. LaDocumentation catholique, n° 1318,20/12/1959, col. 1566).

Le décret du 25 juillet 1957, pour sa part,se limite à transférer l’obligation du jeûne etde l’abstinence prescrits pour la Vigile del’Assomption de Marie (14 août) à la Vigilede l’Immaculée Conception (7 décembre)(Cf. La Documentation Catholique, n° 1257,4 août 1957, col. 1020).

Si les décrets de 1959 et de 1957 – sur les-quels se base l’abbé Belmont – ne fournis-sent aucun appui à sa position, reste la réfé-rence à celui du 28 janvier 1949.

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Le décret du 28 janvier 1949…

C’est à ce décret que je m’étais référédans l’article de Sodalitium (n° 27, pp. 58-60)cité plus haut.

Puisque de nombreux lecteurs ne se lerappellent pas ou ne me font pas confiance,je le publie ici intégralement (le caractèregras est ajouté par la rédaction):

“Décret de la S.C. du Concile relatif aujeûne et à l’abstinence.

Puisque les circonstances difficiles qui, en1941, poussèrent à accorder la dispense de laloi d’abstinence et du jeûne se sont presquepartout un peu améliorées, pour préparerl’Année sainte qui approche et conformémentaux vœux exprimés par beaucoup d’Or-dinaires, il semble opportun que l’observancede ladite loi soit rétablie au moins en partie.

Pour ce motif, Notre Très Saint Père lePape Pie XII a daigné décider qu’à partir dupremier jour du prochain Carême, jusqu’ànouvelle disposition, pour tous les fidèles derite latin, même appartenant aux Ordres reli-gieux ou aux Congrégations religieuses, lafaculté accordée aux Ordinaires de dispen-ser de l’abstinence et du jeûne, soit limitéede la façon suivante:

a) l’abstinence doit être observée tous lesvendredis de l’année

b) l’abstinence et le jeûne doivent être ob-servés le mercredi des Cendres et le VendrediSaint, aux Vigiles des fêtes de l’Assomption etde Noël: pour tous ces jours de jeûne etd’abstinence, l’usage des œufs et du laitage estd’ailleurs partout autorisé dans les petitsrepas du matin et du soir.

Les Ordinaires qui se serviront de ce nouveladoucissement du jeûne et de l’abstinence nemanqueront pas d’exhorter les fidèles, spéciale-ment le clergé séculier, les religieux et les reli-gieuses, à vouloir, dans ces temps très difficiles,ajouter des exercices de perfection chrétienne etdes œuvres de charité, particulièrement à l’égarddes pauvres et de ceux qui souffrent, et à prierselon les intentions du Souverain Pontife.

Rome, 28 janvier 1949.Francesco Cardinal Marmaggi, F. Roberti, secrétaire”.

(Cf. La Documentation Catholique, n° 1038, 13 mars 1949, col. 325).

… bref commentaire

Du texte du décret que je viens de repro-duire il découle que la loi sur l’abstinence et

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sur le jeûne mise en vigueur par le canon1252 n’a été ni changée ni abolie par le dé-cret ultérieur de 1949. Les seules véritablesmutations – les seules, entre autres, signa-lées en note dans mon édition du Code quidate de 1965 et remonte à Paul VI – concer-nent le déplacement de l’obligation de la vi-gile de l’Assomption à celle de l’Immaculée(S.C. du Concile, décr. 25 juillet 1957) etl’extension de la loi du jeûne et de l’absti-nence du carême jusqu’au Samedi Saint mi-nuit (Sacrée Congrégation des Rites, décretgénéral, 16 novembre 1955, n. 10).

Cette seconde disposition est décisivepour l’interprétation du décret de 1949; sil’interprétation qu’en donne l’abbé Belmontétait exacte, le décret de 1955 serait absurde:car pourquoi étendre au Samedi minuitl’abstinence et le jeûne du carême si - selonl’abbé Belmont - depuis 1949 il n’y a plusd’abstinence et de jeûne ce jour-là (maisseulement le Vendredi Saint)? Par contre, ilest cohérent qu’avec le déplacement de l’ho-raire de la Veillée Pascale à la nuit instituépar la réforme de la Semaine Sainte, laCongrégation des Rites ait étendu jusqu’à lanuit le jeûne du Carême.

Par conséquent la loi fixée par le canon1252 du Code du droit canonique est de-meurée substantiellement inchangée jusqu’àla Constitution Pœnitemini de 1966 de PaulVI; l’abbé Belmont suivant – comme nous –la Thèse du Siège formellement vacant, ils’ensuit que – la Constitution de Paul VIétant nulle – la loi de l’Eglise en vigueur estcelle du canon 1252 (mis à part les deuxchangements signalés).

Mais le décret de 1949 ne laisse-t-il passubsister seulement 4 jours de jeûne?

Non. Comme Sodalitium l’a déjà expli-qué, le décret de 1949 limitait seulement lepouvoir de dispenser de l’observance de laloi accordé aux Ordinaires (Evêques diocé-sains ou similaires), en excluant de leur pou-voir celui de dispenser pour ces quatrejours-là. Les sièges épiscopaux étant actuel-lement formellement vacants, ces dispensesne sont plus accordées.

Appliquer la loi… avec bon sens

Telle est la loi, sans l’ombre d’un doute.Ce qui ne veut pas dire que ladite loi ne

doive pas, de nos jours, être appliquée avecbon sens, et avec sens pastoral. Ce qui veut

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dire que les motifs adoptés couramment parles moralistes pour décharger les fidèles del’application de la loi doivent être évaluésavec une grande bénignité, en tenant compte:

a) qu’en temps normal les Ordinaires au-raient pu dispenser de la loi et réduire l’obli-gation à seulement quatre jours par an;

b) que cette loi – de fait – n’est plus ob-servée depuis 1941, ce pour quoi on pourraitéventuellement invoquer – contre l’obser-vance de la loi – une coutume de plus dequarante ans (cf. canons 25-30).

Affirmer cependant, sans donnerd’autres précisions, que la loi ecclésiastiquede l’abstinence et du jeûne ne prescrit plusactuellement que quatre jours de pénitenceest - objectivement - une erreur.

Note1) Cet article a été publié dans le numéro 53 de l’édi-

tion italienne de Sodalitium datant de décembre 2001.

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fendre le droit de l’enseignement de l’écolelibre, il dut quitter la France, refusant toutcompromis, après la promulgation de la loiFerry. Il fonda et dirigea alors en Angleterrele collège français St. Mary, à Canterbury. Ilcommença l’année scolaire avec quatreélèves et il la termina avec… cent quatre! Ilrefusait toute recommandation si l’élève nedonnait pas les garanties “de piété, de tra-vail, de discipline”.

De retour en France en 1890 il devint unpersonnage très médiatique; ses prédicationsdans les plus grandes chaires de Paris, enmême temps que ses œuvres sociales dans lecadre d’un “catholicisme social”, avancépour l’époque, en firent la cible privilégiéedes gouvernants anticléricaux. Il fonda le“Syndicat de l’Aiguille” (1891) pour amélio-rer les conditions de travail des employés,modistes, lingères, couturières. En 1897 cesyndicat sera présent dans 33 des principalesvilles de France; en 1903 il comptera 2000inscrits à Paris.

Il écrivit France (Paris, 1888), recueil desouvenirs pour les anciens élèves du St.Mary’s College, et Jésuites (Paris, 1901) endéfense de l’Ordre contre les calomnies ré-pandues de partout.

abbé Giuseppe Murro

YVES DU LAC DE FOUGERESPère Stanislas du Lac, s.j. De la légende àla réalitéPierre Téqui éditeur, 238 pages, 17,70 €

L’éducation de Jean-Marie

Ce petit livre est une réponse aux mèresqui, bien décidées à faire de leurs en-

fants de solides chrétiens, ne savent com-ment commencer leur éducation religieuse.Une réponse à toutes celles qui, sentant lagrandeur et le poids de leur tâche, estimentque l’expérience des unes peut aider lesautres et qu’on n’est jamais trop de mamansensemble pour s’encourager et se soutenir.Vous retrouverez dans ces pages Jean-Marieentre cinq est sept ans; sa sœur Moniqueentre trois et cinq. Le jeune François est en-core poupon. Vous assisterez à des scènesvécues, à des conversations où vous retrou-

Recensions

Une victime de l’anticlérica-lisme: le Père Stanislas du Lac

La vie du Père Stanislas du Lac (1835-1909), écrite par un neveu de sa famille

qui a pu avoir accès non seulement aux ar-chives des jésuites, mais aussi aux documentset souvenirs de sa famille, retrace la vie et lescombats de ce père jésuite dans une fresquesaisissante de l’homme et de l’atmosphèrepolitique de l’époque. L’anticléricalisme dela fin du XIXème siècle apparaît avec les dé-buts de la Troisième République, dès 1876. Ilva durer trente ans jusqu’à la confiscationdes biens de l’Eglise et la séparation del’Eglise et de l’Etat. Le R. P. Stanislas du Lacincarne la résistance. Il se prodigua pendantla guerre franco-allemande pour installer unlazaret au Mans, où passèrent 22.000 soldats.Recteur de l’école Sainte-Geneviève à Parisde 1871 à 1881, il lui donna une grande re-nommée, notamment du fait des succès qu’ilobtint aux concours des grandes écoles, etdevint dès lors l’objet des premières attaquesdirigées contre l’enseignement religieux.Chargé par le général des jésuites de dé-

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verez les réactions de vos petits, le reflet devotre propre foyer. La mère de Jean-Mariene laisse à personne le soin de faireconnaître et aimer Dieu à ses enfants. Ellene dit pas: “Ils sont bien le temps d’ap-prendre… pour l’instant qu’ils se laissentvivre”, car elle sait que dès leurs premièresannées les petits ont une âme faite pourDieu et qui a besoin de Lui. Elle ne dit pas:“Ils apprendrons cela au catéchisme… c’estl’affaire de M. le Curé”, car elle a comprisque l’enseignement du catéchisme doit êtrepréparé par une première initiation mater-nelle que rien ne remplace. Elle ne dit pas:“Je ne suis pas capable d’instuire mes en-fants”; les vérités religieuses sont présentes àson esprit et à son cœur, parce qu’elle necesse de les vivre. On n’oublie pas sa reli-gion quand on la pratique. Et puis ce qu’ellene sait pas elle l’apprend.

L’ambition de ce petit livre est d’aider lesmères. Il s’agit d’exprériences d’une mèreproposées à d’autres. Chacune saura lesadapter à ses propres enfants, à leur caractè-re, à leur développement, à leur vie.

abbé Giuseppe Murro

L’éducation de Jean-MarieCentro Librario Sodalitium, 80 pages,4,50 €

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Les sept péchés capitaux del’enfance

Nous avons jugé utile de rééditer le livredu R. P. Charles de Maillardoz “ Les sept

péchés capitaux de l’enfance ” (1): il sera d’ungrand profit aux parents et à toutes les per-sonnes concernées par l’éducation des en-fants. Dans ce petit ouvrage, le Père deMaillardoz a su allier esprit surnaturel et bonsens. Il s’appuie en effet sur la vérité dupéché originel, souvent oubliée de nos jours,mais qui est pourtant si manifeste même chezles enfants; par ailleurs, il donne un grandnombre d’exemples pratiques qui permettentla compréhension des principes exposés.

Le Père Charles de Maillardoz était l’undes huit enfants de Mme Marie LaureMaublanc de Chiseuil, épouse du Marquisde Maillardoz de Rue. S’il a pu aussi bientraiter de l’éducation, c’est certainementgrâce à celle qu’il avait reçue de sa mère quifut vraiment une sainte femme. Fidèle àl’Eglise et au Pape dans cette période duXIXème siècle si difficile pour lesSouverains Pontifes, catholique fervente,amie de nombreuses personnalités telles quele Cardinal de Mermillod, elle participa etorganisa sur leur conseil et sous leur direc-tion plusieurs œuvres ayant pour but le dé-veloppement de la foi et de la dévotion. Ellefavorisa la prédication de missions dans despays protestants et soutint la fondation deplusieurs maisons religieuses. Toutes ces ac-tivités ne l’empêchèrent pas de maintenirune profonde vie intérieure; toujours, elles’efforça de vivre selon les principes surna-turels, les mettant plus spécialement en pra-tique tant dans la formation de ses enfants àla maison que dans le choix pour eux d’éta-blissements où régnait le meilleur esprit.Dieu bénit cette âme: autour d’elle, tous sesanctifièrent. L’un de ses enfants mourut àl’âge de huit ans comme un petit saint; dedeux qui se consacrèrent à Dieu, l’un devintévêque; elle-même, renonçant aux joies fa-miliales méritées après une vie si bien rem-plie, voulut consacrer à Dieu les dernièresannées de sa vie.

Désireux de ne pas retoucher le texte del’édition de 1928, nous l’avons repris prati-quement tel quel. Cependant, le lecteursaura lui-même comprendre que lesexemples donnés par l’auteur, il y a mainte-

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nant plus de soixante-dix ans, ne peuventpas tous être appliqués au pied de la lettre àl’heure actuelle bien que les vérités qu’ilsillustrent demeurent toujours intactes. Demême, si le style utilisé est quelquefois unpeu désuet, il ne nous semble pas représen-ter un obstacle à la lecture.

Nous souhaitons que les parents et leséducateurs retirent beaucoup de fruits de cepetit livre à la fois si court et si précis, pourle plus grand bien des enfants confiés à leurssoins par le Bon Dieu.

R. P. de Maillardoz, Les sept péchés capitauxde l’enfance Centro Librario Sodalitium,90 pages, 8,40 €

CONSEILS DE LECTURE

* COPIN-ALBANCELLILe drame maçonnique. Le pouvoir occul-te contre la France, Réimp. de l’édition de 1908, par éd.A. Barruel, 2000, p. 300 B.P. 8 - 33650Cabanac. www.barruel.com. L’auteur: ancien franc-maçon, il lança

une vaste campagne de dénonciation de laFranc-Maçonnerie afin de dévoiler ses butssecrets.

* DOMENICO MARGIOTTA

Le Palladisme. Culte de Satan Luciferdans les triangles maçonniques, Réimp. de l’édition de 1895, par éd.A. Barruel, 2001, p. 220 B.P. 8 – 33650CabanacL’auteur: ancien franc-maçon de Naples.

Ses ouvrages eurent beaucoup de succès; il aconnu personnellement Albert Pike etAdriano Lemmi (ancien Grand-Maître duGrand Orient d’Italie). Il démontre que laFranc-Maçonnerie est une secte satanique.

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La réponse du Sel de la terre à Sodalitium àpropos du sédévacantisme et de la Thèse deCassiciacum

Dans le numéro 52 de notre revue (jan-vier 2002) nous avions répondu à un

“Petit catéchisme du sédévacantisme” publiédans le n° 36 de la revue dominicaine – fidè-le à Mgr Lefebvre – Le sel de la terre. Cetété, les dominicains dAvrillé ont répondu ànotre article (n° 41, été 2002).

Sodalitium se réjouit de cette réponse,qui n’est pourtant pas exempte de trait polé-miques contre nous; le fait même que nos ar-gumentations aient été prises en compte etqu’il en ait été fait mention, donc que ledébat soit accepté, est à considérer commepositif.

Dans une lettre du 5 juin, les Pères domi-nicains nous ont demandé de publier leur ré-ponse dans Sodalitium. Sodalitium ne s’y op-pose pas, et propose même une publicationintégrale, pour les lecteurs des deux revues,de nos arguments différents, à condition tou-tefois qu’il y ait réciprocité! Sodalitium pu-bliera les réponses du Sel de la terre lorsquenos confrères publieront celles deSodalitium… Pour le moment, limitons-nous, les uns et les autres, à faire connaîtreindirectement mais fidèlement à nos lecteursrespectifs, les arguments de l’adversaire.

Entre temps, nous nous promettons derépondre le plus tôt possible… à la réponsede Dominicus… A bientôt!

Nouveau démenti au docteur Heller et à sarevue Einsicht

Nous avions publié dans le dernier nu-méro de Sodalitium (n° 53, pp. 46-47) un dé-menti d’une calomnie publiée par la revuesédévacantiste allemande Einsicht. Mal-heureusement, non seulement son directeur,le docteur Heller, n’a pas considéré de sondevoir de publier notre démenti, mais il amême renouvelé la calomnie en question.Einsicht écrit de nous: “[pour l’Institut] non-obstant son [de Jean-Paul II] apostasie, onne peut pas dire que le Siège apostolique soitvacant (et en toute cohérence, l’Institut avait

R. P. Ch. de MAILLARDOZ S. J.

LES SEPT PÉCHÉS CAPITAUX DE

L’ENFANCEPréface de S. G. Mgr Julien

Évêque d’Arras,Membre de l’Institut.

CONTROVERSES

Couverture du livre duP. de Maillardoz s.j.

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mis le blason de Jean-Paul II sur son site pré-cédent” (p. XXXII – 155). Nous devons doncle répéter, cette nouvelle est complètementfausse. Le sit internet où se trouvait (dansun ‘link’) le blason de Jean-Paul II ‘heureu-sement régnant’ n’a jamais été un site del’Institut ou de Sodalitium; notre adresseélectronique est signalée dans chaque numé-ro de notre bulletin; cette adresse n’a jamaisété celle à laquelle Einsicht fait référence.

Pour ce qui est du fond de la question,nous nous limitons à observer:

1) Einsicht pensait que la Thèse du PèreGuérard était morte, parce que le PèreGuérard l’avait (quasiment) abandonnée etque nous démontrions – en collaborant avecdes sédévacantistes – que nous ne la soute-nions que par respect pour la mémoire duPère Guérard. Einsicht, en l’occurence,manque d’informations. Non seulement iln’est pas vrai que le Père Guérard (ensei-gnant au Latran et non à la Grégorienne) ait(quasiment) renoncé à la Thèse mais, en cequi nous concerne, Sodalitium a toujours pas-sionnément défendu – par de nombreux argu-ments – cette position. Nous avons même ex-pliqué dans quelles limites nous considéronspossible la collaboration avec les sédévacan-tistes complets (éditorial du n° 26, décembre1991). Enfin, le Père Barbara, donné parEinsicht pour sédévacantiste simpliciter, avaitadhéré publiquement à la Thèse.

2) Einsicht fausse notre position. Selon larevue allemande, nous soutiendrions que “lesiège apostolique n’est pas vacant”, donc que“Jean-Paul II est pape s’il enseigne quelquechose d’orthodoxe et qu’il ne l’est pas s’il en-seigne l’hérésie”. Ce n’est absolument pas laposition de la Thèse, mais celle de laFraternité Saint Pie X. Selon nous Jean-PaulII n’est pas Pape, dans le sens qu’il n’a pasl’autorité divinement assistée: nous ne le ci-tons pas au canon de la Messe. Il n’est pas vraique, pour nous “simplement il n’est pas permisd’obéir à ses lois hérétiques”: il n’a pas le pou-voir législatif. Dire qu’il n’est pas “Pape for-maliter” veut dire – pour répondre par oui oupar non – que, non, il n’est pas Pape.

3) Einsicht présente comme unique solu-tion donnée par la Thèse celle de la conver-sion de Jean-Paul II: “les tenants de la Thèse,comme l’abbé Ricossa, attendent donc queJean-Paul II se convertisse. Il suffit d’avoirfoi en la Providence contrairement à nous sé-dévacantistes”. Le docteur Heller ne peut

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ignorer – parce que l’abbé Ricossa le lui aécrit personnellement – que la Thèse exposedeux solutions: le retour de l’occupant duSiège apostolique à la profession intégralede la foi, ou bien l’intervention de la hiérar-chie pour constater l’hérésie formelle deJean-Paul II, et ce en un Concile général im-parfait, auquel reviendrait aussi l’électiond’un Pontife légitime. Si Einsicht objecteque la “hiérarchie est déchue” elle aussi etque cela exclue la possibilité d’un retour pu-blic à la foi de certains de ses membres, qu’ilnous explique pourquoi il a considérécomme légitime le retour à la profession pu-blique de foi de Mgr Ngo-Dinh-Thuc, lequelavait pourtant auparavant reconnu VaticanII et la légitimité de Paul VI et de Jean-PaulII. Si l’apostasie est un “péché irréversible”comment se fait-il qu’il n’ait pas été irréver-sible pour l’évêque vietnamien?

4) Einsicht parle avec assurance d’un“enseignement de l’Eglise en ce qui regarde leproblème du ‘papa hæreticus’”. Il ne semblepourtant pas que le docteur Heller connaissecet enseignement. D’abord, parce que cetenseignement n’existe pas (il n’existe quedes opinions de théologiens, mais l’Eglise nes’est pas prononcée définitivement) et ensui-te parce qu’il ne semble pas connaître grandchose des diverses opinions des théologiens.Il va jusqu’à écrire que “l’idée de Bellarminque le pape hérétique est déposé est complé-tée par Cajetan par la formule deponendumest, qui signifie que cette sentence doit êtrerendue publique devant l’Eglise et que de lapart de l’Eglise il doit être déclaré déposé,parce que l’Eglise est une communauté juri-dique, visible, qui doit connaître clairementl’état de son chef”. Les derniers mots du doc-teur Heller nous font espérer qu’il pourracomprendre notre position, qui se fondeprécisément sur l’exigence d’une déclarationde l’Eglise, mais il n’est pas exact de direque Cajetan a complété Bellarmin puisqueCajetan a vécu avant Bellarmin et que cedernier s’opposa à la thèse du premier!

5) Selon Einsicht la déclaration de dépo-sition par l’Eglise fut faite par Mgr Thuc:c’est la déclaration de Münich. Le PèreGuérard chercha en effet à convaincre MgrThuc de formuler sa déclaration de façonplus exacte, mais sans y parvenir. En dehorsde toute autre considération, la valeur légalede la déclaration de Münich laisse interdit, sil’on pense que – en déclarant la vacance du

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Siège – Mgr Thuc utilisa le titre d’Evêque deBulla Regia, à lui conféré par… Paul VI!

6) Enfin, Einsicht s’oppose à la Thèseparce qu’elle empêcherait la solution de lacrise, laquelle viendrait d’une élection papa-le. Nous voudrions savoir clairementd’Einsicht qui sont, dans la situation actuel-le, les électeurs habilités à élire un Pape.

La Voie

Nous étions sur le point de porterSodalitium à l’impression lorsque – par cour-rier électronique – nous est parvenu le der-nier numéro (novembre par conséquent) dela revue sédévacantiste, La Voie, fondée parMelle Myra Davidoglou et reprise par l’abbéFrancesco Paladino. Notre attention a étéattirée par l’article intitulé le sédévacantismeet le conclavisme qui traite plus ou moins lemême sujet que ce numéro de Sodalitium(L’élection du Pape). Dans La Voie, l’auteurpréconise – comme solution à la situation deSiège vacant – l’intervention surnaturelle desaint Pierre, se fondant sur les prophétiesd’Elisabeth Canori Mora. L’abbé Paladino,répondant à l’abbé Ricossa (mais sans citerla source, c’est-à-dire l’opuscule de l’abbéRicossa “L’abbé Paladino et la Thèse deCassiciacum”) nous accuse d’avoir faussé sapensée au sujet du conclavisme et même delui avoir fait dire juste le contraire de cequ’il pense: “Comment peut-on dire que l’au-teur de Petrus es tu ? [l’abbé Paladino] ‘incli-ne visiblement’ pour le conclavisme quand,en réalité, il affirme que cela serait ridicule entronquant la citation, évidemment”. Désoléde devoir contredire l’abbé Paladino, maisnotre avis demeure le même: au sujet duconclavisme il n’a pas encore aujourd’huiune position claire, du moins pour nous quisommes durs de la comprenette. L’abbéPaladino dit à raison que pour procéder àune nouvelle élection il faudrait une déclara-tion de l’Eglise. En cela nous sommes d’ac-cord – nous l’avons déjà écrit – et, qu’il nenous en veuille pas, sur ce point l’abbéPaladino se rapproche de la Thèse deCassiciacum et s’éloigne du sédévacantismecomplet (c’est un compliment!). Mais cequ’entend l’abbé Paladino par Eglise, cen’est pas clair pour moi. Qui doit faire cettedéclaration? A notre avis, les Cardinaux oules Evêques résidentiels qui, pour le mo-ment, ne le sont que materialiter, lorsqu’ils

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reviendront à la profession publique de lafoi (ce pour quoi ils auront l’autorité forma-liter pour accomplir un tel acte). L’abbéPaladino toutefois refuse cette éventualité.Quels sont donc, pour lui, les personnes ha-bilitées à accomplir cette déclaration pour-tant nécessaire?

Ensuite l’abbé Paladino qualifie de ridi-cules les “élections papales” faites jusqu’icipar les conclavistes; mais tout conclaviste estconvaincu que les élections faites par lesautres sont ridicules alors que celle qu’il pré-voit sera enfin sérieuse. Pour savoir si l’abbéPaladino s’oppose au conclavisme non seule-ment pour des motifs d’opportunité (de faitles conclaves ne sont pas sérieux, de fait ilsdivisent au lieu d’unir, de fait on n’arrive pasà réunir tous les catholiques qui pourraientparticiper au conclave, de fait les “papes”s’excommunient réciproquement etc., c’estpourquoi “l’Eglise qui pourrait subvenir elle-même à ses besoins” – et voici le conclavisme– de fait n’y arrive pas) mais aussi pour unmotif théologique, nous voudrions ap-prendre de lui clairement si des laïcs, desprêtres (romains) ou des Evêques non rési-dentiels pourraient, en théorie, être actuelle-ment les électeurs du Pape. L’abbé Paladinorépondra-t-il oui? Il est alors un conclaviste.Répondra-t-il non? Encore une fois il vas’approcher de notre position (et nous allonslui adresser à nouveau nos compliments!L’abbé Paladino – qui jusqu’ici n’a pas préci-sé ces points parce que, peut-être, il n’a pasles idées claires à ce propos (et c’est ce quenous voulions dire dans notre opuscule) –pense trouver une solution dans une voie“surnaturelle”, celle d’une élection papalefaite par le Ciel. Nous répondons à cette hy-pothèse, dans ce numéro de Sodalitium etnous y expliquons pourquoi elle n’est pasviable. L’abbé Paladino n’ignore pas nos ob-jections (“certains ont objecté que cela n’estpas possible car si saint Pierre choisissait di-rectement un nouveau Pontife, il inaugureraitune nouvelle lignée apostolique, et ce ne se-rait donc plus la même Eglise”). Et voici saréponse: “il nous semble que cette objectionn’a aucun fondement car il faut, à notre avis,entendre cette prophétie dans le sens que saintPierre interviendra d’une manière extraordi-naire pour faire comprendre quel devra êtrele nouveau Pontife à élire ou quelque chosede semblable”. La réponse de l’abbéPaladino est raisonnable: il exclut, tout

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comme nous, que saint Pierre (ou qui que cesoit) puisse élire directement le Pape. Ilpourrait seulement convaincre les électeursde voter pour telle personne. Mais de cettefaçon nous revenons à la question précéden-te à laquelle l’abbé Paladino n’a pas encorerépondu: qui sont-ils ces électeurs? Existent-ils déjà en acte (thèse conclaviste) ou seule-ment en puissance (thèse de Cassiciacum)?Que l’abbé Paladino nous dise s’il est – fon-damentalement – conclaviste ou bien s’il est– fondamentalement – pour la Thèse…Tertium non datur.

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Aux nouveaux lecteurs. Certains parmivous reçoivent pour la première foisSodalitium, revue envoyée gratuite-

ment à tous ceux qui le désirent. Sodalitium(qui s’inspire dans son titre du Sodalitiumpianum, l’association anti-moderniste fondéepar Mgr Benigni avec l’approbation de St PieX) naquit en 1983, comme revue du Prieuréde Montalenghe et ensuite de tout le districtitalien de la Fraternité Saint Pie X, la congré-gation fondée par Mgr Lefebvre. En 1985, lesfondateurs et les autres rédacteurs de larevue quittèrent la Fraternité pour fonderl’Institut Mater Boni Consilii. Notre petitInstitut, qui se compose d’un évêque, de sixprêtres, sept séminaristes et plusieurs laïcs,est présent dans trois pays: en Italie, avecdeux maisons (près de Turin et près deRimini), en France (avec une maison dans laNièvre) et en Belgique (avec une maisondans les Flandres). Nos activités sont nom-breuses: nous avons un séminaire à VerruaSavoia (région de Turin), une maison d’édi-tion, le Centro Librario Sodalitium, qui a pu-blié plusieurs titres et édite quatre revues(Sodalitium, Le Bon Conseil, Opportune im-portune et, dernier né, L’Albertario) et, par-fois avec la collaboration de centres culturels(le Federici à Rimini, le Zanarini à Bologne,section du précédent, L’Albertario à Milan,Gli amici di Sodalitium à Rome), nous orga-nisons de nombreux colloques ou confé-rences un peu dans toutes les villes d’Italie.Sur la dernière page de la présente revue,vous pourrez voir dans quelles localités nousnous rendons régulièrement pour célébrer la

Vie de l’Institut

Sainte Messe, selon le rite, en langue latine,promulgué par le Pape Saint Pie V (celui cé-lébré partout avant la révolution liturgiquede 1969). Ceux d’entre vous vivant non loinde ces endroits auront la possibilité de ren-contrer ainsi un de nos prêtres, à l’occasionde son passage pour la célébration de laMesse. Pour les jeunes (enfants ou adoles-cents), nous organisons des camps de vacanceselon la méthode de la Croisade Eucha-ristique et la pédagogie salésienne; pour lesadultes, nous donnons les Exercices Spi-rituels, en Italie et plus encore en France,selon la méthode de Saint Ignace. Enfin, uneAssociation Mater Boni Consilii a pour butl’aide aux nécessiteux et la pratique desœuvres de miséricorde. Nous sommes catho-liques, apostoliques, romains; mais face à lacrise ouverte par le Concile Vatican II, noussoutenons que le nouvel enseignement conci-liaire, tout comme les réformes canoniques,liturgiques et disciplinaires faisant suite auConcile, sont en contradiction avec l’ensei-gnement infaillible et irréformable del’Eglise. Il s’ensuit que nous ne pouvons re-connaître l’Autorité de ceux qui ont promul-gué ces réformes: le Siège apostolique est for-mellement vacant, et le sera tant que ses oc-cupants ne reviendront pas à la professionpublique et intègre de la Foi (c’est la Thèsedéfendue par le défunt Père M.-L. Guérarddes Lauriers, religieux dominicain et théolo-gien thomiste, autrefois enseignant à l’Uni-versité Pontificale du Latran à Rome). A lasuite de toute l’école sociale catholique, à la-quelle le Pape Léon XIII donna une grandeimpulsion, nous reconnaissons dans la“judéo-maçonnerie” (l’expression est de MgrJouin, loué à maintes reprises par les PapesBenoît XV et Pie XI) le principal adversairede l’Eglise dans son œuvre d’évangélisationdu monde et de salut des âmes: l’Institut or-ganise des études sur ce phénomène, et surtoutes les erreurs et les hérésies opposées àl’Eglise. Quiconque désire en savoir plus peutprendre contact avec notre revue.

Séminaire Saint Pierre Martyr. Le 14septembre, fête de l’Exaltation de la SainteCroix, nos séminaristes sont rentrés àVerrua pour y suivre, du 16 au 21 sep-tembre, les Exercices Spirituels donnés parles abbés Murro et Giugni. Le 21 septembre,et non sans quelques péripéties, arrivait àVerrua Frère Joseph-Marie, bénédictin deFaverney. Depuis vingt ans en effet, à

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Faverney, en Franche-Comté, existe unprieuré bénédictin fondé par le Père PierreVerrier. Dans sa Lettre aux amis et bienfai-teurs (n° 36, 14 septembre 2002), le PèreVerrier recommande aux prières de ses lec-teurs le Frère Joseph-Marie venu en Italieafin de poursuivre ses études préparatoiresau sacerdoce. Dans le même numéro, lePère Verrier prend position en faveur de laThèse sur la vacance formelle du Siège apos-tolique. Le 24 septembre, ils étaient doncsept séminaristes à reprendre les études auSéminaire Saint Pierre Martyr.

Nouveaux membres de l’Institut. Commele séminaire, l’Institut s’est accru en nombre.Le 15 août, fête de l’Assomption, à Raveau,l’abbé Murro recevait dans l’InstitutMademoiselle Elisabeth Langlet. Par ail-leurs, à l’issue des Exercices Spirituels citésci-dessus, l’abbé Ricossa recevait dansl’Institut l’abbé Ugo Carandino de la Casa S.Pio X, à San Martino dei Mulini (Rimini).

La maison de Verrua… on en voit jamaisla fin, et ça continue! Les maçons ont com-mencé la construction de la bibliothèquedans les locaux affectés autrefois au fenil; enplus de la bibliothèque, nous devrons amé-nager des chambres pour les séminaristes,les hôtes ou les retraitants. La réfection d’unmur et d’un portail d’entrée – qui mena-çaient ruine – a été effectuée en octobre pardes maçons bénévoles, à qui va notre recon-

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naissance. Merci Michel, Christian, Philippeet Vincent! Enfin, une triste nouvelle pourceux qui connaissent notre maison: Pluto,notre fidèle chien de garde qui nous a tenucompagnie pendant des années, est mortaprès 11 ans de bons et loyaux services...

Italie. Les fidèles romagnols ont effectuédeux pèlerinages paroissiaux: le premier, ledimanche 18 août, en se rendant à Sas-socorvaro (PU) pour vénérer les reliques deSaint Valentin et à Montecerignone (PU),devant l’urne du corps du BienheureuxDomenico Spadafora; le second s’est dérouléle 22 septembre au sanctuaire de la SainteVierge de Carbognano (RN). Le 28 février,une sympathique réunion a eu lieu à Cassana,près de Ferrare. Nouveaux et anciens amis deRimini et de Ferrare s’y sont retrouvés, oubien ont fait connaissance, guidés par lesabbés Carandino et Ricossa. Après une ins-truction spirituelle donnée par l’abbé Ricossasur les fins dernières, on s’est revigoré l’espritavec la récitation du rosaire, et le corps…avec un repas entre amis. Nous remercionsSabrina Baroni qui a organisé la journée.Samedi 19 octobre, a eu lieu le pèlerinage ha-bituel pour les émiliens et les romagnols à laMadone de San Luca, Sanctuaire qui domine(et protège) Bologne. Nous avons honoré lemois du Rosaire en récitant les trois chapeletssur le chemin du Sanctuaire.

Face au Dôme de Milan le 19 octobre,l’abbé Giugni a conclu par une prière unemanifestation publique, invitant à suivrel’exemple des croisés et des chouans contreles troupes napoléoniennes; la journée étaitorganisée par Padania cristiana et par lesVolontari verdi, pour la préservation del’identité catholique de la ville (cf. LaPadania, 20/21 octobre 2002, pp. 1 et 8). Bienévidemment, l’abbé Giugni n’est pas d’accord– ainsi que tout l’Institut – avec la malheureu-se formule d’une église ambrosienne “auto-nome de celle de Rome”, soutenue à cette oc-casion par le député Borghezio (ibidem, p. 8).Le quotidien communiste L’Unità a égale-ment parlé (mal! – et c’est bon signe…) decette manifestation (l’Unità 20/10/2002).

L’Institut et la presse. Le n° 213 de Orion(juin 2002) publie une intervention de l’abbéNitoglia et une “brève réponse” de MaurizioMurelli. Dans ce numéro de Sodalitium vouspouvez lire la réplique de l’abbé Nitoglia àMurelli. la Padania du 13 juillet 2002 a rap-porté la position de l’Institut sur la nomina-

L’abbé Carandino entrant dans l'Institut le 21 septembre à Verrua

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tion de Mgr Tettamanzi à la tête du diocèsede Milan. Sur Casalecchio News, l’abbéCarandino a été interviewé par AlessandroOri et Giulio Nesi (n° 8, octobre 2002, p. 7).Le 40ème anniversaire du Concile a été l’oc-casion de parler aussi de la thèse “sédévacan-tiste”. Messori parle de la “cohérence” decette thèse sur le Corriere della Sera du 21octobre (p. 35). Raimondo Gatto, sur laPadania, écrit de son côté: “Cette affirmationde Jésus [Matth. XVI, 15-18], d’un côtéconstitue la plus grande garantie que le magis-tère éternel de l’Eglise catholique, excepté leConcile Vatican II, ne peut tromper ni s’êtretrompé, de l’autre soulève des doutes sur l’au-torité actuelle qui soutient manifestement lecontraire” (18 octobre 2002, p. 17). Il Restodel Carlino du 5 octobre 2002 (p. III) signalela présence à Ferrare – en plus de laFraternité Saint Pie X – de notre Institut. Lebulletin Gloire à Marie (15 septembre 2002,pp. 3-5) intervient sur la question débattuedu “Secret de La Salette”, en prenant ses dis-tances par rapport à l’Institut. Gloire à Marieadmet que l’Eglise s’est plusieurs fois pro-noncée à ce propos, mais estime que lescondamnations du Saint-Office doivent êtreconsidérées comme abrogées après le décretde la Sacrée Congrégation pour la Doctrinede la Foi du 14 octobre 1966 (sous Paul VI,pourtant).

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Ont parlé de l’Oratoire Saint Grégoire-le-Grand de Rimini le Corriere di Rimini du15 juillet, dans l’article “Un giorno tra sacroe profano” et La Voce della Romagna du 2-9-2002 dans l’article “Due giorni intensi, Fracerimonie e ricordi”. L’abbé Carandino a étéinterviewé le 4 septembre (sur l’immigra-tion) et le 2 octobre (sur la bataille deLépante) par Radio Padania Libera; le 25octobre durant une interview à Tele Padaniail a parlé de l’islamisme. Deux articles del’abbé Carandino, sur la question desCrucifix dans les édifices publics, ont été pu-bliés sur la Padania du 1er et du 31 octobre.

Sodalitium. Le quotidien de VittorioFeltri, Libero (25 juillet 2002, pp. 1 et 35), si-gnale à ses lecteurs “un journal clandestin,ou presque, Sodalitium, petite revue sincèrede l’homonyme Centro Librario. Réalité hy-percatholique – ajoute l’auteur de l’article,Alberto Mingardi – et pourtant (eux-mêmesdiraient: justement pour cela) critique, hyper-critique en ce qui concerne l’Eglise conciliai-re”. L’article de Sodalitium qui a suscité l’in-térêt du recenseur est celui de l’abbé Giugnisur Guareschi et le Concile, publié dans ledernier numéro de l’édition italienne denotre bulletin (et dans ce présent numéroaux pp. 18 à 36). Une belle recension du der-nier numéro de Sodalitium a été publiée parle Sole delle Alpi dans le numéro du 24 août.L’Ultima Crociata (n° 9, novembre 2002),dans un bel article de Italo Merli, fait allu-sion à la couverture du dernier numéro deSodalitium (la statue de l’Immaculée fusilléepar les soldats israéliens à Bethléem).

Centro Librario Sodalitium. La presti-gieuse Rivista di studi politici internazionali[Revue d’Etudes politiques internationales](n° 275 – 3/2002, juillet-septembre, p. 513) asignalé la réédition, par notre Centro Librario,du livre classique de Lazare sur L’antisémitis-me, ainsi que (sur le n° 276 – 4/2002, p. 689)l’ouvrage de l’abbé Nitoglia, L’esoterismo. LeC.L.S. a réédité pour le compte du CentroStudi Davide Albertario le livre “In prigione innome di Gesù Cristo”, écrit dans les années 30par Mgr Pecora (neveu d’Albertario), qui re-trace admirablement la vie et l’activité deDon Albertario. Notre Centro assure égale-ment la diffusion des nombreux travaux del’abbé Nitoglia, publiés chez d’autres éditeurs,en italien.

Activités estivales. Du 8 au 22 juillet s’estdéroulé à Raveau le camp Saint Louis de

Photo de groupe prise lors du camp de la Croisade Eucharistique

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Gonzague de la Croisade Eucharistique. Lavie quotidienne y est centrée sur la prière, enparticulier la Messe et la Sainte Eucharistie,et sur le jeu. Mais il y a aussi les journées“spéciales”: matinée d’adoration eucharis-tique le samedi 13, pèlerinage aux reliques desainte Marie-Madeleine à Vézelay le 11, visi-te au Château de Saint-Fargeau le 16, le jeude piste dans la forêt de la Chartreuse deBellary le 18, et pour terminer, la veillée fina-le avec représentation théâtrale le dimanche21. C’est depuis 1991, date de l’ordination del’abbé Giugni qui en prit aussitôt la direction,que ces camps de la Croisade Eucharistiquede l’Institut ont lieu chaque année.

Du 8 au 26 juillet a eu lieu le camp Saint-Joseph, organisé par les sœurs du Christ-Roi, avec l’abbé Murro pour aumônier.Cette année les fillettes françaises, italienneset belges se sont retrouvées à Chantelouve, àproximité du Parc National des Ecrins, pourpasser ensemble de belles journées parta-gées entre promenades, jeux, chants et avecl’incontournable pèlerinage à La Salette,pour prier Notre-Dame, réconciliatrice despécheurs. Le dernier jour les habitants deChantelouve ont souhaité écouter des chants(de montagne, folkloriques et religieux) exé-cutés par nos campeuses sur la place prochede la mairie; ils ont aussi assisté à la tradi-tionnelle veillée finale.

Début août, dans les montagnes deSavoie, au col de la Croix Fry prèsd’Annecy, s’est déroulé le camp St Françoisde Sales: la petite troupe - une petite dizainede garçons, l’abbé Cazalas et trois sémina-ristes - n’a pas été arrêtée par les caprices dutemps. Les jours de soleil, montagne, lesjours de pluie, visites d’Annecy ou autres:siège épiscopal de St François de Sales, mu-sées... pour connaître sa vie, l’histoire de laSavoie, la façon de vivre en montagne autre-fois, et la faune montagnarde... Chaque soir,une petite conférence sur un sujet religieux:la prière, les objections contre l’Eglise, lesfins dernières, la situation actuelle del’Eglise, etc... de quoi réfléchir et poser desquestions... Pour sortir de l’ordinaire: leparc-aventure de Thônes, un vrai parcoursdu combattant de plus de deux heures, sus-pendus dans les arbres; et, le dernier jour (le13 août), un pèlerinage au sanctuaire marialde la Savoie, la Bénite-Fontaine: deuxheures de marche avant d’arriver au sanc-tuaire et y célébrer la Messe... Le lendemain,

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retour à la maison, fatigués, mais contents,et parfois même surpris du bien reçu durantces dix jours. Merci aux Savoyards qui ontaidé au bon déroulement du séjour, et parti-culièrement à l’aide généreuse et efficace deMr et Mme Petit. Si Dieu veut, à l’annéeprochaine, à la même époque!

Conférences. Le 21 juillet, à Raveau,l’abbé Ricossa a donné une conférence pourles amis de la région sur le thème: Le n° 48 deSodalitium (avril 1999!) en question.Pourquoi ai-je parlé de l’Apocalypse, duSecret de La Salette et de la ‘prophétie’ deSaint-François?. Le soir du 7 octobre (fête dela Vierge du Rosaire et de N.-D. desVictoires), l’abbé Ricossa a parlé sur lethème: “7 octobre 1571: la flotte chrétienne ar-rête l’invasion turque dans les eaux deLépante. Aujourd’hui l’Italie et l’Europe sontconfrontées à une nouvelle invasion islamique.Comment l’affronter?” La rencontre était or-ganisée par le Circolo territoriale di Loano(SV) de Alleanza nazionale, et l’orateur a étéprésenté par le professeur GiampaoloStradella. Le 12 octobre à Brembate (BG)l’abbé Giugni a parlé de Famille chrétienneface à l’Islam: quel futur? avec la députéeCarolina Lussana (LN) et Daniele Belotticonseiller à la Région Lombardie (LN). Larencontre était organisée par la section localede la Lega Nord. L’abbé Carandino a parlé le11 novembre à la bibliothèque provinciale DeMeis de Chieti sur le thème: La Révolutioncontre la Chrétienté; la conférence était orga-nisée par Amicizia Cristiana et présentée parMarco Solfanelli, président de l’association.Le 16 novembre à Motta Visconti (PV)l’abbé Giugni est intervenu au colloqueMariages mixtes: quel futur pour les enfantsorganisé par l’Association Donne di Milano[“Femmes de Milan”], parlant de La traditionitalienne et les mariages mixtes. Les interven-tions des autres orateurs ont été celles del’avocate Simona Norrieri (Le droit de la fa-mille), de Zaira Galli (La médiation familiale:ressource familiale dans les complexités fami-liales), la modératrice était Clara Modena. Lemême jour à Lyon, l’abbé Murro a entretenuses auditeurs sur le thème: La nouvelle Messe,qu’en penser?. Le 23 novembre à Bologne,l’abbé Ricossa a parlé des quarante ans duConcile, dans une rencontre organisée par leC.S. Federici et par le Centro LibrarioSodalitium intitulée: 1962-2002: 40 ans aprèsle Concile Vatican II.

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Centro Studi Giuseppe Federici : leCentro Studi a tenu un stand le 15 septembreà la fête de la Lega Nord à Venise; le quoti-dien Il Gazzettino en a parlé dans un articledu 16 septembre. Le 5 octobre il a organiséun colloque à Rimini sur le thème: Lépante,7 octobre 1571: la victoire de la Chrétienté.Un message de salutation envoyé par le dé-puté Federico Bricolo a été lu, et sont ensui-te intervenus l’abbé Giugni (Saint Pie V, lePape de Lépante), le professeur Zanpolo daCorte dei Santi (Lépante: croisement del’Histoire) et Lorenzo Busi (Pour une nou-velle Lépante). Le 9 novembre, toujours àRimini, a eu lieu un colloque organisé par leCentro Studi Federici; il avait pour thèmeDu Risorgimento au Mondialisme... En ce135ème anniversaire de la victoire pontificaleà Mentana (3 novembre 1867). Il s’est dérou-lé en deux parties. D’abord le Dr PieroRaggi (L’héroïsme des armés Pontificales àMentana) et l’abbé Carandino, de notreInstitut, (Regnare Christum nolumus: leNouvel Ordre Mondial contre la Royauté duChrist) ont présenté la seconde édition dulivre de Piero Raggi, La neuvième croisade:les volontaires de Pie IX à la défense deRome (1860-1870). Puis un débat s’est ou-vert (Des volontaires pontificaux aux résis-tances antimondialistes actuelles) auquel ontparticipé Paolo Grimoldi et Stefano Corti(Movimento Giovani Padani), Pietro Ferrari(Azione Giovani de Teramo) AlainQuataert (dirigeant du Vlaams BlokJongeren, des Flandres); l’animateur dudébat était Gianluca Stefani, dirigeant deAzione Giovani de Rimini.

Centro Studi Davide Albertario: il a or-ganisé le 24 octobre à Milan, une conférencesur le thème Politique de guerre U.S.A. enAfghanistan et Irak: ce que les médias ne di-sent pas; le rapporteur était le Dr MauroBottarelli, journaliste et auteur de plusieurslivres de géopolitique. Le dimanche 24 no-vembre l’abbé Giugni, en qualité d’assistantspirituel du Centro Studi, est intervenu à unimportant congrès à l’occasion du centenairede don Albertario, qui s’est déroulé àFilighiera (PV), pays où il était né.Rappelons que don Albertario sera commé-moré par le CSDA par un colloque à Milan(placé sous le patronage à la fois de laRégion Lombardie et de la Province deMilan), le samedi 14 décembre dans la salledes Affreschi via Vivaio 1, à 15 heures.

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Signalons enfin que depuis le mois d’octobrele Centro Studi Davide Albertario publie unepetite revue L’Albertario; les personnes dé-sirant la recevoir peuvent la demander àl’adresse suivante: Centro Studi DavideAlbertario, via Vivarini 3, 20141 Milano,Tél.: 0161.839.335, Fax: 0161.839.334; email:[email protected]

Exercices Spirituels de Saint Ignace. “J’aiune affection extrême pour ces Exercicesfaits dans la solitude; parce que c’est à euxque je reconnais devoir ma conversion et larésolution de quitter le monde” (SaintAlphonse). Comme toujours, l’été est le mo-ment le plus favorable pour pratiquer lesExercices. Nous avons eu de nombreux re-traitants à la Maison Saint-Joseph, du 1er au6 juillet 2002 (25 personnes: 14 dames et 11messieurs), aux Exercices donnés par lesabbés Murro et Ricossa. A Raveau, ont étéprêchés deux sessions d’Exercices par lesabbés Murro et Giugni: du 29 juillet au 3août pour sept dames, et du 5 au 10 aoûtpour sept messieurs. A Verrua Savoia,l’abbé Nitoglia et l’abbé Ricossa ont donnéeux aussi deux sessions d’Exercices: du 19 au24 août pour six dames et du 26 au 31 aoûtpour sept messieurs. Pendant qu’à Verrua sedéroulaient les Exercices pour dames, à laMaison Saint-Joseph treize messieurs sui-vaient les Exercices prêchés par les abbésGiugni et Cazalas. Le mois de septembre estsouvent dédié aux Exercices des religieuses,des prêtres et des séminaristes avant la re-prise de la nouvelle année scolaire. Cettefois les Exercices des Sœurs du Christ-Roi,dans leur maison mère, se sont déroulés du 8au 16 septembre, et ont été prêchés parl’abbé Murro, l’abbé Ricossa et la MèreSupérieure; ceux des séminaristes (et autrehôtes de la maison, ainsi que l’abbéCarandino de la Casa San Pio X) ont eu lieudu 16 au 21 septembre, sous la direction desabbés Murro et Giugni. Du 16 au 20 octobre

Les Exercices Spirituels à Serre-Nerpol en juillet

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l’abbé Cazalas a prêché les Exercices de ren-trée aux élèves de la Maison Saint-Joseph.Le 1er novembre à Raveau l’abbé Murro etl’abbé Giugni ont prêché une journée de ré-collection pour tous ceux qui ont déjà fait lesExercices Spirituels: malgré la saison avan-cée, les fidèles sont venus nombreux des ré-gions proches et lointaines (même de Lyon)pour restaurer spirituellement leurs âmes.

Anniversaires. Le 6 juillet, à la MaisonSaint-Joseph, l’abbé Murro a célébré laMesse de Requiem pour l’âme du PèreVinson, fondateur des Sœurs du Christ-Roi,à l’occasion du troisième anniversaire de samort. Une heureuse nouvelle: le 29 juin,l’abbé Anthony Cekada fêtait, à Cincinnati(Ohio) ses 25 ans de sacerdoce; Sodalitiumadresse à son confrère américain ses vœuxavec le traditionnel: ad multos annos!

Baptêmes. Le 21 septembre l’abbéMurro a baptisé Louis Gatté, fils des épouxBenoît et Clarisse Gatté à Hyères. Le mêmejour l’abbé Giugni a baptisé à Serre-NerpolJosepha Louis.

Première communion. Dimanche 7 juillet2002, à la Maison Saint-Joseph, CarolineMontcharmont a reçu la première commu-nion des mains de l’abbé Ricossa.

Défunts. Comme nous l’avions déjà an-noncé dans le numéro précédent, le di-manche 9 juin 2002 est décédée à l’hôpitalde la SS. Annunziata di Ponte à Niccheri(Florence) Madame le Professeur LilianaBalotta. Elle avait été hospitalisée le lundiprécédent pour une embolie pulmonaire,après avoir assisté pour la dernière fois à laSainte Messe célébrée par l’abbé Ricossa, etavoir reçu la sainte communion. Avec leProfesseur Balotta disparaît un des person-nages les plus connus – en Italie – du mouve-ment catholique qui s’est opposé à VaticanII. Fidèle de la première heure (elle partici-pa aux Pèlerinages romains des premièresannées soixante-dix) elle fut durant delongues années l’infatigable secrétaire de lasection florentine de l’association Una Vocedicentes et la rédactrice du bulletin du mêmenom. L’expérience acquise à l’Université dePadoue où elle avait été l’organisatrice denombreux concerts et rencontres culturellesavec les artistes et les poètes les plus repré-sentatifs, s’avéra très utile lorsqu’il s’agit derépéter l’expérience à Florence, mais alorsen défense de la Foi. C’est elle, par exemple,qui favorisa la venue de Mgr Lefebvre à

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Florence le 15 février 1975, quand il tint lafameuse conférence au cours de laquelle ilqualifia le nouveau missel de “Messe deLuther”, et le lendemain célébra la Messesolennelle en la Basilique de San Lorenzo(dont le recteur était alors Mgr Setti). L’ho-mélie de la Messe et la conférence furentpubliées ensuite par Una Voce Florencedans l’opuscule précisément intitulé LaMesse de Luther, l’adresse était celle de MlleBalotta, via Brandini 30.

En 1985, quand nous quittâmes laFraternité Saint Pie X, Mlle Balotta n’hésitapas à prendre notre défense, nous invitant àcélébrer dans son hospitalière maison flo-rentine, ce que nous avons fait jusqu’à samort. Cette décision lui coûta beaucoup,non seulement à cause de l’affection qu’elleéprouvait pour Mgr Lefebvre, mais aussi dufait de l’isolement qui s’ensuivit pour elle.

Elle affronta l’épreuve avec courage, etelle n’en manquait pas, ce qui était peut-êtreun héritage familial. Née à Florence le 1erdécembre 1917 et baptisée en la fête de sain-te Barbe à la cathédrale de la ville, LilianaBalotta eut en effet d’excellents exemplesfamiliaux, parmi lesquels un cardinal (lePatriarche de Venise Trévisanato) et unSaint (le prêtre Vincenzo Grossi). Son père,général d’artillerie, et son frère démission-nèrent de l’armée après la proclamation dela République, faisant preuve d’une forced’âme hors du commun. D’une famille esti-mée d’Incisa Valdarno, sa mère avait une foi

Le Professeur Liliana Balotta (à droite) en compagniede Mgr Lefebvre à Florence le 15 février 1975 lorsque le

prélat définit la nouvelle messe comme étant “La Messe de Luther”

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profonde. Les deux parents contrecarrèrentles premières réformes qui perturbèrentl’Eglise au début des années soixante. Il nerestait à leur fille qu’à suivre leur exemple,et c’est ce qu’elle fit en vraie “artilleuse”. Le12 juin conformément à ses volontés, ses fu-nérailles ont été célébrées par l’abbéRicossa (assisté de l’abbé Carandino) dansla chapelle de Loro Ciuffenna, et son corpsrepose dans la chapelle de la famille Falornià Incisa. Elle nous manquera beaucoup.

Ferrare a été particulièrement frappéepar plusieurs décès ces derniers mois, avec lamort de parents de plusieurs de nos amisdans les familles Ferretti, Checchi,Moschetta et Fabri. Nous rappelons en par-ticulier le décès de Giuseppe Moschetta, sur-venu à Ferrare le 17 août après avoir reçu

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L’éducation de Jean-Marie 4,50 €

DONALD J. SANBORN La papauté matérielle 8,40 €

CH. DE MAILLARDOZ Les sept péchés capitaux de l’Enfance 8,40 €

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Le PèreBarbara àVerrua en1994, baisantles mains del’abbéCazalas lejour de sonordinationsacerdotale

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les derniers sacrements des mains de l’abbéRicossa; ses funérailles ont été célébrées le19 par l’abbé Carandino. Nous rappelonsaussi celui de décès de Luigi Fabbri, rappeléà Dieu le 17 septembre, muni lui aussi detous les sacrements. Sodalitium adresse sesplus sincères condoléances aux familles du-rement éprouvées. Le 6 septembre, à Milan,disparaissait à son tour Eugenio Tamagniniaprès une longue maladie. Les abbésRicossa et Giugni lui avaient administré tousles sacrements. L’Institut est par la penséeavec les familles Tamagni et Dini, en ce dou-loureux moment.

Nous avons reçu de la fille de MarcWinckler, Mme Francine Muel, une lettrenous annonçant la triste nouvelle de la mortde son père, survenue le 4 août. MarcWinckler fut, à la demande de Mgr Guérarddes Lauriers, le premier traducteur en fran-çais de notre revue.

Le 10 octobre, dans sa maison de la ruedes Oiseaux, à Tours, fidèlement assisté deSœur Marie-Bernadette et de la sœur de cettedernière, Myriam Malré, est décédé pieuse-ment le R. P. Noël Barbara, qui à Noël auraiteu 92 ans. Nous aurons l’occasion de parlerplus longuement - à une prochaine occasion -du Père Barbara, qui fut l’un des chefs de filede la “résistance” catholique à Vatican II etau néo-modernisme. Rappelons pour le mo-ment sa proximité avec notre Institut, quinous le rend cher comme ami et bienfaiteurinsigne. Proximité avant tout doctrinale. LePère Barbara en effet, après avoir été long-temps le point de référence des sédévacan-tistes absolus (appelés précisément dans cesannées-là “barbaristes”) corrigea ensuite cou-rageusement sa position en embrassant publi-

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quement la Thèse de Cassiciacum sur le Siègeformellement mais non matériellement va-cant. Après avoir pris contact avec notreInstitut dès sa naissance, il se rendit à Verruaquatre années de suite (de 1991 à 1994) pourdonner aux prêtres et aux séminaristes lesExercices Spirituels. Durant de nombreusesannées il fut le seul prêtre en France, avecl’abbé Delmasure et l’abbé Petit, à demanderla collaboration de notre Institut, collabora-tion qui se concrétisa par la présence d’un denos prêtres à Tours pendant 5 ans, jusqu’à oc-tobre 2001 (l’abbé Cazalas de 1996 à 1999,l’abbé Giugni de 1999 à 2000, l’abbé Ercoli de2000 à 2001). Le conseil du Père Barbara nefut pas étranger à la fructueuse collaborationqui s’est instaurée par la suite avec le PèreVinson, étant lui aussi, comme le PèreBarbara, un ancien Père de Chabeuil.Rappelons également que, en mettant unterme aux publications de la glorieuse revueForts dans la Foi, le Père Barbara invita tousses lecteurs et abonnés à voir dans Sodalitiumla continuation de son œuvre. Nombreusessont les dettes de reconnaissance que notreInstitut a accumulées envers le Père, et nom-breuses sont les dettes de tous les catholiquesà l’égard de celui qui, dès 1968, prit la défensede la Foi contre l’hérésie moderniste. Le PèreBarbara a reçu les derniers sacrements desmains de l’abbé Guépin; le curé deSteffeshausen, l’abbé Schoonbroodt, a célé-bré ses funérailles le 14 octobre. L’abbéMurro et l’abbé Cazalas y assistaient, repré-sentant ainsi tous les membres de l’Institut,tandis qu’à Verrua, le 12 du même mois, a étéchantée une messe solennelle de Requiem.

Le Père Barbara sur une photo des années 70 au coursd’une conférence à Rome organisée par Civiltà cristiana

L’Institut Mater Boni Consilii,la revue Sodalitium et la Casa S. Pio X

souhaitent à leurs fidèles lecteurs un Saint Noël

Pèlerinage à Notre-Dame de l’OsierJeudi 8 mai 2003

Arrivée à la Maison Saint-Joseph de Serre-Nerpol dès le mercredi 7 au soir: une conféren-ce est prévue à 20h30.

Pour renseignements et inscriptions:04-76-64-24-11 ou 04-78-47-88-41

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CENTRES DE MESSES

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- Il n’y a pas d'abonnement à “Sodalitium”. Ce périodique est envoyé gratuitement à tous ceux qui dési-rent le recevoir. Nous demandons aux personnes qui, pour un motif quelconque, ne désirent pas le rece-voir, de nous le faire savoir.- L’Institut Mater Boni Consilii et son périodique “Sodalitium” n’ont pas d’autres ressources que vos of-frandes sans lesquelles ils ne peuvent vivre.

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RESIDENCES DES PRETRES DE L’INSTITUT

ITALIE: Verrua Savoia (TO). Maison-Mère.Istituto Mater Boni Consilii - Località Car-bignano, 36. Tél. de l'Italie: 0161.83.93.35 -Ste Messe: en semaine à 7h30. Salut du Saint-Sacrement: tous les vendredis à 21h. HeureSainte: le premier vendredi du mois à 21h.

San Martino dei Mulini (RN). Casa San PioX. Abbé Ugo Carandino - Via Sarzana 86.Pour toute information, téléphoner au0541.75.89.61. Fax 0541.757.231.

FRANCE: Mouchy Raveau 58400 - La Charité-sur-Loire. Pour toute information, télé-phoner au 03.86.70.11.14.

BELGIQUE: Dendermonde. Mgr GeertStuyver: Kapel O.L.V. van Goede Raad,(chapelle N.-D. du Bon Conseil) KoningAlbertstraat 146 - 9200 Sint-Gillis Dender-monde: Ste Messe le dimanche à 9h30.Tél. (et Fax): (+32) (0) 52.38.07.78.

AUTRES CENTRES DE MESSESFRANCE

Annecy: 11 avenue de la Mavéria. Tél.:04.50.09.04.67. Ste Messe le 2ème et 4ème di-manche du mois à 10 h. Confessions à 9 h.

Cannes: Chapelle N.-D. des Victoires. 4 rueFellegara. Tél.: 04.93.60.57.68. Ste Messe le2ème et 4ème dimanche du mois à 18h.

Lille: Ste Messe le 1er et 3ème dimanche dumois à 17h. Confessions à 16h30. Pour touteinformation: Mgr Geert Stuyver en Belgique.

Lyon: 17 cours Suchet. Tél.: 04.77.33.11.24.Ste Messe le 2ème et 4ème dimanche dumois à 17h. Confessions à partir de 16h30.

ITALIEBologne: le 2ème dimanche du mois, Messe à

11h; le 4ème dimanche, Messe à 17h30.Ferrare: Chiesa S. Luigi, Via Pacchenia 47

Albarea. Ste Messe tous les dimanches à 17h30.Le 1er dimanche du mois à 11h30.

Loro Ciuffenna (Arezzo): Fattoria del Co-lombaio, str. dei 7 ponti. Ste Messe le 1erdimanche du mois à 17h30.

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Rimini: Oratoire St Grégoire le Grand, viaMolini 8: dimanches et fêtes, Messe à 11h.

Rome: Oratoire St Grégoire VII. Via Pietrodella Valle, 13/b. Ste Messe le 1er, 3èmeet 5ème dimanche du mois à 11h.

Rovereto (Trente): Messe le 3ème dim. dumois.

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