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Associaon DOUSOPAL - Soins Palliafs à domicile Territoire de santé Rouen-Elbeuf 44, Bd Stanislas Girardin 76140 Le Petit Quevilly Tél : 02.32.10.92.00 Mail : [email protected] Numéro 12 2ème semestre 2011 Editorial Madame, Monsieur, Depuis quelques années, notre société est hantée par la notion d’EUTHANASIE « du grec : ευ, bonne, θανατ, mort ». Il semblerait qu’après s’être préoccupés quotidiennement de leur bien être, nos concitoyens s’inquiètent désormais du bien mourir ! Que se cache-t-il donc derrière cette démarche sociétale ? Que nous dit la loi ? Quel est l’avis des professionnels de santé, des bénévoles d’accompagne- ment, des proches ? Comment répondre à cette demande ? Et le patient dans tout ça, qu’advient-il ? A travers ce numéro, nous ne prétendons pas apporter de réponse à toutes les questions, mais nourrir la réflexion de chacun et ouvrir le débat. Pendant ce temps, sur le terrain, l’équipe du réseau continue de s’activer quotidiennement aux côtés des patients et des familles avec la collaboration des différents partenaires présents sur ce grand territoire de santé Rouen-Elbeuf. Quant à la direction, elle s’affaire à établir des conventions de partenariat entre les différents acteurs de santé du territoire afin d’améliorer la coordination des soins, donc in fine, la qualité de prise en charge des pa- tients jusqu’au dernier souffle. N’est ce pas une façon de répondre à cette demande de Bonne Mort ? Dr Sébastien Taupin, Médecin Généraliste, Trésorier de Dousopal Jusqu’au bout La Vie Réalisé par le Comité de Soutien DOUSOPAL Roumois Sommaire Editorial (S. Taupin) Euthanasie (S. Galmard) Que penser de l’Euthana- sie ? (Ch. Lajouanie) Témoignage : « Hommage à tous ceux qui souffrent et à ceux qui entendent leur douleur » (Chrisne) Soins Palliafs et Euthanasie (JF Héron) Mr ALBERT demande à mourir (R. Le) Livres sur le thème de la fin de vie (G. Lhopiteau) Ni acharnement thérapeuque...ni euthanasie (G. Boulets) L’allocaon journalière d’accom- pagnement d’une personne âgée en fin de vie (E. Valois)

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Association DOUSOPAL - Soins Palliatifs à domicile Territoire de santé Rouen-Elbeuf

44, Bd Stanislas Girardin

76140 Le Petit Quevilly

Tél : 02.32.10.92.00

Mail : [email protected]

Numéro 12

2ème semestre 2011

Editorial

Madame, Monsieur,

Depuis quelques années, notre société est hantée par la notion

d’EUTHANASIE « du grec : ευ, bonne, θανατ, mort ».

Il semblerait qu’après s’être préoccupés quotidiennement de leur bien être,

nos concitoyens s’inquiètent désormais du bien mourir !

Que se cache-t-il donc derrière cette démarche sociétale ?

Que nous dit la loi ?

Quel est l’avis des professionnels de santé, des bénévoles d’accompagne-

ment, des proches ?

Comment répondre à cette demande ?

Et le patient dans tout ça, qu’advient-il ?

A travers ce numéro, nous ne prétendons pas apporter de réponse à toutes

les questions, mais nourrir la réflexion de chacun et ouvrir le débat.

Pendant ce temps, sur le terrain, l’équipe du réseau continue de s’activer

quotidiennement aux côtés des patients et des familles avec la collaboration

des différents partenaires présents sur ce grand territoire de santé

Rouen-Elbeuf.

Quant à la direction, elle s’affaire à établir des conventions de partenariat

entre les différents acteurs de santé du territoire afin d’améliorer la

coordination des soins, donc in fine, la qualité de prise en charge des pa-

tients jusqu’au dernier souffle.

N’est ce pas une façon de répondre à cette demande de Bonne Mort ?

Dr Sébastien Taupin, Médecin Généraliste, Trésorier de Dousopal

Jusqu’au bout La Vie Réalisé par le

Comité de Soutien DOUSOPAL Roumois

Sommaire

Editorial (S. Taupin)

Euthanasie (S. Galmard)

Que penser de l’Euthana-sie ? (Ch. Lajouanie)

Témoignage : « Hommage à tous ceux qui souffrent et à ceux qui entendent leur douleur » (Christine)

Soins Palliatifs et Euthanasie (JF Héron)

Mr ALBERT demande à mourir (R. Le)

Livres sur le thème de la fin de vie (G. Lhopiteau)

Ni acharnement thérapeutique...ni euthanasie (G. Boulets)

L’allocation journalière d’accom-pagnement d’une personne âgée en fin de vie (E. Valois)

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Selon le Docteur Régis AUBRY : « S’il n’existe pas de demande de la personne, il ne s’agit pas d’eutha-nasie mais d’un homicide par empoisonnement. »

Euthanasie

L’Euthanasie se définit aujourd’hui comme une

pratique visant à provoquer la mort d'un individu,

atteint d'une maladie incurable, laquelle lui inflige

des souffrances morales et/ou physiques intolé-

rables.

L'euthanasie dite « active » se fait dans le but

d'abréger la vie du patient. En France, elle est un

homicide, donc interdite et punie par la loi .

Ce que l’on nomme «euthanasie passive» consiste

à arrêter un traitement qui aurait pour effet d'aug-

menter de façon inappropriée la durée de vie du

patient.

Néanmoins ce terme porte à confusion

Il devrait être employé le terme « refus d'acharne-

ment thérapeutique », qui depuis la loi du 9 juin

1999 est devenu un des droits de la personne

malade .

Depuis plusieurs années

déjà, le sens du mot

« soins palliatifs » se dé-

veloppe en France et

permet de bannir l'acte

d'euthanasie .

Attitude du soignant face à une demande d’euthanasie :

1°) Qui peut en faire la demande ? Pour qui ? Pourquoi ?

Le patient lui même, qui ne supporte plus ses douleurs physiques, sa souffrance morale, son apparence,

sa déchéance, sa dépendance.

L'entourage, pour les mêmes raisons que leur proche malade et qui refuse de voir l'être aimé dans cette situa-

tion inacceptable. De plus, une notion d'impuissance est ressentie par l'entourage face à tout cela .

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Page 3 Jusqu’au bout La Vie Numéro 12

Il faut apprendre à vivre tout au long de sa vie, et

ce qui t’étonnera davantage, il faut, sa vie durant,

apprendre à mourir.

Sénéque

2°) Comment y répondre ?

Le diagnostic de la maladie évoluée et incurable

étant posé, l'équipe soignante devra prendre le pa-

tient en charge dans sa globalité. Douleurs phy-

siques à évaluer, à traiter et à réévaluer jusqu'à ob-

tention d'un niveau de douleur confortable pour le

patient. Divers moyens existent de nos jours pour

les évaluations ainsi que des traitements rapides et

adaptés. Une douleur physique insupportable

entraine forcément une souffrance morale et donc

la demande que cela cesse au plus vite .

Si la douleur physique est soulagée, le patient et

son entourage se retrouveront dans de meilleures

conditions. A ce moment là, le rôle des soignants

est d'accompagner (être à côté de …), de soutenir,

de guider le patient et sa famille, afin que chacun

chemine, à son rythme, vers l'inéluctable, c'est à

dire la mort du patient .

L'équipe se doit d'être disponible, à l'écoute .

La notion d'équipe, en soins palliatifs, fin de vie,

comprend tous les professionnels de santé

gravitant autour de la personne malade. Il ne peut

en être autrement pour une telle prise en charge.

Le médecin, les infirmières, les aides soignantes,

ont un rôle capital qui ne se résume pas aux seuls

soins. L’écoute, la relation, l’accueil de la souf-

france contribuent au cheminement. Le psycho-

logue interviendra auprès du patient et de son en-

tourage, avant le décès, au moment du décès et

surtout après le décès, en suivi de deuil pour la

famille .

Dans l'accompagnement et le soutien, les béné-

voles formés en soins palliatifs sont également in-

dispensables .

3°) Ensuite ?

La prise en charge de la douleur, de la souffrance, de l'anxiété, la mise en œuvre des soins de confort, la pré-

sence et l'écoute de chacun, permettent souvent de voir la première demande se modifier. Si toutes ces no-

tions de médecine palliative sont appliquées cette demande n'existerait plus. Ainsi, chacun profitera du

temps qui reste sereinement, et cela aidera l'entourage à accepter le décès et accomplir un deuil moins dou-

loureux .

« LES SOINS PALLIATIFS, C'EST TOUT CE QU'IL RESTE A FAIRE QUAND IL N'Y A PLUS

RIEN A FAIRE . » Cicély Saunders .

Sylvie GALMARD

Aide Soigante

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Que penser de l’Euthanasie ?

Ce n’est pas simple d’accompagner un mourant. La société semble assez démunie devant l’attitude à avoir face à une

personne dont la vie se termine. Peut-on dire « bonne mort » ou « bonne vie jusqu’à la fin » ?

De nombreuses questions surgissent.

Nous restons avec humilité devant ce grand mystère qu’est la mort.

Chantal LAJOUANIE

Votre avis nous intéresse, vous pouvez l’envoyer

par mail ou à l’adresse postale de l’Association

La mort est la compagne de tout homme lucide.

Père Christian de Chergé

Quelles souffrances peuvent conduire un malade à un désir de mort ?

Toutes les souffrances physiques peuvent-elles être soulagées ?

Quelles peuvent être les souffrances morales ? Le sentiment de dégradation physique, d’inutilité, d’indi-

gnité ?

Le regard porté sur le malade, la qualité de la relation humaine, une attitude de respect peuvent-ils dimi-

nuer ce désir de mort ?

Qu’est-ce que la dignité d’une personne en fin de vie ?

Existent-ils des vies indignes ?

Mettre fin à une vie n’équivaut-il pas à faire un choix entre les dignités, l’une est valable, l’autre pas ?

La demande de mort par les proches signifie-t-elle égoïsme, manque de courage, ou inquiétude sur l’état

d’esprit du malade qui ne s’exprime plus ? Est-il dans une grande souffrance morale ou dans la sérénité ?

Le médecin peut-il être tenté d’arrêter une vie même s’il n’y a pas de demande particulière du malade

ou des proches ?

Quelle décision prendre pour le malade qui a atteint le point de non-retour ?

L’alternative des soins palliatifs est-elle toujours suffisante, notamment dans les cas définitifs de totale

dépendance physique et de pleine conscience ?

Accompagner, être à côté ? Oui, mais tous les jours, pendant des années ? Est-ce possible ? Peut-on

apaiser des angoisses pendant des années ? L’accompagnant peut-il arriver à accepter ? Le malade le

peut-il ?

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Témoignage : « Hommage à tous ceux qui souffrent et à

ceux qui entendent leur douleur »

En été 2009, Raymond, notre frère, a appris qu’il avait une tumeur au cerveau. L’opération était possible pour peut-être gagner quelques années. Cette opération a eu lieu en septembre 2009. Mais les quelques années annoncées n’ont été en réalité que quelques mois.

Après des séances de rayons en décembre 2009, les nouvelles ont été alarmantes. En effet, son œil gauche se fermait, une tumeur s’y est installée. Les métastases avaient à nouveau envahi son cerveau.

Il a décidé, lui qui avait le sida depuis 28 ans, lui qui avait accompagné tant de copains en fin de vie dans les années 80, que la partie était perdue.

Il a donc pris contact en janvier 2010 avec l’hôpital St Pierre à Bruxelles où il avait été soigné dans les années 80/90.

Le personnel se souvenait bien de Raymond, il était heureux de le revoir, mais a vite compris l’objet de son retour à l’hôpital.

Il a eu un rendez-vous avec une assistante sociale, un psychothérapeute, son médecin Sida, et tout le staff médical pour connaitre les démarches à suivre pour mettre en place son choix de mourir dans la dignité.

Il a donc choisi de mettre en place le protocole du suicide assisté. Il a visité le cloître où il devrait séjourner durant ses derniers jours de vie. Il pourrait être accompagné de son ami. Il était serein, car sa plus grande peur était de ne pas être maître de décider de sa fin de vie.

En rentrant de son voyage en Belgique, Raymond nous a annoncé sa décision de mettre fin à ses jours. Nous avons regardé son œil gauche malade et nous avons pleuré. La tumeur avait tant grossi, et pourtant ce n’était que la partie visible de sa tumeur.

Nous en avons longuement parlé entre nous tous, ses amis, sa famille. Il avait tout tenté, il n’y avait plus aucun espoir. Nous l’avons conforté dans son choix. Nous savions qu’il avait tout essayé, qu’il s’était battu avec courage pour affronter sa maladie.

Il ne voulait pas d’acharnement thérapeutique, il savait qu’il était condamné. D’ailleurs, en février 2010, le professeur qui l’avait opéré, à Rouen, le lui a confirmé. Lorsque mon frère lui a posé la question « Suis-je foutu ? », le professeur l’a regardé droit en face. Il y avait tant de tristesse dans ses yeux (nous étions juste en face de lui), il a serré la cuisse de notre frère … là nous avons compris.

Il ne pouvait plus opérer la tumeur à l’œil, il ne pouvait que prescrire de la morphine pour soulager la douleur.

Raymond a pris rendez-vous avec un médecin de l’Unité de Soins Palliatifs de Rouen, le 15 mars 2010. Il voulait ren-contrer l’équipe médicale et être sûr de son choix de fin de vie. Or son état avait empiré au cours des derniers jours, il n’avait plus la force de faire son voyage en Belgique. Ce 15 mars, il a été hospitalisé en soins palliatifs.

Nous l’avons entouré de tout notre amour. Le personnel a été digne, a respecté le refus d’acharnement thérapeutique de notre frère. Deux jours plus tard, le 17 mars au matin, Raymond est décédé ; accompagné de son ami, il s’est endor-mi tout doucement, dans la paix.

Notre plus grande peur était qu’il parte seul. Mais son amour était là, à ses côtés.

Notre frère, notre ami, nous manque tous les jours. Mais nous avons eu la chance de pouvoir l’accompagner, l’aimer. Nous avons pu combattre toutes nos craintes, aborder les difficultés tous ensemble, garder « les yeux ouverts ».

A NOTRE GRAND RAYMOND - Christine, ta petite soeur

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Dès les origines, le mouvement des soins palliatifs subit les invectives de quelques opposants et il n’est pas rare

d’entendre proférer à son encontre des propos tels que :

avec les soins palliatifs vous prolongez le temps de la souffrance !

vous ne respectez pas le désir d’en finir du Patient et de ses proches !

où placez-vous donc la dignité du malade qui n’en finit pas de partir ?

pourtant parfois il vous arrive, dans le secret, d`interrompre la vie !

vous ne voulez pas parler d`euthanasie, car elle est pour vous un tabou moral !

Avant tout débat, nous, professionnels de la santé, recevant une demande d’euthanasie, ne pouvons qu’exprimer une

double souffrance : en tout premier lieu celle du Patient, en second lieu notre propre souffrance, engagés que nous

sommes à respecter la vie.

Soins Palliatifs et Euthanasie

Aucun motif ne saurait autoriser quiconque à décider

qu’une vie ne vaut pas la peine d’être vécue.

Jean-Luc Mouton (journaliste)

EUTHANASIE ! tout d’abord comment compre-

nons-nous ce mot ?

L’euthanasie est un geste volontaire d’un tiers qui

provoque la mort d’un malade atteint d’une maladie

incurable, en vue d’interrompre ses souffrances. Il

ne s’agit donc pas d’une attitude passive mais d’une

démarche active. Au regard de la Loi il s’agit,

aujourd’hui, d’un meurtre avec préméditation.

LA DEMANDE d’EUTHANASIE est l’expression d’une

SOUFFRANCE EXTREME

Au-delà de la définition glacée, implacable, apportée par la

Loi, la demande d’euthanasie est toujours reçue par l’Equipe

soignante en soins palliatifs comme l’expression d’une souf-

france extrême du Patient : cette demande exprime le sou-

hait de rapprocher le terme de la vie… car la vie, telle

qu’elle est vécue à ce moment précis, n’est plus tenable,

pour ce Patient, ou pour ses proches,… à ce moment,… là,…

dans ce contexte vécu. La vie semble alors ne se réduire

qu’à la souffrance. La vie est devenue, dans sa totalité,

souffrance. La mort est désirée,… elle apparaît comme

seule capable d’interrompre ce temps de souffrance,… une

souffrance que ne tolère plus ce patient, ou ses proches.

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ANALYSE de cette DEMANDE par l’EQUIPE professionnelle

Le Patient ne formule pas cette demande à n’importe qui : il l’exprime à un intime ou à un membre de l’Equipe

soignante qui a toute sa confiance et qui lui est le plus proche : c’est bien souvent l’aide-soignante, parfois

l`infirmière ou le psychologue, plus rarement le médecin, qui devient le dépositaire de ce désir d’en finir….

Cette demande ne surgit pas non plus à n’importe quel moment : c’est ce jour-là, à ce moment précis de la journée,

à la suite de tel et tel geste ou événement….un moment qui s’inscrit dans le cours de l’histoire évolutive de la mala-

die de ce Patient.

Cette demande, difficilement exprimée par le Patient, plus ouvertement cependant par un proche, est également

difficilement audible par les membres de l’Equipe soignante… tant elle va à l’encontre de cette tension continue qui

les porte à améliorer la vie de ce Patient qu’ils entourent.

Il est pourtant essentiel que l’Equipe soignante, dans son écoute attentive et respectueuse, recueille précieusement

cette demande car elle est bien l’expression d’une souffrance extrême qu’elle va devoir analyser pour la com-

prendre et lui apporter une attention renouvelée.

C`est en effet l’expression d’une souffrance incontrôlée, dont les composantes très diverses n’étaient pas toutes

prises en compte ou non encore apparues, réactivant l’inconfort de multiples symptômes : douleur, gêne respira-

toire, nausées, anxiété, révolte….

L’écoute professionnelle pluridisciplinaire renouvelée du Patient et de ses proches, suivie du partage en Equipe

soignante est seule garante de l’analyse la plus fiable, la plus fine de la situation, venant au plus près de la vérité du

Patient. Pour atteindre l’accalmie des symptômes gênants, il est en effet nécessaire d’en comprendre l’origine,

parfois simple, souvent multifactorielle :

douleur ou symptômes insuffisamment contrôlés conduisant à réévaluer le traitement

l’angoisse dans laquelle s’enferme le Patient, masquant la plainte et l’expression de symptômes…. synonymes

pour lui d’aggravation de la maladie évolutive, ou de la nécessité d’éventuels nouveaux examens redoutés, ou

de soins douloureux renouvelés….plainte tue que révèle une écoute attentive approfondie…

la fatigue pesante, une autonomie réduite, un conflit social, l’attente interminable, la solitude insondable

devant l’échéance, …toute manifestation qui altère l’espoir d’un temps meilleur, peut emporter vers le refus

de vivre, vers une demande d’en finir.

Les SOINS PALLIATIFS ACCOMPAGNENT la VIE

Autant nous savons accompagner notre Patient en l’assurant de notre présence réconfortante permanente,

Autant nous savons modifier et améliorer la prise en charge des symptômes pour le meilleur confort possible,

Autant nous savons interrompre les thérapeutiques et les soins lorsqu’ils sont inutiles ou douloureux,

Autant nous savons adapter les thérapeutiques dans le but de contrôler la douleur jusqu`à la rendre tolérable,

même si, ce faisant, apparaît un risque d’écourter la vie. Il s’agit alors de livrer la juste posologie qui libère du

symptôme, parfois jusqu`à la sédation totale durant quelques jours,

Autant nous nous interdisons d`interrompre intentionnellement la vie par un geste donnant la mort. Nous ne voulons

exercer aucun pouvoir de mort sur aucun Patient.

Le temps qui reste à vivre à ce Patient, entouré de ses proches, ne nous appartient pas. Tout doit être fait et tout

peut être fait pour atténuer les symptômes.

… Demeurera toujours la conscience de la séparation à la fin du parcours …devant laquelle, seule, la reconnaissance

de la grandeur de l’humain, épris de solidarité et de beauté, celle-là même qui illumine la bonté, peut se révéler d’un

éminent réconfort…

Docteur Jean-Francois HERON

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Mr ALBERT demande à mourir Quelques aspects juridiques

Avant d'aborder certains aspects juridiques de quelques exemples de situations de demande de mort, il est

primordial de rappeler quelques notions générales :

Dans tous les cas, il est fondamental et indispensable de s'assurer que tous les moyens ont été mis en œuvre

pour soulager les douleurs physiques, ainsi que les souffrances psychologiques et spirituelles du malade. Car

dans l'immense majorité des cas, le souhait d'en finir relève d'une volonté de fuir une souffrance devenue in-

tolérable. La limitation ou l'arrêt des traitements, ne signifie pas l'arrêt des soins (soins de confort, d'accompa-

gnement, prise en charge des souffrances, …) qui doivent impérativement se poursuivre pour assurer une fin

de vie la plus digne et sereine possible.

Ne pas maintenir la vie, ne signifie pas provoquer délibérément la mort.

Episode I : M. ALBERT, se sachant atteint d'une maladie neurologique dégénérative incurable s'aggravant de jour en

jour (bien qu'actuellement pas trop évoluée), et se voyant inexorablement de plus en plus impotent, est résolu à deman-

der à son médecin de lui faire une injection pour en finir au plus vite.

A travers ce cas d'école, il est intéressant de constater que la demande de M. ALBERT "d'un acte délibéré par

lequel un tiers entraine directement la mort d'une personne malade", correspond à la définition de l'EUTHA-

NASIE, admise en 2004 par la mission d'information sur l'accompagnement de la fin de vie. A ce propos, il faut

rappeler que les dispositions juridiques françaises sont très claires à ce sujet :

"Le médecin n'a pas le droit de provoquer délibérément la mort" Art. R4127-38 du Code de la Santé-

Publique

"Le fait d'attenter à la vie d'autrui par l'emploi ou l'administration de substances de nature à entraîner la

mort constitue un empoisonnement.

L'empoisonnement est puni de trente ans de réclusion criminelle." Art. 221-5 du Code Pénal

Ainsi, une personne a le droit de se suicider, mais la loi sanctionne très durement l'aide au suicide.

Finalement, sa maladie neurologique évoluant tout de même lentement, et avec l'aide de son médecin traitant et de son

infirmière à domicile ( qui sont très efficacement secondés par le Réseau de soins palliatifs de Rouen-Elbeuf), M. AL-

BERT retrouve goût à la vie. Il ne demande plus la piqûre finale, qui entretemps, est remplacé par de fastidieuses pi-

qûres d'Insuline quotidiennes pour un diabète apparu tardivement.

Episode II : Mais voilà qu'un jour, en plus de s'être progressivement retrouvé paralysé dans son lit, M. ALBERT ap-

prend que son plus vieil ami vient de décéder d'une très longue maladie. Et lors d'un terrible accès de mélancolie, se

sachant en phase très évoluée d'une affection grave et incurable, lui viennent en mémoire :

l'Article L. 1er C de la loi du 09 juin 1999, qui précise que "la personne malade peut s'opposer à toute in-

vestigation ou thérapeutique", ainsi que l'Art. L1111-4 de la loi du 22 avril 2005 : "… Aucun acte médical

ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consente-

ment peut être retiré à tout moment. …"

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Fort de son droit, M. ALBERT signifia à son médecin, sa volonté de ne plus accepter les sempiternelles piqûres d'Insu-

line. Selon les termes de cette même loi ("… Le médecin doit respecter la volonté de la personne après l'avoir

informée des conséquences de ses choix. Si la volonté de la personne de refuser ou d'interrompre tout trai-

tement met sa vie en danger, le médecin doit tout mettre en œuvre pour la convaincre d'accepter les soins indispensables … Dans tous les cas, le malade doit réitérer sa décision après un délai raisonnable. …), son

médecin lui expliqua les risques extrêmes consécutifs à l'arrêt de ses injections, et mit tout en œuvre pour le con-

vaincre de les poursuivre. Il profita de ce délai de réflexion, pour prendre en charge (avec l'aide efficace du psycho-

logue du Réseau DOUSOPAL) la profonde détresse de son patient et de sa famille. Tant et si bien, que M. ALBERT

revint sur sa décision, et retrouva un grand intérêt à bien poursuivre le petit restant de son bout de chemin.

Episode III : Cela fait maintenant quelques jours que M. ALBERT s'est progressivement glissé dans un profond co-

ma. Tout de même, lors de ses périodes d'agitation, on a l'impression qu'il souffre. Et ce n'est pas sans appréhension

que son médecin, de peur d'aggraver définitivement les problèmes respiratoires de son patient, s'est résolu à augmen-

ter les doses déjà faramineuses de Morphine. En cela, il est tout à fait en accord avec l'Art. L1110-5 de la loi du

22 avril 2005, qui précise : "… Si le médecin constate qu'il ne peut soulager la souffrance d'une personne, en

phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, quelle qu'en soit la cause, qu'en lui appliquant

un traitement qui peut avoir pour effet secondaire d'abréger sa vie, il doit en informer le malade, … la per-

sonne de confiance …, la famille …".

Cette fois, malgré une accalmie de ses douleurs, M. ALBERT arrive à la fin de son chemin. Auparavant, il avait pris

soin de rédiger ses Directives Anticipées (Art. L1111-11 de la loi du 22 avril 2005), en plus d'avoir désigné sa

femme comme Personne de Confiance (Art. L1111-6 de la loi du 22 avril 2005), afin de relayer son souhait

d'éviter un acharnement thérapeutique inutile, au stade terminal de sa maladie. Ainsi, en accord avec ses dernières

volontés et sa famille, cela a permis à toute l'équipe soignante multidisciplinaire de M. ALBERT, d'aboutir à la prise

de décision collégiale d'interrompre tous les traitements inutiles, mais en conservant tout l'accompagnement palliatif.

Article L 1111-13 de la loi du 22 avril 2005 : Lorsqu'une personne, en phase avancée ou terminale

d'une affection grave et incurable, quelle qu'en soit la cause, est hors d'état d'exprimer sa volonté, le méde-

cin peut décider de limiter ou d'arrêter un traitement inutile, disproportionné ou n'ayant d'autre objet que

la seule prolongation artificielle de la vie de cette personne, après avoir respecté la procédure collégiale défi-

nie par le code de déontologie médicale et consulté la personne de confiance visée à l'article L. 1111-6, la

famille ou, à défaut, un de ses proches et, le cas échéant, les directives anticipées de la personne. Sa décision,

motivée, est inscrite dans le dossier médical.

Le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de sa fin de vie en dispensant les soins visés

à l'article L. 1110-10.

Au dire de sa famille et de l'équipe soignante, la fin de vie de M. ALBERT a été très digne.

THE END

Dr. René LE

Toute la dignité de l’homme est en

la pensée.

Pascal

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Livres sur le thème de la fin de vie

Deux livres pour se documenter et poursuivre sa réflexion sur le thème de la fin de vie :

Dans un ouvrage simple et clair « A la lumière du crépuscule », édition Michalon novembre 2008, Jean Léonetti, à travers des témoignages, nous invite à réfléchir sur cette peur du « mal mourir » qui nous effraie tant.

Un autre ouvrage, « Peut-on vraiment choisir sa mort ? » de Bernard Devalois, médecin anesthé-siste-réanimateur, actuellement responsable d’une Unité de Soins Palliatifs en région pari-sienne, apporte des repères pour les citoyens et ceux qui les soignent (collection Omega, juin 2009).

La difficulté ou l’impossibilité de dire sa douleur physique ou d’expri-mer, par quelque moyen que ce soit, sa souffrance morale, peut con-duire une personne à demander l’euthanasie. Tout soignant est sus-ceptible d’entendre une telle demande de mort. Les réponses s’élabo-rent à plusieurs voix, à travers une réflexion concertée entre professionnels, dans le respect du cheminement du malade et de ses proches .Cette élaboration exige une attitude d’écoute véri-tablement authentique et impose de prendre du temps.

Geneviève Lhopiteau, infirmière coordinatrice.

L’association de bénévoles d’accompagnement , JALMALV - Rouen, vous invite à une soirée débat , jeudi 6 Octobre 2011,à 20H30, Espace du Moineau, route de Neufchâtel à Rouen , pour réfléchir avec le Docteur Devalois , sur le thème de « choisir sa mort ». (entrée gra-tuite)

Page 11: Mail : dousopal@orange.fr Jusqu’au bout La Vie · dire la mort du patient . L'équipe se doit d'être disponible, à l'écoute . La notion d'équipe, en soins palliatifs, fin de

ASSOCIATION DOUSOPAL Président : Dr. LE

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COMITE DE SOUTIEN

DE L'ASSOCIATION DOUSOPAL

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J'adresse mon don (20,00 € ) à l'ordre de l'ASSOCIATION DOUSOPAL,

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Page 11 Jusqu’au bout La Vie Numéro 12

Le thème de la fin de vie… Un thème qui est très souvent tabou, mais sur lequel nous avons tous des idées +/- argumentées et rationnelles étant donné la dose d’émotion qui accom-pagne cette étape de la vie.

Peut-être que nous savons mal ce qu’est l’euthanasie et les réalités qui se cachent derrière ce mot.

Une grande information dans ce domaine est nécessaire. Les nombreux témoignages de per-sonnes rencontrées en soins palliatifs sont pleins d’espoirs.

Aujourd’hui, il est possible de refuser l’acharnement thérapeutique sans accepter l’euthana-sie, et de mourir dignement et paisiblement sans être euthanasié.

www.sosfindevie.org

Géraldine BOULETS

Infirmière Coordinatrice DOUSOPAL

Ni acharnement thérapeutique… Ni euthanasie

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Page 12 Jusqu’au bout La Vie Numéro 12

Bureau du Comité de

Soutien

Tél. 02 32 10 92 00

Jacques CLOET

Geneviève DU MESNIL-ADELEE

Sylvie GALMARD

Christine GRANDOU

Jean-François HERON

Marie-Agnès HERON

Georges HOSTEIN-GUENOLE

Audrey LAINE

Chantal LAJOUANIE

René LE

Geneviève LHOPITEAU

Annick JOSSE-POTTIER

Sébastien TAUPIN

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Créée par la loi du 2 Mars 2010, l’allocation journalière d’accompagne-ment d’une personne en fin de vie, peut désormais être attribuée aux personnes qui assistent un proche en phase avancée d’une maladie grave. Vous trouverez une information détaillée sur le site de la C.P.A.M.

http://www.ameli.fr/assures/index.php .

Si vous souhaitez en bénéficier, n’hésitez pas à me contacter, Elodie Valois Assistante Sociale de l’équipe au 02 32 10 92 00 ou par Mail :

[email protected] .

Elodie Valois

Maquettiste du bulletin : Mme Corinne ROULLE

L’allocation journalière d’accompagnement d’une personne

âgée en fin de vie

Il faut rechercher la place que l’on veut donner à

l’homme et à la qualité de sa vie, quel que soit le

moment, y compris lorsque, mourant, il est à la fin

de sa vie.

Lucien Neuwirth

Association ASP 27 76 CHI Eure-Seine Rue Léon Schwartzenberg 27015 EVREUX Cedex

Représentée par son Président Monsieur Jacky LEROUX

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Association JALMALV-ROUEN 35 Place du Général de Gaulle 76000 ROUEN

Représentée par sa Présidente Madame Sibille FLEURY

Le Réseau DOUSOPAL a signé des conventions de partenariat avec 2 Associations de bénévolat d’accompagnement :