L’ANNUAIRE DE LA MEDITERRANEE 2 0 0 9

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GROUPEMENT D’ETUDES ET DE RECHERCHES SUR LA MEDITERRANEE L’ANNUAIRE DE LA MEDITERRANEE 2009 GERM Le Statut avancé à l’épreuve de l’Union pour la Méditerranée ............................................................................................................... ............................................................................................................... Edition du GERM Publié en partenariat avec la Fondation Friedrich Ebert

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G R O U P E M E N T D ’ E T U D E S

E T D E R E C H E R C H E S S U R L A M E D I T E R R A N E E

L’ANNUAIRE DE LAMEDITERRANEE2 0 0 9

GERM

Le Statut avancé à l’épreuve de l’Union pour la Méditerranée

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Edition du GERMPublié en partenariat avec la Fondation Friedrich Ebert

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L’ANNUAIRE DE LA MEDITERRANEE

2009

Le Statut avancé à l’épreuve de l’Union pour la Méditerranée

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L’Annuaire de la Méditerranée est publié en partenariat avec la Fondation Friedrich EBERT

© Groupement d’Etudes et de Recherche sur la Méditerranée

Dépôt légal : 2010 MO 3073ISBN : 978-9954-500-02-6

Pré-presse : Babel comImpression : Al Maârif Al Jadida

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GROUPEMENT D’ETUDES ET DE RECHERCHES SUR LA MEDITERRANEE

L’ANNUAIRE DE LA MEDITERRANEE

2009

Le Statut avancé à l’épreuve de l’Union pour la Méditerranée

PUBLICATION DU GERMAssociation scientifique reconnue d’utilité publiqueB.Q. n° 5560 du 13 septembre 2007 (version arabe)

Correspondance : B.P 8163, Agence des Nations Unies, Agdal, RabatSite web : www.germ.ma

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LES ORGANES DU GERM

COMITE EXECUTIF

Habib EL MALKIDriss KHROUZ

Jamila HOUFAIDI SETTARMohamed MOHATTANE

M. BERRIANEHamid BEHAJ

Fouad AMMORMoha MARGHI

Mohamed KHARISSEl Houssine Mohamed AFKIR

Driss AISSAOUI Mohamed Larbi EL HARRAS

CONSEIL SCIENTIFIQUE

Habib EL MALKIDriss KHROUZ

Mohamed MOHATTANEJamila HOUFAIDI SETTAR

Miloud LOUKILIAbdoulwahab MAALMI

Aziz HASBI

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REDACTEUR EN CHEF

Driss KHROUZ

COMITE DE REDACTIONDriss KHROUZ

Abdelouhab MAALMINajia BENSERHIR

Mohamed BENNANIMohammed HARISS

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Sommaire

Avant-propos . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9Présentation du thème . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

Axe I : Le Statut avancé et l’Union pour la Méditerranée : quelles interactions et quelles perspectives communes ? . . . . . . . . . . . 13

Le Statut avancé et les perspectives du Maroc dans le projet euro-méditerranéen

Driss KHROUZ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15

Le Statut avancé, la Politique de voisinage et l’Union pour la Méditerranée au service d’un même dessein

Kamal EL MAHDAOUI . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25 Le « Statut avancé » Maroc/UE : quelle valeur ajoutée à la PEV ?

Larbi JAIDI et Nezha ALAOUI . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29

Quels enjeux pour le Maroc dans ses rapports avec l’Union européenne ? Fouad M. AMMOR . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67

Le Statut avancé UE-Maroc et les collectivités localesIván MARtíN et Paqui SANtONJA . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79

AXE II : Les politiques et les mécanismes de mise en œuvre du Statut avancé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91

Un nouvel instrument financier pour un nouveau Statut avancéIván MARtíN . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93

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Le statut avancé à l’épreuve de l’Union pour la Méditérrannée8

La question de l’éducation et de la formation, repères et perspectivesPerla COHEN . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109

Très grande crise multidimensionnelle et Euromed : chance ou handicap ?

Henri REGNAULt . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 125 La Turquie et l’Union pour la Méditerranée, entre méfiance et espoir

Samim AKGöNüL . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 137 Vertus et limites de l’intégration économique : le cas des relations entre la Turquie et l’Union européenne

Deniz AKAGüL . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 145

Annexes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157I. Huitième session du Conseil d’association UE-MAROC . . . . . . . . . . 159 II. Conclusions de la présidence du Conseil de l’Union européenne . . 173

Conclusions des 29 et 30 octobre 2009 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 175 Conclusions du 10 juillet 2009 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 179 Conclusions des 19 et 20 mars 2009 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 187

III. Rapport annuel de la Haute Représentante de l’Union pour la PESC . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 193IV. Rapport général sur l’activité de l’Union européenne . . . . . . . . . . . . 201

Les changements apportés au cadre institutionnel . . . . . . . . . . . . . . . . . 203 Sommet de Copenhague . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 207Une Politique de bon voisinage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 215

V. Présidence suédoise du Conseil de l’UE 2009 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 217

Sélection bibliographique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 221

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Les relations euro-méditerranéennes sont pour la Fondation Friedrich Ebert – une organisation d’origine du Nord et représentée depuis des décennies au Sud – un champ de travail évident et important. Depuis le lancement du processus de Barcelone, en 1995, notre Fondation a accompagné le partenariat euro-méditerranéen dans le cadre de ses différents programmes. Avec le lancement de l’Union pour la Méditerranée, nous avons encore intensifié la coopération entre les partenaires des rives Sud et Nord de la Méditerranée dans le cadre d’un programme régional particulier. Tous les bureaux de la FES dans la région MENA, dans l’Union européenne, notamment nos bureaux à Madrid, à Paris et à Bruxelles, ainsi que nos bureaux dans les autres pays ayant rejoint le partenariat euro-méditerranéen participent à ce processus.

En développant des perspectives social-démocrates, concernant notamment la dimension sociale du partenariat EuroMed, la FES entend promouvoir des stratégies politiques alternatives et innovantes, au niveau à la fois national et régional. La FES a noué de longue date des relations privilégiées avec ses partenaires au Nord et au Sud : en particulier les décideurs au sein des différents gouvernements, les syndicats, la société civile, les universités et les centres de recherche. Outre les partenariats au niveau national des pays partenaires, la FES soutient également les réseaux et institutions au niveau régional.

Le programme de la FES a pour objectif de rallier le soutien politique au projet EuroMed, partagé par l’ensemble des partenaires susmentionnés. L’approche mise en œuvre pour atteindre cet objectif est, d’une part, de proposer des plateformes de dialogue pour permettre un échange constant entre les cercles politiques, syndicaux et de la société civile aux niveaux national, régional et euro-méditerranéen, tout en tenant compte, dans le

Avant-propos

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Avant-propos10

même temps, de la dimension Sud-Sud. D’autre part, la FES contribue, par ses compétences, aux débats et à l’élaboration de propositions de stratégies politiques futures. Dans ce contexte, elle considère sa fonction comme un lien entre les experts et les universitaires, d’une part, et les décideurs politiques et sociaux, d’autre part.

Au Maroc, nous sommes liés depuis de nombreuses années avec le GERM dans un partenariat étroit et durable qui remonte aux origines du processus de Barcelone.

Depuis le début des années 90, le GERM avait été conçu comme un groupement de recherche et de collaboration scientifique nationale et régionale sur les questions méditerranéennes et les relations euro-méditerranéennes. Il s’agissait alors de l’une des premières et rares plateformes au Sud où non seulement pouvait s’élaborer une perspective Sud sur la question Euromed, mais où pouvait également s’opérer une interaction pionnière et productive entre des chercheurs-universitaires talentueux, des politiciens engagés et des acteurs enthousiastes de la société civile.

Depuis ces temps, le GERM n’a cessé de jouer ce double rôle à la fois d’acteur de la coopération scientifique Euromed et de promoteur du dialogue politique et civil entre les deux rives. Et depuis ces temps, la FES a toujours appuyé cette orientation et cet engagement du GERM. Ensemble, le GERM et la FES ont réalisé de multiples initiatives d’étude, d’édition, de dialogue et d’échange sur les questions pertinentes pour le partenariat Euromed. Cette coopération se poursuit aujourd’hui sur les sujets actuels d’intérêt pour le processus de Barcelone, la Politique européenne de voisinage et l’Union pour la Méditerranée. Un intérêt particulier et partagé entre le GERM et la FES nous porte également à donner à l’avenir une priorité à l’accompagnement du nouveau cadre de partenariat bilatéral entre le Maroc et l’UE, le Statut avancé.

Nous tenons à adresser nos remerciements les plus sincères à notre partenaire, le GERM, pour la confiance qu’il nous a témoignée pendant toutes ces années. Nos remerciements vont également et particulièrement aux experts et auteurs des contributions publiées dans cet Annuaire de la Méditerranée 2009.

Ulrich StorckFriedrich-Ebert-Stiftung

Maroc

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Le Statut avancé à l’épreuve de l’Union pour la Méditerranée

G.E.R.M.

PrésentationLa Méditerranée est aujourd’hui non seulement un espace géographique

et historique, elle est de plus en plus un enjeu stratégique : un espace de tensions, de conflits et de guerres qui se cachent souvent derrière les instrumentalisations des civilisations et des religions, un centre où se joue l’avenir de la paix et de la démocratie dans le monde. Elle est la première destination touristique, la principale route énergétique dans le monde et l’espace le plus important des flux migratoires internationaux.

Les accords de partenariat, depuis le processus de Barcelone jusqu’à « l’Union pour la Méditerranée », en passant par les accords d’association, la Politique de voisinage et le Statut avancé (s’agissant du Maroc), ont créé un nouveau cadre ainsi que de nouvelles formes de coopération dans la région méditerranéenne.

Ces différents formats renouvelés de partenariat et d’association visent d’abord et avant tout à permettre à l’Europe de disposer d’un cadre plus adapté pour conduire ses relations avec les pays tiers et remédier aux lignes de division qui résultent des élargissements successifs de l’Union. De nouvelles frontières se dessinent, et de nouveaux voisins apparaissent. Aussi l’Union se dote-t-elle de nouveaux mécanismes et de nouveaux instruments de coopération et d’association avec les pays non candidats à l’adhésion dont le dernier né est le « Statut avancé », dont est bénéficiaire le Maroc depuis 2008.

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Présentation12

Parallèlement, en lançant le projet de l’Union pour la Méditerranée, outre qu’elle s’efforce aussi de se repositionner politiquement et stratégiquement en Méditerranée, l’Europe marque de nouveau son intérêt pour le Sud et tente de relancer sa coopération avec les pays méditerranéens tiers sur de nouvelles bases et selon une autre vision, plus participative et plus concrète. L’Union pour la Méditerranée introduit ainsi une coprésidence du Nord et du Sud et un secrétariat conjoint avec un secrétaire général issu du Sud, et elle propose six projets structurants de développement pour la région méditerranéenne.

Dans ce contexte, le Maroc se trouve engagé dans un double format de partenariat : le « Statut avancé », qui est un cadre bilatéral de traitement différencié, et l’Union pour la Méditerranée, qui est un cadre rénové de partenariat multilatéral. En vertu du premier format, le Maroc renforce son rapprochement avec l’UE jusque et y compris dans la PESC et la PESD. Dans le second format, il est appelé à participer activement aux efforts des deux rives en vue d’un espace méditerranéen de paix, de coprospérité et de développement, de démocratie et des droits de l’homme.

C’est sur ces deux formes de partenariat que des éléments de réflexion sont présentés dans cette édition de l’Annuaire du GERM. Ils sont le résultat de la rencontre scientifique annuelle du GERM organisée les 4 et 5 décembre 2009 à Rabat avec la collaboration de la Fondation Friedrich Ebert, sur le thème « Le Statut avancé à l’épreuve de l’Union pour la Méditerranée ». Les travaux de la rencontre se sont articulés autour de deux axes, à savoir :

• le Statut avancé et l’Union pour la Méditerranée : quelles interactions et quelles perspectives communes ?

• les politiques et les mécanismes de mise en œuvre du Statut avancé.

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Axe ILe Statut avancé et l’Union pour la

Méditerranée : quelles interactions et quelles perspectives communes ?

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Le Statut avancé et les perspectives du Marocdans le projet euro-méditerranéen

Driss KHROUZ (1)

Introduction

Le Maroc est lié à l’Union européenne par un cadre global depuis son adhésion à la déclaration de Barcelone en novembre 1995. Des relations multidimensionnelles existent entre les deux parties depuis 1969.

Leur ancrage politique et institutionnel s’est consolidé et ne cesse de gagner en intégration et en adaptation aux changements dans le monde, aux structurations régionales, aux étapes du processus européen et aux évolutions du Maroc lui-même, bien entendu.

Le Statut avancé conclu entre le Maroc et l’Union européenne à la suite du sommet européen du Luxembourg, le 13 octobre 2008, n’est ni une rupture avec le processus euro-méditerranéen engagé depuis 1995, ni une nouvelle architecture issue du nouveau projet, l’Union pour la Méditerranée.

Pour bien comprendre les dimensions, la portée, les instruments et les impacts du Statut avancé, il est indispensable de le replacer dans son cadre institutionnel pour mieux cerner ses caractéristiques.

Le cadre global

Contrairement à des déclarations répandues et souvent diffusées à tort, il n’y a pas de « pagaille en la demeure » dans les différents cadres institutionnels euro-méditerranéens. L’argument souvent invoqué considère que la politique européenne de voisinage est une remise en cause du processus de Barcelone et que le Statut avancé signe le dépassement de ce dernier, dont l’Union pour la Méditerranée est une mise à mort. Quant au partenariat oriental, il est interprété comme un contrepoids de

(1) Directeur de la Bibliothèque Nationale du Royaume du Maroc ; Professeur de l’Enseignement supérieur de Sciences économiques à la faculté de droit, Université Mohammed V-Agdal, Rabat ; Secrétaire général du G.E.R.M.

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tout le reste en faveur des six républiques qui ont émergé de l’implosion de l’Union soviétique : la Géorgie, l’Arménie, la Moldavie, l’Ukraine, l’Azerbaïdjan et la Biélorussie.

Peut-être la multitude des appellations et des instruments manque-t-elle de pédagogie, ce n’est pas pour autant qu’il y a confusion et désordre. Si confusion il y avait, ce serait du côté de celles et de ceux qui confondent cadre politique, déclaration, accord juridique et instruments de mise en œuvre.

Que retenir en définitive ?

Au-delà des joutes oratoires, somme toute conventionnelles dans les prises de position partisanes et conjoncturelles, le partenariat entre l’Union européenne et les pays du sud et de l’est de la Méditerranée est un processus, un cheminement non linéaire. Il est le résultat des positionnements des uns et des autres et des réalités politiques et géostratégiques dans le monde, au sein de l’Union européenne et dans chaque pays du sud et de l’est de la Méditerranée.

Les avancées et les résultats obtenus sont évidemment en deçà des pronostics et encore plus des attentes et des besoins. Tout le processus est handicapé par les conflits à dimension régionale, par les écarts de développement, par les dossiers litigieux, par les dynamiques sociales et politiques internes et par les enjeux de pouvoir et d’instrumentalisation des opinions publiques.

Le conflit israélo-palestinien est un blocage majeur dans le monde et en Méditerranée. La dynamique issue des accords de Madrid et surtout d’Oslo s’est totalement disloquée sous l’effet de l’intégrisme des gouvernements israéliens, de l’aveuglement intégriste radical des colons sionistes et des évangélistes intégristes américains, russes, ukrainiens, lituaniens, estoniens, polonais et autres hongrois et européens qui financent les colonies et autres expansions territoriales.

L’ascension de l’intégrisme islamiste avec le Hamas et l’incurie des responsables qui ont dirigé du côté palestinien enclavent toute la région dans un étau de surenchères idéologiques et religieuses où la Syrie et surtout l’Iran deviennent les véritables maîtres d’ouvrage des enjeux géostratégiques régionaux. L’agression disproportionnée et meurtrière contre les populations de Gaza a enclenché des forces dont les effets ne peuvent être, au moins à moyen terme, que négatifs et incontrôlables.

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Le Statut avancé et les perspectives du Maroc dans le projet euro-méditerranéen 17

L’invasion de l’Irak, la quasi-guerre civile qui y règne et le retour des vieux démons des règlements de compte de toujours entre les instrumentalisations des religions et des différentes appartenances entre chiites et sunnites en Irak et dans tout l’Est méditerranéen ne sont pas de bonne augure non plus.

L’équation islamiste de ces postures non seulement à travers le Hamas, le Jihad islamique, le Hezbollah, le Liban, le Yémen mais aussi à travers l’Afghanistan, le Pakistan et, bien entendu, la Turquie, puissance régionale émergente, est un paramètre déterminant dans tout scénario méditerranéen.

Toute perspective doit, pour être crédible, prendre en considération l’émergence de quatre pôles dans cette partie de la Méditerranée, et ce sont tous des pôles qui s’appuient sur ou sont adossés à un soubassement religieux de l’Etat et de sa puissance :

• Israël s’appuie sur son mythe biblique sioniste pour nier les droits des Palestiniens et les positions des justes et des démocrates israéliens ;

• le Hamas inscrit sa politique, non dans les intérêts de l’Etat de tous les Palestiniens mais dans un combat universel pour la Oumma islamique, rejoignant en cela deux forces antagonistes, les wahhabistes et les hanbalites, d’un côté, et les chiites, de l’autre ;

• l’Iran, chef de file du chiisme idéologique international, est au centre des rapports de force dans le monde ; sa probable maîtrise de la menace nucléaire en fera un acteur central en Méditerranée ;

• la Turquie, dont les négociations pour l’adhésion à l’Union européenne sont plutôt mal engagées, est une puissance politique et militaire dont le rôle est très important tant au sein des Etats musulmans et de l’Otan qu’entre l’Asie centrale et l’Europe.

L’Union européenne dont la puissance économique et technologique n’a pas les supports politiques et militaires correspondants, s’est enlisée dans son fonctionnement endogène. Les élargissements successifs ont accru ses dimensions, fait reculer ses frontières, lui ont donné de nouveaux voisins et continuent à lui lancer des défis inédits.

Bloqué pour des problèmes de procédures et de référendum, le développement institutionnel n’a été mis en œuvre qu’à la suite de la ratification du traité de Lisbonne par l’ensemble des 27 pays membres à la

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fin de 2009. Sa mise en œuvre et toutes les restructurations et les cultures qu’elle suppose ne sont pas chose aisée.

Il est légitime de se poser la question – les choses ayant tellement changé entre 1995 et 2009 – de savoir si la Méditerranée est aussi primordiale pour l’Europe aujourd’hui qu’elle l’était après les grands reclassements que le monde a connus suite aux grands événements de 1989 à 1993 !

C’est peut-être tout cela qui, a posteriori, peut donner une légitimité prospective et imaginaire au projet de “l’Union méditerranéenne” lancé par le président Nicolas Sarkozy à Tanger en octobre 2007.

L’Union pour la Méditerranée

Le projet annoncé par le candidat Nicolas Sarkozy aux élections présidentielles françaises connaît une évolution intéressante. Lancé en octobre 2007 à Tanger, ce concept revêtait alors une force et une énergie capables à elles seules d’ouvrir les plus grands chantiers de paix, de réconciliation et de co-développement en Méditerranée.

Le Président Sarkozy a dû faire des concessions face à la réaction de la Grande-Bretagne et de l’Espagne, mais surtout de la chancelière allemande Angela Merkel.

Le 10 décembre 2007 à Rome, le président du Conseil italien, Romano Prodi, et le Premier ministre espagnol, José Luis R. Zapatero, ont adhéré à ce qui est devenu l’Union pour la Méditerranée et non l’Union de la Méditerranée qui a remplacé l’Union méditerranéenne.

Le sommet franco-allemand de Hanovre en mars 2008 a définitivement ramené ce projet dans le giron de l’Union européenne, faute de quoi il était condamné à rester dans les promesses électorales comme des tas d’autres projets.

Le Conseil européen de mai 2008 a défini le cadrage institutionnel de ce projet, et c’est à Marseille en novembre 2008 que l’Union pour la Méditerranée a été officiellement proclamée à la suite du sommet des chefs d’Etat et de gouvernement qui l’a consacrée à Paris le 13 juillet 2008.

L’Union pour la Méditerranée est composée de 43 membres, ceux de l’UE (27) plus les 10 du processus de Barcelone auxquels s’ajoutent la

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Le Statut avancé et les perspectives du Maroc dans le projet euro-méditerranéen 19

Mauritanie, Monaco, le Monténégro, la Bosnie-Herzégovine, la Croatie, l’Albanie et la Ligue des Etats arabes.

Dorénavant il s’agit du Processus de Barcelone : une Union pour la Méditerranée. Elle est une organisation internationale intergouvernementale.

Le couperet sarkozien qui a décrété l’échec du Partenariat euro-méditerranéen et son remplacement par l’Union méditerranéenne n’est plus de mise. L’UPM est une étape dans le processus de Barcelone. Selon Benita Ferrero Waldner, commissaire européen aux relations extérieures, « il n’est ni une alternative à l’élargissement, ni une perspective d’adhésion ».

Qu’est-ce alors ?

Une union autour de projets concrets dont la vocation est de créer les synergies entre les entreprises et les associations, les autres acteurs non gouvernementaux et les programmes bilatéraux et multilatéraux.

Ces projets structurants devaient créer ces ponts et ces liens nécessaires que les conflits, les problèmes de sécurité, les écarts de conditions de vie et les peurs migratoires n’ont pas pu consolider jusqu’ici.

Le Conseil européen propose à la Commission européenne de mettre en œuvre quatre grands chantiers.

• les autoroutes maritimes et terrestres ;• la coordination énergétique et la promotion des énergies solaires ;• la dépollution de la Méditerranée ;• la recherche et la formation.

Aux quatre programmes cités précédemment s’ajoutent d’autres : la protection civile contre les catastrophes naturelles, une initiative méditerranéenne de développement des affaires et une université euro-méditerranéenne.

La conception, la réalisation et le financement de ces projets doivent se faire par des initiatives du Nord et du Sud.

Les financements privés étant les plus attendus, à côté de ceux de l’UE, les attentes vis-à-vis des pétrodollars du Golfe sont très fortes.

L’UPM est coiffée par deux co-présidents : un de la rive Nord et un de la rive Sud. Les présidents Nicolas Sarkozy et Hosni Moubarak sont les premiers choisis. L’alternance est prévue pour deux ans.

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À cause de l’invasion de Gaza par l’armée israélienne, le Conseil de l’Union ne s’est réuni au complet avec l’ensemble des membres pas même une seule fois depuis sa création.

Un secrétariat général hébergé à Barcelone est composé d’un secrétaire général, un Jordanien, et de six secrétaires généraux adjoints.

Si l’UPM a le grand mérite d’avoir essayé de sortir de sa torpeur le processus entamé en novembre 1995 à Barcelone, elle s’est, elle-même et pour le moment, enlisée dans ce qu’elle a voulu éviter : la prééminence de la politique et des rapports de force entre blocs, religions et nationalismes sur le reste !

La force suggestive de l’intitulé est une vertu en soi ; le terme d’union a le mérite, au moins dans les discours, de fixer un horizon, puisse-t-il créer un mythe rassembleur !

Mais en évitant de retenir et de souligner avec force le socle voulu d’un espace de démocratie et de droits de l’Homme, la charte de l’UPM tombe dans le piège du pragmatisme choisi comme stratégie. Il en est de même du contournement de la question centrale en Méditerranée, celle de la nécessaire paix israélo-palestinienne.

C’est de cette impasse qu’ont émergé de nouvelles volontés d’aller de l’avant. La Politique européenne de voisinage (PEV) avait retenu le principe que, faute d’avancer tous ensemble, entre l’UE et le PSEM il serait préférable que l’Europe progresse avec le pays ou les pays qui sont le mieux engagés dans les réformes et qui souhaitent des traitements adaptés et à la carte, le « Statut avancé » en est l’illustration.

Le Statut avancé

Après neuf ans de négociations sur un statut adapté à ses avancées dans la coopération avec l’Union européenne, le Maroc a pu finalement aboutir à un accord dans ce sens.

Le 13 octobre 2008, le Conseil de l’Union européenne réuni au Luxembourg a entériné l’accord sur le Statut avancé entre le Maroc et l’Union européenne. Le Maroc est ainsi le premier pays de la rive sud à bénéficier de ce statut.

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Les rappels sur le contexte institutionnel montrent bien que, quoique complexe, l’édifice euro-méditerranéen a une cohérence dans l’ensemble. Les problèmes qui se posent de façon aiguë sont au niveau des réalisations et dans l’impact sur les objectifs attendus et les attentes suscitées par cet élan généreux de novembre 1995, à la suite de la guerre des Balkans, de l’invasion de l’Irak et de l’accord israélo-palestinien.

Le Statut avancé n’est donc pas un nouvel accord d’association qui se substitue au reste. Il est une déclaration politique, dont l’objectif est de canaliser les moyens, les commissions de travail et les instruments déjà en place, pour créer une meilleure convergence entre le Maroc et l’Union européenne.

Il s’agit d’accompagner les réformes sérieuses et structurelles engagées par le Maroc depuis une quinzaine d’années.

La réforme de la justice et la gouvernance des institutions, la restructuration du système de l’enseignement et de la formation, de même que la modernisation de l’arsenal législatif et réglementaire sont les supports de la nécessaire stratégie d’harmonisation.

Tout cela est bien entendu complexe et ne peut se faire que de façon graduelle, progressive et maîtrisée. Le rôle de ces réformes de fond étant déterminant, les engagements des deux parties ne peuvent souffrir aucune tergiversation ou flottement.

Un accord de libre-échange global et approfondi devrait promouvoir une dynamique d’ouverture et de croissance pour plus d’investissements, plus de création d’emplois et plus d’échanges avec les marchés européens.

Cet accord concerne l’agriculture et les services dont l’importance et la complexité sont des enjeux de taille. Il concerne également d’autres domaines aussi importants que la propriété intellectuelle, la concurrence, l’accès aux marchés publics, la lutte contre l’émigration clandestine, contre le blanchissement de l’argent, contre les cultures et les exportations de drogue et pour le développement durable.

Les manifestations de cette convergence devraient se situer notamment au niveau des normes. Cette question est souvent méconnue et sous-estimée. Les normes ne concernent pas que l’Etat, mais de plus en plus les réseaux d’entreprises, d’associations, d’universités et autres centrales d’achat et de distribution. Elles touchent à des domaines aussi variés que les équivalences

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de diplômes, les curricula des formations, les échanges d’expertise, les droits d’installation, l’agriculture, les règles phytosanitaires, etc.

La dimension humaine « people to people » bien soulignée par la déclaration de l’Union pour la Méditerranée est centrale. Fernand Braudel souligne bien que « la Méditerranée est un carrefour, non pas une civilisation mais plusieurs civilisations superposées ».

Cette cohérence dans la convergence suppose l’adaptation des moyens et des instruments qui ont été mis progressivement en place, notamment dans le Plan d’action qui accompagne la Politique européenne de voisinage.

Tout en choisissant les priorités et les hiérarchisations qui lui conviennent dans cette perspective, le Maroc s’engage à progresser vers l’acquis communautaire.

Autant cela semble plutôt maîtrisé dans les échanges de produits manufacturés, autant tout est à faire dans les autres domaines. Sans cela, le libre-échange global restera biaisé, et la convergence des cohérences vers l’acquis communautaire se fera de façon éparpillée par secteur et par domaine d’activité.

L’une des questions, et non des moindres, est celle de la compensation du rétrécissement de l’acquis communautaire, notamment dans les services au fur et à mesure des élargissements successifs de l’Union européenne.

Les régimes préférentiels qui sont utilisés à 80 % par les pays de l’Union européenne alors qu’ils ne le sont qu’à 30 % par le Maroc, sont une autre contrainte à lever.

L’intégration progressive du Maroc aux marchés intérieurs de l’Union européenne est une perspective certes difficile mais très stimulante pour le Maroc.

Reste à donner des contenus à travers des politiques et des actions de mise en œuvre à cette articulation du Maroc par des programmations précises et viables et par l’interaction avec les réseaux européens et transeuropéens de coopération entre entreprises, entre universités, par la coopération décentralisée et les jumelages des collectivités territoriales et par des proximités humaines et associatives.

Le nouvel élan pris par la Fondation Anna Lindh pour le dialogue entre les cultures augure bien de toutes les promesses à tenir et de toutes

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les contraintes à lever, notamment pour promouvoir plus de respect entre les cultures et les religions et pour une meilleure connaissance et reconnaissance entre les peuples. Le rôle du dialogue sur les religions et le choix des valeurs démocratiques et des droits de l’homme constitue un des fondements de cette dimension humaine de voisinage et de coopération. Ce sont là des choses de plus en plus difficiles par les temps qui courent, mais ce n’est par parce que les résultats ne sont pas probants que le cadre et la philosophie ne le sont pas.

L’Union est de loin le premier pourvoyeur d’aide publique multilatérale et bilatérale pour le Maroc, et les prêts de la BEI sont en progression.

Le Maroc, qui a adhéré au Centre Nord-Sud pour l’interdépendance et la solidarité du Conseil de l’Europe en juillet 2009, exprime bien son option pour les valeurs démocratiques dont le Conseil de l’Europe est l’institution par excellence.

C’est bien en décembre 1999 que le Secrétariat général du Conseil de l’Europe avait proposé au Maroc cette adhésion. Une lettre du Premier ministre de l’époque, Abderrahman Youssoufi, avait demandé au ministre marocain des Affaires étrangères et de la Coopération de formaliser l’adhésion. Entre 1997 et 2002, un des représentants du Sud était Marocain. Il était vice-président du Conseil exécutif du Centre Nord-Sud, dont le président de l’époque, Miguel Angel, avait tout fait pour cette adhésion, qui a finalement eu lieu dix années plus tard. C’est tant mieux, même si rien n’explique que le ministère des Affaires étrangères marocain ait attendu dix ans pour répondre à cette invitation !

Le Conseil européen prévu pour le début du mois de juin 2010 à Barcelone devra discuter de la « feuille de route » sur le Statut avancé que le Maroc va présenter le 8 mars à Grenade au sommet Maroc-Union européenne. Un nouveau plan d’action avec de nouveaux instruments financiers sera alors négocié avec l’Union européenne pour la période 2011-2013.

Le Maroc devra choisir, parmi les milliers de normes de convergence, celles qui lui semblent prioritaires pour plus d’harmonie avec les marchés intérieurs européens.

Le Statut avancé, qui va probablement connaître un début d’application après le sommet européen, n’est pas gagné d’avance. Il est plein d’atouts

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qu’accompagnent d’énormes contraintes. Le Maroc et l’Union européenne ont bien saisi les perspectives stratégiques de cette étape avancée dans le rapprochement. Le Statut avancé est une convergence globale mais graduelle et par étapes cumulatives et vertueuses. Il suppose des refontes totales dans toutes les dimensions de la société, de la culture et de l’économie marocaines.

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d’un même desseinKamal EL MAHDAOUI (2)

La dimension européenne et euro-méditerranéenne, qui est un choix stratégique de la politique étrangère du Maroc, est marquée par son engagement à développer ses relations avec son voisinage immédiat. Dans ce cadre, l’engagement du Maroc pour le renforcement de ses relations avec l’UE ne date pas d’aujourd’hui, il a évolué depuis plusieurs décennies en passant par l’Accord de coopération, l’Accord d’association, le Plan d’action dans le cadre de la Politique européenne de voisinage (PEV) et, enfin, le Statut avancé en 2008. Ce choix stratégique traduit la conviction et l’engagement du Maroc qui considère que la coopération avec l’Union européenne est fructueuse pour les deux parties, peut accompagner la dynamique endogène du Maroc et peut contribuer positivement au projet de société moderne voulu par le Maroc.

En parallèle, les relations bilatérales Maroc-UE ont été accompagnées par une dimension régionale, en l’occurrence l’engagement du Maroc dans le cadre du Processus de Barcelone en 1995, mais aussi dans d’autres espaces sous-régionaux tels que le « Forum méditerranéen » et le « Dialogue 5+5 », où notre pays a joué un rôle actif en faveur du renforcement des relations euro-méditerranéennes. Cet engagement a été confirmé encore une fois pare fait qu’il a été l’un des premiers pays à soutenir « l’Union pour la Méditerranée » (UPM) – qui est basé sur les acquis du Processus de Barcelone – vu l’apport qualitatif de ce projet en termes de co-appropriation de la coopération via des structures paritaires (co-présidence et secrétariat) et sa dimension-projet susceptible de traduire la volonté politique du Partenariat et de concrétiser des actions de coopération qui renforceraient aussi bien la crédibilité du projet que sa visibilité dans la région.

(2) Conseiller, chef du service « Coopération régionale euro-méditerranéenne », direction des Affaires européennes, ministère des Affaires étrangères et de la Coopération.

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L’accent va être mis ici sur l’aspect régional (Processus ce Barcelone et Union pour la Méditerranée) qui a vu au cours de ces dernières années le lancement d’autres initiatives, en l’occurrence la PEV et le SA, tout en abordant l’interaction entre ces trois exercices.

Le Processus de Barcelone est né en 1995 dans un contexte particulier marqué par les espoirs de réaliser la paix au Proche-Orient dont voulait profiter toute la région pour hisser la coopération régionale vers, justement, une zone de paix, de sécurité et de prospérité. Toutefois, durant plusieurs années, le Processus de Paix au Proche-Orient a malheureusement tenu en otage le Partenariat euro-méditerranéen l’empêchant de réaliser pleinement ses objectifs.

D’autre part, il y a lieu de souligner un élément très important. Dans le cadre de l’Euromed, « l’esprit de Barcelone », si l’on peut se permettre cette appellation, est basé sur le consensus par lequel devrait passer toute décision ou action à l’échelle euro-méditerranéenne. Avec ce principe s’installe dès le départ une sorte d’autocensure, dans la mesure où il est quasi impossible d’arriver à ce consensus sur l’ensemble des sujets, surtout sur des thématiques-clés telles que la paix au Proche-Orient, la participation des ONG au Processus de coopération, les réformes politiques, les droits de l’homme, les droits des femmes, la démocratie, etc.

Cette situation difficilement gérable, et dont tout le monde était conscient, a été marquée par une évolution majeure en 2004, en l’occurrence, le lancement par l’Union européenne de la PEV.

Le Maroc a été l’un des premiers pays à appuyer et à adhérer à la PEV en adoptant le Plan d’action Maroc-UE. En adoptant cette démarche, le Maroc n’a pas cherché à se singulariser ou à viser l’exclusivité. Notre pays était et reste convaincu que cette nouvelle politique hisserait ses relations bilatérales avec l’UE et constituerait certainement un apport positif pour la coopération régionale dans son ensemble.

On constate donc que l’année 2004 a insufflé une nouvelle dynamique sur le plan régional. Car un an après, les partenaires Euromed se sont attelé à travailler ensemble sur des idées susceptibles de redynamiser le Processus de Barcelone (idées entérinées par les conclusions de la Conférence ministérielle du Luxembourg en mai 2005). Cette nouvelle dynamique a été couronnée par la célébration du 10e anniversaire du Processus de Barcelone, à l’occasion du sommet de Barcelone tenu en novembre 2005,

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Le Statut avancé, la Politique de voisinage et l’Union pour la Méditerranée… 27

où les chefs d’Etat et de gouvernement ont adopté un programme de travail quinquennal ainsi que le Code de conduite sur le terrorisme.

D’autre part, la PEV, en mettant en place un nouvel et un seul instrument financier pour la région, a intégré, de facto, dans son champ d’intervention, le financement du Processus de Barcelone. De ce fait, on a constaté la persistance du « cordon ombilical » qu’est l’Instrument de voisinage, liant Processus de Barcelone et PEV. Avec cette nouvelle donne, on a assisté à l’intégration et à la concrétisation du principe de « différenciation » dans le cadre régional, qui appuie de facto le principe de « coopération renforcée » prôné justement par le Maroc dans le cadre de la PEV. Ce nouveau tableau a abouti à une nouvelle phase dans la coopération euro-méditerranéenne selon la philosophie suivante : on peut travailler ensemble sur le plan régional, mais on peut le faire à plusieurs vitesses, avec un ou plusieurs partenaires et en fonction du degré et de la volonté du partenaire concerné à aller de l’avant sur un ou plusieurs axes de coopération.

Le résultat aujourd’hui est qu’on se trouve devant un aspect bilatéral (PEV et SA) qui est certainement bénéfique et complémentaire de la coopération régionale, dans la mesure où il assurera l’ancrage de la région à l’Union européenne en mettant en place un partenariat étroit entre l’UE et ses voisins et apporter une substance concrète à l’Union pour la Méditerranée. Car sans progrès sur les aspects bilatéraux, les progrès réalisés sur le plan régional risqueronnt d’être très faibles et seront compromis par les aléas conjoncturels que connaît la région, principalement à cause du blocage au niveau du Processus de paix au Proche-Orient. Dans le même ordre d’idées, le Statut avancé du Maroc auprès de l’UE aura certainement un effet de levier susceptible de renforcer la coopération – à travers le renforcement du dialogue politique et des mécanismes de décisions conjoints – entre le Maroc et l’UE, d’une part, mais aussi entre l’Union européenne et les autres partenaires méditerranéens, d’autre part, qui ont justement commencé à manifester un intérêt pour emboîter le pas au Maroc.

Aujourd’hui, avec l’Union pour la Méditerranée, on constate que la coopération régionale est renforcée, grâce à la dimension-projet de l’UPM et la mise en place de structures paritaires permettant la co-appropriation et une meilleure visibilité de l’Euromed. L’Union pour la Méditerranée

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s’érigera comme la plateforme d’une gouvernance euro-méditerranéenne rénovée, réussira le saut institutionnel et politique souhaité à l’échelle régionale et recréera un espace politique, économique et humain qui soit solidaire et compétitif.

De son côté, le Statut avancé est en parfaite symbiose avec le projet d’Union pour la Méditerranée, car il se met au service du même grand dessein, celui de l’intégration au niveau de la région euro-méditerranéenne. Il n’y a aucune contradiction entre la démarche du Statut avancé et celle de l’UPM. Au contraire, il y a convergence et complémentarité, car elles versent dans le même grand chantier de l’intégration de l’espace euro-méditerranéen. Le Maroc, qui a opté pour le statut avancé conformément au principe de la politique de voisinage selon lequel chaque pays avance à son propre rythme, a réaffirmé, par son adhésion rapide et sans équivoque à l’idée de l’UPM, qu’il participera pleinement à toutes les actions entreprises dans ce cadre. Dans ce contexte, on ne peut que souligner notre profonde conviction que le Maroc, l’Europe et la région euro-méditerranéenne ont le même destin et que la sécurité, la paix et le développement de tous ne peuvent être atteints sans l’engagement de chacun dans une entreprise de partenariat ambitieux bénéfique à l’ensemble de la région.

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Le « Statut avancé » Maroc/UE : quelle valeur ajoutée à la PEV ?

Larbi JAIDI Nezha ALAOUI (3)

Introduction

Dans un document conjoint adopté en octobre 2008, lors de la septième session du Conseil d’association UE/Maroc, l’Union européenne et le Maroc ont annoncé leur décision de renforcer substantiellement leurs relations de partenariat dans la perspective d’un statut avancé demandé par le Maroc. Cette décision a entériné les séries de propositions présentées et discutées à l’occasion des réunions régulièrement tenues par le groupe de travail ad hoc constitué lors de la session précédente et qui visaient à donner corps au «Statut avancé» en allant dans le sens de la concrétisation de cette ambition.

Une question légitime peut être posée initialement. Le Maroc a adopté et mis en œuvre un Plan d’action dans le cadre de la Politique européenne de voisinage (PEV). Pourquoi donc plaider en faveur d’un statut avancé ? Le cadre actuel ne suffit-il plus à l’ambition du Maroc ? Le cheminement partenarial Maroc-UE s’est développé de manière dynamique. Il s’est caractérisé par l’adaptation continuelle des relations, la capacité à rénover, de manière évolutive, le cadre contractuel qui les régit. Il a cherché à appréhender les évolutions de l’Union européenne, à travers ses élargissements successifs et rester à l’écoute des évolutions géostratégiques qui ont caractérisé la région. La proposition marocaine part de la volonté politique de consolider les acquis, d’ouvrir des perspectives. Un retour sur le bilan de l’Accord d’association, surtout sur son volet commercial, montre que celui-ci prédomine encore dans les relations et milite pour un réajustement des relations de partenariat. Le projet de statut avancé

(3) L. Jaidi, professeur d’économie, Université Mohamed V à Rabat et président de la Fondation Abderrahim Bouabid, Maroc ; N. Alaoui, avocate au barreau de Kénitra, coordinatrice des tribunaux arabes contre la violence et présidente de l’Union de l’action féminine.

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réaffirme le double ancrage du Maroc dans la politique de voisinage renforcée et dans la politique euro-méditerranéenne revitalisée par le Plan quinquennal de Barcelone II. Les deux dynamiques se renforçant dans une plus grande synergie d’action. Son référentiel, ce sont les expériences les mieux réussies de l’Espace économique européen et des phases de la pré-adhésion des pays candidats. Ses principes fondateurs : tendre vers une convergence réelle, institutionnelle avec l’Union européenne ; agir dans la coresponsabilité et la codécision pour un partenariat multidimensionnel.

Les deux partenaires ont donc décidé de revisiter le cadre contractuel qui les lie et d’anticiper sur la trajectoire future du partenariat et lui faire ouvrir un nouveau dessein plus ambitieux. Une telle ambition puise sa légitimité politique et sa pertinence stratégique dans la recherche d’une convergence entre le projet de société que le Maroc est en train de construire et les ambitions de l’Union européenne de promouvoir, à l’échelle de son voisinage, les valeurs d’ouverture, de progrès et de prospérité. Cette convergence devrait aider aujourd’hui à se projeter vers un partenariat privilégié qui soit en mesure de contribuer utilement à l’émergence d’un ordre euro-méditerranéen rénové.

Cette approche a toujours caractérisé la position du Maroc dans son dialogue avec l’UE. Elle illustre également la volonté et la capacité du pays à renouveler de manière constante sa relation avec l’UE par le biais d’initiatives nouvelles et ambitieuses. Celles-ci se sont souvent traduites par des propositions de coopération renforcée à même de tirer vers le haut le processus d’intégration euro-méditerranéenne. Le Maroc considère que le renforcement de l’intégration euro-méditerranéenne requiert l’introduction d’un degré important de flexibilité dans un partenariat à « plusieurs » sur le plan bilatéral, mais aussi sous-régional, ou thématique entre pays non voisins, car le processus Euromed ne saurait se résumer à une simple juxtaposition d’accords d’association.

Le Statut avancé ne procède donc point d’une tentation de singularisation ou d’un quelconque réflexe d’exclusivité. Il se veut plutôt une contribution, modeste et lucide à la fois, du Maroc à la nécessaire inflexion que devra connaître la gouvernance de l’espace euro-méditerranéen, car la nouvelle géo-économie telle qu’elle est en train de se développer, les enjeux sécuritaires qui émergent et l’imbrication croissante des intérêts stratégiques interpellent les partenaires pour concevoir, au sein de l’espace euro-méditerranéen, une approche rénovée du concept de voisinage, de

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manière à maîtriser les impératifs de la mondialisation, à en capitaliser les atouts et à affronter les défis et menaces à la sécurité collective.

Quelques limites de la zone de libre-échange bilatéral

La mise en place de la zone de libre-échange inscrite dans l’Accord d’association UE-Maroc signifiait essentiellement le passage progressif d’un régime préférentiel fondé sur des concessions commerciales unilatérales et asymétriques octroyées par l’UE aux exportations manufacturées marocaines à un accord d’association de nouvelle génération devant déboucher sur la mise en œuvre de concessions commerciales réciproques. Une telle réciprocité – en l’absence d’une libéralisation plus significative des échanges des produits agricoles – ne signifie en définitive rien d’autre que l’ouverture programmée, sur une douzaine d’années, du marché marocain aux productions industrielles en provenance de l’Union européenne. Le démantèlement tarifaire s’est effectué sur une période de douze ans, sur la base de quatre listes de produits. Le Maroc a supprimé progressivement tous les droits et taxes d’effets équivalent pour la totalité des marchandises industrielles en provenance de l’UE. 58,3 % des importations marocaines totales ont été touchées par le démantèlement (4). L’impact de cet accord sur la création de nouveaux flux de commerce entre le Maroc et l’UE dépendra – toutes choses étant égales par ailleurs – du comportement de l’élasticité des importations des partenaires en relation avec la croissance de leur PIB.

Un déficit commercial accentué

Le Maroc cherchait à tirer un gain potentiel de la croissance des économies européennes et du courant d’échange qu’elle génère. Mais, sachant que la communauté était un marché déjà relativement ouvert pour les exportations marocaines, il fallait s’attendre à ce que la croissance du marché européen bénéficie surtout aux entreprises concurrentes par le double effet de l’érosion du système préférentiel et de la généralisation progressive du libre-échange.

Par contre, la réduction des coûts d’accès des producteurs de l’UE sur le marché marocain induite par le démantèlement progressif du système tarifaire risquait de causer un détournement des flux au profit des offreurs

(4) La liste des catégories de produits et le rythme des réductions tarifaires à l’intérieur des calendriers ont été définis en fonction de la sensibilité des branches industrielles.

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intra-communautaires et au détriment des approvisionnements externes, réduisant ainsi le courant des échanges avec les partenaires.

Le marché européen représente en moyenne 65 % des exportations marocaines. En termes de solde commercial, le déficit des échanges industriels avec la CEE, principal fournisseur (74 %) et client (63,5 %) s’est creusé depuis la mise en place de l’Accord d’association. Les échanges commerciaux bilatéraux Maroc-UE ont enregistré une croissance moyenne de l’ordre de 9 % durant les sept dernières années de mise en œuvre de l’Accord d’association Maroc-UE (2001-2008), en s’établissant à 22,85 milliards d’euros en 2008, contre 11,93 milliards euros. Cette situation est liée à la hausse aussi bien des importations que des exportations. Les exportations sur le marché Européen sont par une évolution fluctuante et lente (7,76 milliards d’euros en 2008 contre 5,48 milliards en 2001). Les importations marocaines ont connu une croissance soutenue depuis 2001, elles sont passées de 6,56 milliards d’euros en 2001 à 14,67 milliards en 2008. Le déficit commercial avec l’UE s’est creusé davantage au détriment du Maroc, puisqu’il a atteint son plus haut niveau : 6,48 milliards d’euros en 2008, contre 1,08 milliard en 2001. Ce qui s’est traduit par une chute du taux de couverture qui s’est établi à 56 % en 2008 contre 83 % en 2001.

En dépit du ralentissement récent, le Maroc a enregistré une légère augmentation de sa part du marché de l’UE pour ses exportations de produits manufacturés. Les effets de l’Accord sur la dynamique des exportations marocaines ont été substantiellement différents selon les types de produits exportés. La croissance du marché européen a été plus favorable aux exportations dont l’élasticité de la demande est élevée. La part de marché du Maroc dans l’Union européenne sur les quinze principaux points forts à l’exportation ne dépasse 10 % que dans les secteurs de l’habillement. De fait, sa part de marché n’est relativement forte que sur les secteurs à faible intégration de valeur ajoutée. Dans les secteurs de la construction mécanique et électrique, de l’automobile, du bois et de la chimie, il n’occupe à ce stade qu’une place très modeste, loin derrière ses concurrents méditerranéens et asiatiques.

La concurrence sur le marché européen est très vive. Les principaux concurrents de l’industrie marocaine demeurent dans le court terme les partenaires méditerranéens de la Communauté. Il s’agit de la tunisie (textiles et engrais) et de la turquie (articles de bonneterie, vêtements confectionnés). Le champ de la concurrence s’élargit dans la durée. Il est

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utile de rappeler que nombre de pays qui ne disposent pas de relations privilégiées avec la CEE ont dores et déjà enregistré des performances sur le marché communautaire plus substantielles que les pays qui ont bénéficié de régimes préférentiels dans le cadre d’accords de coopération. La disparition du régime préférentiel a nivelé les conditions d’entrée des concurrents. Il s’en est suivi une redistribution des parts de marché en faveur des pays les plus agressifs.

La première manifestation de l’intensification de la concurrence est venue de la plus large ouverture du marché européen aux entreprises des Pays de l’Europe centrale et orientale (PECO) avant leur admission et de l’Asie. L’Union européenne s’est engagée dans le cadre des accords d’association avec les premiers et de l’OMC avec les seconds, à ouvrir son marché aux concurrents des Pays du Sud et de l’Est de la Méditerranée. Dans plusieurs secteurs sensibles, le Maroc a subi un effet de ciseaux entre les pays d’Asie et les PECO, qui ont vu chacun progresser leurs parts de marché.

Cette situation est particulièrement vérifiée dans le cas de l’habillement et des cuirs et chaussures. La forte progression relative des PECO par rapport au Maroc sur le marché de l’Union européenne a résulté essentiellement des nombreux avantages comparatifs de ces pays (formation et qualification de la main-d’œuvre, existence d’un tissu industriel, proximité géographique, disponibilité des services d’accompagnement). Le maintien de la spécialisation actuelle du Maroc aurait des conséquences particulièrement négatives sur son économie.

Sous un autre aspect, la concurrence a encore été plus accentuée par les efforts déployés par les entreprises européennes pour défendre leurs parts de marché. Ces entreprises déstabilisées ont misé non seulement sur l’innovation et la qualification de la main-d’œuvre mais aussi sur les restructurations et les rapprochements pour résister à une concurrence de plus en plus vive sur les prix. Les stratégies adoptées par les entreprises européennes consistaient à accroître leur croissance externe, grâce à la coopération entre rivaux dans des domaines d’intérêt commun, aux fusions et aux absorptions.

La concentration des débouchés de l’industrie marocaine sur quelques pays européens est un handicap à l’élargissement de la pénétration des produits marocains sur le marché unique. Les entreprises marocaines

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restent encore passives face à la dimension « européenne » de l’UE, que ce soit par une plus grande pénétration des produits sur des marchés de grande taille (Allemagne, Angleterre, Italie) ou par une plus grande insertion sur des marchés de moindre envergure mais fortement porteurs. Le remodelage de la carte de consommation européenne déjà entamé sera certainement et progressivement accentué par l’élargissement de l’Union européenne. Les entreprises marocaines devraient saisir les opportunités qu’offrent les perspectives de croissance de ces marchés à fort contenu en importations.

Un autre aspect de la dimension du marché européen consiste dans la diversité des produits en circulation dans ses différents segments. Or, une observation de la structure des exportations marocaines indique une faible diversification. Les vêtements constituent près de 50 % des ventes de produits manufacturés. Les produits finis de consommation restent dominés par la confection, la bonneterie, les articles chaussants et les tapis. Les produits alimentaires sont composés en majorité d’agrumes et de poissons. Peu de biens nouveaux ont intégré le panier d’exportation durant ces dernières années. C’est là aussi une autre source de vulnérabilité des entreprises nationales dans un marché aux potentialités immenses et largement diversifiées.

Sur la base de la réciprocité, le Maroc a ouvert progressivement son marché local aux produits industriels européens. Le niveau de couverture de la demande nationale en produits manufacturés importés est de 35 %. Les produits en provenance de la communauté représentent une très large partie de ces importations, soit 74 %. Certes, on peut considérer que la libéralisation du commerce extérieur, entamée depuis le milieu de la décennie quatre-vingts, prédisposait l’économie marocaine à évoluer progressivement vers une zone de libre-échange avec l’Europe. Selon les données disponibles, la moyenne des taux de protection tarifaire des secteurs industriels varie de 10 % à 45 % selon les activités (5).

(5) Globalement, la protection tarifaire est plus élevée que la moyenne nationale dans l’agro-alimentaire où certains produits sont « surprotégés » (farines, sucre). Les produits textiles se caractérisent aussi par une protection tarifaire plus élevée que la moyenne (notamment pour le fil et le tissu en coton). Dans la chimie et la parachimie, la protection est en général modérée. Quant aux industries métalliques, métallurgiques, électriques et électroniques, la protection élevée est limitée à quelques produits.

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Mais l’établissement de la zone de libre-échange a augmenté le potentiel de pénétration des produits européens sur le marché intérieur. Cet élargissement a concerné plus sérieusement les secteurs où la part des importations était encore limitée, où le taux de protection tarifaire était élevé et tendait à se réduire et où le degré de compétitivité des industries nationales était faible.

L’inadaptation de la politique industrielle au contexte de l’ouverture

Les effets de la zone de libre-échange sur le tissu industriel et l’estimation de ses avantages nets pour l’économie marocaine ont varié en fonction des secteurs, de leur degré d’ouverture préalable et de leur niveau de compétitivité. On s’attendait à ce que la progressivité de mise en application de ce projet et les dispositions générales et particulières qui ont accompagné sa mise en œuvre (Programme Meda, notamment) permettraient d’envisager une ouverture sans heurts. A la condition évidemment que les politiques d’accompagnement soient efficientes et que les choix opérés s’inscrivent dans la perspective d’une stratégie industrielle à moyen terme. Ce ne fut pas le cas. Il a fallu attendre l’année 2005 pour voir le Maroc s’engager dans une nouvelle politique industrielle en mettant en place un programme volontariste, ciblant des secteurs porteurs et mettant en place des dispositifs transversaux pour relever la compétitivité de l’industrie marocaine (6). Ce programme ne peut avoir de retombées effectives à moyen terme. Dans cette phase de transition, le système productif national, atomisé en unités petites et spécialisées dans les séries courtes ou de ré-amortissement, est resté exposé aux chocs de l’ouverture, ne disposant pas d’une capacité compétitive élevée face à l’intensification de la concurrence interne et externe.

Au-delà du comportement des indicateurs de performance (croissance moyenne à un rythme de 3,2 par an entre 2000 et 2007) et en dépit de la diversité de ses activités, l’industrie marocaine continue de souffrir de profonds déséquilibres qui l’handicapent face à l’ouverture de ses frontières. La compétitivité ne requiert pas seulement une capacité à s’insérer dans un processus d’ouverture dans une phase donnée mais aussi

(6) Le Programme Emergence a été adopté par le ministère de l’Industrie en 2004. Sa mise en œuvre est plutôt lente à se dessiner.

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l’existence d’un appareil de production diversifié capable de générer une croissance de longue durée. Dans cette perspective, la composition du tissu industriel, sa densité et sa répartition harmonieuse dans l’ensemble des secteurs et des tailles sont également des facteurs d’efficacité.

L’inégal développement entre les différentes activités est un des aspects des distorsions du tissu industriel. Les industries de transformation restent principalement axées sur la production de biens de consommation qui concerne près de 50 % de la production totale, alors que les biens d’équipement comptent pour moins d’un dixième. Dans leur grande majorité, les produits fabriqués reçoivent un faible degré de transformation, et le taux de valeur ajouté ne progresse pas suffisamment. La diffusion du tissu industriel sur l’ensemble du territoire est trop lente. Le manque d’intégration de l’industrie nationale est un autre aspect des déséquilibres qui la caractérisent. Il se manifeste dans l’inarticulation de la croissance industrielle à celle des mines et de l’agriculture. La faiblesse de l’intégration apparaît aussi dans la médiocrité des échanges croisés ou intra-industriels.

La croissance de l’industrie nationale demeure une croissance à faible productivité. Bien plus, les indices d’évolution de la productivité réelle dans l’industrie nationale montrent une régression dans 8 branches sur 15 entre 1999 et 2005. Il s’avère que les secteurs traditionnellement exportateurs ne font pas preuve d’innovation dans l’organisation du travail et enregistrent des pertes de productivité. Une des causes de cette régression est le vieillissement de l’appareil productif dans certaines branches. La deuxième raison est le sureffectif dans certaines branches et entreprises publiques. Enfin, le bas niveau des salaires ne stimule pas le rendement.

Des stratégies d’entreprise peu évolutives

Parallèlement à la nécessaire amélioration de l’environnement national, tâche qui interpelle plus fondamentalement les pouvoirs publics, l’entreprise nationale est aussi appelée à relever les défis qui la concernent, plus particulièrement pour espérer un positionnement favorable dans la dynamique du marché européen. L’examen du tissu industriel national face aux mutations de l’environnement révèle sa profonde hétérogénéité. La densification du tissu par les nouvelles créations d’entreprise cache

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un déséquilibre entre les unités qui le composent. D’un côté, il y a une prédominance de PMI (moins de 50 employés) qui forment plus de 70 % du total des unités industrielles ; d’un autre côté, un petit noyau de grandes entreprises dont la plupart sont des sociétés publiques dont les effectifs dépassent les 500 personnes. Il s’agit de distorsions structurelles qui freinent la réalisation d’une croissance soutenue et régulière. Du fait des limites de la taille, ces entreprises mènent moins d’actions dans les domaines essentiels de la compétitivité: formation, organisation, technologie. La raison est liée à la faible technicité du management, les équipes dirigeantes étant naturellement peu importantes. La compétitivité intrinsèque des entreprises dépend de la compétence accumulée pour traiter ces fonctions stratégiques.

Les entreprises nationales devaient donc répondre au changement de l’environnement par des stratégies adaptées. Or, les entreprises nationales n’ont pas encore assimilé que les avantages comparatifs, les structures du marché et les comportements ne peuvent être considérés comme des données. Elles n’ont pas encore compris que la compétitivité est un jeu séquentiel résultant d’une série d’interactions entre des acteurs actifs. Un jeu dans lequel la mise en œuvre des nouvelles formes d’organisation, l’ouverture de nouveaux marchés et l’introduction de nouveaux produits et procédés mettent continuellement en cause les positions acquises et modifient les règles du jeu.

La reconnaissance généralisée des normes constitue des acquis de discipline visant à la qualité régulière des produits. Une inquiétude semble persister auprès de quelques producteurs nationaux de voir ces instruments utilisés pour faire obstacle à un accès libre au marché. Surtout en ce qui concerne les normes externes c’est-à-dire l’emballage, les conditions de commercialisation, de transport et de manutention. On observe un retard de l’entreprise marocaine à mettre sur le marché des produits conformes aux normes internationales.

Il était donc particulièrement recommandé de renforcer la taille des offres et consolider les positions acquises par des économies d’échelle pouvant conduire à des effets susceptibles, dans les secteurs concernés, de déboucher sur des gains importants: un accroissement de la production, une nouvelle répartition de la production entre les entreprises et une réallocation des actifs. Cette perspective appelait une restructuration des entreprises dont l’avantage est d’accélérer l’entrée sur de nouveaux

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marchés ou la réalisation de nouvelles productions à moindre coût. De plus, la mise en commun de ressources pouvait fournir des financements à des conditions plus favorables; elle pouvait également répartir les coûts fixes élevés et améliorer le savoir-faire technologique. Or, de ce point de vue, le programme de mise à niveau des entreprises marocaines a accusé un retard particulièrement handicapant. Ses dispositifs, ses mécanismes d’appui (financement), son ciblage ont souffert de grandes insuffisances et ont accentué la réticence des entreprises à adhérer à ce programme.

La dynamique du marché unique a eu des implications sur le secteur de la distribution de l’UE. Ont ainsi été mises en œuvre des associations se concrétisant par des prises de participation croisées, voire des fusions. La collaboration entre distributeurs (achats groupés, marques commune, etc.) est aussi une méthode de plus en plus suivie pour affronter le grand marché dans de bonnes conditions. Ces modes de collaboration renforceront la puissance d’achat face aux producteurs notamment des petits pays comme le Maroc. Plus précisément, le regroupement des approvisionnements a permis à ces grands distributeurs de rechercher des fabricants nationaux susceptibles de produire à façon et de favoriser l’obtention de grandes séries. Les entreprises exportatrices marocaines ne sont pas parvenues à renforcer leur pouvoir de négociation face aux grands distributeurs, elles n’ont pas initié des actions en commun qui auraient permis de répartir les risques et d’explorer davantage de pistes. Elles ont souffert d’un manque d’effets de complémentarité par la combinaison d’informations sur les marchés et de capacité en matière de marketing.

L’entreprise marocaine avait un grand avantage à gérer les changements impulsés par la réalisation du marché européen et les accords d’association (dimension, concurrence, normalisation des produits, etc.) en développant une stratégie de coopération multiforme avec les entreprises européennes (commerciale, productive, technologique). L’objectif étant de créer et de valoriser des relations communes denses et variées en vue de maîtriser à long terme la présence sur les marchés. Il est généralement admis que l’impact favorable de l’accord de libre-échange sur le solde commercial ne se produira qu’à long terme lorsque des investissements étrangers auront permis de renforcer les structures productives de l’économie récipiendaire. Les délocalisations vers le Maroc ne représentent actuellement, selon toute vraisemblance, qu’une part limitée des délocalisations européennes vers l’ensemble du monde. Elles sont principalement le fait de PME

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investissant sur place ou recourant à la sous-traitance, dans des secteurs bien précis et limités: textile-habillement, cuirs, construction électrique, biens de consommation courante. Quelques grandes entreprises sont pour leur part présentes dans des secteurs tels que l’électronique (SGS Thomson au Maroc) ou la construction mécanique (Merlin-Gerin).

L’encouragement de la délocalisation appelle une identification des conditions et des secteurs dans lesquels pourraient se développer à moyen terme des partenariats industriels plus étroits avec le Maroc, permettant aux entreprises européennes de demeurer compétitives par rapport à leurs homologues occidentales et aux entreprises marocaines de conquérir des parts de marché dans ces pays et de maîtriser ainsi une situation plus concurrentielle de plus en plus marquée.

Le Statut avancé : une feuille de route ancrée sur le Plan d’action

Les engagements réciproques qui figurent dans ce document conjoint tracent une feuille de route pour le développement progressif et soutenu des relations bilatérales dans de nombreux domaines. Les actions et propositions retenues couvrent les dimensions politique, économique, financière et humaine ainsi que la participation du Maroc à certains programmes et agences communautaires. Les partenaires considèrent que le Statut avancé devra se traduire par un raffermissement de la coopération politique entre le Maroc et l’Union européenne en vue d’une plus grande prise en compte de leurs priorités stratégiques respectives, par une intégration progressive du Maroc au marché intérieur de l’UE avec notamment un soutien financier approprié et en phase avec l’ampleur et le caractère ambitieux de cette nouvelle évolution. Le Statut avancé a également pour vocation une plus grande implication des entités territoriales, des acteurs économiques et des partenaires sociaux des deux parties dans l’objectif de promouvoir les synergies entre ces intervenants et de concrétiser l’appropriation commune de ce partenariat.

Le Statut avancé permet de donner une nouvelle impulsion à la coopération de l’UE avec le Maroc, et demain avec les autres pays impliqués dans la PEV, notamment en relevant le dialogue politique, en renforçant les mécanismes de décision conjoints et en augmentant la visibilité du partenariat. D’un point de vue concret, les actions retenues tracent une « feuille de route » évolutive pour le développement des relations bilatérales UE-Maroc. On peut s’interroger sur la valeur ajoutée

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du Statut avancé par rapport aux engagements pris dans le cadre de la PEV et du Plan d’action établi à cet effet.

Le dialogue politique et stratégique : une dimension de « plus »

Le projet de « Statut avancé » apparaît dans un premier temps comme un appui aux réformes politiques réalisées par le Maroc ces dernières années pour faire progresser la démocratisation et la modernisation de la société, qui bénéficient de l’appui de l’UE, notamment le programme de modernisation du système judiciaire en vue d’instaurer davantage d’indépendance et d’impartialité. Le programme de modernisation de l’administration a été lancé afin de renforcer les capacités de l’administration et de la rendre plus transparente et plus accessible pour les citoyens, la décentralisation et la dévolution accrue de pouvoirs aux collectivités locales.

Le Maroc joue un rôle de pointe à cet égard. Des progrès importants ont été accomplis grâce à la mise en place d’un mécanisme législatif de protection et de promotion des droits de l’homme, notamment par l’adoption d’une loi réactualisée contre le recours à la torture, en conformité avec les critères des Nations Unies. Les réserves relatives à un certain nombre de conventions sur les droits de l’homme ont été levées. Des progrès ont été réalisés dans le domaine de la liberté de la presse. La réforme du code de la famille en 2004 a permis de grandes avancées concernant l’élaboration d’un cadre juridique garantissant l’égalité entre les hommes et les femmes. Le Maroc a aussi renforcé sa politique sociale à travers les objectifs poursuivis par l’Initiative nationale pour le développement humain, qui accorde la priorité aux investissements dans les zones les moins développées du pays et vise à fournir les services de base qui font cruellement défaut, tels que l’eau potable et l’enseignement.

Toutefois, si des avancées concrètes sont été réalisées en matière de démocratie et des droits de l’homme, les réformes restent encore à consolider ou à entreprendre. Des entraves à la liberté subsistent, les dysfonctionnements du système judiciaire risquent de vider de leur contenu les réformes législatives entamées. La réforme de la justice, annoncée comme prioritaire, est ainsi un défi essentiel qu’il est urgent de relever pour asseoir durablement l’État de droit, assurer une protection efficace des citoyens et améliorer le climat des affaires.

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C’est la dimension politique des engagements prévus par les deux parties et consignés dans le document en référence qui apporte un « plus » aux initiatives et programmes déjà lancés. Dans le document conjoint, les deux parties attachent au Dialogue politique et stratégique du Partenariat une importance primordiale. Aussi, le Maroc et l’UE envisagent une série de dispositions de concertation : il en est ainsi de la possibilité d’organiser un sommet Maroc-UE ; de tenir des réunions à New York entre le ministre des Affaires étrangères du Maroc et le Haut Représentant de l’UE ; d’organiser des réunions informelles entre le ministre des Affaires étrangères du Maroc et ses homologues européens ; de prévoir une participation des ministres des départements sectoriels du Royaume du Maroc avec leurs homologues européens ; d’envisager une participation de l’Ambassadeur et/ou haut(s) fonctionnaire(s) du Royaume du Maroc aux réunions des comités et groupes du Conseil de l’Union européenne.

Toutefois, cette série de propositions a fait l’objet tout simplement d’un accord de principe pour tenir des réunions sur une base ad hoc, en marge des réunions régulières du Conseil des ministres de l’UE et des enceintes multilatérales du système des Nations Unies et d’autres organisations internationales. L’objectif d’assurer une meilleure coordination des positions des deux partenaires est retenu, mais les modalités de la concertation restent à définir d’un commun accord et au cas par cas.

Un appel a été adressé aux institutions parlementaires pour la création d’une commission mixte Parlement marocain-Parlement européen. Ces institutions seront formellement saisies pour l’obtention pour le Parlement marocain du statut d’observateur à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. Un autre engagement a été prévu dans les dispositifs annoncés en vue d’assurer une cadence régulière des réunions du Dialogue politique renforcé. Des réunions thématiques entre le Maroc et l’UE (secrétariat général du Conseil/Commission) seront programmées, mais les champs de ces réunions thématiques n’ont pas été arrêtés. Ils concernent vraisemblablement la question de la démocratie, des droits de l’homm et de la sécurité collective.

Par ailleurs, la coopération sur les questions régionales et internationales ainsi que sur les menaces communes est un axe majeur des relations entre les deux partenaires dans la perspective de promouvoir la paix et la stabilité et de contribuer à la prévention et à la résolution des conflits. Il en est ainsi du conflit du Sahara occidental qui demeure un obstacle majeur

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sur la voie d’une plus grande stabilité régionale, de la coopération et de la prospérité. Il en est de même de la gestion commune de la pression migratoire sur les frontières méridionales de l’Europe en convenant que l’immigration clandestine doit être traitée dans le contexte plus large d’un dialogue et de la coopération transfrontalière avec tous les pays d’Afrique du Nord, car l’immigration clandestine est une question qui relève d’une responsabilité commune et nécessite une approche régionale dans une optique de co-développement.

Le principe d’un accord-cadre pour la participation du Maroc aux opérations de gestion des crises (civiles et militaires) avec l’UE a été retenu dans la perspective de renforcer la coopération et le dialogue Maroc-UE dans le cadre de la PESD. Cet objectif présuppose cependant le développement d’une réflexion commune pour une gestion co-responsabilisée des enjeux sécuritaires. Cet exercice devrait à cet effet passer par la définition d’une culture commune de la sécurité. Ce cheminement vers une gestion coresponsable des enjeux sécuritaires reste tributaire de trois paramètres majeurs :

– l’intégration de la rive sud comme un partenaire actif de l’espace euro-méditerranéen ;

– la consolidation d’un environnement géopolitique favorable qui passe inéluctablement par l’engagement actif de l’UE pour la consolidation du Maghreb ;

– l’approfondissement du dialogue de sécurité dans le cadre de la PESD, ce qui serait de nature à donner aux partenaires méditerranéens une bonne visibilité.

Le Maroc apporterait en outre son soutien aux déclarations PESC au cas par cas. La coopération au sein du programme régional Euromed sur la prévention, la préparation et la réponse aux désastres naturels sera poursuivie. Il en est de même du développement du partenariat pour la paix et la sécurité en Afrique: notamment à travers une contribution du Maroc à la Facilité de la paix pour l’Afrique.

Sur le volet de la Coopération sécuritaire, la feuille de route propose d’approfondir la coopération par la conclusion d’accords (entre le Maroc et le CEPOL); entre le Maroc et l’Office européen de police (Europol). L’UE et le Maroc ont choisi de renforcer leur coopération en matière de lutte contre le terrorisme international. Le Plan d’action avait amorcé la coopération

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dans ce domaine par des dispositions antiterroristes approuvées dans le contexte de la Politique européenne de voisinage et qui dessinent le cadre d’un dialogue structuré et stratégique sur la lutte contre le terrorisme. Les deux parties avaient retenu huit axes de coopération portant essentiellement sur la formation et l’assistance technique. Toutefois, le Maroc considère que le terrorisme ne doit pas détourner l’attention des véritables enjeux et défis de la région, qui demeurent l’instauration d’une paix durable, le développement socio-économique, la consolidation démocratique et la promotion du rapprochement culturel et humain. Dans le domaine de la coopération judiciaire et de la promotion des droits de 1 ‘homme, le document conjoint prévoit un agenda d’actualisation et d’harmonisation du cadre conventionnel et la création d’instruments spécifiques pour le développement des mécanismes de contrôle des frontières.

L’intégration profonde ou l’affirmation d’une volonté

Le Maroc attend de l’évolution vers le Statut avancé avec l’Europe une opportunité d’approfondir son accès au marché communautaire et de franchir un « jalon » additionnel dans la perspective d’une intégration approfondie de son économie dans le marché unifié européen. La feuille de route affirme la volonté de mettre en place un espace économique commun, entre l’UE et le Maroc, caractérisé par une intégration poussée de l’économie marocaine à celle de l’UE. Cet objectif est recherché par la mise en œuvre d’actions conjointes dans quatre axes complémentaires : le rapprochement du cadre législatif du Maroc à l’acquis communautaire, la conclusion d’un Accord de Libre-échange global et approfondi, la coopération économique et sociale et l’adhésion du Maroc aux réseaux transeuropéens et coopération sectorielle.

L’intégration du Maroc au marché intérieur de l’Union européenne constitue un objectif ambitieux qui ne peut être atteint qu’à travers un processus graduel et séquencé, basé sur la reprise progressive de l’acquis communautaire de l’UE. Il faut observer que l’effet positif du démantèlement tarifaire a été freiné par l’augmentation des obstacles non-tarifaires mis en place sur le marché intérieur européen. Ce mouvement est un processus continu qui vise la protection du consommateur et la protection de l’environnement. La législation de l’accès au marché européen repose sur un dispositif constitué par un ensemble de quelque 2000 directives et 650 000 normes. Compte tenu de l’importance du

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marché européen pour les exportations nationales (60 % des exportations en moyenne), la question de la transposition des normes européennes est donc un sujet prioritaire.

La reprise de l’acquis communautaire sera probablement un processus long et coûteux. Elle implique des investissements notamment dans le domaine de l’environnement, de la santé et de la sécurité au travail et de la santé publique. Elle suppose une modernisation dans nombre de secteurs. Des structures administratives efficaces, du personnel formé sont nécessaires pour mettre en œuvre la réglementation communautaire dans ces domaines ainsi qu’en matière de protection des consommateurs, de règles phytosanitaires et vétérinaires et de contrôle des frontières extérieures. L’ampleur de la tâche sur le plan législatif, administratif ou financier et les obstacles d’ordre politique expliquent les demandes de coopération technique et de périodes transitoires formulées par le Maroc.

Pour les pays de candidats à l’adhésion, la Commission européenne avait défini un cadre pour les périodes transitoires. Elle proposait d’opérer une distinction. En s’inspirant de ce modèle, le Maroc pourrait mieux cibler les domaines liés à l’approfondissement du marché unique pour lesquels des mesures réglementaires pourraient être mises en place rapidement. Pour les domaines de l’acquis dans lesquels des adaptations considérables sont nécessaires et qui exigent un effort substantiel, et notamment d’importantes dépenses financières (environnement, énergie ou infrastructures par exemple), des régimes transitoires pourraient être étendus sur une période déterminée.

Dans cette logique, il semble nécessaire de s’appuyer en priorité sur les structures de l’Accord d’association (sous-comités et groupe de travail) et sur les instruments de la coopération de jumelage, en leur donnant une nouvelle impulsion afin de systématiser l’approche dans tous les secteurs. En tout état de cause, il n’apparaît pas opportun de se prononcer dans ce domaine avant que ne soient ouverts tous les chapitres de la négociation : seule une vision globale de la négociation permettra d’envisager une stratégie particulière et, essentiellement, des concessions mutuelles incluant des périodes de transition.

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L’Accord de libre-échange approfondi et global : tout sauf la mobilité du travail

Le document conjoint fait référence à la nécessité de la conclusion d’un Accord de libre-échange approfondi (ALEA) qui doit permettre à terme « d’instaurer la libre circulation des marchandises (mesures tarifaires et non tarifaires), des services, des capitaux et de la présence temporaire des personnes physiques à des fins professionnelles ».

Les négociations commerciales en cours (libéralisation du commerce des services et du droit d’établissement, d’une part, et libéralisation du commerce des produits agricoles, des produits agricoles transformés et des produits de la pêche, d’autre part) s’inscrivent dans ce cadre et seront complétées par de nouvelles négociations sur d’autres aspects de l’Accord. Les nouvelles négociations devraient prendre en considération la sensibilité de certains secteurs, prévoir une asymétrie des engagements et une progressivité de leur mise en œuvre.

Un ensemble de mesures, formant un ensemble indivisible et cohérent, sont suggérées dans le document conjoint pour concrétiser l’ALEA d’un point de vue opérationnel : il s’agit notamment de l’accès aux marchés publics, de la facilitation de l’accès au marché pour les produits industriels, des mouvements de capitaux et des paiements, des mesures sanitaires et phytosanitaires, des droits de la propriété intellectuelle et industrielle, de la politique de concurrence, de la protection du consommateur… Cette liste n’est pas exhaustive, et elle sera accompagnée de mécanismes d’alerte ou de consultation rapide en matière de mesures ayant un impact sur le commerce et l’investissement.

Dans ce cadre, lors des négociations Maroc-UE en matière de libéralisation des échanges agricoles, le Maroc avait réitéré son engagement dans ce processus en vue de mettre en place un partenariat réel fondé sur une ouverture progressive et maîtrisée des marchés et adaptée aux réalités socioéconomiques du Maroc.

Le chapitre agricole représente une part importante du commerce total entre l’Union et le Maroc. Les importations agricoles communautaires en 2005 se sont élevées à plus de 13 % du commerce bilatéral et les exportations agricoles de l’Union vers le Maroc ont représenté 5 % des exportations totales vers le Maroc. Depuis l’entrée en vigueur de l’accord

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d’association en 2000, les échanges agricoles sont soutenus et font preuve d’un dynamisme constant. Cette tendance devrait connaître un saut quantitatif et qualitatif à l’issue des nouvelles négociations que les deux parties ont entamé en 2006 sur la base de la feuille de route agricole élaboré à la suite des recommandations de la rencontre des ministres Euromed des Affaires étrangères tenue à Luxembourg (31 mai 2005).

Dans la perspective d’une libéralisation des échanges agricoles, le Maroc propose une approche par produit et l’aménagement de périodes de transition. La libéralisation ne peut être que modulée, progressive et asymétrique. Durant la période de transition, des aides sociales ou structurelles pourraient en outre favoriser la modernisation des exploitations et l’emploi, dans le cadre de programmes de développement agricole et rural. Un autre volet, et non des moindres dans cette approche, serait l’appui au développement rural fondé sur la multifonctionnalité. Un appui qui tendrait à maintenir une agriculture dans les zones en difficulté, par le développement des infrastructures et services de base, la promotion d’une agriculture diversifiée et porteuses de valeur ajoutée et le développement d’activités alternatives comme l’artisanat et le tourisme.

L’offre marocaine obéit à deux principes : d’une part, assurer un meilleur accès au marché communautaire pour les produits marocains et, d’autre part, fixer des délais suffisants pour gérer les transitions et l’accompagnement de l’UE dans le cadre de l’ouverture du secteur agricole marocain. Toutefois, force est de constater que les négociations sur cette libéralisation portent essentiellement sur la vitesse et la méthode pour y parvenir au détriment des enjeux et limites liés à une ouverture brutale des marchés agricoles. Pour le Maroc, ces enjeux sont liés à une dimension économique, sociale et environnementale. En revanche pour l’UE, les enjeux se posent en termes de concurrence exercée par les pays méditerranéens, surmontée par une régulation et une gestion des marchés.

Toujours dans le même domaine de l’intégration approfondie, la libéralisation des services constitue un autre enjeu de l’accès au marché. Les services représentent ainsi 39 % du PIB du Maroc et 23 % de ses recettes en compte courant. Une ouverture plus grande et efficiente des activités de services permettrait des gains sensibles en PIB et pourrait revigorer le partenariat. Dans le cadre de l’Accord d’association, il n’existe pas de liste séparée pour la libéralisation du commerce des services au-

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delà de celles mentionnées par l’AGCS lui-même. La question de la libéralisation des services s’annonce plus complexe que celle des biens. La fourniture est généralement peu transfrontalière, et elle implique la proximité du fournisseur et du client et le déplacement des personnes ; les imperfections du marché sont nombreuses et il y a des difficultés à mettre en place des régulations concurrentielles. L’hétérogénéité des services rende difficile l’adoption d’un cadre commun. Il y a d’abord les services produits (le tourisme), la construction, les professions indépendantes, le petit commerce. Il y a aussi les services facteurs qui agissent sur les prix ou sur l’investissement (les banques, les assurances), il y a ensuite les services réseaux à externalités fortes. On peut distinguer entre les services à la personne (moins mobiles, le coiffeur, l’infirmière) et les services qui ne sont pas à la personne (comptabilité, consulting, centres d’appels…). Les deux partenaires estiment que la libéralisation des services doit être adaptée à la situation particulière de chaque sous-secteur, afin de ménager les transitions nécessaires. Si elle doit être compatible avec les règles fixées par l’OMC, elle doit aussi être envisagée dans une perspective de co-développement entre le Maroc et l’Union européenne, en privilégiant les activités de service les plus créatrices d’emplois au Maroc caractérisé par un nombre élevé de jeunes chômeurs diplômés.

La migration : le domaine évacué

La coopération dans la mise en œuvre de l’approche globale dans le domaine de la migration est assurément la partie la moins approfondie de la feuille de route. Tout en reconnaissant l’importance de la coopération dans ce domaine, l’UE affirme qu’elle ne serait prête à la développer que lorsque les négociations relatives à l’accord de réadmission auront été achevées avec succès. Sur cette question, l’UE maintient sa position sur la présomption de la nationalité marocaine pour demander la réadmission, et le Maroc n’accepte pas la clause du « silence vaut consentement » de réadmission dans le cas de dépassement du délai de réponse. Le Maroc demande aussi que « le paquet » de l’accord de réadmission soit accompagné d’un accord de facilitation de visa, d’actions de réinsertion dédiées aux réadmis, d’un mécanisme de promotion de la migration légale et d’un appui technique et financier pour la mise en œuvre de l’accord.

L’UE n’a pas encore donné d’indications sur ce paquet de réadmission. Dans ce contexte, le Maroc considère qu’il ne peut faire davantage de

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concessions à ce stade des négociations dont la partie la plus difficile reste encore à mener sur la question de la flagrance et le procédurier y afférent, d’autant plus que l’accord sera lourd de conséquences, notamment financières, pour le Maroc et nécessitera par conséquent des mesures d’accompagnement pour la réussite de sa mise en œuvre. Dans le mesure où il n y a pas de vide juridique à l’heure actuelle, puisque les accords bilatéraux sont en place avec les Etats de l’UE qui accueillent les plus forts contingents de la communauté marocaine, donner le temps au temps semble être le point de convergence des deux parties sur cette question.

Faut-il néanmoins rappeler que l’UE propose, à travers le concept de partenariat de mobilité, une nouvelle démarche pour la coopération avec les pays tiers qui collaborent dans la lutte contre la migration clandestine et ce, selon un paquet de mesures qui pourrait comprendre des possibilités de migration légale, une assistance pour développer les capacités de gestion des flux migratoires légaux, des mesures contre la fuite des cerveaux et l’assouplissement des procédures de délivrance de visas de court séjour. Le Maroc est déjà pleinement engagé dans la lutte contre la migration clandestine, notamment à travers les négociations en matière de réadmission, le renforcement des contrôles aux frontières (11000 hommes dont 5600 affectés à la surveillance du littoral), les échanges d’informations et la lutte contre le trafic des migrants et la traite des êtres humains (7). Mais à ce jour, les choses ne sont pas claires en ce qui concerne ce nouveau concept. Les discussions en sont à peine à leurs débuts. Elles devraient concerner les questions de fond, notamment pour définir les contours du partenariat pour la mobilité et, éventuellement, voir quels sont les pays avec lesquels il est souhaitable d’initier des projets. Plusieurs pays européens ne sont pas très convaincus de l’opportunité de ces partenariats pour la mobilité. Certains pays tels que l’Espagne, le Portugal, l’Italie et éventuellement l’Allemagne sont disposés à offrir des possibilités de réalisation de projets-pilotes en matière de migration légale avec les pays tiers.

Le Maroc est mieux placé dans la région de l’Afrique du Nord pour coopérer à la réalisation d’un projet-pilote dont la réussite permettra d’assurer la viabilité de ce nouveau concept de partenariat pour la mobilité. Le « paquet réadmission » demandé par le Maroc lors du 12e round des

(7) Le Maroc vient d’adopter au début du mois de juillet 2007 un projet de loi instituant la carte d’identité nationale biométrique permettant de s’assurer de l’authenticité du document.

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négociations en matière de réadmission avec l’UE pourrait-il trouver certains éléments de réponse dans le partenariat pour la mobilité ?

Les programmes et agences de l’Union européenne : une participation sélective et conditionnée

Le Maroc, à l’instar des autres pays partenaires de la Politique européenne de voisinage (partenaires PEV), peut participer aux agences et organismes associés à la gestion des politiques européennes ou aux programmes de mise en œuvre des politiques communautaires. La PEV prévoit cette possibilité en général dans les plans d’action PEV, et le Maroc avait déjà manifesté son intérêt dans ce cadre.

C’est la Commission européenne qui a établi un inventaire des agences et des programmes auxquels les pays PEV pourraient participer et défini, sur cette base, les modalités à suivre (8). La participation offre un moyen d’encourager le renforcement des institutions et des capacités administratives nécessaires pour concrétiser leur participation. Elle constitue également un moyen pour renforcer les processus de réformes ainsi que le rapprochement avec les normes communautaires, conformément aux objectifs de la PEV et aux plans d’action PEV.

Le Conseil européen de juin 2007 avait permis à la Commission européenne d’ouvrir, de manière officielle, les négociations avec un groupe pionnier de pays, en vue de leur participation aux travaux des agences et programmes communautaires. Le Maroc faisait partie de la 1re vague des trois pays (Israël, Moldavie, Maroc) avec lesquels la Commission européenne avait commencé à négocier des protocoles-cadres régissant le cadre juridique de leurs participations et les modalités financières y afférentes (9). Cette participation du Maroc reflétait le niveau d’avancement de la mise en œuvre du Plan d’action Voisinage et la capacité institutionnelle de l’administration marocaine à s’inscrire dans cette logique novatrice. L’ambition marocaine était de rentabiliser au mieux cette nouvelle perspective.

(8) L’opportunité et l’intérêt d’une participation aux agences et aux programmes communautaires étaient identifiés sur la base de l’expérience acquise dans le cadre du processus d’élargissement de l’Union européenne (UE).(9) Le premier desdits protocoles était conclu avec l’Israël en avril 2008.

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La commission avait arrêté la liste des programmes auxquels les pays partenaires étaient invités à participer (10). En revanche, d’autres programmes communautaires ne sont pas ouverts à la participation des pays de la PEV en raison de leurs objectifs. La participation aux programmes est assujettie à l’acquittement d’une contribution financière, variable selon l’agence ou le programme et reposant sur différents facteurs. Cette contribution s’effectue par un apport au budget général de l’Union européenne. Une aide générique pourrait être prévue au cas par cas lors de la programmation nationale régulière de l’aide communautaire (11).

Dans d’autres cas, la participation peut consister en une simple coopération. Certaines agences envisagent une coopération sélective avec des pays tiers pour des activités spécifiques (12), alors que d’autres (13) prévoient une collaboration informelle. D’autres, enfin, offrent des perspectives de coopération intéressantes qui existent déjà avec d’autres pays tiers (14). En revanche, le Maroc et les autres pays PEV ne peuvent participer à quelques autres agences dont les activités consistent à aider les États-membres à mettre en œuvre les politiques européennes.

L’intégration du Maroc aux travaux des agences devrait s’effectuer de façon progressive et sélective et prendre en compte les intérêts des deux partenaires, les avantages mutuels, les conditions à remplir ainsi que la capacité d’absorption des agences concernées. Avant que les accords

(10) Il s’agit du programme-cadre pour la compétitivité et l’innovation, des programmes Douane 2013, Pericles, IDABC, SESAR (EN), MEDIA 2007 et Marco Polo ainsi que les programmes sur la santé publique (2007-2013) et la protection des consommateurs (2007-2013). Certains programmes prévoient des modalités de coopération spécifiques comme le programme Culture, le programme d’éducation et de formation tout au long de la vie, le 7e programme-cadre de recherche, le programme Hercules II, certains projets relevant du programme-cadre «Droits fondamentaux et justice» ainsi que les programmes de coopération transfrontalière, transnationale et interrégionale du Fonds européen de développement régional (FEDER).(11) Afin de stipuler les conditions générales de leur participation, des protocoles aux accords de partenariat et de coopération et aux accords d’association avec les pays partenaires PEV sont établis. Ces protocoles prennent la forme d’accords-cadres. Ils peuvent être négociés avec les partenaires ayant déjà conclu des plans d’action PEV. Des mémorandums d’entente propres à chaque programme fixent ensuite les règles régissant la participation de chaque pays individuel. Cette procédure permet une simplification du format d’accord sur les conditions spécifique de leur participation.(12) Comme Eurofound,(13) Tel que le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC)(14) C’est le cas l’Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l’Union européenne (Frontex), l’Office européen de police (Europol) et l’Unité de coopération judiciaire européenne (Eurojust) (EN).

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de participation ne soient conclus, une phase de familiarisation avec les agences concernées sera mise en place. Cette phase préparatoire permet notamment d’adapter les législations et les institutions, pour pouvoir effectivement participer à l’agence (15). Dans la phase de transition, le Maroc ne pourra agir qu’en qualité d’observateur.

Des pourparlers exploratoires ont déjà permis d’avancer sur les modalités opérationnelles de participation et d’identifier un intérêt mutuel pour de telles participations. Le Maroc suggérait de promouvoir, dans ce cadre, une démarche progressive et à même de lui assurer une participation équilibrée au niveau des trois piliers (Marché intérieur/ Justice, Liberté et Sécurité/PESC). De même, il suggérait de concevoir des mécanismes de financement novateurs qui pourraient, par exemple, s’inscrire dans le cadre de la coopération thématique mise en place par l’Instrument voisinage.

La feuille de route considère que la participation du Maroc à certains programmes et agences communautaires constitue « une opportunité importante pour pérenniser les réformes visant notamment à une meilleure intégration du Maroc au marché communautaire ». Le choix de ces programmes et agences obéit à un critère de progressivité eu égard à l’avancée du partenariat Maroc-UE. Le Maroc devrait participer aux agences suivantes : Agence européenne de la sécurité aérienne (EASA), Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (EMCDDA), Eurojust, l’Institut d’Etudes de Sécurité. Une participation vraisemblable, mais qui demeure sous réserve des procédures de décision prévues par les statuts de ces agences. En outre, l’intégration progressive du Maroc, sur une base de réciprocité et de confidentialité des données, au système d’alerte rapide (RASFF) est prévue. De même que l’idée d’établir une relation de coopération entre le Maroc et l’Agence européenne pour l’environnement (EEA) et l’Agence européenne pour la sécurité maritime (EMSA).

Quatre programmes semblent mobiliser l’attention du Maroc: Programme compétitivité et innovation (CIP), Douane 2013 (2008-2013), Programme SESAR, Programme Marco Polo. Le Programme SESAR concerne la gestion du trafic aérien. Il vise à assurer la sécurité et l’efficacité des opérations aériennes, aussi bien au sol qu’en vol. Les transports aériens au

(15) En effet, pour pouvoir participer aux agences européennes dans les domaines de la sécurité des réseaux et de l’information (ENISA), de la sécurité aérienne (AESA), de la sécurité maritime (EMSA) et de l’environnement (AEE) ainsi qu’à l’Agence ferroviaire européenne (AFE) et l’Autorité européenne de sécurité des aliments,

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Maroc sont actuellement confrontés à des défis majeurs : politique des tarifs, efficacité, sécurité, convivialité et modernisation technique sont au centre du développement de ce secteur. Ce sont aussi des questions auxquelles est confrontée la gestion du trafic aérien européen. Le programme SESAR de l’UE prévoit le développement d’une nouvelle génération de systèmes de gestion du trafic aérien pour permettre à l’industrie européenne de rester à la pointe du développement technologique. Ce programme peut faire faire école dans la région méditerranéenne. A travers sa participation au programme, le Maroc souhaite relever les défis auxquels il est confronté dans ce secteur.

Le programme Marco Polo (2003-2006), quant à lui, vise à déplacer les marchandises de la route vers des modes plus compatibles avec l’environnement. Dans ce contexte, un recours plus fort à l’intermodalité est nécessaire afin de contribuer à une meilleure utilisation des infrastructures existantes et des ressources de service grâce à l’intégration du transport maritime à courte distance, du rail et du transport fluvial dans la chaîne logistique. L’intermodalité est une composante du plan stratégique que le Maroc met en œuvre dans le secteur de la logistique.

Dans le cadre de la stratégie de Lisbonne renouvelée, le programme-cadre pour l’innovation et la compétitivité (CIP) a été adopté pour la période 2007-2013 afin de stimuler la croissance et les emplois en Europe. Le programme-cadre soutient des actions en faveur de la compétitivité et de la capacité d’innovation au sein de l’Union européenne. Il encourage en particulier l’utilisation des technologies de l’information, des écotechnologies et des sources d’énergie renouvelables. Les actions soutenues par ce programme-cadre sont susceptibles d’appuyer les initiatives et politiques prises au Maroc en faveur du développement de la société de la connaissance ainsi que le développement durable reposant sur une croissance économique équilibrée.

Enfin, le programme d’action Douane 2013 (2008-2013) dans la Communauté a pour but de favoriser la mise en place d’une douane informatisée paneuropéenne qui garantit que les activités des douanes correspondent aux besoins du marché intérieur, qui assure la protection des intérêts financiers de la CE et qui renforce la sécurité et la sûreté. Le programme est susceptible d’aider l’administration douanière du Maroc à renforcer le processus de sa modernisation ainsi qu’à simplifier et à accélérer les procédures douanières pour favoriser les échanges.

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La participation du Maroc à ces programmes et agences est tributaire des modalités opérationnelles et budgétaires qui seront convenues à cet effet. Le Maroc souhaite bénéficier de l’appui financier communautaire pour sa participation à ces programmes et agences. La Communauté pourrait prendre en charge une partie des coûts financiers dont les modalités devraient être discutées dans le cadre de la négociation sur le protocole. Plus fondamentalement, la participation du Maroc à ces agences et programmes dépend de la mise en œuvre par le Maroc des politiques et législations sous-jacentes compatibles avec les objectifs de ces programmes et agences. Dans cette perspective, les négociations entre la Commission et le Maroc concernant le protocole à l’Accord d’association seront accélérées pour définir un accord-cadre permettant la participation du Maroc aux programmes communautaires.

Telle qu’exprimée dans le document conjoint, la feuille de route épouse les priorités établies du Plan d’action UE /Maroc. Son contenu est en conformité avec la vocation et les principes de la PEV. La Politique européenne de voisinage avait effectivement offert de nouvelles perspectives de partenariat notamment : la perspective de progresser au-delà des relations existantes vers un degré significatif d’intégration, y compris en offrant au Maroc une participation dans le marché intérieur ainsi que la possibilité de prendre progressivement part aux aspects-clés des politiques et des programmes de l’UE, l’approfondissement des relations économiques et commerciales, une revalorisation de l’étendue et de l’intensité de la coopération politique à travers le dialogue politique renforcé, la perspective d’une ouverture graduelle ou d’une participation renforcée à certains enceintes et programmes communautaires, notamment dans les domaines couverts par le Plan d’action. Le Plan d’action a exprimé une panoplie de priorités de l’Etat marocain dans des domaines qui rentrent dans la perspective de l’Accord d’association aussi bien au niveau politique qu’au niveau économique et social.

Lors de la réunion du septième Conseil d’association, un groupe de travail ad hoc a été chargé de conduire cette réflexion et de faire des propositions au prochain Conseil. Il est spécifié que la mise en œuvre de ces propositions se fera à court et à moyen termes, et aucun calendrier n’a été retenu dans cette perspective. Le Conseil d’association a tout simplement donné des instructions aux différents sous-comités et groupe de travail mis en place d’assurer le suivi des différentes mesures techniques qui ont

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été identifiés dans le document conjoint. C’est la réflexion commune qui devait être entamée dès le début 2009 qui spécifiera la nature et la forme que pourrait prendre l’instrument qui prendra la suite du Plan d’action voisinage UE et, éventuellement, de l’Accord d’association.

Le « Statut avancé » : une approche extensible à souhait ?

Nous disions en introduction que le statut avancé ne procède point d’une tentation de singularisation ou d’un quelconque réflexe d’exclusivité. Il s’inscrit dans la perspective d’étendre la coopération à l’ensemble des pays de la Méditerranée du sud et de l’est et aux pays impliqués dans la Politique de voisinage. Différentes initiatives prises en 2008 tendent à le confirmer.

La Jordanie et la Tunisie sur la voie du Maroc

La Jordanie, qui a signé en 2002 un accord d’association, veut aujourd’hui passer à la vitesse supérieure. En novembre 2008, elle a demandé de bénéficier d’un statut avancé dans la perspective de nouer une coopération plus étroite avec l’UE. La Jordanie souhaite devenir plus “euro-compatible” dans certains secteurs (transports, énergie ou environnement). Amman espère alors accéder aux financements européens pour développer ces secteurs. Il n’y a pas encore de calendrier fixé pour l’ouverture des négociations. La Jordanie s’inscrit dans la démarche de ce qui a déjà été fait pour le Maroc.

La Jordanie a conçu un plan national pour faire avancer les réformes politiques afin de consolider la démocratie, la responsabilité de l’administration, la transparence et la justice dans le pays et pour forger un modèle de pays moderne islamique et arabe, fondé sur la connaissance. La politique européenne de voisinage se veut une contribution au plan d’action économique et social du gouvernement jordanien (2004-2006), qui vise à lancer un processus de réforme socio-économique durable. Le degré d’ambition des relations entre les deux partenaires dépendra du niveau d’engagement de la Jordanie en faveur des « valeurs communes » et de sa capacité à mettre en œuvre les priorités définis d’un commun accord.

Dans l’immédiat, l’accord d’association reste la base solide de coopération entre l’UE et la Jordanie. Mais de nouvelles perspectives

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de partenariat sont ouvertes par la Politique européenne de voisinage, notamment: la perspective de s’acheminer, au-delà de la coopération, vers un degré important d’intégration économique, y compris par le renforcement de la portée et de l’intensité de la coopération politique, la possibilité d’une convergence de la législation économique, l’approfondissement des relations commerciales et économiques pour les étendre progressivement à l’agriculture et au secteur des services, la poursuite de la réduction des obstacles commerciaux et la participation au marché intérieur de l’UE, la possibilité d’une ouverture progressive des programmes communautaires qui s’y prêtent ou d’un renforcement de la participation jordanienne à ces programmes, et par des actions de jumelage pour permettre le respect des normes de l’UE.

Le Plan d’action constitue une première étape dans ce processus. Le plan d’action définit tout un ensemble de priorités dans les domaines relevant du champ d’application de l’accord d’association. Parmi ces priorités : l’accent sur la démocratisation de la vie politique dans le cadre du plan national pour le développement politique, le développement de la liberté des médias et de la liberté d’expression et la mise en place d’une magistrature indépendante et impartiale, la coopération dans le processus de paix au Moyen-Orient et la lutte contre le terrorisme, l’adoption de mesures pour une plus large libéralisation des échanges de marchandises, de produits agricoles, du commerce des services, la gestion efficace des flux migratoires et le développement des secteurs et réseaux de transport, de l’énergie et de la société d’information.

On attend de la mise en œuvre du Plan d’action qu’elle contribue au respect des dispositions de l’accord d’association, qu’elle soutienne les objectifs de réforme nationale de la Jordanie et favorise « la poursuite de son intégration dans les structures économiques et sociales européennes ». La Jordanie souhaite rapprocher la législation, la réglementation et les normes jordaniennes de celles de l’Union européenne. Cette perspective contribuera également à poser des fondations stables en vue d’une intégration économique plus poussée, fondée sur l’adoption et la mise en œuvre de règles et de réglementations économiques et commerciales susceptibles de stimuler les échanges, les investissements et la croissance.

C’est aussi en fonction de la réalisation des objectifs du Plan d’action et de l’évolution globale des relations entre l’UE et la Jordanie que la possibilité d’établir une nouvelle relation contractuelle pourrait prendre

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forme. L’opportunité de conclure de nouvelles dispositions contractuelles sera examinée en temps opportun. Il pourrait s’agir d’un accord européen de voisinage dont la portée sera définie en fonction des progrès accomplis dans le respect des priorités fixées dans le plan d’action.

L’Accord d’association avec la Tunisie est entré en vigueur en 1998. Les mesures en vue du démantèlement tarifaire tunisien et de la libre circulation des produits industriels avec l’UE ont pris fin en janvier 2008, deux années avant l’échéance initiale de 2010. La Tunisie est ainsi le premier pays à avoir franchi cette étape importante vers l’objectif d’établir une zone de libre-échange Euromed en 201016. Les négociations ont démarré sur la poursuite de la libéralisation progressive du commerce des services et du droit d’établissement, ainsi que des produits agricoles, des produits agricoles transformés et des produits de la pêche. La finalisation de ces négociations, accompagnée d’avancées dans l’approximation règlementaire, constitue une nouvelle étape dans les relations UE/Tunisie et vers l’intégration de l’économie tunisienne dans le marché unique.

La coopération institutionnelle, à travers le Conseil d’association UE-Tunisie, et ses sous-comités ou groupes de travail, a permis de progresser dans la mise en œuvre du Plan d’action PEV (17). Si des progrès ont été enregistrés dans de nombreux domaines de coopération repris dans le Plan d’action (réformes économiques et réglementaires, politique sociale, protection des droits de la femme, coordination en matière de lutte contre le terrorisme, la gestion des frontières, la coopération sur les questions migratoires…), c’est en matière de démocratie que les objectifs fixés n’ont pas été atteints. L’approfondissement du dialogue n’est pas parvenu à lever les points de friction sur les questions de droits de l’homme, notamment en matière de liberté d’association et d’expression et d’indépendance de la justice (18). Ce sont des défis qu’il reste à relever pour asseoir durablement l’Etat de droit, élément essentiel d’un véritable rapprochement vers l’UE, surtout pour pouvoir bénéficier des dispositions du Statut avancé.

(16) En matière commerciale, la Tunisie a été le premier partenaire de la région à entrer en zone de libre-échange pour les produits industriels.(17) Le Plan d’Action PEV entre l’UE et la Tunisie a été adopté en juillet 2005, pour une période de trois à cinq ans. (18) Voir le premier rapport de suivi adopté en décembre 2006 et le deuxième en avril 2008.

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La Tunisie a manifesté son intérêt pour un partenariat renforcé avec l’UE dans le même esprit que le « statut avancé » qui a été mis en place avec le Maroc. La Tunisie est le pays le plus avancé dans la mise en œuvre de la ZLE, puisque depuis le 1er janvier 2008, tous les tarifs pour les produits industriels ont été abolis, deux années en avance sur l’échéance initiale. Une intense coopération institutionnelle, à travers le Conseil d’association UE-Tunisie, le Comité d’association et les dix sous-comités ou groupes de travail institués, a permis aux deux parties de progresser dans la mise en œuvre de l’Accord d’association et du Plan d’action PEV qui a été adopté en juillet 2005. Les négociations bilatérales avec l’UE sur la poursuite de la libéralisation progressive du commerce des services et du droit d’établissement ont été lancées en mars 2008, ainsi que les négociations pour la libéralisation du commerce des produits agricoles, des produits agricoles transformés et des produits de la pêche.

C’est dans ce contexte, lors de la 7e session du Conseil d’association UE-Tunisie, tenue en novembre 2008, que la Tunisie, en commun accord avec l’UE, a décidé de constituer un comité ad hoc chargé d’engager une réflexion commune pour définir le cadre et les objectifs d’un partenariat renforcé permettant à la Tunisie d’accéder à un statut avancé dans ses relations avec l’UE. Le ministre des Affaires étrangères M. Abdelwaheb Abdallah, en a fait l’annonce devant la Chambre des conseillers, soulignant la satisfaction de la Tunisie quant aux « progrès accomplis dans la mise en œuvre de notre plan d’action commun ». En matière de démocratie et de droits de l’homme, le dialogue dans le cadre du sous-comité compétent a été poursuivi et approfondi, mais il n’en reste pas moins que les objectifs fixés, notamment en matière de libertés d’association et d’expression, n’ont pas été atteints. Benita Ferrero-Waldner, Commissaire aux relations extérieures et à la politique européenne de voisinage a précisé : « Nous avons également réussi à établir un dialogue constructif au sujet des droits de l’homme et nous sommes confiants qu’il sera développé davantage afin qu’il puisse produire des progrès.»

Au début de 2009, la Tunisie et l’UE ont entamé des discussions pour élaborer une « feuille de route » destinée à rehausser le niveau de leur partenariat et lui conférer un « statut avancé » dans le cadre de la Politique de voisinage. Mais on n’est qu’au début du processus de réflexion par un groupe de travail conjoint dont les travaux n’ont pas encore démarré. Cette réflexion devrait se dérouler dans le même esprit que celui qui

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a conduit à la mise en place d’un partenariat renforcé entre l’UE et le Maroc. La Tunisie s’apprête à adhérer à la Commission de Venise qui se compose actuellement des 47 pays membres du Conseil de l’Europe et de quelques autres pays non européens. L’adhésion à la Commission européenne de Venise (organe consultatif du Conseil de l’Europe sur les questions constitutionnelles) constituera un prélude pour bénéficier d’un statut plus renforcé au Conseil de l’Europe puis au Conseil parlementaire de l’Europe.

Elle portera vraisemblablement sur le large éventail des actions prioritaires définies par le Plan d’action et qui correspondent aux champs d’application de l’Accord d’association. Parmi ces priorités qui gardent toutes leur importance figurent notamment les réformes garantissant la démocratie et l’Etat de droit, le renforcement du dialogue politique et de la coopération notamment en matière de démocratie et de droits de l’homme, de politique étrangère et de sécurité et de coopération dans le domaine de la lutte contre le terrorisme en tenant compte du respect des droits de l’homme, l’amélioration de l’environnement et des conditions pour le développement d’entreprises compétitives et de l’esprit d’entreprise, la facilitation du commerce des biens et des services, y compris par la négociation d’accords de libre-échange, le rapprochement de la réglementation technique, les normes et procédures d’évaluation de la conformité, le développement des secteurs du transport et de l’énergie basé sur la sécurité et la sûreté, et la gestion efficace des flux migratoires, y compris la possibilité de conclure un accord de réadmission avec la Communauté européenne.

C’est sur la base d’une évaluation commune des progrès accomplis dans la réalisation des objectifs contenus dans ce plan d’action que l’UE et la Tunisie pourront prendre des décisions concernant l’étape suivante du développement de leurs relations bilatérales, incluant la possibilité de nouveaux liens contractuels. Ceci pourrait prendre la forme d’un Statut avancé ou d’un Accord de voisinage.

Israël ou la confirmation de la dimension stratégique

A fin 2007, le gouvernement israélien a transmis à l’Union européenne un document non officiel demandant un « statut spécial » dans le cadre de la Politique européenne de voisinage. L’État d’Israël voulait ainsi participer

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à plusieurs politiques et programmes communautaires, notamment pour renforcer la coopération technologique et commerciale, mais également participer aux réunions du Conseil ayant trait à l’économie, à l’environnement, à l’énergie ou à la sécurité. Cette demande a été examinée et accueillie favorablement lors du huitième Conseil d’association entre l’UE et Israël tenu le 16 juin 2008. Il faut ici souligner que les négociations autour du contenu possible de ce « rehaussement » des relations se sont déroulées dans la plus grande opacité jusqu’au Conseil d’association (CA). Le texte du Conseil, qui précise que les intérêts et objectifs communs des parties incluent « notamment la résolution du conflit israélo-palestinien par la mise en œuvre de la solution à deux Etats », prévoit le renforcement des relations politiques, stratégiques, de sécurité et de défense, économiques, commerciales, scientifiques et technologiques...

La position du CA a suscité une vive critique des parlementaires européens tant sur le fond que sur la méthode et l’absence de transparence de ce processus. Tous les groupes politiques confondus concluaient à l’inopportunité d’ouvrir de telles négociations, au vu de la dégradation de la situation et du non-respect des engagements d’Annapolis. De même, le 3 décembre 2008, le Parlement européen a repoussé le vote sur la participation accrue d’Israël aux programmes communautaires, au motif que la situation humanitaire à Gaza ne se prêtait pas à un rehaussement des relations avec Israël.

Pourtant, contre toute attente, la proposition du Conseil d’association a été examinée par le Conseil « affaires étrangères et relations extérieures » du 8 décembre 2008, qui a affirmé, en guise de conclusion, « la détermination du Conseil à rehausser le niveau et l’intensité de sa relation avec Israël, à la faveur de l’adoption du nouvel instrument qui succédera à l’actuel Plan d’action « PEV » », sans toutefois, il faut le souligner, définir quel serait cet instrument. Certes, ce rehaussement des relations bilatérales a été de facto gelé, fin avril 2009. Mais cela n’a pas empêché la poursuite d’une coopération étroite, tant sur les plans économique et commercial qu’aux niveaux politique et même stratégique.

L’annexe des conclusions du Conseil définit les lignes directrices en vue du renforcement des structures du dialogue politique avec Israël. Elles consistent en l’ouverture du champ des négociations ministérielles, l’ouverture à Israël du Comité politique et de sécurité de l’Union européenne, la facilitation de l’audition d’experts israéliens par les

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groupes et comités du Conseil, la systématisation et l’élargissement des consultations stratégiques informelles, l’approfondissement des échanges thématiques, notamment sur les droits de l’homme, l’encouragement d’Israël à s’aligner sur la Politique étrangère et de sécurité commune, la mise en œuvre d’une coopération de terrain en matière de Politique européenne de sécurité et de défense (PESD), l’insertion et l’implication d’Israël dans les enceintes multilatérales et, enfin, l’approfondissement du dialogue inter-parlementaire.

De fait, l’État d’Israël demandait un partenariat politique qui n’a jamais été accordé à ce jour à aucun pays au titre de la Politique de voisinage. Cette coopération renforcée prévoirait trois réunions annuelles UE-Israël au niveau des ministres des Affaires étrangères et la possibilité pour chaque présidence tournante de l’UE d’inviter un responsable de la diplomatie israélienne à une réunion des ambassadeurs de l’UE sur les questions de sécurité. L’UE se dit prête aussi à envisager « la possibilité d’inviter Israël à participer aux missions civiles » menées dans le cadre de sa politique de défense et de sécurité, « au cas par cas et lorsque l’intérêt commun s’y prêtera », et à avoir avec Israël, « au moins une fois par an », un dialogue informel sur les grandes questions stratégiques.

Sur le fond et par respect des normes de droit international et communautaires, il est déplorable que l’État d’Israël puisse se voir octroyer comme une récompense un statut spécifique de quasi membre de l’Union, alors même que, sur le terrain, il accélère la construction de colonies, maintient le bouclage des territoires palestiniens, notamment dans la bande de Gaza, et pratique de nombreuses formes de violation des droits de l’homme.

Le Partenariat oriental ou le Statut le plus avancé ?

Les partenaires d’Europe orientale et du Caucase du Sud souhaitent intensifier leurs relations avec l’Union européenne. La politique de l’Union à leur égard doit être proactive et sans équivoque. Aussi le Conseil européen des 19 et 20 juin 2008 a-t-il invité la Commission à élaborer une proposition relative à un « Partenariat oriental » en soulignant la nécessité d’une approche différenciée qui respecte la nature de la PEV en tant que cadre stratégique cohérent et unique.

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La communication de la commission a formulé des propositions porteuses d’un message politique fort insistant sur la mise en œuvre du Partenariat oriental sur la base d’un engagement politique profond et sans faille des États membres de l’Union européenne. « L’Union doit être ouverte à ces aspirations en offrant un niveau d’association politique plus élevé et en intensifiant progressivement les relations dans des domaines essentiels. »

Des accords d’association négociés avec les partenaires seraient le nouveau cadre contractuel pour un engagement plus profond, qui remplacerait les accords de partenariat et de coopération actuels. Ces accords ont pour objet, entre autres, d’instaurer une zone de libre-échange renforcée et globale avec chacun des pays partenaires.

trois domaines donnent à ces négociations une dimension plus profonde que les relations qui caractérisent le statut avancé en cours avec le Maroc. Tout d’abord, la question de la mobilité : les pays partenaires insistent sur le fait qu’elle représente un test décisif du nouveau partenariat qui devrait avoir pour priorité de promouvoir la mobilité dans un environnement sûr. L’Union devrait offrir aux partenaires des pactes de « mobilité et sécurité ». L’UE s’est engagée, une fois les accords d’assouplissement et de réadmission effectivement mis en œuvre, à entamer le dialogue avec l’ensemble des partenaires au sujet des déplacements sans obligation de visa. L’Union européenne pratiquerait une ouverture ciblée du marché du travail de l’Union aux citoyens des partenaires et prendrait des mesures pour faciliter la migration circulaire, dans le cadre des partenariats pour la mobilité.

Ensuite, le soutien au développement régional des pays partenaires. Certains partenaires sont confrontés à des problèmes structurels résultant de fortes disparités économiques entre leurs régions et groupes de population. Ils souhaitent pouvoir tirer parti de l’expérience et des mécanismes des politiques économiques et sociales de l’UE. La Commission propose des protocoles d’accord sur la politique régionale avec les partenaires comme base de dialogue, une coopération au moyen d’un financement supplémentaire dans le cadre de programmes-pilotes de développement régional répondant aux besoins locaux en termes d’infrastructures, de capital humain et de petites et moyennes entreprises (PME) s’inspirant de la politique de cohésion de l’UE, une coopération directe entre les régions de l’UE et les pays partenaires, notamment la participation des partenaires

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concernés aux programmes transnationaux existants en Europe du Sud-Est, centrale et septentrionale, et l’extension aux frontières entre les partenaires de la coopération transfrontalière financée au titre de l’IEVP et actuellement mise en œuvre aux frontières extérieures de l’UE.

Enfin, l’UE propose, à chacun d’eux, un programme global de renforcement des institutions visant à améliorer les capacités administratives dans tous les secteurs de coopération concernés, programme cofinancé par l’Instrument européen de voisinage et de partenariat (IEVP). La Commission propose d’organiser le cadre multilatéral du partenariat oriental à quatre niveaux : des réunions bi-annuelles des chefs d’État ou de gouvernement, des réunions annuelles de printemps des ministres des Affaires étrangères de l’UE et des partenaires orientaux, des conférences ministérielles sectorielles, quatre plateformes thématiques devraient être mises en place en fonction des principaux domaines de coopération (démocratie, bonne gouvernance et stabilité ; intégration économique et convergence avec les politiques de l’UE, mécanismes mutuels de soutien et de sécurité énergétiques, contacts interpersonnels). Chaque plateforme adoptera un ensemble d’objectifs-clés réalistes et régulièrement actualisés – avec un programme de travail correspondant – et évaluera les progrès réalisés.

L’un des signaux les plus clairs d’un engagement concret de l’UE est un niveau de financement conforme au niveau d’ambition politique du partenariat. Des ressources financières sensiblement plus élevées sont nécessaires pour réaliser les objectifs définis dans la proposition. Le financement actuel au titre de l’IEVP pour les partenaires s’élève à environ 450 millions d’euros en 2008. La Commission a l’intention de proposer son augmentation progressive pour qu’il atteigne quelque 785 millions d’euros en 2013.

Conclusion

Le Statut avancé est donc une approche dynamique, mais qui fixe des repères dans la progressivité des relations entre les deux partenaires. Il n’a pas comme point de départ ni comme promesse une demande d’adhésion, mais il n’exclut pas non plus une adhésion éventuelle à long terme. Entre un non actuel et un oui d’un futur encore assez éloigné, il reste un vaste spectre d’actions permettant de créer une dynamique vertueuse, un scénario dans lequel chacun des partenaires serait gagnant. Quel est-il ce scénario

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“gagnant-gagnant” ? La réponse est simple : stabilité, sécurité et prospérité partagée. La région est devenue un foyer de crises. L’Europe ne peut résoudre seule les sources de déstabilisation : immigration clandestine, trafic de drogue, blanchiment d’argent, terrorisme. La pierre angulaire de cette perspective est l’ancrage d’une alliance stratégique, condition de succès des deux autres volets.

Le Maroc réaffirme sa position d’acteur des relations euro-méditerranéennes et de médiateur dans les relations de voisinage élargi avec l’Afrique sub-saharienne. S’il est d’abord l’expression d’une volonté politique, le Statut avancé est aussi une dimension économique et financière d’égale ambition. Ce qui signifie faciliter l’accès des biens et services au marché européen, négocier au mieux le transfert de l’acquis communautaire, harmoniser les politiques communes (concurrence, fiscalité, monnaie), intégrer le Maroc dans les programmes, réseaux et agences communautaires. Enfin, la dimension culturelle, sociale et humaine est aussi fortement réaffirmée pour faire en sorte que la frontière ne fasse pas obstacle aux échanges culturels et humains.

Le Statut avancé est-il un modèle unique ou serait-il plutôt une approche qui favorise une différenciation de plus en plus poussée entre les partenaires de la Politique de voisinage, qui menace sa cohérence ? La cohérence de la Politique de voisinage ne serait-elle pas davantage menacée par le développement d’une différenciation de plus en plus individualisée entre les partenaires ? En quelque sorte, chaque partenaire aspire à la détermination d’un statut ad hoc qui lui soit spécifique et entend renforcer ses relations bilatérales avec l’Union européenne, au détriment de la coopération régionale à laquelle est censée aboutir cette Politique de voisinage.

La multiplication de ces statuts ad hoc risque néanmoins de poser quelques problèmes. L’UE doit-elle les encourager et créer une sorte de politique d’accords à la carte ? Dans ce cas, la politique de voisinage a-t-elle encore une raison d’être ? Peut-elle encore apporter une valeur ajoutée substantielle ? Le risque d’encourager la différenciation et l’individualisation des statuts consiste à diluer la solidarité qui peut exister entre l’ensemble des pays voisins et à compromettre définitivement l’objectif de coopération régionale. Or, la coopération régionale peut être un outil de développement et d’autonomie précieux pour le voisinage de l’Union européenne, tout comme elle peut contribuer à résoudre les conflits gelés. La négociation de statuts ad hoc tend aussi à rendre les

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pays voisins plus dépendants de l’Union européenne, ce qui ne correspond pas forcément à l’objectif de développement visé par la Politique de voisinage.

Au total, si elle est un signe de réussite, dans la mesure où elle traduit l’adaptation à la situation de chaque partenaire, la différenciation est aussi porteuse de risques d’éclatement pour la Politique de voisinage qui, au fur et à mesure de sa mise en œuvre, risque de ressembler de plus en plus à une mosaïque d’accords et d’instruments reflétant un voisinage à plusieurs vitesses. Tout ceci posera inévitablement, à terme, un problème d’arbitrage entre différenciation et cohérence de la Politique de voisinage.

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Références

Commission des communautés européennesProposition de décision du Conseil relative à l’accord relatif aux principes

généraux de la participation de l’Etat d’Israël aux programmes communautaires, Bruxelles, le 14 novembre 2007, COM (2007) 713 final.

Document de travail des services de la commission. Politique européenne de Voisinage. Rapport sur la Jordanie. Bruxelles, le 12 mai 2004, COM (2004) 373 final.

Document de travail des services de la commission. Politique Européenne de Voisinage. Rapport sur Israël, Bruxelles, le 12 mai 2004. COM (2004) 568 final.

Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil. Document de travail des services de la commission. Mise en œuvre de la PEV. Rapport de suivi tunisie 2008, Bruxelles, le 23 avril 2009, SEC (2009) 5212.

Communication de la commission au Parlement européen et au Conseil. Document de travail des services de la commission. Mise en œuvre de la PEV. Rapport de suivi Maroc 2007, Bruxelles, le 3 avril 2008, SEC (2008) 398.

Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil. Document de travail des services de la Commission. Mise en œuvre de la PEV. Rapport de suivi, Maroc 2008, Bruxelles, 2009, SEC (2009) 590/2.

Communication concernant l’approche générale visant à permettre aux partenaires de la PEV de participer aux travaux des agences communautaires et aux programmes communautaires.

Conseil d’association UE-Maroc, Sixième session, Bruxelles, le 23 juillet 2007, Document ronéotypé.

Conseil d’association UE-Jordanie : conférence de presse conjointe du secrétaire d’Etat chargé des Affaires européennes et du ministre jordanien des Affaires étrangères (Bruxelles, 10 novembre 2008).

Déclaration de l’Union européenne, Septième session du Conseil d’Association UE-Maroc, Luxembourg, le 13 octobre 2008.

Germain-Robin Françoise, Israël et le partenariat euro-méditerranéen, Revue Géostratégie, n° 8, juillet 2005.

Instrument de voisinage et partenariat européen, Programme pour la région orientale, Document de stratégie 2007-2013.

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Larbi Jaidi, Nezha Alaoui66

Morocco, National Indicative Programme 2011-2013, Concept Note. Extraits.

Commission européenne, Représentation au Luxembourg, communiqué de presse du 3 décembre 2008, Partenariat oriental, nouveau chapitre ambitieux des relations entre l’UE et ses voisins orientaux.

Europe, Synthèses de la législation de l’UE. Participation aux travaux des agences et aux programmes communautaires : http://europa.eu/legislation_summaries/external_relations/relations_with_third_countries/eastern_europe_and_central_asia/r15015_fr.htm

Lannon Erwan, Braga de Macedo Jorge, De Vasconcelos Alvaro, « Maroc-UE : vers un statut avancé dans le cadre du PEM et de la PEV », Papiers IEMED, novembre 2007.

Jaidi Larabi, « Le Maroc entre le Statut avancé et l’Union pour la Méditerranée », Working Paper, Cahiers bleus, Fondation Abderrahim Bouabid, Maroc 2008.

Jaidi Larabi, « Les relations entre le Maroc et l’UE : où en est le Plan d’action », Lettre du Centre marocain de conjoncture, n° 210, mai 2006, Casablanca, Maroc.

Jaidi Larbi, « Le Statut avancé : du sens et de la substance », chronique dans la Vie Economique, 5 octobre 2007.

Jaidi Larabi, « Le projet de « Statut avancé » entre l’UE et le Maroc : un nouveau mode de partenariat ? », Revue Afkar, juillet, 2008.

Martín Iván, How to advance the EU-Morocco « Advanced Status », Instituto Complutense de Estudios Internacionales, Madrid, 2009.

République française, Sénat : Rapport d’information sur la Politique européenne de voisinage, n° 451, session extraordinaire de 2007-2008, juillet 2008.

Royaume du Maroc, Document conjoint Union européenne-Maroc sur le renforcement des réalités bilatérales/Statut avancé, décembre 2008, ronéotypé.

Royaume du Maroc, Ministère des Affaires étrangères et de la Coopération : Le Maroc et l’UE, le Partenariat Maroc-UE : vers la concrétisation du Statut avancé, 2008.

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Le Statut avancé : quels enjeux pour le Maroc dans ses rapports

avec l’Union européenne ?Fouad M. AMMOR (19)

Le rapprochement avec l’UE a toujours constitué pour le Maroc un choix stratégique fondamental de sa politique étrangère. Le Statut avancé, plus que le statut de « voisin » dans le cadre de la politique européenne de voisinage (PEV), permettra au Maroc de renforcer son ancrage stratégique avec l’Union européenne. Dans le cadre de la PEV, le Maroc tend à intégrer progressivement le marché intérieur de l’UE et ses structures réglementaires.

Il y a lieu de rappeler que, depuis que l’ex-président de la Commission européenne, Romano Prodi, a lancé en 2003 sa phrase laconique mais non moins significative « Tout sauf les institutions » à l’égard des partenaires de l’Union européenne, la voie est frayée pour un possible traitement spécial des partenaires, parfaitement en phase avec l’esprit de la Politique européenne de voisinage.

Le Maroc, dont le dernier accord d’association avec l’Union européenne est entré en vigueur en 2000, est considéré parmi les quatre meilleurs partenaires de l’UE à côté de l’Ukraine, Israël et la Moldavie, auxquels l’UE est disposée à offrir des avantages supplémentaires.

En effet le Maroc, conscient de ses atouts – proximité géographique, épaisseur historique aussi bien récente qu’ancienne, participation dans les programmes de sécurité (Dialogue méditerranéen de l’OTAN, Dialogue 5+5, PESD) et de coopération (Processus de Barcelone, Union pour la Méditerranée…), engagement, encore à parfaire, dans des réformes internes – n’hésite pas à faire valoir son désir de jouir d’un traitement sui generis. Il fallut attendre quatre ans pour qu’en octobre 2008 l’accord du statut avancé soit signé entre le Maroc et l’Union européenne.

(19) Chercheur universitaire.

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Fouad M. Ammor68

Un rappel historique des rapports entre le Maroc et l’UE (CEE auparavant et ce, jusqu’en 1992) montre que la demande du statut avancé est en deçà de l’adhésion pure et simple demandée par Hassan II déjà en 1984 et réitérée en 1987 (20). Le « désir » d’Europe constitue une constante dans la politique extérieure du Maroc. Feu Hassan II présenta sa demande dans un contexte marqué par la guerre froide et la confrontation Est-Ouest où, selon les termes du défunt roi, l’Europe « manquait de recul stratégique » qu’elle pouvait trouver au Maroc. L’option libérale du Maroc en est une composante nodale.

On savait bien à l’époque que la demande d’adhésion n’allait pas aboutir et ce, en dépit du soutien français. François Mitterrand, Président du Conseil européen avait répondu le 15 juillet 1984 à la lettre royale par un soutien explicite à la thèse marocaine : « J’ai exposé le contenu de votre lettre aux chefs de gouvernement des pays membres de la Communauté lors du Conseil européen de Fontainebleau. J’ai présenté l’argumentation de votre Majesté et appuyé vos thèses. Les membres du Conseil européen ont pris acte de vos intentions (21). »

Plusieurs raisons expliquaient à l’époque la candidature marocaine à la CEE : 1. Les relations avec le voisin algérien dans le cadre de la guerre froide (et de son soutien tous azimuts au Polisario) étaient au creux de la vague. La non digestion de la marche verte par les algériens était manifeste dans leur politique régionale. 2. La Turquie a présenté sa candidature à la CEE. Le Maroc ne voyait pas la Turquie plus européenne que le Maroc. 3. Les perspectives d’entrée de l’Espagne et du Portugal dans la Communauté étaient porteuses de difficultés pour le Maroc. Ces deux pays concurrençaient le Maroc dans un grand nombre de ses produits, surtout agricoles, destinés à l’exportation.

Hassan II n’était pas dupe quant au refus réservé à la candidature du Maroc. « Ce refus ne peut être que politique et ne peut, par conséquent, relever du seul critère d’appartenance géographique de l’Europe (22). » Avec sa ténacité habituelle, Hassan II, en montant au créneau, avançait : « Nous voudrions être à l’Europe ce que le Mexique est à l’Amérique (23). »

(20) Réda Guédira, « Hassan II et la CEE », in Géopolitique n° 10, 1985. (21) Réda Guédira op cit. p. 29. (22) Maroc Soir du 18 novembre 1987, Interview de Hassan II, le 25 octobre 1987 à Mme Forsenet, envoyée spéciale de la Télévision suédoise. (23) Entretien avec Hassan II, Libération (France) du mardi 7 juillet 1992.

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Le Statut avancé : quels enjeux pour le Maroc dans ses rapports avec l’U.E ? 69

Le Statut avancé demandé par le Maroc est dans la logique qui a toujours présidé à sa perception de l’Europe. « Nous pensons, en ce qui nous concerne, que le Maroc avait des relations plus étroites avec l’Europe que d’autres pays de la région (24). »

Plus proche de nous, la Politique européenne de voisinage se révèle un cadre permissif du Statut avancé. L’Union européenne, lors du lancement de sa Politique de voisinage en 2003 (devenue réalité le 1er mai 2004), a bel et bien fixé les limites de ses rapports avec ses partenaires. Entre être membre à part entière de l’Union européenne et être voisin, il y a un possible espace de coopération flexible et extensible. Pour explorer cet espace et les possibilités y afférentes, une cellule de réflexion Maroc-UE sur le Statut avancé a été constituée en avril 2003.

Par sa demande de « statut avancé », le Maroc entend tirer le maximum de cet espace. Un groupe de travail ad hoc maroco-européen, dont la constitution a été décidée à l’occasion du Conseil d’association UE-Maroc de juillet 2007, a travaillé tout le long de 2007-2008 pour donner corps à cette proposition. En octobre 2008, un document conjoint UE-Maroc sur le renforcement des relations bilatérales/Statut avancé, en marge du 7e Conseil d’association Maroc-UE a été adopté.

Ce groupe de travail, passant en revue les progrès réalisés par le Maroc dans le cadre du Partenariat euro-méditerranéen, considère le Maroc sinon un bon « élève » du moins un bon « voisin ». La Politique européenne de voisinage (PEV) a permis le renforcement des relations politiques, économiques, commerciales, culturelles et humaines entre les deux partenaires. Aussi ce partenariat traite-t-il également des domaines liés à la sécurité collective, à la résolution des conflits, à la bonne gouvernance, à la lutte contre le terrorisme, à la régulation des flux migratoires, etc.

Le groupe de travail voit dans le Statut avancé le moyen de raffermir la coopération politique en vue d’une plus grande intégration progressive du Maroc au marché intérieur de l’UE avec, entre autres, un soutien financier approprié eu égard à cette ambition exprimée par le Maroc. Ce groupe de travail, qui n’a pas oublié l’implication des entités territoriales, des acteurs économiques et des partenaires sociaux des deux parties en vue

(24) Abdellatif Filali, le Figaro du 26 janvier 1995. Cité par A. Belgourch « Les politiques étrangères maghrébines », Université Cadi Ayyad, Collection de la Faculté des SJES, Marrakech, série « Thèses et mémoires » n° 8, 2001.

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de concrétiser l’appropriation commune de ce partenariat, a convenu de poursuivre la réflexion relative à la nature et à la forme qui remplacera le plan d’action (mode opératoire de la PEV) ainsi que le lien contractuel qui se substituerait à l’Accord d’association en cours.

Au centre des propositions concrètes faites par ce groupe de travail se trouve « l’apprentissage en faisant ». La participation du Maroc à certains programmes et agences communautaires lui permettra d’approfondir les réformes (25) dans le but d’une meilleure intégration au Marché communautaire. Le choix de ces programmes et agences est tributaire de l’avancée du partenariat Maroc-UE.

Le groupe reconnaît que les réformes que le Maroc doit réaliser nécessitent des moyens financiers supplémentaires. Ceux-ci ne pourraient pas être, fondamentalement modifiés avant 2013, dans la mesure où, à l’heure actuelle, les Perspectives financières de l’UE pour la période 2007-2013 ont déjà fixé le montant maximal du budget de l’action extérieure de la Communauté. Pour la période restante (2010-2013), un effort supplémentaire pourrait être envisagé dans le cadre de « l’optimisation de l’existant » en tenant compte des réalisations faites par le Maroc dans ses efforts de rapprochement avec l’UE.

D’ici là, suite à l’élargissement de l’Union européenne, la Commission européenne a jugé bon de prendre des mesures concrètes pour éviter de nouveaux clivages entre l’UE et ses voisins. « L’élargissement nous a nettement rapprochés de nos voisins d’Europe de l’Est et de la région méditerranéenne » a déclaré Günter Verheugen, commissaire chargé de l’élargissement et de la politique européenne de voisinage. « Aujourd’hui, nous proposons de renforcer nos liens avec ces pays partenaires par de nouvelles formes de coopération et d’assistance. Nous voulons leur offrir la possibilité d’être réellement partie prenante dans l’UE élargie pour qu’ils puissent eux aussi se développer et prospérer. Il est dans l’intérêt de l’Europe dans son ensemble de voir l’UE entourée d’un cercle de pays pratiquant la bonne gouvernance et proposant de nouvelles perspectives de démocratie et de croissance économique. »

(25) Le Maroc devrait participer aux agences suivantes : 1. Agence européenne de la sécurité aérienne (EASA) ; 2. Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (EMCDDA) ; 3. Eurojust ; 4. Institut d’études de sécurité ; 5. Programme compétitivité et innovation (CIP) ; 6. Douane 2013 (2008-2013) ; 7. Programme SESAR et Programme Marco Polo.

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Cette PEV entend dépasser la vision traditionnelle consistant à tracer de nouvelles frontières en renforçant l’intégration de son « cercles d’amis ». A l’égard des pays partenaires méditerranéens, la PEV, comme l’Union pour la Méditerranée, n’entend nullement se substituer au processus de Barcelone de 1995 mais à en approfondir les actions de « proximité ». Cette politique entend mettre en œuvre un traitement quasi individuel de ses voisins.

Chaque voisin de l’Union européenne sera traité eu égard à sa situation économique, politique et sociale mais aussi en fonction de son effort à mettre en pratique les réformes économique, politique et sociale nécessaires à son rapprochement aux standards européens. C’est donc une mise en œuvre plus ciblée des instruments mis à disposition par les Accords d’association conclus entre l’Union européenne et ses voisins que des Plans d’action sont négociés avec ces pays. Jusqu’à présent, sept pays ont déjà négociés ces plans, dont le Maroc.

Cette PEV, ouvrant largement la porte à ces pays en termes de circulation des personnes (à termes non encore spécifiés) et d’accès au marché européen, limite, cependant, tout espoir quant à l’adhésion de ces pays à l’Union européenne. Ce qui semble critiquable dans cette PEV est que, dorénavant (26), il n’y a plus de benchmarking, pas de point de référence contraignant. Les pays « voisins » peuvent évoluer, dans les différents domaines (politique, économique, sociale) selon leur rythme, leur vouloir, leur volonté. La conditionnalité n’a plus de raison d’être dans la PEV, puisqu’il s’agit d’un traitement « à la carte ». Ce qui autorise à croire que la PEV constitue, en quelque sorte, un recul par rapport au Traité de Barcelone. Si on n’est pas contre la prise en compte des particularités locales et des contraintes sociales, il n’en demeure pas moins que l’insistance quant au respect des valeurs communes s’avère incontournable.

Le Statut avancé : atouts et enjeux

Le Maroc est appelé à faire le plaidoyer de ses multiples atouts (27). Au-delà des choix économiques relatifs à la mise en application des

(26) Fouad M. Ammor, le Partenariat euro-méditerranéen à l’heure de l’élargissement : perceptions du Sud, Publication du GERM, 2004. (27) Nezha Alaoui M’hamedi, Conférence à l’Institut français, 16 décembre 2009.

71Le Statut avancé : quels enjeux pour le Maroc dans ses rapports avec l’U.E ?

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réformes sur le plan de l’incitation à l’investissement, de la promotion d’un climat compétitif approprié (mise en place du Conseil de la concurrence, Plan Azur, Off-shoring...), les plus importantes avancées sont celles-là même qui concernent l’environnement humain et la bonne gouvernance.

En effet, depuis 1992, une importante vague de réformes politiques a été mise en œuvre suite à la décomposition du bloc soviétique, deux révisions constitutionnelles successives ont été engagées. Les principales réformes politiques et institutionnelles qui ont pris forme sont les suivantes :

• la création du Conseil consultatif des droits de l’Homme (1990) ; • la libération des prisonniers politiques et le retour des exilés (août

1991, juillet 1993 et mai 1994) ; • la mise en place des tribunaux administratifs (1993) ; • la création du ministère chargé des droits de l’Homme (1993) ;• la création du Conseil constitutionnel (1994) ;• la création du Conseil consultatif pour le suivi du dialogue social

(1994).

Le processus de réformes s’est poursuivi avec l’alternance gouvernementale (1998), l’avènement du Roi Mohammed VI (1999) et l’arsenal des questions sociales et culturelles :

• la création en 2001 de l’Institut royal de la culture amazighe (IRCAM) chargé d'œuvrer à la réhabilitation de la langue et la culture amazigh ;

• la création en décembre 2001 de l’institution Diwan Al Madhalim, instrument dédié au développement de l'intermédiation entre les citoyens et l’administration ;

• l’adoption d’une mesure de discrimination positive en faveur des femmes lors des élections législatives en septembre 2002, grâce à une liste nationale ; ce procédé avait permis l’accès de 30 femmes à la première Chambre du parlement, en plus des 5 femmes qui ont été élues sur des listes locales ;

• la réforme du code de la famille dans le sens de l’égalité des sexes et du progrès social (octobre 2003), mettant ainsi fin à une situation d’injustice et de discrimination à l’égard des femmes qui durait depuis 1957 ;

• la création de l’Instance Équité et Réconciliation (janvier 2004) destinée à achever le travail de la précédente Commission indépendante d’arbitrage pour l’indemnisation, en recherchant la vérité sur les

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violations des droits de l’homme liées aux disparitions forcées et aux détentions arbitraires qui ont eu lieu durant ce qu’on appelle communément “les années de plomb” ;

• la création du Haut Conseil Audiovisuel (novembre 2003).

La récente restructuration du ministère des Habous et des Affaires islamiques avec, notamment, la réactivation des conseils régionaux et du Conseil supérieur des Ulémas. Ceux-ci ont d’ailleurs vu l’entrée, pour la première fois, de 36 femmes dans leur composition. La nouvelle réforme comporte aussi la mise en place d’une stratégie visant le renouveau du discours religieux dans le sens de l’ouverture, de la modération et de la tolérance.

Le 18 mai 2005, le Roi Mohammed VI a, dans un discours, lancé l’Initiative nationale pour le développement humain (INDH) en déclarant que « de larges franges de la population marocaine et des zones entières du territoire national vivent dans des conditions difficiles ».

Ces initiatives, au-delà de leur degré de mise en application, constituent des avancées notoires dans le sens de l'établissement de la bonne gouvernance ; cependant, la grande faiblesse du Maroc réside dans ses fractures économiques et sociales. Sur le plan socio-économique, le Maroc, en dépit d'efforts importants ces dernières années et l'implication du Roi dans la tentative d'atténuation de la pauvreté et de la vulnérabilité, continue à traîner de lourds « boulets ». L’Indice de développement humain classe le Maroc au 117e rang en 1995 puis au 126e en 2003, au 123e en 2006 (28) et au 126e en 2008 (29). Ce classement reste parmi les plus bas du monde.

En effet, si 25 % de la population marocaine demeure économiquement vulnérable, la pauvreté affecte aujourd’hui 13,7 % de la population (23,1 % en zones rurales et 6,3 % en zones urbaines où 30 % de la population continue de vivre dans un habitat insalubre). Le taux d’analphabétisme, selon le recensement 2004, reste en effet élevé (43 %) avec une incidence encore plus marquée dans les zones rurales (60,5 %). Une part importante

(28) L’IDH est basé sur un indicateur de mesure composite concernant trois dimensions: l’espérance de vie (santé et longévité), l’instruction (alphabétisation et scolarisation) et le niveau de vie mesuré par le revenu en parité de pouvoir d’achat, cf. http://www.yenoo.com/fr/news+article.storyid+1790.htm(29) http://www.lopinion.ma/def.asp?codelangue=23&id_info=14039&date_ar=2009-10-8

Le Statut avancé : quels enjeux pour le Maroc dans ses rapports avec l’U.E ?

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de la population de 10 ans et plus (42,7 %) n’a aucun niveau d’instruction (villes, 29,5 % et rural, 59,8 %) (30). La situation étant ce qu’elle est, que peut espérer le Maroc par l’octroi de ce Statut avancé ?

Ce que peut demander le Maroc en vertu de son Statut avancé

Le Groupe de travail ad hoc sus mentionné a effectivement réalisé un travail remarquable en termes de propositions. Il a passé en revue la quasi-totalité des secteurs à la fois économique, politique, social et culturel. Le listing proposé, par son exhaustivité, risque d’aboutir à l’impression du “tout prioritaire”. Il nous semble qu’une tentative de hiérarchisation des actions à entreprendre en priorité s’avère nécessaire. Cela ne veut nullement dire que les autres secteurs ne le sont pas ; mais puisqu’il faut gérer la pénurie des moyens et des efforts, un ordre de priorité des domaines d’intervention est nécessaire. Dans cette veine, trois domaines semblent urgents : 1) un effort soutenu est à envisager pour résoudre le conflit “gelé” du Sahara qui continue d’absorber une part importante du budget marocain ; 2) la contribution à la réussite de l’édification de la région maghrébine ; 3) la mobilisation de davantage de moyens pour concrétiser ce Statut avancé en termes d’implication des acteurs institutionnels et de la société civile.

1. Une plus grande implication de l’UE dans la résolution du conflit du Sahara

Jusqu’à présent, l’UE s’est montrée timorée face à la proposition marocaine relative à une large autonomie des provinces sahariennes dans le cadre de la souveraineté marocaine. Cette proposition négociable dans son principe et sa philosophie n’en a reçu qu’une appréciation de principe. Ce qui est demandé, nous semble-t-il, c’est un peu plus d’engagement politique de la part de l’UE qui connaît bien les tenants et les aboutissants historiques, politiques et géostratégiques de cette épineuse affaire.

Cet engagement de l’UE est d’autant plus urgent que tout le long de la frontière entre le Maroc et l’Algérie se situe une zone “grise”, objet de toutes les surprises. De même, la zone qui s’étend du Sahara jusqu’aux pays du Sahel est aussi poreuse que vaste nécessitant pour en assurer le contrôle

(30) UNDP country programme document for the Kingdom of Morocco (2007-2011).

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des moyens coûteux et sophistiqués. Ici, l’aide de l’UE est évidemment précieuse, vu son expérience en matière de “gestion des crises”.

Le Sahel (de la Mauritanie au Soudan en passant le Mali, le Niger et le Tchad) présente les caractéristiques suivantes :

a) la porosité des frontières, inhérente aux caractéristiques géopolitiques propres à cet espace ;

b) l’immensité du désert, « vide topologique » difficilement contrôlable et difficilement défendable, passible de multiples fonctions : trafics illicites en tous genres (personnes, armes légères, armes prohibées, déchets nucléaires, etc.), sources de tension et de crises, abri pour bandes criminelles et autres commandos dormants, zone discrète pour tests sensibles (armes chimiques, armes balistiques, entraînements aériens...), etc.

En fait, le Sahara, zone de transit, zone refuge et zone d’activités secrètes, est au croisement de multiples initiatives mises en place par les grandes puissances. Dans l’échiquier stratégique mondial, l’arc sahélien cristallise un faisceau de facteurs ‘crisogènes’ qui ont produit et qui ne cesseront de produire des conflits aux répercussions préjudiciables à la paix et à la sécurité de la région mais aussi à la paix et à la sécurité internationale. La dégradation des économies, la faiblesse et l’usure des infrastructures éducatives et sociales et la précarisation des ressources agricoles sont les traits communs aux Etats du Sahel, rangés pour la plupart dans la catégorie des Etats les moins avancés (PMA). La paupérisation et le chômage croissant, sources de désespoir, offrent un terreau favorable aux rébellions, aux dissidences et aux extrémismes.

Les dangers potentiels peuvent se matérialiser sous plusieurs formes, isolées ou combinées telles que la constitution d’un terreau et d’un sanctuaire pour le terrorisme international (attentats, enlèvements, piraterie, camps d’entraînement ; zone grise propice à la multiplication des trafics illégaux : armes, stupéfiants, véhicules, matières premières ; source d’une émigration de masse en direction de l’Afrique du Nord et des rivages européens (jusqu’à présent, ces flux sont relativement maîtrisables) ; l’investissement massif du produit des détournements et des trafics dans les circuits souterrains des économies occidentales (blanchiment d’argent) ; risque de détournement des ressources stratégiques (pétrole, gaz, uranium), objets de convoitise internationale à des fins subversives ou nuisibles à la stabilité régionale.

Le Statut avancé : quels enjeux pour le Maroc dans ses rapports avec l’U.E ?

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Aujourd’hui, les Subsahariens, qui ont toutes les raisons de fuir leur état de misère et d’insécurité pour aller en Europe, sont en nombre croissant et se chiffrent par milliers. Ils quittent leurs pays et traversent, dans la quasi-totalité des cas, le territoire algérien avant de regagner le Maroc, puis tentent à travers Ceuta et Melilla de passer sur l’autre rive de la Méditerranée : « Des réseaux clandestins (31), véritables organisations de contrebandes de toutes sortes, traversent l’Algérie du sud au nord pour acheminer les clandestins. » D’autres passent par la Mauritanie pour tenter de rejoindre les Canaries.

Dans son rapport du 20 octobre 2004, le Secrétaire général de l’ONU avait exprimé ses appréhensions « face au trafic d’êtres humains » dans la région du Sahara occidental. La partie se situant entre le Mur de sécurité et la frontière algérienne constitue en effet un espace de passage de Subsahariens vers l’Europe via l’Algérie ou s’acheminant vers le nord du Maroc (32), plus proche des côtes européennes. D’où les inquiétudes de Kofi Annan en 2004 par rapport à la zone algérienne occupée par le Polisario « où s’installent des réseaux clandestins (33) ».

(31) Le témoignage de ce Malien est édifiant à ce propos : « Après avoir quitté le Mali, nous avons (il était accompagné de trois de ses compatriotes) été accueillis par des éléments du POLISARIO auxquels chacun de nous a versé 1 000 euros. D’autres émigrés se sont joints à nous et le nombre augmentait au fur et à mesure que nous progressions. Nous étions pris en charge pour la nourriture et le transport. Ce sont les véhicules algériens et polisariens qui nous ont transportés jusqu’à Tindouf. Là, nous fûmes abandonnées à nous-mêmes. Nous avons passé la frontière marocaine au nord. Dans notre traversée algérienne, nous n’avions aucune difficulté avec les autorités qui nous soutenaient. Nous avons vécu une tragédie douloureuse. Nous étions complètement vidés et malades (...). Les Algériens nous fixaient les étapes de notre itinéraire pour rejoindre la frontière marocaines à partir de B’ni Ounif, dernière ville algérienne que nous avons quittée pour nous cacher dans les montagnes de Figuig au Maroc. » Cf. Mohammed Boughdadi, 2007, le Conflit saharien dans le contexte sécuritaire euro-maghrébin, Editions d’impression Bouregreg communication, Rabat, p. 73-74. (32) Fouad M. Ammor « Pour un Dialogue méditerranéen Plus », recherche réalisée dans le cadre d’une bourse d’étude au Collège de l’OTAN à Rome, mai 2008. (33) Aymeric Chauprade (Lecture given at the University of Geneva on 6 June 2005) goes so far as to suggest a link between the Polisario and Al Qaeda networks : «As a result of the combined effect of a decrease in its political and military power, and the arrival of a new generation of Polisario recruits who have absorbed fundamentalist ideology in Algerian universities, the movement is seeking fresh logistic and ideological impetus.» In Chauprade’s view, the Polisario could eventually swing towards radical Islam and terrorism. This change is being accelerated by the current transformation of “the Sahara fundamentalist belt” into Al Qaeda rear bases manned by «500 to 600 Afghanistan veterans (…) already installed in what others call the “grey areas of the Sahara.» “Deterritorialization” of terrorist violence, then, would imply that the Sahara could be used as a base to prepare terrorist attacks to be executed elsewhere, for logistic support and transit of armed groups such as the Salafist Group for Preaching and Combat (SGPC), which

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2. De bonnes auspices quant à l’édification du Grand Maghreb La stabilité de la région euro-méditerranéenne est fortement tributaire

de la démocratisation et du développement de sa rive sud. Cette assertion n’est pas nouvelle, elle est mentionnée dans la quasi-totalité des documents d’association et de partenariat conclus entre l’UE et ses partenaires (cf. Déclaration de Barcelone du 28 novembre 1995). Si l’espace maghrébin ne réussit pas à attirer suffisamment d’investissements, notamment européens, c’est parce que les pays maghrébins continuent à agir en ordre dispersé et que leur marché n’est pas attractif. La variabilité du quantum d’investissements drainés d’un pays maghrébin à l’autre et d’une année à l’autre et leur faiblesse ne pourraient pas participer significativement à la résorption du chômage endémique et surtout celui des jeunes (diplômés de surcroît).

Flux des Investissements directs étrangers (en millions de $)

Pays 1990-2000Moyenne annuelle 2003 2004 2005 2006

Maroc 580 2429 1070 2946 898

Algérie 282 634 882 1081 795

Tunisie 452 584 639 782 312

Source : UNCTAD, World Investment Report 2007 ; www.unctad.org/wir or www.unctad.org/fdistatistics.

Pour plus de détails, voir “Definitions and sources” in annex B and annex tables B 1-3 in WIR07.

Les performances du Maghreb en tant que telles quant aux possibilités d’attirer les investisseurs étrangers sont très faibles, elles se situent au 55e rang dans l’échelle des destinations des investissements directs étrangers (doc. UNCTAD précité.). Moins de 1/100 des investissements européens y sont destinés (34).

whom Algerians and Americans are only too familiar. A solution to the conflict needs to be found urgently, to prevent terrorism from taking root, cité par Laurence Ammour in Research Paper, Academic Research Branch - NATO Defence College, Rome – n°30, november 2006, p. 4.(34) Fouad M. Ammor « L’Union pour la Méditerranée : que de brèches à colmater », Economia, n° 4, Centre d’études stratégiques, HEM, 4e trimestre, 2008.

Le Statut avancé : quels enjeux pour le Maroc dans ses rapports avec l’U.E ?

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3. Un plus grand soutien quant à l’approfondissement de ses réformes économiques, sociales et politiques

Les propositions faites par le Groupe de travail Maroc-UE sont une bonne base de départ. Encore faut-il leur allouer les moyens nécessaires pour leur mise en œuvre. Contrairement au programme MEDA, il y a toutes les raisons de croire que le nouvel instrument financier de l’UE (ENPI) est suffisamment flexible pour répondre, partiellement, à ce cas de figure. Un minimum d’équilibre doit être rétabli entre l’effort de soutien et d’assistance prodigué aux pays “voisins” de l’Est et du Centre et celui accordé aux pays du sud de la Méditerranée.

Une plus grande implication des acteurs de la société civile marocaine, notamment dans leurs rapports avec leurs homologues du Nord et de l’Est, est à encourager. Cette proposition ne ferait que concrétiser davantage l’appel du Processus de Barcelone qui insiste explicitement sur cette dimension participative des programmes de coopération universitaires et de recherche tels que Tempus, Erasmus Mundus, en raison de leur rôle fondamental dans le rapprochement des standards et des normes.

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Le Statut avancé UE-Maroc et les collectivités locales

Iván MARTíN et Paqui SANTONJA (35)

Le Statut avancé accordé le 13 octobre 2008 entre l’Union européenne et le Maroc dans un « Document conjoint » sur le « renforcement des relations bilatérales/Statut avancé » (36) est avant tout l’expression de la « volonté commune du Royaume du Maroc et de l’Union européenne de nouer un partenariat de plus en plus étroit et mutuellement bénéfique, couvrant toutes les dimensions et à tous les niveaux, afin notamment de consolider le processus de réformes et de modernisation économique et sociale de ce pays (37) ». En tant que telles, les collectivités locales ont un rôle fondamental à jouer dans cette démarche de modernisation et, par conséquent, dans le Statut avancé. En effet, le lancement d’un nouveau cadre de relations privilégiées entre l’UE et le Maroc a ouvert de fortes expectatives par rapport à la possibilité d’élargir et d’approfondir les relations déjà existantes entre les collectivités locales euro-marocaines.

Après une brève révision de la politique actuelle menée par le Royaume du Maroc dans le domaine de la décentralisation et du développement régional, cet article dédiera son analyse aux potentialités qu’offre le Statut avancé à la veille du premier sommet entre l’UE et le Maroc.

(35) Iván Martín est chercheur associé de l’Instituto Complutense de Estudios Internacionales (Universidad Complutense de Madrid) et Paqui Santonja est assesseur exécutive auprès du Secrétaire d’état pour l’Union européenne du Ministère des Affaires étrangères et de la coopération espagnol. Les propos ici recueillis impliquent seulement les auteurs et non pas les institutions qu’ils représentent.(36) http://ec.europa.eu/external_relations/morocco/docs/document_conjoint_fr.pdf.(37) Conclusions du Conseil des affaires générales et des relations extérieures de l’UE des 8-9 décembre 2008, http://www.consilium.europa.eu/uedocs/cms_data/docs/pressdata/fr/gena/104615.pdf.

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Iván Martín et Paqui Santonja80

Accompagnement du processus de décentralisation marocain

Le Statut avancé, suivant la dynamique établie par l’UE d’accompagnement des stratégies établies par les états partenaires (38), apparaît dans un premier temps comme un appui aux réformes politiques engagées par le Maroc ces dernières années pour faire progresser la démocratisation et la modernisation de la société en profitant de l’appui de l’UE. Le Statut avancé se veut ainsi porteur de réformes dans le domaine politique permettant le renforcement de la politique engagée par le Royaume du Maroc et offrant un cadre spécifique et plus adapté à la forte et toujours croissante coopération décentralisée entre les collectivités locales euro-marocaines.

Dans ce cadre, durant la dernière décennie, des programmes spécifiques dans le domaine de la décentralisation ont commencé à se concrétiser au Maroc à travers des politiques (39) versant aussi bien sur la décentralisation administrative que sur le support au développement territorial. C’est ainsi que le Plan d’action national pour la régionalisation et le Programme de Modernisation de l’Administration (40) se bâtissent sur la base de la dévolution de compétences auprès des collectivités territoriales et la dotation de moyens permettent de mettre en place des politiques décentralisées qui restent néanmoins encore sous la tutelle du ministère de l’Intérieur.

Accompagnant cette démarche, une lecture rapide des différents documents et plans d’action entre l’Union européenne et le Maroc nous permet de constater l’évolution de l’approche, liée dans un premier temps à l’appui institutionnel et au support à la décentralisation de façon générale, vers petit à petit, la concrétisation de certains domaines spécifiques d’intervention pour les collectivités locales marocaines, à savoir : le développement régional équilibré et l’aménagement du territoire pour

(38) Pour davantage d’information sur les stratégies d’accompagnement des bailleurs de fonds internationaux envers les Etats, voir : Santonja, Paqui (2010), « Décentralisation et coopération internationale : quelle cohérence avec les stratégies nationales ? Les cas du Maroc et du Liban », en cours de publication dans les Cahiers de la coopération décentralisée de Cités Unies France, juin 2010.(39) Annoncées dans les discours officiels du Roi. (40) Pour une étude détaillée voir les différents documents élaborés par le Ministère de la Réforme de l’Administration Publique :http://unpan1.un.org/intradoc/groups/public/documents/un/unpan031651.pdf http://unpan1.un.org/intradoc/groups/public/documents/cafrad/unpan002395.pdf

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les régions, le développement urbain et les politiques sociales à travers l’INDH pour les villes.

Le niveau local dans le Statut avancé UE-Maroc

Parmi les objectifs signalés par le Document conjoint, il convient de souligner l’intensification de la coopération politique « en vue d’une plus grande prise en compte de leurs priorités stratégiques respectives », la convergence des législations pour l’« intégration progressive du Maroc au marché intérieur de l’UE » et « la vocation [du Statut avancé à] une plus grande implication des entités territoriales, des acteurs économiques et des partenaires sociaux des deux parties dans l’objectif de promouvoir les synergies entre ces intervenants et de concrétiser l’appropriation commune de ce partenariat » ainsi que de « développer la dimension humaine du partenariat UE-Maroc à travers le renforcement des échanges culturels, éducatifs et scientifiques». Et ce, « avec un soutien financier approprié et en phase avec l’ampleur et le caractère ambitieux de cette nouvelle évolution ». À cet effet, une « feuille de route » a été établie visant à matérialiser le Statut avancé en une série d’actions à court et à moyen termes qui seront objet d’une évaluation périodique.

Concernant les collectivités locales, le document conjoint sur le Statut avancé

« encourage le rapprochement entre les représentants des autorités régionales et locales marocaines et leurs homologues européens qui permettra de conforter la dynamique de la coopération transfrontalière et transrégionale promue dans le cadre de la PEV, étant entendu qu’elle devrait respecter les mêmes principes que la coopération transfrontalière au titre de l’IEVP. Le Maroc ambitionne, à terme, de mettre en réseau les entités régionales marocaines avec le Comité des Régions (CdR) ».

Les deux éléments à extraire de cette déclaration sont les suivants :

– Continuité explicite des instruments de coopération transfrontalière et de coopération décentralisée entre le Statut avancé et la Politique européenne de voisinage. En effet, il ne semble pas que l’agenda actuel du Statut avancé prévoie des possibilités d’impulser ladite coopération à travers de nouveaux programmes ou ressources.

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– Perspectives d’institutionnalisation des relations entre les autorités régionales marocaines et européennes (il est intéressant à signaler que, dans ce contexte, les collectivités locales en tant que telles ne sont pas mentionnées).

a) Institutionnalisation

Quant à la dimension institutionnelle, le Comité des régions de l’UE et le ministère des Affaires étrangères et de la Coopération du Royaume du Maroc ont déjà établi des contacts préliminaires pour convenir des mécanismes de coopération opérationnelle entre cette institution et les régions et villes marocaines. Il est important que cette institutionnalisation ne se produise pas uniquement « de haut en bas », mais qu’elle permette aussi des contacts directs entre les autorités locales européennes et marocaines et garantisse une implication adéquate du niveau municipale.

b) Un pari pour la promotion de jumelages institutionnels

Dans cette logique, dans le cadre du Document conjoint sur le Statut avancé on retrouve un énoncé qui rappelle l’engagement mutuel de l’UE et du Maroc dans le processus de renforcement et d’approfondissement des réformes politiques et administratives, permettant entre autres l’avancement dans le processus de décentralisation : « L’UE salue l’intention du Maroc de renforcer la décentralisation et de promouvoir le développement régional. L’UE attache une grande importance au développement régional équilibré dans un souci de cohésion sociale. Elle se félicite du lancement de deux opérations de jumelage au profit d’autorités régionales. » Cependant, mis à part cette mention, peu d’éléments de concrétisation se retrouvent dans le texte.

Or le support à la régionalisation n’est plus seulement compris comme un effort pour le développement régional, mais il s’agit aussi de renforcer leur rôle en tant qu’institution au travers d’un instrument spécifique : la promotion de jumelages institutionnels. Initialement prévu comme instrument pour accompagner la préparation des pays de l’Est de l’Europe à l’adhésion à l’UE, le jumelage institutionnel a été élargi en 2003 aux Etats ayant un Accord d’association avec l’UE, dans le cas concret qui nous occupe à travers le Programme d’appui à l’Accord d’association Maroc-UE. L’originalité de cet outil est de permettre à une administration ou organisme public marocain en charge d’une réforme sectorielle ayant

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pour objectif de rapprocher l’arsenal juridique (législation, réglementation, normes, standards…) du Maroc de l’acquis communautaire, de pouvoir choisir une administration ou un organisme public européens similaires pour l’aider à réaliser cette réforme. En effet, à l’issue d’une procédure d’identification du projet et de mise en concurrence des 27 Etats-membres de l’UE, l’État membre partenaire sélectionné par les Autorités marocaines s’engage à transférer l’expertise pratique du secteur public disponible dans son administration nationale à l’administration marocaine.

Ceci constitue une expérience pilote unique dans le cadre de la Politique européenne de voisinage en matière de renforcement des capacités d’une région déterminée. L’objectif commun est de promouvoir le développement de la même région par les moyens propres à chaque institution et les synergies potentielles à générer au profit du territoire, des secteurs d’activités et des populations bénéficiaires.

Les deux projets de jumelage avec des autorités régionales actuellement en cours au Maroc concernent la Wilaya de l’Oriental et l’Agence de Oriental dont la réalisation a été attribuée à l’Espagne en tant qu’Etat-membre à travers respectivement la Région de Galice et l’Agence andalouse de coopération internationale. Ils ont pour objectif de permettre, d’une part, à l’Agence de développer ses capacités d´intervention dans le cadre de ses objectifs institutionnels propres et, d’autre part, de permettre à la Wilaya de développer ses capacités en matière de développement intégré et durable de la région.

Le Statut avancé recueille donc ces deux projets, valorisant le fait que les administrations bénéficiaires sont des régions. Ceci devrait être l’occasion d’un véritable engagement en faveur non seulement d’une consolidation des régions comme acteurs-clés ancrés sur le territoire (en cohérence avec le plan de régionalisation qui devrait être présenté en fin 2010) mais aussi pour renforcer la coopération territoriale avec d’autres régions européennes et ceci avec le support de la Commission européenne (41). Par contre, la mise en exergue du jumelage institutionnel entre régions euro-marocaines ne peut en aucun cas être le seul fondement de l’appui à la décentralisation et au développement régional déclaré dans le document conjoint du Statut avancé.

(41) Pour plus de détails au sujet du jumelage des collectivités locales, voir : http://www.gemdev.org/publications/etatdessavoirs/pdf/abouhani.pdf.

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En fait, les deux projets de jumelage entre des autorités régionales mentionnés ci-dessus pourraient offrir le cadre approprié pour lancer une première étude sur les besoins de renforcement des capacités administratives et institutionnelles des divers niveaux des gouvernements locaux et régionaux du Maroc (42). Plus généralement, le Statut avancé offrirait également un cadre approprié au lancement d’un vaste programme de renforcement des capacités administratives et institutionnelles au profit également des collectivités locales, tel qu’il a été fait dans le cadre du Partenariat oriental établi lors du sommet de Prague du 7 mai 2009 entre l’UE et six pays d’Europe de l’Est et du Caucase méridional (Ukraine, Moldavie, Géorgie, Azerbaïdjan, Arménie et Biélorussie).

Par ailleurs, l’établissement au Maroc de la Commission consultative sur la régionalisation, qui devra dresser un rapport sur la « régionalisation avancée » au Maroc fin 2010 et notamment la démarche ultérieure d’adoption et d’éventuelle application de ses propositions, offre une excellente opportunité pour matérialiser l’appui de l’UE à ce processus et assurer une participation appropriée des collectivités locales à cette dernière. En ce sens, il est important de souligner que la répartition des compétences entre les divers niveaux de gouvernement est bien plus qu’un simple question d’efficience et de bonne gouvernance : il s’agit d’une dimension fondamentale du processus de démocratisation, de manière que le processus de régionalisation doit être accompagné par un renforcement effectif de l’autonomie et des ressources des collectivités locales, et avoir un impact direct sur les conditions de vie des citoyens, aspects que l’on ne saurait ignorer.

c) Autres programmes européens concernant les collectivités locales marocaines

Dans le cadre plus général de la Politique européenne de voisinage (PEV), le Programme indicatif national (PIN) 2011-2013 (43) publié par la Commission européenne en avril 2010 présente les priorités de la coopération bilatérale UE-Maroc pendant les prochaines années. En effet, le document mentionne explicitement la « régionalisation/approche territoriale » comme l’un des thèmes transversaux à intégrer dans tous les

(42) Concernant la distribution des compétences entre les divers niveaux de gouvernement au Maroc et la structure institutionnelle territoriale, voir la Fiche Pays Maroc du CGLU (2009b).(43) http://ec.europa.eu/world/enp/pdf/country/2011_enpi_csp_nip_morocco_en.pdf.

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programmes proposés, au même titre que le genre, l’environnement et la bonne gouvernance. Il est à signaler l’importance attachée dans ce PIN au support au processus de modernisation des administrations publiques et tout particulièrement à l’articulation entre les services déconcentrés de l’Etat et les attributions des collectivités locales, aussi bien dans le renforcement des capacités que dans l’amélioration en matière de gestion fiscale. Comme autre nouveauté, mise à part de la régionalisation, il est à signaler le besoin de renforcement des capacités des collectivités locales. Les principaux programmes inclus dans le PIN qui touchent le domaine des collectivités locales sont les suivants : le Programme de prévention de l’habitat insalubre (qui fait mention du besoin de coordination avec la Direction générale des collectivités locales dans le cadre de son travail sur la planification stratégique urbaine), le Programme de développement rural intégré dans le Nord, la réforme agricole, la modernisation de l’action publique (avec l’accent mis sur la régionalisation) et l’appui à la politique forestière.

Finalement, dans le chapitre « réussir le Statut avancé », le programme veut contribuer « à une meilleure implication des entités territoriales, des acteurs économiques et des partenaires sociaux au sein de ce partenariat ».

Programme de coopération transfrontalière. L’accent mis sur la continuité des instruments de coopération décentralisée dans le cadre de l’Instrument européen de voisinage et de partenariat (IEVP), qui est l’instrument financier de la Politique européenne de voisinage, souligne combien il est important de débloquer la participation du Maroc au Programme de coopération transfrontalière qui y est prévu. L’importance de ce programme réside non seulement dans les ressources considérables qu’il mobilise, avec une enveloppe financière totale (pour le sud de la Méditerranée et l’est de l’Europe) de 1,181 milliard d’euros pour la période 2007-2013, mais surtout dans le fait que pour la première fois dans l’histoire de la coopération externe de l’UE, il applique une méthodologie de gestion et de contrôle propre aux fonds structurels de la politique régionale européenne, bien que légèrement simplifiée. En outre, ces ressources sont destinées à des programmes de coopération transfrontalière entre les territoires situés sur les frontières externes de l’UE, c’est-à-dire entre les États membres et les pays partenaires qui partagent des frontières maritimes ou terrestres, programmes qui seront exécutés par les autorités

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régionales et locales et des autres acteurs locaux du développement (ONG, chambres de commerce, universités…).

Plus concrètement, il comprend le Programme Bassin Méditerranée destiné à toutes les régions côtières méditerranéennes et qui a déjà été mis en œuvre (avec un budget d’environ 171 millions d’euros) (44) et divers programmes bilatéraux dont, entre autres, un Programme Espagne-Maroc (avec un sous-programme Andalousie-Maroc et un sous-programme îles Canaries-Sud du Maroc) avec un budget de 156,7 millions d’euros. Le lancement de ce dernier programme est sujet à un accord préalable des gouvernements d’Espagne et du Maroc. Cependant, ce dernier a décidé de suspendre pour l’instant sa participation au Programme Bassin Méditerranée (qui requiert la signature d’une convention financière avec la Commission européenne) et de ne pas souscrire au Programme Espagne-Maroc, ce qui implique la perte de la moitié des fonds alloués à ce programme si l’accord ne se produit pas avant juin 2010 (l’autre moitié, correspondant à des fonds structurels revenant à l’Espagne, serait allouée à des programmes de coopération transfrontalière gérés par les autorités régionales espagnoles).

Au-delà de la perte des ressources financières, qui infirme l’excellente capacité d’absorption du soutien financier européen qu’a démontré posséder le Maroc (116 % des allocations en 2008), le blocage du lancement du Programme de coopération transfrontalière Espagne-Maroc et le refus de participer au Programme Bassin Méditerranée remettent en question la capacité d’adaptation du Maroc à la méthodologie de la politique régionale européenne et, par conséquent, sa future participation à cette politique. En effet, l’objectif de l’application de la méthodologie des fonds structurels aux programmes de coopération transfrontalière de l’IEVP était précisément de servir de banc d’essai à « l’accès aux moyens financiers communautaires adéquats pour accompagner le Maroc dans une logique de politique régionale et de cohésion de l’UE » que mentionne le document conjoint.

De ce point de vue, le déblocage de la participation du Maroc au Programme de coopération transfrontalière revêt une importance cruciale pour les perspectives de toute modalité d’élargissement de la politique

(44) www.enpicbcmed.eu/fr/index.html. Programme opérationnel conjoint. www.commed-cglu.org/IMG/pdf/Programme._Fr.pdf.

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régionale et des fonds structurels au Maroc dans le cadre du Statut avancé, ainsi que pour la participation opérationnelle des collectivités locales et régionales à ce processus.

Programme CIUDAD. Ce programme (Coopération en matière de développement urbain et dialogue) compte sur une enveloppe budgétaire de 14 millions d’euros pour la période 2009-2011 (dont 8 millions pour le sud de la Méditerranée) et permet aux collectivités locales de l’UE et des pays méditerranéens partenaires de mener à bien des projets de coopération et de partenariat, précisément dans l’objectif de promouvoir la compréhension mutuelle, le dialogue et la coopération en soutenant le renforcement des capacités afin de moderniser et de renforcer les gouvernements locaux et régionaux des pays partenaires (notamment en matière de planification du développement urbain durable) (45). Les premiers projets dans le cadre de ce programme ont déjà été approuvés.

Conclusion

La tenue du premier Forum des autorités locales UE-Maroc (46) dans le cadre des activités préparatoires du premier Sommet UE-Maroc sous la présidence espagnole de l’UE a permis de mettre en rapport les interlocuteurs impliqués et de dresser un premier bilan des résultats escomptés et réellement atteints au sujet du renforcement institutionnel au support à la décentralisation. « L’engagement de Cordoue », document déclaratoire du Forum, annonce ainsi que les collectivités locales euro-marocaines réunies s’engagent, d’une part, « à initier un processus pour la construction d’un agenda commun de la coopération décentralisée entre les autorités locales du Maroc et de l’Union européenne » et, de l’autre, « à impulser les mesures nécessaires pour développer les outils d’appropriation dans les territoires, afin de faciliter davantage la coopération en tant que complément des efforts de planification stratégique ». Par ailleurs,

(45) Pour une vue d’ensemble des programmes euro-méditerranéens ouverts à la participation opérationnelle des collectivités locales et régionales, voir Iván Martín (2009), La participation opérationnelle des collectivités locales et régionales au Partenariat euro-méditerranéen. Fiche de divulgation euromed nº 2 (www.commed-cglu.org/spip.php?rubrique13).(46) Organisé par le Forum des Municipalités Andalouses pour la Solidarité Internationale (FAMSI) en collaboration avec le Secrétariat d’Etat pour l‘UE du ministère des Affaires étrangères et de la Coopération espagnole et la Direction générale des collectivités locales du ministère de l‘Intérieur marocain. http://www.andaluciasolidaria.org/index.php?option=com_content&task=view&id=866&Itemid=609

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ces mêmes collectivités locales exhortent les responsables européens et marocains « d’aller de l’avant pour une participation du Maroc dans le Programme de Coopération Transfrontalière » qui permette une meilleure « articulation entre acteurs de la coopération décentralisée UE-Maroc ».

Le Statut avancé peut offrir un cadre approprié pour rationaliser la coopération décentralisée qui existe déjà entre les autorités locales européennes (notamment françaises, italiennes et espagnoles, mais pas uniquement) et marocaines. Cette coopération n’est pas nouvelle et constitue le point de départ naturel de la participation des autorités locales dans le Statut avancé UE-Maroc. Les efforts pour le structurer ont donné lieu à la création de nombreux projets et réseaux, telles les initiatives structurants du PAD Maroc (47) (entre le Maroc et la France), le projet ART-GOLD Maroc (48) ou le projet de Ciudades Hermanas andalouses et du Nord du Maroc (AN’MAR) (49). Toutefois, il existe encore de nombreuses autorités locales dans l’Union européenne qui seraient prêtes à participer aux projets de coopération décentralisée et d’échanges avec le Maroc, mais qui ne trouvent pas souvent un interlocuteur institutionnel pouvant donner suite à ses demandes. Et le manque d’intégration entre les projets de coopération décentralisée et entre ceux-ci et les stratégies de développement au niveau local empêche de tirer tout le profit possible de l’extraordinaire potentiel mobilisateur de ces ressources et de l’expérience accumulée de la coopération décentralisée.

En ce qui concerne le dialogue politique entre les collectivités locales marocaines et européennes (50), un nouveau pas a été franchi avec la création de l’Assemblée des collectivités locales et régionales euromed (ARLEM) (51) dans laquelle le Maroc vient d’assumer la présidence des pays partenaires méditerranéens avec le président de la région d’Al Hoceima. Ceci permet de promouvoir un véritable dialogue et constitue un support à la concertation politique qui devra au niveau marocain avant tout faire un effort pour fédérer les élus locaux et régionaux

(47) Projet d’accompagnement du processus de décentralisation au Maroc, qui organise des assisses de la coopération décentralisée ; http://padmaroc.org. (48) http://www.pnud.org.ma/P00056511.asp. (49) http://www.an-mar.org(50) Selon le Document conjoint « le Maroc ambitionne, à terme, de mettre en réseau les entités régionales marocaines avec le Comité des Régions (CdR) ».(51) Pour plus d’informations, voir le site web du Comité des Régions : http://www.cor.europa.eu/pages/DetailTemplate.aspx?view=detail&id=01da2561-f039-4abd-a42e-47995ffc0fc5.

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à travers les structures déjà existantes (entre autres l’Association marocaine des collectivités locales).

Grâce au Statut avancé, de nouvelles fenêtres d’opportunités souvrent pour les collectivités locales euro-marocaines. Il s’agit du cadre le plus approprié pour continuer à avancer dans l’approfondissement des relations à travers la mise en place de programmes spécifiques dotés de ressources financières propres et assurant un espace de dialogue avec les autorités nationales. Un nouveau sera d’établir des mécanismes effectifs par assurer une implication majeure de la population et des acteurs de la société civile dans cette dynamique de travail et d’échange.

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CGLU (2009b): “Kingdom of Morocco”, UCLG Country Profiles, Fiche pays sur le Maroc du Rapport GOLD sur la Décentralisation et la Démocratie Locale dans le Monde, www.cities-localgovernments.org/gold/Upload/country_profile/ Morocco.pdf

Jaidi, Larabi (2009) : Le statut avancé Maroc-UE : quelle valeur ajoutée à la PEV ? Annuaire de la Méditerranée, 2009. IEMed et CIDOB. Barcelone. http://www.iemed.org/anuari/2009/farticles/fr159.pdf

Bernard Husson et Abdallah Saaf (2009) : Évaluation de la coopération décentralisée maroco-française. Évolution et impacts des actions et des dispositifs d’accompagnement (2001-2008), CIEDEL y CERSS, PAD-Maroc.

Larabi Jaidi et Iván Martín (2010) : Comment faire avancer le Statut Avancé ? Documents IEMed, nº 5, IEMed, Barcelone, http://www.iemed.org/publicacions/papers5_ma.pdf.

Martín, Iván (2009) : « EU-Morocco Relations : How Advanced is the ‘Advanced Status’? », Mediterranean Politics, vol. 14.2, p. 239-245, Routledge. 2009.

Martín, Iván (2008) : « El estatuto avanzado de Marruecos en la UE : ¿cuánto más que la asociación y cuánto menos que la adhesión? », en ARI, Real Instituto Elcano, p. 9-13, ARI nº 158/2008.

Santonja, Paqui (2008) : El Instrumento Europeo de Vecindad y su aplicación en el Mediterráneo. Retos y oportunidades desde el mundo local. Universidad Internacional de Andalucía. Sevilla, marzo, 2008.

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Axe IILes politiques et les mécanismes

de mise en œuvre du Statut avancé

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Un nouvel instrument financier pour un nouveau statut avancé

Iván MARTíN (52)

Dans le document conjoint sur le Statut avancé approuvé par le Conseil d’association UE-Maroc le 13 octobre 2008 (53), les deux parties se sont mises d’accord pour assurer au Maroc « un soutien financier approprié et en phase avec l’ampleur et le caractère ambitieux » du Statut avancé, tout en reconnaissant que « l’approfondissement des réformes découlant du Statut avancé, et notamment l’approximation réglementaire et la modernisation des infrastructures, ainsi que l’ouverture croissante de l’économie prévue au titre de l’approfondissement de la libéralisation (ALEA), nécessiteront des moyens financiers importants afin de mobiliser l’assistance technique, financer les investissements et accompagner (au niveau social) les inévitables mutations ».

Les deux parties s’engagent donc à une « réflexion conjointe [...] en vue de franchir, à partir de 2013, une nouvelle étape pour l’accès aux moyens financiers communautaires adéquats pour accompagner le Maroc dans une logique de politique régionale et de cohésion de l’Union européenne (UE) et d’adoption de nouvelles procédures de mise en œuvre », c’est-à-dire pour envisager un type de participation aux fonds structurels européens. Il ne faut pas laisser passer cette opportunité d’entamer cette « réflexion conjointe » et même aller plus loin et profiter de la période 2010-2013 pour avancer dans les préparatifs concrets pour rendre possible cette participation.

Étant donné que les montants maxima de l’action extérieure de l’UE sont fixés dans les Perspectives financières 2007-2013, l’augmentation substantielle de l’assistance financière est reportée aux prochaines

(52) Chercheur associé de l’Instituto Complutense de Estudios Internacionales (ICEI) à Madrid.(53) http://ec.europa.eu/external_relations/morocco/docs/ document_conjoint_fr.pdf. Pour une analyse exhaustive du Statut avancé, voir Larabi Jaidi et Iván Martín (2010), Comment faire avancer le Statut avancé UE-Maroc ? 94 pages, Documents IEMed nº 5, IEMed et Groupement d’Etudes et de Recherches sur la Méditerranée (GERM), Barcelone, http://www.iemed.org/publicacions/DocsIEMed_5.pdf.

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Perspectives financières 2014-2018, qui devraient commencer à être négociées au cours du deuxième semestre de 2010.

Ceci étant, dans le cadre de la planification stratégique de l’Instrument européen de voisinage et partenariat (IEVP) pour la période 2011-2013, la Commission européenne dispose d’une certaine marge de manœuvre dans la répartition des fonds entre les pays d’une même région. Ainsi, dans le Programme Indicatif National 2011-2013 pour le Maroc approuvé par la Commission le 3 mars 2010, quelques jours avant le premier Sommet UE-Maroc, le Maroc, avec 580,5 millions d’euros pour cette période, bénéficie effectivement du montant le plus important en termes absolus, ainsi que de l’augmentation en pourcentage la plus élevée parmi les pays partenaires méditerranéens, à l’exception de la Syrie et de la Libye qui partent de niveaux très bas (voir tableau 1).

tableau 1Allocations bilatérales multiannuelles indicatives

pour 2011-2013 (mill. €)

PaysEnveloppe financière

provisionnelle 2011-2013 (mill. €)

Augmentation par rapport à

2007-2010 (%)

Population(mill)

AssistancePar habitantet par an (€)

Maroc 580,5 18,2 % 31 6,2Algérie 172 4,2 % 34 1,6Tunisie 240 6,7 % 10 8Égypte 449 7,2 % 82 1,8

Autorité palestinienne*

504 6,3 % 4,5 37,3

Jordanie 223 12,2 % 6 12,4Liban 150 7 % 4 12,5Syrie 129 32,3 % 21 2Libye 60 1 000 % 6 3,3

Pays arabes méditerranéens

2 507 12,8 % 198,5 4,2

* Hors assistance humanitaire extraordinaire.Source : Élaboration propre à partir de documents de la Commission européenne.

Du point de vue du Maroc, cela reste bien sûr en deçà de ses attentes et de ses capacités. En effet, en termes de quantité par habitant le soutien financier reste très modeste : de un peu plus de 6 euros par habitant et par an, toujours substantiellement inférieur aux quantités allouées à des pays

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de petite taille comme la Tunisie, le Liban ou la Jordanie. L’augmentation accordée au Maroc doit également être relativisée par rapport à d’autres pays du voisinage, notamment les pays de l’est de l’Europe : ainsi, l’Ukraine verra son enveloppe financière augmenter de 27 % (470 millions en tout) pour 2011-213, et les autres pays du Partenariat oriental bénéficieront encore d’augmentations plus conséquentes : plus de 50 % en moyenne. La répartition des fonds pour la période indiquée respecte en gros l’accord politique de distribuer 1/3 de l’assistance de l’IEVP aux pays voisins de l’Est et 2/3 aux pays du sud de la Méditerranée (si on ne compte pas les 45 millions destinés à la Russie et en tenant compte du fait que cette règle de répartition a été adoptée avant l’adhésion des 10 pays de l’est de l’Europe qui sont devenus États-membres de l’UE et ne bénéficient donc plus de ces aides). Néanmoins et curieusement, l’assistance moyenne par tête et par an pour les pays de l’Est, qui ont commencé à recevoir de l’aide très récemment, a déjà devancé celle des pays méditerranéens (5,6 euros contre 4,2 euros).

À l’évidence, le niveau actuel de l’aide, même s’il a augmenté de façon soutenue depuis 1995 tant en termes absolus que par habitant, ne suffit ni pour mener une politique de convergence réelle entre le Maroc et l’UE, ni pour faire face aux grands défis socioéconomiques auxquels est confronté le Maroc. Dans le meilleur des cas, le montant par tête ne dépassera pas les 6,5 euros par habitant et par an en 2013. Même si c’est une avancée importante par rapport aux 4 euros par habitant et par an alloués durant la période 2000-2006, cela s’avère insignifiant en comparaison avec les 200 euros par habitant et par an jugés nécessaires par l’UE elle-même.

tableau 2Assistance financière de l’UE au Maroc (1995-2013)

Allocation(mill. €)

Allocationpar an (mill. €)

Allocation par an et par habitant (€)

MEDA I (1995-1999) 660 132 4,7

MEDA II (2000-2006) 982 140,3 4,8

IEVP (2007-2010) 654 163,5 5,45

IEVP (2011-2013)* 580 193,3 6,2

Quant aux modalités de l’assistance, il est évident que l’évolution de la logique de coopération par projet vers l’aide budgétaire sectorielle qui

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absorbe déjà 100 % de l’assistance au Maroc a été un pas en avant important en termes d’efficacité. Cependant, si l’on veut effectivement créer un espace économique euro-marocain, la logique de la coopération qui l’a emporté jusqu’à présent doit être remplacée par une logique d’intégration au niveau de l’assistance financière (comme complément, par exemple, de la convergence normative). Cette logique est sous-jacente, par ailleurs, à la Politique européenne de voisinage (PEV). Sans convergence réelle et sans politique de convergence avec des objectifs clairs, la convergence réglementaire et la libéralisation des échanges perdraient beaucoup de leur sens.

Dans ce contexte, il faut reconnaître que l’on n’a ni profité du sommet UE-Maroc ni de l’année écoulée depuis l’approbation du Document conjoint pour entamer la réflexion annoncée dans ce document. Curieusement, la Déclaration adoptée à ce sommet ne fait aucune référence aux Perspectives financières 2014-2020 pour lesquelles, cependant, devront commencer les négociations au sein de l’Union européenne au plus tard en 2011 et qui devront définir les nouvelles modalités de coopération financière entre l’UE et les pays du sud et de l’est de la Méditerranée en remplacement de l’IEVP (2007-2013) qui a lui-même remplacé les fonds MEDA de la période 1995-2006. En effet, le nouvel IEVP était entré en vigueur en janvier 2007, englobant en un seul instrument de financement les fonds MEDA, Phare, Tacis et les autres programmes plus spécifiques (comme Interreg) de soutien aux pays voisins de l’Union européenne. Alors que la première révision à mi-parcours des instruments financiers pour les actions extérieures (54), IEVP compris, a été déjà publiée, il est nécessaire de réfléchir à de nouveaux instruments financiers pour répondre à la différentiation croissante dans les relations de l’Union européenne avec ses voisins méditerranéens.

La nécessité d’un nouvel instrument financier

L’expiration de la période d’exécution des Fonds MEDA (1995-2006) a permis d’évaluer leur efficacité, leur fonctionnement et leur impact (55). Au-delà de l’aide indéniable apportée aux politiques de réforme structurelle et de stabilisation budgétaire de la région, ce qui a contribué de manière

(54) Communication de la Commission européenne au Parlement européen et au Conseil, COM(2009) 196 final, du 21 avril 2009.(55) Une évaluation officielle du Programme MEDA II et de son application vient d’être publiée par la Commission européenne (http://ec.europa.eu/europeaid/how/evaluation/evaluation_reports/2009/1264_docs_en.htm).

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significative à l’assainissement macroéconomique des pays partenaires méditerranéens (PPM) et à la réussite de quelques projets sectoriels ou régionaux, il n’est pas exagéré de dire qu’il existe un large consensus sur le fait que les programmes MEDA n’étaient ni par leur volume ni par leur conception un instrument à même de répondre aux énormes défis posés à la région en termes d’emploi, d’environnement – notamment l’accès à l’eau – d’éducation et, bien entendu, de convergence (56).

En effet, les programmes MEDA ont mis en évidence l’existence d’un seuil minimum d’efficacité au-dessous duquel les retombées de l’aide sont absorbées par les procédures bureaucratiques, l’assistance technique, la planification, etc. Or, les fonds MEDA et l’IEVP sont loin d’atteindre ce seuil (dans le cas des Fonds MEDA, la fragmentation des projets est un obstacle supplémentaire à leur efficacité). Certes, du point de vue quantitatif, l’IEVP s’est traduit par une certaine augmentation des ressources, mais de façon plutôt marginale, puisque nous sommes passés de moins de quatre euros à un peu plus de cinq euros par habitant et par an, ce qui est un progrès mais qui n’altère nullement l’appréciation globale quant à la modestie de l’aide. De ce point de vue, il est vrai que l’aide budgétaire directe (transferts financiers destinés à des secteurs concrets liés à l’avancement des réformes dans ces secteurs), qui est en train de s’imposer comme modalité privilégiée de l’aide en Méditerranée, est un mécanisme qui minimise la question des procédures bureaucratiques et des frais de gestion. C’est donc probablement la meilleure façon de débourser des sommes relativement petites, comme dans le cas de la coopération euro-méditerranéenne, et c’est cette modalité qui tend à s’imposer dans le cadre de la PEV en remplacement du financement par projets (57).

Cependant, force est de reconnaître que les instruments financiers dont nous disposons actuellement n’arrivent même pas à compenser les pertes de revenus de l’État enregistrées par les Pays partenaires méditerranéens suite au démantèlement des tarifs douaniers sur les produits industriels européens après la création des zones euro-méditerranéennes de libre-échange. Le cas du Maroc peut servir d’exemple. A trois ans de l’achèvement de sa zone de

(56) Pour une analyse récente sur la performance des Fonds MEDA, voir The MEDA Programme in Morocco 12 Years on: Results, Experiences and Trends, de Michal Natorski, Documents de CIDOB Mediterráneo nº 11, Barcelone, 2008, http://www.cidob.org/en/content/download/7230/72561/file/doc_mediterraneo_11.pdf. (57) Voir la brochure “Aide budgétaire : la manière efficace de financer le développement?”, http://ec.europa.eu/europeaid/infopoint/publications/europeaid/documents/budgetsupport08_fr.pdf.

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libre-échange, ses recettes tarifaires ont diminué de 450 millions d’euros par an (par rapport aux recettes qu’il aurait réalisées s’il n’avait pas réduit ou éliminé ses tarifs sur les produits industriels européens), tandis qu’il perçoit de l’Union européenne, au titre de la coopération économique et financière (dans le cadre de l’IEVP) quelque 165 millions d’euros par an, autrement dit, bien loin de ce qu’il faut pour au moins compenser les pertes causées aux finances de l’État (58).

Malgré cela, il convient de souligner que l’IEVP introduit une innovation très intéressante, à savoir que 5 % des fonds sont réservés aux programmes de coopération transfrontalière sous-régionaux ou bilatéraux, complétés par un montant équivalent de fonds structurels européens (qui finançaient les projets Interreg jusqu’à présent), ce qui donne au total un montant de 1 180 millions d’euros. Ces programmes de coopération transfrontalière reprennent la méthodologie des fonds structurels européens, bien que légèrement simplifiée concernant certaines procédures. Malheureusement, alors que le Programme du Bassin méditerranéen est déjà en route (même si tous les pays du Sud n’y ont pas encore adhéré), parmi trois des programmes bilatéraux établis en Méditerranée, deux sont bloqués entre l’Espagne et le Maroc pour des raisons politiques tenant à la participation au programme des villes de Sebta et Melilla ; par contre, celui entre la Sicile et la Tunisie a déjà été approuvé.

L’Union pour la Méditerranée, pour sa part, ne semble pas apporter beaucoup de valeur ajoutée en termes de mobilisation de nouvelles ressources financières et moins encore dans le contexte actuel de la crise économique mondiale. En effet, aucun engagement financier précis n’a été assumé, ni au Sommet de Paris de juillet 2008, ni à la réunion ministérielle de Marseille de novembre 2008, pour financer les projets régionaux sélectionnés. Qui plus est, les débats et propositions qui ont précédé la création de l’UPM ont mis en lumière que l’un des axes essentiels pour renforcer le Partenariat euro-méditerranéen doit être la construction d’infrastructures de toutes sortes (énergie, transports, dépollution…) et que, par ailleurs, le succès de la plupart des initiatives envisagées (en particulier en matière d’énergie, de financement et d’investissement ou concernant l’eau) passe par une série de réformes d’accompagnement

(58) Voir Iván Martín (2004) : « The Social Impact of Euro-Mediterranean Free Trade Areas : a First Approach with Special Reference to the Case of Morocco », Mediterranean Politics, vol. 9.3, Taylor & Francis, Londres, p. 422-458.

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assurant la création d’un climat propice à l’initiative privée, ce qui est, malgré les progrès réalisés, loin d’être achevé dans les pays partenaires méditerranéens. Or, l’expérience d’intégration européenne prouve que la construction d’infrastructures, même si elle est exécutée par des entreprises privées, a besoin de financement public, notamment si l’on souhaite parvenir à un certain degré de cohésion régionale (ce qui transforme les infrastructures en de véritables biens publics dont la rentabilité sociale dépasse largement la rentabilité financière), surtout dans le cas des infrastructures environnementales. De même, l’acceptation sociale des réformes encouragées par l’Union européenne dans le domaine économique et social est d’autant plus aisée qu’elle est accompagnée d’un soutien financier conséquent pour aider à en pallier les effets négatifs pour les secteurs et catégories touchés et faciliter ainsi la transition.

C’est dans ce cadre qu’il convient de parler de l’intérêt que présente la possibilité d’explorer, de concevoir et d’introduire de nouveaux instruments financiers en Méditerranée. Alors même que nous voulons avancer vers la création de la Zone euro-méditerranéenne de libre-échange en 2010 et la participation des pays partenaires au Marché unique européen, cela doit aussi avoir des implications financières, comme cela avait été le cas lors de la création du Marché unique en 1993, qui a été accompagnée d’un triplement des fonds de la Politique régionale européenne pour financer une authentique politique de cohésion. En effet, la question-clé des relations économiques euro-méditerranéennes est la question de la convergence : sans convergence ni politique de convergence claire, le projet de Partenariat méditerranéen ou, à présent, celui de l’Union pour la Méditerranée, n’a pratiquement pas de sens, et cela implique la coresponsabilité quant aux effets des politiques appliquées.

Or, l’Europe a justement, au moins depuis 1993, un instrument politique très rôdé qui a prouvé son efficacité : la politique régionale européenne et, plus précisément, la politique de cohésion qui a fonctionné exactement dans cette direction : réussir la convergence interne au sein de l’Espace économique européen et la solidarité entre territoires à niveaux de développement très inégaux, tout en promouvant la mise à niveau et la modernisation du tissu économique des régions à la traîne pour faire face à la concurrence au sein du marché unique. Les instruments de cette politique sont les fonds structurels. Dans le cadre du Statut avancé, il semble tout à fait logique d’explorer les possibilités d’extension de ces fonds au Maroc.

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Cette possibilité qui, il y a quelques années encore, semblait inatteignable, n’est plus si lointaine aujourd’hui.

Vers un Fonds euro-méditerranéen (ou euro-marocain) de cohésion

En relation avec les perspectives de l’extension de la méthodologie des fonds structurels aux pays du Sud de la Méditerranée, et notamment au Maroc, il faut tout d’abord souligner qu’il ne s’agit pas seulement, ni surtout, d’une augmentation substantielle des ressources financières disponibles (même si cela reste important), mais d’une méthodologie propre aux fonds structurels qui déclenche un processus de mobilisation et de transformation institutionnelle (qui ne peut cependant pas fonctionner avec des montants dérisoires). Ces fonds ont un effet transformateur, un effet de levier, comme dirait le secteur financier, beaucoup plus important que celui d’une simple injection de ressources supplémentaires. Et ce, au moins à deux titres :

– En premier lieu, un effet de levier sur la mobilisation de ressources du secteur privé, c’est-à-dire, un effet multiplicateur. Pour le développement des pays du Sud de la Méditerranée, cette mobilisation est indispensable mais elle sera très difficile à réussir si les ressources du secteur public ne sont pas mobilisées auparavant. Les investissements publics en infrastructures caractéristiques du mécanisme des fonds structurels constituent justement le facteur d’attraction majeur pour l’investissement privé (étranger et local) et la promotion de l’activité économique. L’expérience de l’Espagne dans les années 90 en est l’exemple le plus éclatant.

– En second lieu, un effet de levier sur les réformes. L’Europe offre d’excellents exemples: il est ainsi beaucoup plus facile de promouvoir n’importe quelle conditionnalité envisagée, notamment en termes d’acceptation sociale des réformes, si elle s’accompagne d’une enveloppe financière conséquente garantissant, y compris à court terme, un rapport coût-bénéfice positif pour le pays, notamment pour les secteurs et les catégories sociales les plus touchés par les réajustements. Les résistances de certaines élites sociales et politiques aux réformes sont alors beaucoup plus faibles.

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Évidemment, les pays du Sud ne peuvent, constitutionnellement, avoir accès aux clés commandant la politique de répartition régionale européenne qui est limitée aux seuls États-membres. Mais rien n’empêche la création de nouveaux instruments financiers calqués sur les fonds structurels, ou de s’en inspirer tout en les adaptant aux circonstances des Pays partenaires méditerranéens. Pour commencer, un nouveau Fonds euro-méditerranéen de cohésion confirmerait l’engagement de l’Europe pour la convergence non seulement législative mais économique de ses voisins du Sud.

Pour des raisons liées au volume des ressources nécessaires autant qu’à la préparation des pays partenaires bénéficiaires (capacité d’absorption), il serait impensable d’étendre d’emblée cette formule à tous les pays : il faudrait moduler le nouvel instrument en fonction des avancées de chaque pays en matière de réformes et de l’évolution de ses capacités d’absorption sur le plan à la fois financier et institutionnel. Dans un premier temps, une approche pragmatique consisterait à viser un consensus au sein du pays concerné (du Sud et de l’Est, car bien que mon analyse ne porte que sur les pays méditerranéens voisins, il va de soi que nous devrions envisager la même innovation autant pour le Sud que pour l’Est de l’Europe simultanément), puis commencer à y appliquer le nouvel instrument à titre d’expérience pilote à l’aide d’un fonds de « cohésion-pays ».

De fait, un mécanisme comportant un élément de modulation similaire, bien que d’un montant beaucoup plus limité, a bel et bien été introduit dès 2007 avec l’Instrument de gouvernance dont les fonds n’ont été alloués jusqu’à présent qu’à l’Ukraine et au Maroc. Aussi, parmi les pays partenaires méditerranéens, ce dernier serait-il le meilleur candidat pour l’application du nouvel instrument financier de cohésion et ce, pour les mêmes raisons, qui ont conduit au Document conjoint sur le Statut avancé.

Par ailleurs, les fonds structurels européens ont développé une grande variété d’instruments financiers avec des objectifs adaptés aux spécificités de chaque région européenne, avant d’atteindre leur complexité actuelle. Concernant les pays méditerranéens, je crois qu’il serait beaucoup plus pertinent dans une première phase de créer un seul fonds, le Fonds euro-méditerranéen de cohésion (59), qui regrouperait tous les objectifs, surtout si l’on prévoit de se concentrer sur un seul pays pilote.

(59) Dans le rapport « Un Partenariat euro-méditerranéen renouvelé pour la paix, l’emploi et le développement durable. Un nouvel élan du Processus de Barcelone basé sur la convergence », élaboré

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De toutes les manières, il faut amorcer au plus tôt le débat sur la définition opérationnelle des modalités d’extension de la politique régionale européenne (et des fonds structurels) aux pays du Sud méditerranéen (l’UE ne s’y étant pas déjà engagée dans le cadre du Statut avancé pour le Maroc ?) : création d’un fonds de cohésion spécifique ou d’une modalité de participation à la politique régionale européenne (beaucoup plus compliquée du point de vue juridique et constitutionnel) ; articulation sur un seul fonds-pays ou plusieurs fonds structurels thématiques, comme dans le cas de l’Europe (et dans le cadre de la PEV, avec l’Instrument de gouvernance et le Fonds d’investissement de voisinage (60)) ; système de programmation et rôle des différentes instances de gouvernement, supervision de la Commission, etc.

Il faut également souligner que l’approche territoriale des fonds structurels est très différente de l’approche macroéconomique ou sectorielle suivie jusqu’à présent dans le cadre de la coopération euro-méditerranéenne. Or, pour appliquer cette nouvelle approche territoriale, nous manquons aujourd’hui d’un instrument aussi essentiel qu’un rapport de cohésion dans la région euro-méditerranéenne, à la manière des rapports émis pour les régions européennes. Et c’est une question fondamentale pour toute extension de la formule des fonds structurels.

Il faudrait compléter ce fonds-pays par un mécanisme de modulation qui garantirait une augmentation progressive des aides structurelles (d’un montant qui pourrait avoisiner celui du fonds-pays) pour tous les pays intégrés dans le système en fonction de l’avancement de leurs réformes et du développement de leurs capacités administratives et institutionnelles conformément à une feuille de route déterminée (selon le modèle de la PEV, mais avec des plans d’action plus précis en termes de calendriers, priorités et ressources et avec une application effective des principes de différenciation et de conditionnalité positive). Ces ressources financières renforceraient la coopération bilatérale et ne remplaceraient pas les ressources assignées aux projets régionaux dans le cadre de l’UPM, qui ont un rôle structurant.

par l’Institut de la Méditerranée, CESPI et l’IEMed pour la Commission interméditerranéenne de la CRPM pour le Sommet de l’Union pour la Méditerranée de Paris, de juillet 2008, les auteurs proposent de créer quatre fonds différents : Med-Regio, Agri-Med, Med-Funds et Cult-Med.(60) Voir une description de ces instruments dans Erwwan Lannon et Iván Martín (2009) : Rapport sur les progrès du Partenariat euroméditerranéen, IEMed, p. 40-41.

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Quant à la gestion de cet éventuel instrument financier pour la période 2014-2020, il conviendrait, en plus du rapport cité sur la cohésion en Méditerranée, de préparer une étude préliminaire sur la transférabilité de ces fonds qui posent bien entendu de nombreux problèmes. Certains sont très complexes et délicats du fait justement de la méthodologie des fonds structurels qui renvoie à l’essence de la structure politique, économique et institutionnelle d’un pays.

Trois questions semblent fondamentales à cet égard :

– Le rôle de la Commission européenne est essentiel dans le cas des fonds structurels et il devrait l’être assurément aussi dans tout nouveau schéma de cohésion élargi au bassin méditerranéen, comme il l’est déjà dans le cas des programmes MEDA et de l’IEVP. Mais il faudrait mobiliser plus de ressources humaines car, à mon avis, nous en manquons sérieusement à la Commission européenne pour gérer les programmes méditerranéens.

– En deuxième lieu, la question clé et la plus délicate a trait à la réforme et au renforcement des autorités régionales et locales des pays bénéficiaires, puisqu’elles sont les gestionnaires directs de ces fonds. Cela pose un problème éminemment politique. Accompagner l’autonomie politique, dont profitent déjà les municipalités de certains pays, en lui associant une autonomie administrative et financière réelle serait une condition préalable pour l’adoption de la nouvelle formule. Personnellement, je considère qu’une approche globale telle que celle proposée ici, si elle est soutenue par des ressources financières substantielles, devrait permettre de surmonter ce problème. Par contre, la question de la capacité administrative des autorités locales et régionales est plus facile à résoudre. Cela fait partie de la procédure de transformation structurelle, la disponibilité de fonds et l’assistance technique assurant le développement des capacités nécessaires. Nous ne le savons que trop bien en Espagne pour l’avoir utilisé dans la procédure de distribution et de gestion des fonds structurels, ce qui a amplement contribué à renforcer et à moderniser les administrations locales.

– Enfin, il va falloir élaborer un système unique de programmation conjointe et de planification stratégique (qui identifierait les retards structurels de chaque région, ainsi que ses ressources institutionnelles, humaines, économiques, financières...), exécuté sous forme de plans

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opérationnels avec un contrat unique (qui remplacerait les Plans d’action de voisinage), où convergeraient tous les acteurs travaillant dans une région et toutes les modalités d’intervention, tous les fonds et mécanismes faisant partie du nouvel instrument financier de cohésion, comme dans le cadre de la politique régionale européenne. Cela pourrait également servir à aller vers une plus grande cohérence entre les interventions des différentes agences de coopération pour le développement (agences nationales, organismes internationaux, Commission européenne...) travaillant dans chaque pays et chaque région.

Concernant les ressources nécessaires, une pleine extension de la politique régionale au Maroc aurait certes un impact financier considérable. Si l’on applique la limite des fonds structurels fixée dans les dernières Perspectives financières 2007-2013, équivalant à 4,25 % du PIB d’un pays, on arrive à un plafond de deux milliards d’euros par an, ce qui reviendrait à multiplier la coopération actuelle par 14 (et atteindre un niveau de près de 73 euros par habitant et par an) (61). Ce montant paraît énorme et il n’est évidemment pas réaliste à court terme en raison, entre autres, de la capacité d’absorption limitée du Maroc. Mais il est toujours possible d’appliquer le nouveau fonds par étapes, en augmentant progressivement les dotations annuelles de sorte que l’on arrive en 2020, par exemple, à l’équivalent de 2 % du PIB en fonction des objectifs atteints de réformes et de convergence réglementaire. Cela supposerait environ un milliard d’euros par an, ce qui représenterait un véritable saut qualitatif dans la coopération financière avec le Maroc, et aussi, sans doute, pour ce qui est de ses perspectives de convergence avec l’Europe. Mais d’ici là il y a une question d’une importance capitale à résoudre au préalable.

Les enjeux du Programme de coopération transfrontalière

En effet, autant le Maroc a fait preuve d’une excellente capacité d’absorption des fonds qui lui sont alloués, autant le blocage de sa participation au Programme de coopération transfrontalière mis en place dans le cadre de l’IEVP depuis 2007 risque d’avoir des conséquences

(61) Iván Martín (2009) : « Perspectives financières 2014-2020 : quels instruments financiers pour la Méditerranée ? », p. 48-57, en IEMed, Europe-Méditerranée. Enjeux, Stratégies, Réformes, Monographies méditerranéennes nº 7, 161 p., Barcelone, http://www.iemed.org/publicacions/detalls/monografia7/5.pdf.

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négatives quant aux perspectives d’une assistance financière plus importante, inspirée surtout de la politique régionale européenne.

En effet, l’IEVP a réservé 5 % de ses fonds, à compléter par 5 % supplémentaires provenant du Fonds européen de développement régional, à des programmes de coopération transfrontalière entre les territoires situés le long des frontières externes de l’UE, autrement dit entre des États membres et des pays partenaires qui partagent des frontières maritimes ou terrestres communes. À cet égard, deux types de programme sont prévus : bilatéraux pour les frontières terrestres ou les détroits maritimes, et multilatéraux de bassin, pour les frontières maritimes. Ces programmes seront gérés à partir d’une méthodologie propre aux fonds structurels encore que légèrement simplifiée, et présupposent un accord de partenariat entre les partenaires impliqués du Nord et du Sud. Ils serviront à financer des projets de coopération qui seront gérés par les autorités locales et régionales, mais aussi par d’autres acteurs et partenaires sociaux comme les universités, les syndicats, les organisations patronales, les ONG ou les chambres de commerce. Le Maroc est censé être bénéficiaire de deux de ces programmes :

– Le programme Espagne-Maroc, avec un volet Andalousie - nord du Maroc et un autre : îles Canaries - sud du Maroc. Le budget total indicatif est de 156,7 millions d’euros.

– Le programme du Bassin méditerranéen, doté d’un budget d’environ 173 millions d’euros pour la période 2007–2013. La Région autonome de Sardaigne gère le Programme en tant qu’Autorité de gestion commune (62).

Le Programme opérationnel conjoint du Programme Bassin médi-terranéen a été adopté en août 2008 par la Commission européenne (63), et le premier appel à propositions de projets standard a été lancé en mai 2009. Or, le Maroc a suspendu pour l’instant sa participation au Programme (qui requiert la signature d’une convention financière avec la Commission européenne), probablement à cause de la participation des villes de Sebta et Melilla (qui bénéficiaient déjà des fonds du programme Interreg III pour la coopération transfrontalière avec le Maroc en 2000-2006).

(62) http://www.enpicbcmed.eu/fr/index.html. (63) http://www.commed-cglu.org/IMG/pdf/Programme._Fr.pdf.

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L’entrée en fonction du Programme de coopération transfrontalière Espagne-Maroc est conditionnée par l’approbation conjointe du programme par les gouvernements d’Espagne et du Maroc, qui n’a pu avoir lieu jusqu’à présent. Cela a déjà entraîné la perte des fonds prévus pour 2009 (ou plutôt de la moitié provenant de l’IEVP, tandis que l’autre moitié, correspondant au FEDER, devant être reversée à l’Espagne pour des programmes de coopération transfrontalière de l’Andalousie, Sebta et Melilla, gérés depuis l’Espagne). Si un accord n’est pas conclu entre les deux gouvernements avant juin 2010, ce sera l’ensemble de l’enveloppe du Programme qui sera perdue.

Même s’il s’agit d’une question purement bilatérale et d’une somme limitée, l’impact de cet échec est à souligner. Les programmes de coopération transfrontalière ont été conçus comme un premier banc d’essais pour étendre la méthodologie des fonds structurels aux pays du voisinage et, au moment où le Maroc est censé bénéficier à terme de ces fonds, c’est un très mauvais signe que de ne pas pouvoir utiliser ceux de la première expérience tentée dans ce sens.

Préparer le terrain pour les fonds structurels

En plus de la nécessité de débloquer la participation du Maroc au programme de coopération transfrontalière, mener une réflexion, comme prévu dans le Document conjoint, ne suffit pas.

Même si l’absence de Perspectives financières après 2014 empêche de prendre des engagements financiers quelconques, il faut développer un cadre conceptuel clair pour l’assistance financière future qui puisse s’insérer dans les négociations des Perspectives financières 2014-2018 prévues au cours du deuxième semestre 2010. On peut déjà établir, en conformité avec le Document conjoint, le principe d’extension de la méthodologie des fonds structurels au Maroc, entamer les études pour définir l’ampleur de l’assistance financière « appropriée » mentionnée dans le Document conjoint, par exemple un doublement à partir de 2014, et un quadruplement pour 2018 en fonction des objectifs réalisés. Une étude sur les modalités de cette extension est également nécessaire et devrait être entamée immédiatement, pour voir s’il convient de créer un fonds de cohésion UE-Maroc spécifique, à l’instar des fonds structurels, ou ouvrir la voie à une participation directe à la politique régionale européenne

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(beaucoup plus compliquée du point de vue juridique et constitutionnel) ? Quelle option adopter ? Un seul fonds-pays ou plusieurs fonds structurels thématiques, comme dans le cas de l’Europe (et dans le cadre de la PEV, avec l’Instrument de gouvernance et le Fonds d’investissement de voisinage) ? Quel système de programmation choisir ? Et quel rôle pour les différents niveaux de gouvernement, pour la Commission, etc..

Nous sommes à quatre ans de l’entrée en vigueur des Perspectives financières 2014-2020, et les négociations sont sur le point d’être entamées à cet effet. Il faut profiter de cette période de transition, pendant laquelle nous sommes toujours liés par les Perspectives financières 2007-2013, pour préparer le terrain afin qu’en 2020, vingt-cinq ans après la Déclaration de Barcelone, on puisse s’assurer que le Partenariat euro-méditerranéen aura été la phase d’une véritable convergence dans la région. Pour ce faire, il est nécessaire d’avancer sur les axes suivants :

• Garantir une dotation de fonds appropriée en vue de l’application de la politique régionale aux pays méditerranéens, et dans le cours terme à certains d’entre eux comme le Maroc, bien que de manière progressive et partielle, au plus tard à partir de 2014, afin d’offrir à nos voisins du Sud une véritable perspective de convergence, un modèle à suivre (effet de démonstration) et un stimulant efficace pour avancer dans les réformes. Pour avoir un impact réel sur le processus de transformation économique, politique et social des pays partenaires méditerranéens, il faudrait multiplier les fonds de coopération actuels.

• Profiter de cette période de transition (jusqu’en 2014) pour préparer convenablement l’application élargie de la politique régionale européenne dans trois domaines au moins :

- rédiger les rapports et les études nécessaires pour mettre en œuvre ces programmes dans le cadre d’un exercice de planification stratégique du développement régional dans les différents pays partenaires méditerranéens, notamment au Maroc, selon le modèle des rapports de cohésion européens ;

- faire une analyse minutieuse de la transférabilité des fonds structurels européens au Maroc et des problèmes de gestion politique, institutionnelle et financière que cela implique, y compris la question de la nécessité d’éventuelles réformes institutionnelles ;

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- le développement des capacités institutionnelles et administratives des autorités régionales et locales qui, en principe, sont les vecteurs institutionnels de ces politiques. Rien n’empêche de s’atteler dès maintenant à la préparation d’un rapport de cohésion et d’études de transférabilité, ni de lancer un programme ambitieux de mise à niveau institutionnelle et administrative (à l’instar des pays voisins de l’Est de l’Europe et du Caucase méridional, dans le cadre du Partenariat oriental établi au Sommet de Prague le 7 mai 2009). Il s’agit de procédures qui demandent peu d’argent et qui sont abordables, y compris dans le cadre de la coopération bilatérale des pays européens. Elles ont en outre des effets bénéfiques même en cas d’échec de l’application élargie de la politique régionale européenne.

Tel est le grand défi de l’Union Européenne en Méditerranée et, plus particulièrement, au Maroc. Tel est le véritable projet structurant pour l’ensemble de la région, et la seule manière cohérente pour l’UE de répondre aux défis colossaux que lui pose son voisinage. L’UE a l’expérience de sa politique régionale et le savoir-faire institutionnel requis. Elle a montré qu’avec de la volonté politique elle est capable de mobiliser les ressources nécessaires pour relever tous les défis. Or, la convergence en Méditerranée n’est pas moins précieuse pour son avenir que la création du Marché unique en 1993, de l’Union économique et monétaire en 1999, ou de l’élargissement en 2004, sans parler des fonds mobilisés pour faire face à la crise financière et économique mondiale ou au plan de sauvetage de la Grèce en 2010.

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La question de l’éducation et de la formation Repères et perspectives

Perla COHEN (64)

« Chaque civilisation meurt de sa pureté », Senghor« Mon ami, la vie c’est l’art de la rencontre », Vinicio de Moraes

A partir de quelle perspective pouvons-nous examiner la question de l’éducation dans le cadre du Statut avancé Maroc - Union européenne ? La question n’est pas anodine et elle n’est pas que théorique ; elle implique en effet que les propositions qui pourraient en découler s’appuient sur l’hypothèse que, d’un point de vue juridique, le Statut avancé permettrait de faire place de façon spécifique à cette dimension au-delà de ce qui est prévu par les statuts d’association antérieurs.

La réponse apportée dictera la logique d’organisation de cette contribution. La mise en perspective du Statut avancé au regard de l’Union pour la Méditerranée n’est pas abordée spécifiquement ici, considérant qu’en effet il n’y a pas antinomie et que le cadre bilatéral continue de s’inscrire dans les accords multilatéraux existants de Barcelone et de la Politique de voisinage.

Je me propose, dans un premier temps, de passer en revue la situation actuelle et les logiques d’action de l’Union européenne dans les domaines de l’éducation-formation, dans un deuxième temps, de faire le point de la place actuelle du Maroc dans l’utilisation des instruments communautaires disponibles (dans les différents schémas) pour enfin ouvrir quelques perspectives et pistes dans le cadre du Statut avancé. La question sous-jacente et récurrente étant de savoir si, en somme, il ne s’agit que de prendre place dans les orientations et les programmes communautaires déjà dessinés et utilisés ou si on peut y voir l’opportunité de dégager de nouveaux contenus et perspectives qui seraient le propre du Statut avancé (65).

(64) Chargée de mission Europe/ International à l’Université de Toulouse-le Mirail.(65) Larbi Jaidi. « Le statut avancé entre l’UE et le Maroc : un nouveau mode de partenariat ? » Afkar/Idées, n° 14, été 2007.

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La question clef sera alors de savoir comment construire une place et un projet pour les priorités éducatives qui permettent d’insuffler à ce Statut avancé orientations et contenus permettant de doter ce partenariat d’objectifs durables et de réalisations fructueuses pour le Maroc et réciproquement.

Aussi l’enjeu sera-t-il de trouver le chemin qui permette de tracer sa propre route dans un statut qui se définit comme “Plus que l’association, moins que l’adhésion, tout sauf les institutions” et pour des domaines stratégiques aussi fondamentaux que le sont l’éducation et la formation.

Bref rappel des contextes

Le Statut avancé se présente comme une démarche assumée de la volonté du Maroc de donner à ses relations avec l’UE des contenus et des orientations bilatérales propres dans un contexte où se construisent aussi au niveau régional un dialogue et une coopération dans des cadres existants et renouvelés.

L’Accord d’association et la Politique européenne de voisinage avaient permis un renforcement des relations politiques, économiques et commerciales ainsi qu’un développement soutenu des échanges culturels et humains.

Le partenariat traite désormais également des domaines stratégiques liés à la sécurité collective, à la coopération régionale, à la résolution des conflits, à la bonne gouvernance, à la lutte contre le terrorisme, à la régulation des flux migratoires, à la promotion des droits de l’homme et à la coopération en matière d’emploi et d’affaires sociales. Il s’étend à de nouveaux domaines tels que la coopération énergétique, la recherche et l’innovation, l’environnement et le développement durable. Nous plaidons pour que l’éducation prenne sa place pleine et entière dans la famille des grandes priorités ci-dessus citées.

Un paradoxe à surmonter

Je dirai d’entrée de jeu et de façon qui pourrait paraître un peu trop catégorique que, de façon générale, l’éducation comme secteur et dans tous ses segments ne fait partie ni des secteurs prioritaires, ni de la Politique de voisinage, ni de l’Union pour la Méditerranée ni même du Statut avancé.

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La question de l’éducation et de la formation Repères et perspectives 111

Cela, bien sûr, ne veut pas dire qu’elle n’est pas prise en considération, car elle est présente tant dans le processus de Barcelone que dans les autres accords cités ; cela ne veut pas dire non plus que ce domaine n’ait pas été abondamment traité, mais il l’est sous couvert de programmes multiples répondant à des logiques internes communautaires et destinés principalement à l’enseignement supérieur.

A cet égard en effet, une coopération diversifiée et riche d’expériences tant bi-nationales que multilatérales jalonne ce parcours, et des instruments diversifiés sont disponibles pour l’enseignement supérieur et la recherche. Nous en examinerons les différents aspects.

Pour autant, comme secteur à part entière, l’éducation n’a ni le statut des autres priorités ni la place qu’elle devrait légitimement occuper eu égard au cadre de l’économie mondialisée de la connaissance, ni surtout dans la perspective historique de la construction de l’Union pour la Méditerranée qui, faut-il le rappeler, rassemble des pays que caractérisent des niveaux d’éducation et de développement différenciés, des courbes démographiques contrastées et des conflits exacerbés.

Une coopération et des expériences multiples à capitaliser pour ouvrir de nouveaux chemins dans le cadre du Statut avancé

Pour l’heure, les contenus de l’éducation qui semblent se dessiner visent à améliorer la participation des publics universitaires marocains aux programmes communautaires ouverts à toutes les régions du monde et aux pays du voisinage. De simples réajustements de quelques programmes et mécanismes ainsi qu’un soutien « logistique » sont prévus pour permettre cette amélioration.

Au regard des enjeux et de la spécificité du Statut avancé, ce simple réajustement apparaît comme nettement insuffisant. Faudrait-il alors repenser et redéfinir les contenus de cette coopération pour lui assigner des objectifs et des moyens plus en adéquation avec les nouvelles réalités du Maroc, celles de l’Europe et celles du monde pour de véritables partenariats et complémentarités au sein de la Méditerranée, à fortiori du Statut avancé ?

Quelle valeur ajoutée pour les uns et pour les autres ? Comment faire pour que la dimension éducation-formation soit retenue comme un enjeu central, qui prenne en compte les déficiences réelles, qui mette à

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niveau pour accompagner la mise en œuvre et la réalisation des domaines affichés dans le Statut avancé, qui prépare les compétences nécessaires et intermédiaires pour demain et pour répondre aux exigences de la société et de l’économie de la connaissance ?

De quels repères disposons-nous pour esquisser un panorama général et rendre compte de l’état actuel de la question ?

Rappelons d’abord que dans le processus même de construction communautaire, le domaine de la coopération en matière d’éducation a été presque totalement absent jusque dans les années 70 ; c’était alors le Conseil de l’Europe, organe intergouvernemental, qui était chargé de traiter les dossiers relatifs à l’éducation et à la culture.

La Commission européenne, ce faisant, au fur et à mesure des traités, développait, par le biais d’instruments politiques comme la coopération et le partenariat, des programmes spécifiques dotés de budgets propres pour leur mise en œuvre, parvenant ainsi et plus tard, grâce à l’évolution des traités et du cadre juridique, à la mise en place d’une véritable direction Education et Culture, à de nombreux programmes sectoriels, à un plan stratégique d’ensemble connu sous le nom de Education et Formation 2010 et à une panoplie d’accords avec toutes les régions du monde.

Sans entrer plus en détail dans cet aspect chronologique interne communautaire, il n’est pas inutile de comprendre ses mécanismes généraux et leurs particularismes afin d’en dégager des repères utiles pour notre propos.

Une logique d’ensemble, des objectifs et des instruments

Si l’on observe le modèle communautaire à l’œuvre en matière d’éducation- formation dans tous leurs segments et dans leurs articulations, nous pouvons en dégager un schéma d’ensemble dont les éléments seraient les suivants :

– un cadre politico-stratégique : la Déclaration de Lisbonne : « faire de l’Europe l’économie la plus compétitive », développer l’attractivité des universités ;

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– un cadre stratégique d’éducation : « Education et Formation 2010 » adopté en 2002 et qui sert de cadre stratégique à toutes les initiatives communautaires dans ces domaines (66) ;

– un chapeau commun à tous les segments : Life Long Learning ;– un objectif mis en œuvre par le biais de programmes qui sont autant

d’instruments pour la mise en œuvre communautaire et dont l’objet est de construire la dimension européenne de l’éducation dans tous ses segments. Le Programme LLP se compose de :

• quatre programmes sectoriels :- Erasmus pour l’enseignement supérieur,- Leonardo da Vinci pour la formation professionnelle,- Comenius pour l’enseignement scolaire,- Grundtvig pour l’éducation des adultes ;

• quatre programmes transversaux qui concernent la coopération en politiques et innovation dans l’éducation, l’apprentissage des langues, le développement des contenus et des services fondés sur les nouvelles technologies de l’information ;

• le programme Jean Monnet qui promeut l’enseignement et la recherche sur l’intégration européenne comme un sujet d’études dans les universités ;

• un budget : 7 Mds d’euros pour la période budgétaire 2007-2013 ;• deux filières parallèles et articulées : connues sous le nom de

Processus de Copenhague pour la filière professionnelle et de Bologne pour la filière universitaire ;

• une articulation entre les deux : EQF (Européen Qualification Framework) ;

• la construction de l’EHEA (Espace européen de l’enseignement supérieur) et de l’ERA (Espace européen de la recherche) et leurs articulations en cascade, le doctorat lien et passerelle champ d’action tant pour la DG Education que pour la DG Recherche ;

• la dimension internationale dans ses déclinaisons multiples et variées (67).

(66) Commission européenne, Education 2010, « Éducation et formation 2010 » adopté par le Conseil en mai 2009.(67) Communication de la Commission au parlement européen, au conseil, au comité économique et social européen et au comité des régions. Un cadre stratégique actualisé pour la coopération européenne dans le domaine de l’éducation et de la formation, Bruxelles, le 16.12.2008 COM (2008) 865 final.

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La Commission européenne est en charge d’une large panoplie d’activités extérieures relatives à la formation et à l’éducation.

Citons des programmes européens d’excellence, éminemment compétitifs, ouverts aux pays tiers et organisés à des niveaux régionaux appelés « fenêtres » :

Erasmus Mundus Master et doctorat avec ses multiples fenêtres géographiques vise à structurer au niveau communautaire des formations d’excellence multi institutionnelles, à attirer les meilleurs étudiants dans ces formations grâce à des bourses pour enseignants et étudiants et à développer des partenariats entre l’UE et le reste du monde. Jusqu’à la mise en place de la fenêtre Méditerranée, de façon générale, nous pouvons affirmer, au vu des résultats, qu’une infime minorité d’utilisateurs en provenance du sud de la Méditerranée avait bénéficié de ces programmes, depuis la mise en place de la fenêtre, cela gagnerait à être mesuré (DG EACEA).

Le Programme ressources humaines Marie Curie du PCRD : bourses pour la formation à la recherche, le financement de réseaux de formation par la recherche (DG recherche) visant l’attraction des meilleures compétences dans les domaines prioritaires de la recherche communautaire.

En un mot, ces programmes d’excellence éminemment compétitifs visent tant la structuration au niveau communautaire de formations d’excellence et de réseaux intra communautaires que l’accueil des meilleurs en provenance des autres régions du monde, pays du voisinage compris ; des programmes communautaires propres au voisinage comme le programme Tempus. Il contribue à la construction de la coopération dans l’enseignement supérieur entre l’UE et les pays du voisinage Est et Sud.

Ces programmes tendent à :• soutenir les réformes structurelles et les efforts de modernisation dans

les pays partenaires ;• promouvoir des valeurs communes et la compréhension mutuelle

entre les peuples ;• promouvoir l’UE comme un lieu d’excellence en formation et

recherche ;• améliorer la qualité des ressources humaines et des services au sein de

l’UE grâce à la connaissance mutuelle, à la comparaison et au partage de bonnes pratiques.

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Des coopérations aux statuts différenciés avec le monde entier, des géométries variables et des schémas d’action spécifiques aux différentes régions.

Citons à cet effet la mise en place de nouvelles dynamiques comme celle de la construction d’espaces communs inte-régionaux d’enseignement supérieur (UE/Amérique latine, UE/Méditerranée). Cela appelle une adaptation aux schémas communautaires par les pays concernés, la réforme des systèmes éducatifs, l’adoption des schémas de diplômes (LMD) :

• éxigence qualité, exigence de la bonne gouvernance ;• mobilité des élites dans les secteurs prioritaires de la connaissance ;• ouverture au partenariat université–entreprise ;• le développement de la dimension régionale ;• la coopération par accords spécifiques avec des zones géographiques

(pays classés par degré de développement, émergents et industrialisés) qui met en exergue la qualité de l’éducation supérieure et professionnelle et des instruments de programme d’études conjoints. Citons :- Edulink qui soutient la capacité de construction et d’intégration régionale dans les ACP et promeut l’éducation comme moyen de réduire la pauvreté ;- Asia Linck SHS / Asie ;- ALFA programme de coopération entre les institutions d’éducation supérieure de l’UE et de l’Amérique latine ;- ALBAN programme de masters conjoints UE- Amérique latine ;- le dialogue politique sur l’éducation-formation : accords individuels avec différents pays comme les accords bilatéraux avec les USA et le Canada sur Education et Formation (plus volet jeunesse pour le Canada) signés en 1995 et renouvelés en 2006. Ils servent de base au développement du « dialogue politique » sur l’éducation. En 2007, un dialogue politique sectoriel sur l’éducation s’instaurait avec l’Australie et la Chine aboutissant à la signature d’une déclaration conjointe. En 2008 la Commission européenne signait des déclarations similaires avec Israël et l’Inde. Des processus similaires ont été initiés avec le Brésil et le Mexique en 2009. Ces déclarations conjointes sont mises en œuvre par la Commission et les autorités nationales concernées dans les pays partenaires par le biais de rencontres entre des

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représentants de haut niveau, l’organisation d’études comparatives conjointes des ateliers de travail et des conférences sur des thèmes d’intérêt mutuel.

Elles se fondent sur des notions de coopération équilibrée au niveau de l’enseignement supérieur et de la formation professionnelle, de réciprocité et de mise en œuvre d’actions communes.

Les accords qui viennent d’être renouvelés fournissent un cadre juridique jusqu’en 2013. Les fonds octroyés ont été considérablement augmentés par rapport aux accords précédents afin de renforcer et d’étendre la coopération transatlantique en matière d’éducation.

Quid du Statut avancé au regard de tous ces types d’accord ?

En un mot, si nous avons insisté si longuement, d’une part, sur la cohérence globale du dossier éducation intracommunautaire inscrit dans « Education 2010 » et, d’autre part, sur la dimension internationale de la coopération et du partenariat tels qu’elle se décline dans les accords à géométrie variable passés avec la quasi totalité des régions, c’est bien pour recentrer la question de la forme et des contenus de ce dossier dans le cadre du Statut avancé.

Passons en revue les programmes auxquels émarge le Maroc pour l’heure pour en arriver enfin à la question de savoir ce qui pourrait se développer à l’avenir.

Grosso modo, nous pouvons avancer que le Maroc émarge aux programmes communautaires ouverts à la coopération internationale et aux programmes spécifiques destinés aux pays du voisinage Sud et Est comme tEMPUS.

tEMPUS est un programme structurant destiné à l’enseignement supérieur, il permet la modernisation et l’adaptation aux acquis communautaires, il se décline en quatre lignes et favorise l’adoption des modèles et normes prévalents : processus de Bologne ; LMD, modernisation des curricula, ECTS, gouvernance, qualité ; 40 projets sur les 160 présentés par le Maroc au cours des années 2002-2006 ont été financés. Ils concernent dans 27 cas le développement de curriculum, dans 10 cas la gestion des universités et dans 3 cas le développement institutionnel. Quelques universités s’y sont particulièrement distinguées.

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Par ailleurs, le Maroc comme tant d’autres pays est partie prenante de tous les programmes communautaires de « portée universelle » ouverts aux pays tiers. Citons d’abord pour la recherche le PCRD et son programme de mobilité Marie Curie et Erasmus Mundus pour la formation de niveau master et doctorat. Ce sont des programmes d’excellence, promouvant la mobilité des meilleurs en provenance des pays tiers. Ils visent la structuration de formations conjointes intra européennes et le développement de partenariats institutionnels avec des pays tiers ; enfin le Programme Jean Monnet, dont la finalité est la connaissance de la construction européenne.

Le Maroc émarge aussi à de nombreux programmes sectoriels Euromed et a construit des réseaux de partenariat autour de ces instruments qu’il pourrait mobiliser pour innover en matière de coopération Ce n’est pas rien et c’est beaucoup car ces programmes ont réellement servi de levier pour des transformations et des adaptations nécessaires et pour placer dans les filières de l’excellence compétitive des chercheurs et des domaines de recherche, quoique de façon assez limitée encore, mais des apprentissages se font et une vue d’ensemble reste nécessaire.

Un bilan exhaustif reste à faire de toutes ces participations afin d’en dégager une base de connaissance sur les comportements des institutions vis-à-vis de ces programmes et de repérer de façon aussi concise que possible les domaines scientifiques dans lesquels participent les chercheurs et la mobilité qui s’y développe.

Mais au total, les programmes d’excellence de mobilité couvrant principalement master et doctorat et dans les programmes du PCRD, tout en méritant d’être consolidés et confortés par les moyens nécessaires ne s’adressent qu’à une infime minorité de l’élite académique pour le moment. Et la consolidation pour une plus grande participation à ces programmes y compris Tempus, prévue dans le cadre du Statut avancé ne changera pas substantiellement la donne générale car ces programmes ciblent les mêmes publics, peu nombreux dans l’absolu. En tout état de cause, les possibles nouvelles initiatives ne devraient remettre en cause aucun des programmes existants, voire permettront de les consolider et de les élargir par ouverture et préparation en amont de nouveaux publics.

Comment alors réfléchir à une coopération sectorielle avancée intégrant plusieurs segments de l’éducation, promouvant la dimension de réciprocité,

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favorisant la notion de connaissance et d’ancrage de l’excellence au Maroc aussi ?

Peut on envisager que le Statut avancé permette d’émarger à des programmes intra communautaires « réaménagés » tels que Leonardo, Gruntdvig ou seuls Erasmus Mundus et Jean Monnet resteront ils accessibles ? En d’autres termes, tous les programmes relatifs à d’autres segments vont-ils s’ouvrir à la participation de partenaires de pays tiers ou le seul segment ouvert restera-t-il celui de l’enseignement supérieur ?

La décision du Parlement européen et du Conseil du 15 novembre 2006 (68) ouvre des perspectives intéressantes dans le cadre du programme d’apprentissage tout au long de la vie LLP. En effet, selon cette décision, des partenaires de pays tiers peuvent participer à des projets, réseaux ou partenariats multilatéraux en vertu de l’article 14, paragraphe 2, à la discrétion de la Commission ou de l’agence nationale concernée.

La décision de soutenir ou non ces partenaires se fonde sur l’importance de la valeur ajoutée susceptible de résulter, au niveau européen, de leur participation au projet, réseau ou partenariat en question.

L’objectif premier de cette coopération avec les pays tiers dans le cadre du « Programme Apprendre tout au long de la vie » n’est pas d’apporter de l’aide aux pays concernés, cet objectif étant mis en œuvre dans les activités de coopération extérieure de l’Union, mais bien de soutenir le processus d’amélioration de la qualité de l’éducation et de la formation au sein de l’Europe.

Une liste d’actions précises a été ouverte à la participation des Pays Tiers, et l’année 2010 est une année pilote. Un tableau spécifique des sous-programmes et des actions ouverts à participation a été élaboré. On y a notamment noté que tous les sous-programmes sont concernés et que les actions concernent des projets et réseaux multilatéraux, des actions de coopération universités entreprises, etc. Le Maroc figure sur la liste des pays éligibles, il est donc concerné tant par Comenius (enseignement scolaire) que par Leonardo (formation professionnelle) et Erasmus (universités) et pourrait dans ces cadres précis aborder tant la question de la problématique

(68) Décision n° 1720/2006/EC du Parlement européen et du Conseil du 15 novembre 2006 établissant un programme d’action dans le champ de Life long learning, JO L327 du 24 novembre 2006.

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analphabétisme et illettrisme que celle de la formation professionnelle. C’est une ouverture non négligeable à des segments qui jusque là ne concernaient que des pays de l’Union et qui devrait permette une meilleure articulation et un échange de bonnes pratiques.

Pour un agenda spécifique de la coopération sectorielle éducation/formation (69)

A l’issue des travaux menés pendant plus de trois ans, les Ateliers culturels méditerranéens pour le dialogue des peuples et des cultures, avaient élaboré un véritable plan d’action culturelle dans le cadre Euro- Méditerranée et l’UPM.

Il nous avait paru alors que l’urgence était de définir le sens, les finalités et les priorités ainsi que les instruments d’un agenda euro-méditerranéen pour le secteur de l’éducation. Toutes choses étant égales par ailleurs, cela reste pertinent dans le cadre du Statut avancé, du moins sur des segments spécifiques qui pourraient servir de projets-pilotes généralisables.

Il ne pourrait suffire en effet que les seules logiques de la participation et de l’adaptation aux programmes existants pour le supérieur tiennent lieu d’objectifs et de finalités du partenariat sur le dossier éducatif dans le Statut avancé.

Le plan d’action général des Ateliers culturels s’appuyait sur la nécessité de développer la connaissance et la compréhension mutuelle, de la production de richesses et d’emploi, du co-développement méditerranéen. L’Atelier Education, dans ce contexte et pour sa part, lors des réunions de Paris, Séville, Alexandrie et Marseille, avait formulé des recommandations autour de deux axes centraux affirmant qu’un saut qualitatif et quantitatif de la coopération éducation et de la mobilité était indispensable pour l’avenir de tout partenariat entre l’UE et les pays de la Méditerranée.

(69) Perla Cohen, « Atelier Education in Ateliers Culturels méditerranées pour le dialogue des peuples et des cultures », Actes de la conférence de Marseille, ministère des Affaires étrangères, Paris 2008.Il convient de rappeler que les Ateliers culturels conduits par Jacques Huntzinger ont tenu quatre conférences (Paris, Séville, Alexandrie et Marseille). Dans ce cadre, l’Atelier Education a été coordonné tour à tour par Guy Haug et Perla Cohen, Perla Cohen et Driss Khrouz avec la participation de nombreux contributeurs par segment dont sans exclusive Victor Billeh, Jacques Fijalkow, Guisela Baumgratz, Laurent Cortese et de nombreux autres intervenants.

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Ces deux axes visaient :

– d’une part, une meilleure adaptation permettant une bonne utilisation des programmes existants (Tempus-Meda, Erasmus Mundus, Marie-Curie et PCRD) tout en soulignant que ces mesures nécessaires resteront insuffisantes ;

– de l’autre, à ajouter à l’existant un programme de coopération et de mobilité spécifique couvrant l’ensemble des segments des systèmes éducatifs.

Ces recommandations avaient permis d’élaborer un projet « Education Méditerranée (70) » bâti autour d’une idée centrale : l’éducation comme secteur et dans tous ses segments devrait être prise en considération et faire l’objet d’un Plan d’action à l’image d’Education formation 2010 de l’UE. Nos propositions allaient dans ce sens, elles concernaient l’éducation de base, la formation professionnelle, un « Bologne méditerranéen » un véritable Erasmus méditerranéen avec le développement de l’enseignement de l’interculturel dans les systèmes éducatifs.

Il recommandait notamment de cibler des priorités pour l’effort éducatif en fonction des réalités, des besoins et des projections de développement pour demain intégrant la formation initiale et professionnelle, le supérieur, la formation des formateurs ; de bâtir et consolider les bases de connaissance réciproques, des valeurs partagées ; de construire des passerelles entre les différents systèmes éducatifs permettant de s’y déplacer et de traiter les question de langues.

De plus était suggérée la définition d’un programme de mobilité plus ouvert et plus adapté, plus large et plus démocratique en rappelant que la question de l’éducation ne concernait pas que l’enseignement supérieur. La formation et l’équipement des maîtres du primaire et du secondaire entre autres nous semblaient primordiaux.

La question des ressources était évoquée sous l’angle de la double nécessité de mobiliser les ressources nécessaires et de veiller à une meilleure équité dans la distribution des ressources publiques entre des élites bien formées, les besoins de formation des tranches intermédiaires qui deviennent de plus en plus nécessaires, la qualification de la population

(70) Perla Cohen et Guy Haug, « Pour un agenda éducation euro-méditerranéen dans l’UPM », novembre 2008 ; Actes du colloque de Marseille, novembre 2008.

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active et la prise en considération des publics en difficulté ou sous favorisés. Ce n’était pas qu’un catalogue à la Prévert ni les élucubrations de doux rêveurs, nous en retrouvons d’ailleurs les principaux éléments dans le Programme Indicatif National 2007-2010, et les propositions faites en appui à l’Initiative nationale pour le développement humain récapitulent bien et éclairent les priorités fixées par le Maroc selon ses besoins spécifiques, ciblent les différents segments en mettant un accent particulier sur l’éducation de base et les problèmes que posent analphabétisme et illettrisme en dépit des efforts importants réalisés en matière de développement et d’action sociale.

Comment articuler ces options pour en faire des actions à développer dans le cadre du Statut avancé en les intégrant dans les cadres régionaux prévalents qui pour l’heure n’ont pas le secteur éducation dans leur agenda ? Comment bâtir un Plan éducation 2020 qui s’appuierait sur Education formation 2010, en somme comment construire ensemble un agenda éducation? A quel niveau et avec quelles ressources ?

S’ouvrir sur de nouvelles perspectives

Le Statut avancé se fonde sur le co-développement, la coresponsabilité et la convergence des intérêts. Son double ancrage Euromed et Voisinage dans la relation avec l’UE n’exclut en rien ses autres dimensions, ni ses autres ancrages (Maghreb Afrique) ni ses autres relations. La question est alors de bien discerner les niveaux et d’en travailler les articulations afin d’éviter doublons et gaspillages et de définir son rôle dans ces différentes configurations en s’appuyant sur des mécanismes institutionnels rénovés afin de donner des contenus aux déclarations de principe. En somme, ce statut de partenaire avancé changera- t-il la donne sur le fond ?

Si oui, l’objectif sera l’élaboration d’un agenda commun pour l’éducation dans l’économie de la connaissance alors que cela n’a pas été envisagé dans le cadre de l’Union pour la Méditerranée. Cet agenda commun devrait s’appliquer aux grands secteurs que sont l’éducation de base, la lutte contre l’analphabétisme et l’illettrisme, la question de la formation professionnelle, lieu privilégié de la relation entre formation, emploi et développement, le dossier de l’enseignement supérieur, dans lequel un saut qualitatif et quantitatif de la coopération et de la mobilité est indispensable tout en s’ouvrant à la problématique de l’éducation interculturelle.

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Un saut qualitatif et quantitatif est nécessaire en matière d’éducation et de formation : quelques pistes

Il devrait viser à :

– consolider la part prise dans les programmes actuels et identifier de nouvelles actions destinées à l’ensemble du système en ciblant les priorités par étapes afin de faciliter l’acquisition des connaissances et des compétences nécessaires à une économie mondiale fondée sur la connaissance ;

– promouvoir de meilleures relations entre les citoyens européens et ceux des pays partenaires, et améliorer la compréhension des cultures, langues et institutions. Des exemples d’accords vertueux et de définition des contenus peuvent être trouvés ça et la, nous évoquerons l’exemple de l’accord UE-USA d’ordre structurant sur la base des intérêts mutuels des partenaires ;

– consolider et soutenir les actions de rapprochement du système d’Enseignement Supérieur et de Recherche et de formation professionnelle marocains à l’Espace européen d’Enseignement Supérieur et de Recherche Scientifique tout en prenant en considération les réalités objectives et les diversités existantes ;

– consolider et soutenir des actions communes :

• Projets de diplômes communs ou doubles : cette expérience menée avec les États-Unis en 2006 soutient des consortia d’établissements d’enseignement supérieur qui cherchent à créer des programmes d’étude communs intégrés. Dans le cadre de ces programmes, des étudiants passent une importante période d’étude dans le pays partenaire et y obtiennent un diplôme commun ou double ;

• Projets de mobilité communs mis sur pied et gérés par un groupe d’établissements d’enseignement supérieur et/ou de l’enseignement et de la formation professionnels de l’UE et d’un pays partenaire. Les activités mettent l’accent sur la mobilité à court terme des étudiants (généralement un semestre) avec reconnaissance des périodes d’étude à l’étranger, développement d’un programme commun et échange de stagiaires, de personnel enseignant ou d’administrateurs. La dimension réciprocité nous semble importante à retenir. D’autres pays comme le Mexique avaient mis en place dans le cadre de programmes comme le PROMEP des échanges fondés sur des mobilités de courte durée

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qui avaient le double avantage de permettre aux professionnels mobiles de garder un pied dans leur cadre d’origine et de limiter le phénomène de la fuite des cerveaux ;

• Dialogue et projets axés sur les politiques destinés à aborder des questions stratégiques liées aux systèmes d’éducation et de formation, ainsi qu’aux politiques de l’UE et de ses pays partenaires. Cette action implique des études, des séminaires, des groupes de travail, des exercices d’étalonnage qui abordent des problèmes comparatifs de l’enseignement supérieur et de la formation professionnelle, notamment la reconnaissance des qualifications et les questions d’accréditation ;

– promouvoir davantage la participation marocaine aux programmes existants ouverts à la participation des pays du voisinage, et initier une réflexion sur la participation éventuelle à d’autres programmes pertinents comme Leonardo pour la formation professionnelle ou mettre en place une fenêtre Leonardo régional méditerranéen ;

– utiliser les instruments existants chaque fois que les règles le permettent pour multilatéraliser les relations (Maroc+Pays de l’UE+ autre région Sud-Sud) ;

– investir les programmes (Erasmus, PCRD) pour structurer les formations doctorales, la recherche en SHS et l’adapter à l’agenda communautaire pour les SHS ;

– créer des chaires d’excellence « Ibn Khaldoun » (ou autre) en étroite coopération avec d’autres pays du Maghreb pour favoriser la connaissance sur ces pays ;

– fixer des ambitions à l’Université euro-méditerranéenne de Fès, dont la vocation première telle qu’elle se définit est de promouvoir à l’échelle régionale les valeurs d’ouverture, d’échange et d’inter-culturalité pour qu’elle soit aussi le lieu de l’ancrage de l’excellence au Sud, de la connaissance du Maroc et de l’universalité de la connaissance.

A titre d’exemple, le Brésil vient d’inaugurer en grande pompe l’Université latino-américaine UNILA ouverte à tous les pays latino-américains et avec des enseignements adéquats. En somme, développer des dimensions structurantes et les ancrer à des niveaux régionaux et interrégionaux.

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– utiliser tous les nouveaux instruments et les programmes thématiques mis en place au titre de l’action extérieure de l’UE pour développer la capacité des universités sur les thèmes clefs de la coopération dans le Statut avancé (la question des migrations, la mobilité).

Toutes ces actions nécessiteront le lancement d’études permettant bilans et repérage des besoins en matière de formation et l’identification des acteurs avant tout lancement de programme.

– viser :

• une meilleure inclusion sociale par l’éducation et la formation professionnelle ;

• le développement des connaissances et des compétences de base indispensables à l’époque de la mondialisation et de la société de la connaissance, et le développement des outils communs de mesure et de connaissance des pratiques permettant en amont le repérage des données nécessaires à l’élaboration d’un socle commun de connaissances et d’un ensemble de valeurs partagées ;

• la formation et l’équipement des maîtres du primaire et du secondaire, y compris avec les outils et technologies de la communication ;

• l’appui aux efforts de refonte et de restructuration des programmes et des institutions d’éducation et de formation, y compris au développement lié au programme Education 2010 de l’apprentissage tout au long de la vie et au processus de Bologne dans l’enseignement supérieur.

– construire et consolider les bases de connaissance réciproques, des valeurs partagées.

En synthèse, il conviendra de préparer de vrais plans d’action à mettre à plat avec les Agences comme EACEA REA ; viser l’évaluation des programmes mis en œuvre au Maroc pour programmer la structuration de nouvelles actions ; mettre à contribution les diasporas marocaines qui ont l’avantage de tenir la chaîne par les deux bouts, enfin, tirer les leçons de l’existant en identifiant les manques et déficiences actuelles au regard de ses priorités propres dans le cadre des instruments existants afin de promouvoir la mise en place de nouveaux instruments.

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La Très Grande Crise Multidimensionnelle et Euromed : chance ou handicap ?

Henri REGNAULT

La crise mondiale actuelle n’a rien d’une récession dont on pourrait sortir par des politiques keynésiennes de relance. Il s’agit d’un processus beaucoup plus lourd, dont l’importance sera au moins égale à celle de la Grande Dépression des années 30 mais dont la nature est profondément différente. Nous sommes dans une Très Grande Crise Multidimensionnelle (TGCM) sans précédent historique, qui ouvre un processus de destruction créatrice d’une intensité exceptionnelle dans lequel les territoires vont s’insérer inégalement en fonction de leurs capacités à mettre en œuvre des politiques susceptibles de contenir les effets collatéraux de la destruction et de dynamiser la création. Comment se situe la zone Euromed et plus particulièrement le Sud de la Méditerranée dans ce processus ?

La première partie de cet article, De la Très Grande Crise Multidimensionnelle, emprunte largement à la conclusion « De la nature de la crise » de mon Journal de crise : août 2007-janvier 2010, des subprimes à l’illusion de la reprise (à paraître en 2010). Elle développera la caractérisation du défi structurel que constitue la TGCM en tant que crise multi-systémique mondiale, à la fois crise de régulation et crise d’adéquation technologique, débouchant sur une longue période de destruction créatrice intense.

La deuxième partie, Euromed et la Très Grande Crise Multi-dimensionnelle, est une réactualisation de mes positions exprimées un an plus tôt (71), à la lumière du déroulement du processus de crise et de l’approfondissement de ma réflexion. Elle portera, d’une part, sur l’évolution de l’ordre international liée à la TGCM, entre continuité et rupture de l’articulation des processus de mondialisation et de régionalisation, entre

(71) Henri Regnault, « Euromed et la crise systémique globale », séminaire : L’intelligence économique dans l’espace méditerranéen, organisé par l’Association marocaine d’intelligence économique, Casablanca, Technopark, 4-5 décembre 2008.

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Henri Regnault126

Système Monétaire International unifié ou éclaté… et les conséquences pour Euromed ; et, d’autre part, sur les hiérarchies territoriales entre inertie et bouleversement face à la TGCM et le positionnement des territoires euro-méditerranéens et de leurs politiques territoriales dans le processus de destruction créatrice.

De la Très Grande Crise Multidimensionnelle

La TGCM n’est pas un épisode conjoncturel mais un défi structurel, et les politiques pour la traiter ne relèvent pas de l’action conjoncturelle et donc pas des recettes keynésiennes de relance (qui ont fait merveille dans la deuxième moitié du 20e siècle pour sortir des récessions). Le problème n’est pas de relancer mais de refonder. La TGCM est une crise multi systèmes mondiale à haut potentiel de destruction créatrice.

La TGCM est une crise multi-systèmes sans précédent dans l’histoire humaine. Elle est systémique au sens le plus large que l’on puisse donner à ce mot. Il ne s’agit pas seulement de l’effondrement en série des établissements bancaires, la faillite de l’un entraînant la faillite d’autres et ainsi de suite. Fort heureusement, nous avons échappé, de peu, à l’automne 2008, à un tel effondrement, l’enchaînement infernal à partir de la faillite de Lehman Brothers ayant pu être stoppé par l’action des banques centrales. Mais, dans la période actuelle, il faut avoir de la crise systémique une conception beaucoup plus large : d’une part, la crise est celle de l’ensemble du système social (économique, politique, idéologique) et, d’autre part, elle concerne aussi l’articulation de ce système social et des écosystèmes (épuisement de ressources, disparition accélérée d’espèces, environnement et climat).

Par ailleurs, la TGCM est mondiale, autre dimension de multi dimensionnalité, au sens spatial : en effet, elle n’est pas seulement cantonnée aux pays dont elle est partie. Le débat couplage / découplage entre les Etats-Unis et le reste du monde (ou entre pays développés et pays émergents) est aujourd’hui tranché dans le sens du couplage : la crise est contagieuse mais avec décalages temporels, du fait des délais de transmission, et avec des nuances d’intensité suivant les territoires.

Nous sommes confrontés à la concomitance d’une crise de régulation et d’une indispensable rupture technologique imposée par l’inadéquation société humaine / écosystème. La crise de régulation

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tient à l’épuisement du modèle fordiste pour cause de mondialisation puis au caractère insoutenable du modèle de régulation à la Greenspan par endettement des ménages : par modèle fordiste, pour dire les choses simplement, on fait référence à la période des Trente Glorieuses pendant laquelle les salaires ont pu progresser au rythme de la productivité, permettant ainsi une augmentation de la demande de biens de consommation ; par greenspanisme (néologisme pas du tout reconnu par les sphères académiques !) j’entends un ensemble de pratiques monétaires (taux bas) et financières (prêts accordés très facilement, titrisation de créances incertaines…) qui a débouché sur un très fort endettement des ménages, déclenchant le détonateur des subprimes. L’inadéquation entre société humaine et écosystème tient à l’impossibilité de prolonger les technologies actuelles et en particulier le modèle énergétique sous jacent pour cause d’épuisement des ressources fossiles et de suspicion (pas de certitude absolue) d’impact climatique du modèle énergétique carbone. C’est cette concomitance qui fonde la spécificité de la TGCM par rapport aux crises antérieures : je ne parle pas seulement des crises conjoncturelles ou des chocs pétroliers, mais aussi de la grande dépression des années 30 qui, d’une part, n’a pas été aussi globale, ne touchant pas l’ensemble de la planète, et, d’autre part, est restée purement économique, sociale et politique dans ses tenants et aboutissants, sans avoir à gérer simultanément une refondation du modèle technologico-énergétique. Le monde d’avant 1929 est celui du pétrole débutant, le monde d’après les années 30 est celui du pétrole triomphant, dans le même univers technologique et énergétique. Cette fois-ci nous sommes entrés en crise dans l’ère du pétrole finissant et donc d’une absolue nécessité de refonder le modèle énergétique. Cette différence fondamentale entre la TGCM actuelle et la dépression précédente devrait refroidir l’ardeur à proclamer la sortie de crise de tous ceux qui pensent que les progrès de la « science » économique font que la dépression a été évitée et qu’on sort tranquillement de la parenthèse d’une récession. La parenthèse va s’étaler sur une longue période, parce qu’on ne peut pas repartir comme avant et qu’il faut négocier un virage compliqué.

La différence avec la grande dépression est saisissante. Limitons-nous ici à deux exemples : dans les années 40 et 50 on ne produit pas les denrées agricoles très différemment que dans les années 30 (pas encore de semences hybrides), sous réserve du développement progressif de la mécanisation ; des améliorations sont certes intervenues dans l’industrie

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automobile mais la technique de locomotion est la même, fondée sur le moteur à explosion. Par contre, aujourd’hui, si on se projette dans 20 ans :

– Il est probable que nous ne cultiverons plus les mêmes plantes (l’évolution est déjà amorcée, en dépit de fortes réticences en Europe sur l’introduction des semences génétiquement modifiées), dans le cadre des innovations biotechnologiques ; la palette des produits phytopharmaceutiques en sera fortement rétrécie et l’industrie des phytosanitaires profondément réorganisée, et c’est heureux pour la santé des utilisateurs, la préservation des espèces et des ressources en eau (quantitativement si les nouvelles plantes cultivées sont moins exigeantes en eau, qualitativement si l’utilisation des phytosanitaires et des nitrates est limitée). Nous avons devant nous une nouvelle révolution agricole : après celle des assolements (au 18e siècle), celle des semences hybrides dans la deuxième moitié du 20e, voici venir celle des biotechnologies. Chacune d’elle a joué un rôle déterminant dans la capacité de l’humanité à gérer sa croissance démographique.

– Il est probable aussi que nous roulerons encore largement dans des voitures individuelles sur courtes et moyennes distances, mais sans recourir à la motorisation pétrolière (au moins dans les zones urbaines) et en développant le moteur électrique, et c’est positif aussi bien en terme de nuisances sonores que de qualité de l’air. La poursuite de l’utilisation des matières énergétiques carbonées encore disponibles et du charbon en particulier suppose le développement des techniques de capture du carbone (enfouissement du CO2), autre front important de l’innovation technologique nécessaire.

Cette différence entre la Grande dépression et la TGCM nous interpelle sur les cadres théoriques à mobiliser pour approfondir notre compréhension des crises et pour proposer des approches opérationnelles de sortie de crise. Les économistes contemporains, lorsqu’ils entendent le mot crise, développent souvent un réflexe quasi pavlovien d’association de mots : Crise… Keynes… Relance… Policy Mix Budgétaire et Monétaire. En effet, Keynes s’est imposé au sortir de la crise des années trente comme le grand économiste de la demande et des politiques économiques de soutien à l’activité par un équilibre de plein emploi. Cependant, Keynes n’est peut-être pas la référence qui nous permet de penser et de panser la TGCM : Si la sortie de crise des années 30 s’est faite à technologie constante, la sortie de la crise actuelle ne pourra se faire que dans le cadre d’une rupture

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technologique, Dès lors, c’est vers Schumpeter (72) et son analyse de la destruction créatrice et du rôle des innovations technologiques que nous devons nous tourner. Là où Keynes fut l’économiste d’une crise à technologie constante, Schumpeter devrait apparaître comme l’économiste d’une crise à rupture technologique. Ce n’est pas en creusant des trous pour les reboucher (façon de verser des salaires et de stimuler la demande, dimension politique budgétaire) ou en faisant voler les hélicoptères de Bernanke pour distribuer des dollars (dimension politique monétaire) qu’on brisera la barrière technologique que représente le changement climatique, l’épuisement de ressources non renouvelables et la nécessité de nourrir correctement 9 milliards d’habitants à l’horizon 2050.

La très grande crise est donc multidimensionnelle par excellence, avec, d’une part, des dimensions économiques, sociales, politiques et écosystémiques et, d’autre part, des échéanciers temporels à court à long terme inextricablement liés, qui s’imposent à tous les pays de la planète. Au-delà des phases de stagnation qui nous attendent à court et à moyen terme (après une éventuelle purge paroxystique encore à venir), la véritable sortie de crise économique par enclenchement d’un nouveau cycle technologique est inséparable de la réponse aux défis alimentaires, énergétiques, et environnementaux d’une humanité qui poursuit sa croissance démographique. Sans ces avancées technologiques, chaque velléité de reprise économique un peu sérieuse viendrait se briser sur les verrous alimentaires et énergétiques : la hausse des prix alimentaires et énergétiques alimenterait une baisse du pouvoir d’achat, une réduction de la demande des autres biens et donc une spirale récessive. Chaque amorce de reprise contiendrait en elle-même son annihilation. La véritable sortie de crise et l’enclenchement d’un nouveau cycle de long terme suppose de faire sauter le verrou alimentaire par la révolution biotechnologique et le verrou pétrolier par la conversion énergétique (renouvelable, nucléaire, charbon avec enfouissement du carbone). Ces deux verrous ne sont d’ailleurs pas indépendants, reliés par la problématique des agro-carburants.

Finalement, il faut bien admettre que la TGCM et la Grande Dépression des années 30 sont profondément différentes dans leur nature profonde, dans leurs caractérisations technologiques et économiques, dans les politiques qu’elles appellent et dans les références théoriques auxquelles

(72) Né, comme Keynes, en 1883, par ailleurs année de mort de Marx, premier grand analyste de la crise... Quelle année pour l’histoire de la pensée économique !

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elles renvoient, comme tente de le synthétiser schématiquement – donc sans nuances – le tableau ci-dessous :

La non comparabilité entre la Grande Dépression et la TGCM

Critères de comparaisonGrande dépression des années 30

TGCM depuis 2007, en cours

Nature profonde de la criseCrise dans la relationhomme – homme

Crise dans la relation homme – homme + homme – nature

Caractérisation technologique Crise à technologie constante Crise à rupture technologique

Caractérisation économique Crise de la demandeCrise de la demande à court terme + crise d’offre non soutenable à long terme

Politique de sortie de crise Politique de relance Politique d’innovation

Auteur de référence Keynes Schumpeter

Source : « De la nature de la crise » in Regnault H., Journal de crise, août 2007-janvier 2010, Des subprimes à l’illusion de la reprise, à paraître en 2010.

Euromed et la Très Grande Crise Multidimensionnelle

Comment faire le lien entre la TGCM et Euromed ? La voie la plus directe est de nous interroger sur les impacts territoriaux de la TGCM sur la zone Euromed en général et sur le Sud méditerranéen en particulier, en partant d’une définition du territoire aussi opérationnelle que possible pour une telle entreprise.

Les géographes et les aménageurs ont produit de nombreuses définitions du territoire, mais au-delà de leur diversité, toutes ces définitions tournent autour de la notion d’espace occupé par des hommes, organisés en sociétés humaines et modifiant l’espace naturel. Une telle approche du territoire ne me permet guère d’avancer beaucoup dans la prospective des impacts de la TGCM. J’ai besoin d’une définition à plus large spectre disciplinaire pour ouvrir un pont intellectuel entre la crise et les territoires. Je propose donc la définition suivante : un territoire est un espace socialisé, régulé, appropriable par ses habitants, susceptible de se projeter dans l’avenir, de définir des stratégies et d’y affecter des ressources. Cette définition introduit une dimension économique à travers la notion de ressources : pas de budget, pas de territoire ! Mais c’est aussi une définition politique : pas de liberté de circulation, pas de territoire non

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plus car une telle liberté est la condition minimale de l’appropriation de l’espace par ses habitants, qui peut leur faire considérer qu’il s’agit bien de leur territoire. A la lumière de cette définition, la zone Euromed peut-elle être considérée comme un territoire ? Non, elle est une juxtaposition de territoires. Voyons pourquoi.

Une telle définition peut s’appliquer à des espaces de tailles très diverses, depuis l’unité territoriale administrative de base, une commune, jusqu’à des ensembles de pays acceptant des règles communes et disposant d’un minimum d’institutions dotées de moyens collectés, directement ou indirectement, auprès des personnes physiques et morales qui occupent ou sont en relation avec cet espace. Les nations sont bien évidemment des territoires au sens de cette définition. A l’intérieur des nations, les sous-divisions spatiales dotées de budgets propres sont des territoires au sens de ma définition. A l’échelle plurinationale, de simples accords commerciaux de type libre-échange ne fondent pas un territoire, qui ne peut pas se limiter à la facilitation des relations marchandes, sans mise en commun de ressources et sans libre circulation des habitants. Ce n’est qu’au stade de l’union douanière que l’on peut éventuellement envisager un territoire, si les recettes douanières sont affectées à l’ensemble des partenaires, via un embryon institutionnel, et si une liberté de circulation minimum existe, condition indispensable de l’appropriabilité de l’espace par ses habitants. L’Union européenne, en tant qu’Union économique, est un vrai territoire, dans lequel des moyens sont mis en commun à travers des politiques communes (Politique agricole commune et fonds afférents ; politique de cohésion et fonds structurels) et dans lequel existe la liberté de circulation (et, au-delà, d’établissement) des citoyens. Mais, hormis l’UE, il faut bien admettre que la portée pratique du territoire multinational est faible voire inexistante. Sans budget, l’ALENA (fût-il un accord d’intégration profonde) ne fonde pas un territoire, faute de pouvoir collecter et affecter des ressources, sans parler du symbole de l’absence de liberté de circulation que représentent les fortifications de la frontière sud des Etats-Unis. En dépit de transferts budgétaires (MEDA puis fonds de la Politique de voisinage) mais sans liberté de circulation la zone Euromed ne peut pas y prétendre non plus : tant qu’il existera des visas (et ce n’est pas demain la veille de leur disparition !)… La zone Euromed ne sera pas un territoire mais une juxtaposition de territoires.

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Sur la base de cette définition du territoire, comment envisager la relation qui s’établit entre les territoires euro-méditerranéens et la TGCM ? Nous nous intéresserons tout particulièrement aux territoires du sud de la Méditerranée, et encore plus spécifiquement à ceux, tels le Maroc ou la Tunisie, qui se sont engagés dans la division internationale du travail et plus spécifiquement dans la division internationale des processus productifs au sein de réseaux productifs plurinationaux. Ces territoires ainsi ciblés sont particulièrement concernés par toute modification de l’ordre économique international (dans ses dimensions commerciales et monétaires) et par les conséquences possibles des modifications technologiques sur la hiérarchie des territoires, en fonction de leur capacité à s’approprier les nouvelles technologies et des modifications de positionnement dans les chaînes de valeur qui peuvent en résulter.

Euromed et l’évolution de l’ordre économique international : entre continuité et rupture de l’articulation régionalisation/ mondialisation ?Le sud de la Méditerranée est largement engagé dans le processus

commercial multilatéral de l’OMC (sauf l’Algérie et la Libye qui ont un simple statut d’observateur à l’OMC), mais aussi dans le processus régional euro-méditerranéen (sauf la Libye), voire dans d’autres accords préférentiels, tout particulièrement le Maroc (accord de libre-échange avec les Etats-Unis). L’articulation de l’ordre multilatéral mondial de l’OMC et de l’ordre préférentiel régional euro-méditerranéen est donc de la première importance pour les territoires du sud de la Méditerranée. Mais, du fait des bouleversements liés à la TGCM, il faut considérer aujourd’hui que la question monétaire internationale surdétermine la question commerciale internationale, que les choses importantes en matière d’évolution de l’ordre économique international se passent au FMI plus qu’à l’OMC, comme en témoigne le désintérêt vis-à-vis de la conclusion du Doha Round.

Le système monétaire international actuel est à l’agonie, victime d’un vice constitutif originel (le statut dominant d’une monnaie nationale – le dollar – comme instrument de règlement des créances internationales, mais d’une monnaie nationale d’une économie moins dynamique qu’elle n’a été) et d’un vice ultérieur dans la conception de la régulation économique internationale : l’admission de la Chine à l’OMC sans droit de regard de la communauté internationale sur ses mécanismes de change. Les

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marchandises chinoises circulent dans le monde selon des mécanismes de marché libéralisé alors que la parité de la monnaie chinoise est administrée par l’Etat chinois : ce hiatus n’était pas grave tant que l’économie chinoise restait une « petite économie » au sein de l’économie mondiale, sachant que la plupart des pays en développement administrent ainsi leur taux de change sans trop perturber les échanges économiques internationaux. Par contre, ce hiatus devient insupportable maintenant que la Chine est un acteur majeur de l’économie mondiale et, depuis peu, le premier pays exportateur mondial. Et les principales victimes ne sont pas tant les pays développés que les autres pays en développement (dont des pays du sud de la Méditerranée) qui se voient dépossédés de leur potentiel exportateur par le dumping monétaire chinois.

Ces dysfonctionnements du SMI ouvrent la voie à deux avenirs possibles :

– La reconstruction d’un SMI unifié, débarrassé de ses asymétries insupportables, autour d’un étalon monétaire international construit, sous l’autorité du FMI. Toutefois cela ne signifierait pas la prolongation de la situation actuelle. En effet, un nouveau SMI unifié ne pourra faire l’économie d’un mécanisme d’équilibrage tendanciel des échanges : On ne pourra plus rejouer la scène d’un gigantesque déficit des USA compensé par un gigantesque excédent de la Chine. L’équilibrage tendanciel des échanges entre grandes zones régionales par la nécessaire réévaluation des monnaies des zones excédentaires changera forcément la donne actuelle de la division internationale du travail, au profit de pays en développement qui ne pouvaient trouver leur véritable place dans l’ancien système du fait de la sous-évaluation de la monnaie chinoise. En effet, un nouveau SMI unifié ne saurait tolérer qu’un grand pays comme la Chine puisse administrer le cours de sa monnaie (donc échapper aux mécanismes de marché sur sa parité monétaire) tout en réclamant le libre jeu du marché pour ses marchandises : c’est là une des contradictions fondamentales du système actuel.

– L’incapacité à reconstruire un SMI unifié conduirait inévitablement à un repli partiel des échanges mondiaux dans des zones régionales, autour d’une monnaie dominante : l’euro pour l’Europe et ses zones périphériques, le dollar pour les Amériques (avec un éventuel contrepoids brésilien sur l’Amérique du Sud), le yen et le yuan en coopération monétaire renforcée en Asie. Dans un tel cas de figure, une remontée

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du protectionnisme (à l’échelle régionale, pas nationale) est inévitable, quelles que soient les réticences des grandes firmes habituées à se mouvoir dans un espace mondial unifié : la division internationale des processus productifs, devra se redéployer, forcée et contrainte, d’une échelle mondiale à une échelle régionale. Les échanges internationaux de biens ordinaires seront largement contraints par cette nouvelle donne régionalisée. Les échanges interrégionaux de biens de haute technologie donneront lieu à des négociations d’Etat à Etat au coup par coup, comme c’est déjà bien souvent le cas.

Dans les deux cas, les pays du sud de la Méditerranée voient s’ouvrir une fenêtre d’opportunité pour les décennies à venir. Sauront-ils exploiter une telle fenêtre pour améliorer leur position dans la hiérarchie des territoires ?

Euromed et hiérarchie des territoires, entre inertie et bouleversement ?Au grand jeu des territoires, la TGCM va rebattre les cartes. La

question est de savoir dans quelle proportion la hiérarchie actuelle des territoires est susceptible d’être modifiée. En règle générale et en temps ordinaire, l’inertie des hiérarchies territoriales est forte : Les territoires les mieux situés dans la division internationale du travail ont entre leurs mains tous les atouts pour rester en haut du classement, et les territoires en bas de la hiérarchie n’ont pas les moyens de développer les politiques qui leur permettrait de remonter. Toutefois les périodes de rupture technologique forte, et la période qui s’ouvre en est bien une par excellence, sont propices à des bouleversements hiérarchiques. On a vu dans années 70 et 80, aussi bien sur la sidérurgie (passage à la coulée continue) que sur l’horlogerie (passage à l’électronique), que les barrières à l’entrée (supposées protéger les opérateurs historiques vis-à-vis de nouveaux entrants dans le secteur) pouvaient se retourner, piégeant les anciens opérateurs dans des investissements non amortis alors que les nouveaux concurrents bénéficiaient de conditions de production optimales. Les territoires européens et américains des vieilles technologies sidérurgiques et horlogères portent encore les stigmates de ces bouleversements sous forme de friches industrielles, alors que la Corée ou Taiwan ont connu un développement accéléré de leur production d’acier et en ont fait la base d’une construction navale très performante, et d’une industrie automobile

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en ce qui concerne la Corée. Or les enjeux technologico-énergétiques qui se profilent sont d’une intensité incomparablement supérieure à ceux des années 70 et 80. Le dossier énergétique en période de pic pétrolier devient vital ; le tournant d’une nouvelle révolution agricole se précise. Les territoires qui prendront du retard à s’inscrire dans le nouvel univers technologique et qui s’acharneront à sauver les emplois des anciennes technologies seront vite distancés et régresseront dans la hiérarchie territoriale : ils ne connaîtront de la destruction créatrice que la face sombre ! A l’inverse les territoires qui maîtriseront les nouvelles énergies et/ou qui sauront participer à la nouvelle révolution agricole expérimenteront des raccourcis de développement qui les feront remonter dans les hiérarchies territoriales, la création l’emportant sur la destruction.

Nul ne peut dire aujourd’hui avec certitude quels seront les territoires qui sortiront gagnants ou perdants de la TGCM, à un horizon de 15 ou 20 ans, sinon que les territoires gagnants seront les territoires schumpetériens innovateurs, les perdants les keynésiens relanceurs. Qu’en sera-t-il du sud de la Méditerranée ?

Le Sud a au moins un avantage : il n’a pas les moyens d’être keynésien relanceur ! Mais a-t-il les moyens d’être schumpetérien innovateur ? Sans doute pas en tant que concepteur d’innovations, sauf à la marge, du fait de la faiblesse de son appareil technologique et scientifique. Par contre, il peut chercher à se positionner au mieux dans la mise en œuvre des innovations, en fonction de ses dotations naturelles (énergie solaire en particulier) et de ses niches de compétences, en ciblant ses rares moyens sur la formation et la recherche-développement, d’une part, et l’adoption, d’autre part, des normes les plus avancées qui lui ouvriront les marchés du Nord et en particulier de l’Europe. Mais qu’il n’attende pas que l’Europe lui fournisse une aide financière massive dans cette démarche : la contrainte budgétaire européenne va devenir très forte, dans une période de croissance faible où les Etats ont dû s’endetter massivement pour sauver leur système financier d’une déroute totale. Dès lors, il n’y a pas d’autre voie pour le Sud que d’améliorer son insertion au marché européen, par une politique normative exigeante, et de renforcer son attractivité, par une sécurisation maximale de l’investissement.

L’inscription d’un pays dans le cadre du statut avancé vis-à-vis de l’Europe peut être un atout dans cette démarche. Mais en aucun cas ce statut avancé n’est à lui seul une garantie de succès. S’il permet la mise en œuvre

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de pratiques avancées des acteurs économiques et de leur environnement politico-administratif, s’il symbolise le passage effectif d’une logique d’intégration superficielle (suppression des obstacles à l’échange aux frontières) à une logique d’intégration profonde (mise en œuvre d’un espace productif normativement homogène), alors oui il sera bien un élément décisif pour le développement du Sud dans l’environnement international post-crise. Ces pratiques avancées se traduiront par une remontée de statut dans la division internationale des processus de production et par un meilleur positionnement dans les chaînes de valeur, comme a su le faire la Turquie dans les 20 dernières années (passage d’une simple position de sous-traitance de capacité à une sous-traitance de spécialité ou d’intelligence, voire jusqu’à la création de marques propres). Mais si le statut avancé n’est pas l’aiguillon et le cadre pour mettre en œuvre des pratiques avancées, il apparaîtra bien vite comme n’étant qu’un nouveau gadget de congratulations diplomatiques, conduisant à de nouvelles désillusions dans les relations euro-méditerranéennes.

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La Turquie et l’Union pour la Méditerranée : entre méfiance et espoir

Samim AKGöNüL (73)

Le processus qui a mené du « Partenariat euro-méditerranéen » à « l’Union pour la Méditerranée » en passant par « l’Union méditerranéenne » est révélateur quant à la position que la Turquie souhaite occuper à la fois en Europe, en Méditerranée et dans le Proche-Orient. Depuis le début de ce processus, Ankara a donné l’impression d’hésiter ; du moins a-t-elle exprimé clairement ses préoccupations et même sa méfiance. Celle-ci est due à une conjoncture à la fois interne et externe. Interne parce que depuis 2002 nous sommes témoins d’une transformation certes ambiguë, mais sans précédent. Externe parce que depuis 1999 à l’égard de l’Union européenne, et depuis 2005 à peu près à l’égard de son environnement géopolitique immédiat, la Turquie se destine, à la fois dans le discours et dans les actes, à devenir une puissance régionale.

De ce point de vue, le projet de l’Union pour la Méditerranée est vu :– d’une part, comme une entrave à ces ambitions, car l’initiative

appartient à la France et, depuis quelques années, tout ce qui vient de la France suscite la méfiance turque ;

– d’autre part, comme un des moyens de réaliser sa nouvelle politique régionale dans la mesure où l’ensemble des pays de la région envers laquelle la Turquie nourrit ses ambitions en font partie.

Construction européenne versus Processus de Barcelone : les perceptions turques

Il est bien connu maintenant que le processus d’unification européenne est passé par trois étapes principales. La première étape a commencé au lendemain de la Guerre et a porté sur le partage des richesses, à la fois

(73) Maître de conférences à l’Université Marc Bloch où il enseigne la langue et l’histoire turques, ainsi que la traduction turc-français.

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pour mettre en place, dans une perspective keynésienne, la société de prospérité via l’initiative étatique, et pour établir la paix et la stabilité entre les anciens ennemis d’hier. Il n’est pas erroné de dire que cette étape était vue uniquement sous l’angle de la prospérité économique et qu’elle était considérée comme un outil dans le développement capitaliste. Or, la concurrence capitalisme / communisme des décennies de la guerre froide a, en quelque sorte, obligé les pays membres ou satellites de la CEE d’instaurer un État social pour annihiler les arguments plausibles des adversaires. Par conséquent, l’établissement de la paix a vite été éclipsé par la construction d’un espace économique protégé, consolidant, paradoxalement, le rôle des États en tant qu’acteurs principaux, tout en installant une quarantaine autour du bloc soviétique. De ce point de vue, le passage à la troisième étape, celle d’une union politique est tout à fait logique du point de vue de l’analyse marxisante : l’évolution du projet européen tend à consolider les acquis du capitalisme face au socialisme, par la paix physique d’abord, l’entente économique ensuite, et l’intégration politique enfin.

Cette intégration politique a été ralentie par le rajout d’une nouvelle étape : celle d’une Europe identitaire. Les préoccupations identitaires se conjuguant, comme toujours, très mal avec un projet néolibéral pragmatique, l’attitude des pays souverainistes comme la France, la Hollande, l’Irlande ou l’Autriche a forcé les idéologues à réviser leurs prétentions pour une Europe-Etat via une constitution. Cette nouvelle étape est due, paradoxalement, à la nouvelle conjoncture d’après 1995. Les vagues successives d’élargissement vers les pays, donc les populations, de l’ex-bloc soviétique ont créé de facto une Europe à deux vitesses où, pour la première fois dans l’histoire de la construction européenne, les relations centre-périphérie se sont installées au cœur du processus décisionnel européen. Dans cette configuration de dominants (Europe de l’Ouest)/dominés (Europe de l’Est), le rejet du projet ultralibéral a été contourné par la ruse avec le traité de Lisbonne, imposé par les parlements, mais rejeté une première fois dans le seul pays où il a été soumis au référendum (l’Irlande), avant d’être finalement accepté au prix d’une pression sans précédent.

Le projet civilisationnel turc d’enracinement européen, débuté dans la deuxième moitié du 19e siècle et qui devait être achevé par l’adhésion à l’Union européenne, s’inscrit et par conséquent se heurte, à cette

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quatrième étape de l’Europe identitaire. L’illusion de la disparition d’un monde bipolaire a contraint les idéologues européens à construire des nouvelles figures d’altérité, face auxquelles l’identité européenne devait être construite. Parmi ces altérités repoussoirs, les Turcs, en tant qu’autres de proximité, proches, mais lointains, semblables, mais différents, européens, mais nationalistes, occidentaux, mais… musulmans, convenaient parfaitement au rôle de miroirs. Ainsi, l’adhésion turque à l’Union européenne a-t-elle été sans cesse renvoyée aux calendes grecques, mettant la Turquie dans une situation ambiguë où le désir d’Europe cède peu à peu la place à la méfiance voire à l’animosité envers toutes les initiatives européennes. Dans l’opinion publique turque, où le nationalisme et le souverainisme sont rois, les termes les plus usités vis-à-vis de l’Europe deviennent peu à peu : le double standard, le mensonge, la perte de dignité, l’humiliation, etc.

C’est dans ce contexte de relations biaisées que s’inscrit le nouveau projet d’intégration régionale apparu en 1995 avec le Processus de Barcelone. Ce projet associant 15 pays de l’Union européenne de l’époque et les 12 pays du pourtour méditerranéen (Maroc, Algérie, Tunisie, Égypte, Israël, « autorité » palestinienne, Syrie, Jordanie, Liban, Turquie) a été accueilli avec espoir en Turquie. En 1995, celle-ci était empêtrée dans des crises politiques successives et voyait sa perspective européenne bien éloignée. L’élargissement vers l’est avait certes créé un espoir, mais il y avait une crainte géostratégique, celle de la diminution de l’importance stratégique de la Turquie avec la disparition du bloc soviétique. Ankara sentait, pour la première fois, la nécessité de s’ancrer solidement à l’Europe non pas grâce à sa situation géostratégique, mais grâce à ses performances politiques et économiques. C’est ainsi qu’en 1995, à une époque où la candidature turque à l’Union européenne n’avait pas été encore concrétisée, le Processus de Barcelone a été accueilli avec enthousiasme par la diplomatie turque, bien qu’ignoré par le grand public. Il s’agissait pour elle d’une de ces voies menant à l’Europe. Cette perception positive était cependant conjoncturelle. Le projet était acceptable tant qu’il ne se substituait pas à celui de l’adhésion à l’Union européenne et tant qu’il n’excluait pas la Turquie.

La donne change avec les années 2000 à partir du moment où trois nouveaux développements commencent à déterminer la politique turque, mais surtout sa perception du monde.

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Vers l’Union européenne : légitimation d’une aspiration séculaire

Paradoxalement, l’objectif d’une intégration totale de la Turquie dans l’Union européenne s’éloigne à partir de 1996, année où l’Union douanière prévue par l’Accord d’association signé en… 1963 s’est partiellement réalisé. Cette Union, qui n’a pas d’assise internationale dans la mesure où l’Organisation mondiale du commerce ne l’a toujours pas validée, semblait être le point le plus loin vers lequel la coopération turco-européenne pût évoluer. Du côté de l’Europe occidentale, cette coopération économique permet d’ancrer la Turquie à l’Occident tout en la maintenant dans les marges, comme le montrent les débats sur le Partenariat privilégié.

A dix ans d’intervalle, trois chocs successifs, ressentis fortement dans l’opinion publique turque et chez les dirigeants, se produisent au tournant du siècle. En 1989, la Commission européenne rend un avis négatif sur l’ouverture des négociations d’adhésion, en raison « du contexte économique et politique de la Turquie ». L’avis note également que « la situation des droits de l’homme et le respect de l’identité des minorités, quoique ayant fait l’objet d’une évolution au cours des dernières années, n’ont pas encore atteint le niveau nécessaire pour une démocratie ».

C’est en 1997, avec l’élargissement à 10 autres nouveaux pays européens, que la Turquie ressent une fois de plus sa particularité et se convainc d’être mal aimée. D’une part, ces nouveaux pays étaient ceux de l’ancien bloc soviétique, or Ankara, qui avait été un rempart contre le bloc de l’Est pendant un demi-siècle, admettait mal que la récompense de ce dévouement fût accordée aux anciens rivaux. D’autre part, ce sentiment d’être lâchée par les anciens alliés était renforcé par le fait que Chypre, bien que toujours divisée, devienne elle aussi membre de l’UE. Une incompréhension s’installe désormais entre la Turquie et l’UE, et à partir de cette date toute initiative venant de cette dernière commence à être vue comme un subterfuge destiné à entraver l’adhésion turque à l’Europe communautaire.

Ce sentiment d’humiliation atteint son paroxysme lorsqu’au sommet de Luxembourg, toujours en 1997, le refus de reconnaître à la Turquie même un statut de candidat à l’adhésion achève de convaincre les élites turques que l’Europe en tant que telle applique une approche discriminatoire à l’égard de leur pays. On peut bien sûr considérer que cette décision n’était

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que l’expression d’une stagnation, pourtant difficile à défendre auprès de l’opinion publique turque, dans la mesure où le Conseil européen reprenait les mêmes termes qu’en 1989 en confirmant « l’éligibilité de la Turquie à l’Union européenne », mais en ajoutant que « les conditions politiques et économiques permettant d’envisager des négociations d’adhésion n’[étaient] pas réunies ». Certes, cette « maladresse » est rectifiée en 1999, lors du Conseil européen d’Helsinki, qui reconnaît indirectement le statut de candidat officiel de la Turquie. Mais dès l’ouverture des négociations avec la Turquie en 2005, un discours essentialiste et culturaliste s’est emparé de certaines capitales européennes comme Paris, Vienne ou encore Berlin. En effet, une fois que la vocation européenne de la Turquie légitimée par cette ouverture officielle, la Turquie devient un enjeu électoral interne, un épouvantail, et elle est marginalisée en tant qu’acteur à part entière dans l’Europe. La proposition répétée d’un « partenariat privilégié » donne le sentiment que la Turquie est menée en bateau par l’Union européenne et que les réformes exigées de l’UE deviennent des concessions.

L’idée d’une Union méditerranéenne, transformée en Union pour la méditerranée, puis finalement en « Processus de Barcelone : Union pour la Méditerranée » a été lancée justement lors de la campagne présidentielle française de 2007 dont les débats ont été littéralement pollués par le sujet turc utilisé à l’envi par les différents protagonistes. Dans ce climat délétère, le fait que soit lancée l’idée d’un projet d’Union méditerranéenne a laissé penser aux Turcs qu’il s’agissait d’une manœuvre de plus pour exclure leur pays de l’Europe en tant que membre à part entière. D’ailleurs, lors de la première phase du projet, seuls les pays du pourtour méditerranéen étaient inclus. Cela donnait l’impression à Ankara qu’il s’agissait d’une tout autre union, inventée de toutes pièces par la France, pour la détourner de sa voie. C’est seulement à l’inclusion de l’ensemble des pays de l’Union Européenne dans le projet qu’Ankara a accepté, du bout des lèvres, de s’y rallier, se retrouvant ainsi dans la même Union pour la Méditerranée avec l’Estonie ou Israël. Une fois dedans, les prétentions et les ambitions turques changent, la Turquie se mettant à réclamer plus de pouvoir et plus de prérogatives ambitionnant de devenir, à terme, un des leaders de la nouvelle Union, si jamais celle-ci existe réellement un jour. Nous y reviendrons.

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La métamorphose : une Turquie nouvelle, une vision ambiguë

La naissance et le développement du projet de l’Union pour la Méditerranée coïncident avec une période de transformation politique et sociétale en Turquie. Les deux décennies qui ont suivi le coup d’État militaire fasciste du 12 septembre 1980 ont connu une instabilité politique et une crise économique chroniques, sous la conduite d’un régime semi-militaire avec un semblant de démocratie prétorienne. Du coup, le pays entre dans une période d’isolement relatif, empêtré dans ses peurs internes et externes. Bien que les séquelles souverainistes paranoïaques d’une telle période demeurent toujours, il est aisé de constater qu’une métamorphose se met en place dès le débuts des années 2000, notamment sous l’impulsion de la perspective européenne. La montée de l’islam politique des années 90, avec une touche anti-européenne, s’était soldée par la fermeture du Parti de la Prospérité de la mouvance islamiste « Vision Nationale » en 1998, suivie de la formation d’un gouvernement de coalition secoué par une crise économique sans précédent en 2001. Cette crise a ébranlé durablement la légitimité et la représentativité des partis traditionnels. C’est dans cette conjoncture que la jeune génération de la mouvance islamiste a fait scission pour fonder un nouveau parti, sous le leadership de l’ancien maire très populaire et populiste d’Istanbul, Recep Tayyip Erdogan. Cette nouvelle formation, le Parti de la Justice et du Développement (AKP) a non seulement réuni les déçus des partis du système et les électeurs des zones rurales lassés des positions radicales de Vision Nationale, mais a également adopté une posture nouvelle, très conservatrice et proche des valeurs islamiques du point de vue sociologique, mais très libéral et résolument pro-européen du point de vue économique et politique. Chose rare dans la politique fragmentée turque, le parti est arrivé seul au pouvoir lors des élections de 2002, et depuis il gouverne seul.

Il ne serait pas exagéré de dire qu’en interne, notamment à partir de 2004, les réformes ont transformé le paysage politique de la Turquie, réformes qui, sous l’impulsion de la candidature européenne, ont pu, peu à peu, éloigner la Turquie de la tutelle militaire et du régime de démocratie prétorienne. Cette nouvelle élite, d’origine rurale mais constituant la nouvelle bourgeoisie nationale, s’est placée dans tous les secteurs de la vie sociale, allant de la politique à l’économie, et de la culture à la diplomatie. Les « ouvertures » à l’égard des minorités et des musulmans se sont succédées, rendant caduc le discours souverainiste et anti-européen

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des anciennes élites… qui craignaient justement de perdre leur manière de vivre à l’européenne.

A partir de 2006, on sent un ralentissement des réformes, dû en grande partie aux découragements successifs venant notamment de la France. Parallèlement en revanche, une politique volontariste régionale se fait de plus en plus jour, Ankara voulant ouvertement devenir une puissance régionale incontournable. Dans cette nouvelle politique étrangère résumée par le slogan « zéro problème de voisinage », et incarnée par le nouveau ministre des Affaires étrangères, Ahmet Davutoglu (surnommé le Kissenger turc !), la Turquie donne l’impression de diversifier ses relations extérieures avec un multilatéralisme assumé. Ainsi, ayant rompu l’alliance avec l’Israël, elle se rapproche davantage des pays musulmans de la région, y compris l’Iran, tout en menant une politique de rapprochement avec les ennemis d’hier comme l’Arménie et la Grèce, mais aussi avec la Géorgie, la Russie ou l’Asie centrale. La suppression de visa avec la Syrie, le Protocole de réconciliation avec l’Arménie, les accords militaires avec la Géorgie, les pourparlers énergétiques avec la Russie pour le projet Nabucco, la volonté de jouer les médiateurs entre Israël et la Syrie, ou celle de résoudre le problème chypriote en sont les meilleures illustrations.

Ainsi, le projet de l’Union pour la Méditerranée met les ambitions turques à l’épreuve. D’une part, la Turquie craint que le projet ne nuise au processus de son intégration à l’Union européenne, la condamnant en quelque sorte à ce statut insupportable de candidat éternel ; d’autre part, elle est bien consciente que le projet peut aussi servir ses prétentions de puissance régionale.

Conclusion

On le comprend bien, la Turquie cherche sa place dans le nouveau monde post-bipolaire, et elle multiplie les initiatives pour ouvrir des portes et se défaire de son isolement géopolitique. Les uns soupçonnent dans cette nouvelle orientation un changement de cap vers les pays musulmans, les autres considèrent que son accession à l’Union européenne passe justement par cette transformation en une puissance régionale stratégique, mais aussi énergétique. Le même type d’inquiétude avait existé après 1990, lorsque Ankara lorgnait de plus en plus vers l’Asie centrale. A partir des années 2000, le pays a consolidé sa position dans les républiques

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dites « turcophones » en abandonnant sa posture condescendante de grand frère. De même, son approche vers les pays de l’Est méditerranéen semble manquer de vision d’ensemble et donne l’impression d’un activisme tous azimuts sans perspective définie à long terme. Dans ce contexte, la conjugaison de ces trois projets – l’intégration à l’Union européenne, devenir une puissance régionale débarrassée de ses démons internes qui la rongent depuis des décennies et être un acteur principal au sein de l’Union pour la Méditerranée – semble être un pari difficile. Quoi qu’il en soit, ce dernier projet reste très secondaire, voire inexistant, pour les stratèges d’Ankara.

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Vertus et limites de l’intégration économique : le cas des relations entre

la Turquie et l’Union européenneDeniz AKAGüL (74)

Résumé

Au-delà des bénéfices purement économiques qu’elle génère, l’intégration économique est souvent mise en avant pour contourner les difficultés de l’intégration politique. Toutefois, au-delà d’un certain stade, cette instrumentalisation de l’intégration économique atteint ses limites. Les ambiguïtés de la démarche choisie apparaissent dès lors qu’on s’aperçoit des contradictions entre la rationalité économique mue par les gains absolus et la rationalité politique déterminée par les gains relatifs qui s’inscrit dans le cadre du paradigme de puissance. La problématique de l’instrumentalisation de l’intégration économique trouve un champ d’étude empirique intéressant dans les relations entre la Turquie et l’Union européenne (UE). Ce pays méditerranéen, bien avancé dans la voie de l’intégration économique avec l’UE, connaît des difficultés dans la réalisation de son intégration politique. En observant les liens entre les intérêts économiques et les états des opinions publiques à l’égard de l’adhésion turque dans les pays membres de l’UE, la présente étude vise à vérifier la validité de l’hypothèse du « doux commerce » de Montesquieu.

Introduction

Le thème « le Statut avancé à l’épreuve de l’Union pour la Méditerranée », suscite au premier abord les questionnements suivants. Qu’est-ce qu’on entend par “Union” ? S’agit-il d’un projet de coopération qui pourrait se réaliser dans un cadre intergouvernemental ? Ou bien

(74) Économiste, spécialiste des Balkans et de la Méditerranée orientale. Maître de conférences à l’université de Lille-I et chercheur au laboratoire Médee (Mécanismes économiques et dynamique des espaces européen).

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s’agit-il d’un projet plus ambitieux, un projet d’intégration qui nécessite une construction supranationale ? Dans ce dernier cas, quelle dimension de l’intégration est mise en avant ? Économique ? Ou politique ? Bien que ces deux dimensions entretiennent des interactions, la question mérite d’être soulevée dans la mesure où les types de rationalité qui régissent les deux dimensions sont différents. Assez souvent, l’intégration économique est instrumentalisée pour contourner les difficultés de l’intégration politique. Mais si l’intégration économique présente l’intérêt de contourner ces difficultés, elle connaît également ses limites qui montrent que finalement c’est la dimension politique qui prime.

Compte tenu de ces remarques, l’expérience de la Turquie se révèle intéressante à observer, à plusieurs égards. Tout d’abord, parce qu’il s’agit d’un pays méditerranéen candidat à l’adhésion à l’Union européenne (UE). Ensuite, parce que le projet initial prévu par l’Accord d’Ankara (1963) met en avant l’intégration économique. Enfin, l’opposition de certains pays membres au processus d’adhésion rappelle les limites de l’instrumentalisation de l’intégration économique au service de l’intégration politique. Certains pays membres de l’UE proposent à la Turquie de tronquer le statut de membre à part entière en statut de « partenariat privilégié ».

Les relations entre l’Union européenne et la Turquie remontent pratiquement aux premiers jours de la construction européenne, puisque la Turquie avait déposé une demande d’association en juillet 1959. Avec l’accélération de l’intégration économique dans les années 1980, la Turquie déposait sa demande d’adhésion en avril 1987. Le statut de pays candidat ne sera reconnu que plus de dix années plus tard, en décembre 1999. L’ouverture des négociations sera décidée en décembre 2004. Avec un contenu essentiellement économique, l’Accord d’Ankara (1963) qui prévoyait la réalisation d’un marché commun, c’est-à-dire la libre circulation des biens, des personnes et des capitaux, ainsi que l’adhésion de la Turquie à l’échéance de 1995, s’inscrit dans une logique semblable. Il s’agissait pour les Six d’appuyer un pays allié qui constituait l’une des pièces maîtresses du dispositif de la défense occidentale dans le climat de guerre froide, à l’aide de l’intégration économique. Après une phase préparatoire (1965-1972), l’Accord envisageait la réalisation du marché commun aux termes d’une phase transitoire (1973-1985) et d’une phase définitive qui devait s’achever en 1995.

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En observant la logique de l’intégration européenne et celle de l’Accord d’Ankara, apparaissent certaines similitudes qui révèlent les vertus et les limites de l’intégration économique comme instrument de l’intégration politique. Dans les deux cas, c’est la dimension économique qui est mise en avant pour avancer dans la voie de l’intégration. Après la coopération intergouvernementale qui caractérise la période de 1945 à 1951, les pays de l’Europe occidentale choisissent la voie de l’intégration politique, avant d’opter finalement pour un projet d’intégration économique. Le choix de l’intégration économique entériné lors de la Conférence des Six à Messine (1955) est précédé des tentatives avortées de création de la Communauté politique (1953) et de la Communauté européenne de défense (1954).

Les vertus de l’intégration économique

L’intégration économique représentait deux catégories d’intérêts, économiques et politiques. Sur le plan économique, il s’agit de bénéficier, d’une part, des gains de l’échange découlant d’une meilleure allocation des ressources et, d’autre part, des économies d’échelle. L’idée de bénéficier des économies d’échelle grâce à la réalisation d’un grand marché est déjà présente dans les réflexions de l’Entre-deux-guerres, qui attirent l’attention sur les pertes engendrées par le morcellement de l’espace économique européen à la suite de la dislocation des empires. Ainsi, en 1919, Keynes dénonçait les « pertes en matière d’organisation et d’efficacité économique que doivent entraîner les innombrables nouvelles frontières politiques qui viennent d’être créées entre les États nationalistes, avides, jaloux, sans expérience et économiquement déficients. Les frontières économiques étaient supportables tant qu’un immense territoire était partagé entre quelques grands empires. Elles cessent de l’être maintenant que les empires d’Allemagne, d’Autriche-Hongrie, de Russie et de Turquie ont été divisés en une vingtaine d’États indépendants. Une Union libre-échangiste, comprenant toute l’Europe centrale, orientale, sud-orientale, la Sibérie, la Turquie, et, nous osons l’espérer, le Royaume-Uni, l’Égypte et l’Inde, œuvrerait probablement autant en faveur de la paix et de la prospérité du monde que la Société des Nations elle-même. »

Quant aux intérêts politiques qui justifient l’instrumentalisation de l’intégration économique, ils peuvent se résumer à l’idée de « doux commerce » de Montesquieu selon laquelle le commerce apporte la paix en établissant des interdépendances entre les pays participants. Selon

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Montesquieu : « L’effet naturel du commerce est de porter à la paix. Deux nations qui négocient ensemble se rendent réciproquement dépendantes : si l’une a intérêt d’acheter, l’autre a intérêt de vendre ; et toutes les unions sont fondées sur des besoins mutuels (75). » Plus tard Victor Hugo, qui prônera les États-Unis d’Europe, verra dans la concurrence sur le marché un substitut au champ de bataille (76). La même idée apparaît dans les réflexions des économistes qui perçoivent « les transactions économiques comme des problèmes politiques résolus », comme en témoigne la Communauté européenne du charbon et de l’acier fondée en 1950 (77). L’idée centrale étant que le coût d’opportunité d’un conflit armée devenant plus important en raison des interdépendances, les partenaires commerciaux seront moins enclins à entamer un conflit armé. L’idée d’une instrumentalisation de l’intégration économique à des fins politiques est admise également par les économistes contemporains, comme Paul Krugman (78). Celui-ci défend l’idée que les États-Unis devraient soutenir l’ALENA pour des raisons géopolitiques, même si cet accord présente peu d’intérêts, voire des coûts du point de vue économique, pour les Américains.

L’instrumentalisation de l’intégration économique légitimée par les avantages économiques et politiques énumérés ci-dessus, semble connaître cependant des limites. En dépit des périodes difficiles, le projet d’intégration prévu par l’Accord d’Ankara a atteint une partie non négligeable de ses objectifs économiques pour l’UE, notamment avec l’union douanière réalisée en 1996 à l’échéance prévue. Force est de constater cependant qu’une partie importante des opinions publiques des pays membres émettent un avis défavorable à l’égard de l’adhésion turque. Dès lors l’observateur est tenté de s’interroger sur la validité de l’hypothèse du « doux commerce » de Montesquieu. Serait-elle infirmée ?

(75) Cf. Montesquieu, De l’esprit des lois, Livre XX, chapitre II (de l’esprit du commerce), Garnier Flammarion, Paris, 1979.(76) Dans son discours prononcé le 21 août 1849 lors du Congrès de la paix à Paris, Victor Hugo disait qu’« Un jour viendra où il n’y aura plus d’autres champs de bataille que les marchés s’ouvrant au commerce et les esprits s’ouvrant aux idées ». (77) « The solution is the transformation of the conflict from a political problem to an economic transaction. An economic transaction is a solved political problem. Economics has gained the title of queen of social sciences by choosing solved political problems as its domain » Cf. Abba Lerner, « The economics and politics of consumer sovereignty », American Economic Review, 62, n° 2, 1972, p. 259.(78) Cf. « L’ALENA : des vérités difficiles à dire », in P. Krugman », la Mondialisation n’est pas coupable, La Découverte, Paris, 1998, p. 153-162.

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Intérêts économiques et opinions publiques dans le cas des relations entre la Turquie et l’Union européenne

La réflexion menée ici se limitera à l’examen des liens entre les intérêts économiques et l’état d’avancement de l’intégration politique. L’intégration économique a-t-elle favorisé le processus d’adhésion ? Quel est l’impact des intérêts économiques sur l’état des opinions publiques dans les pays membres ? Quel lien entre les intérêts commerciaux et les opinions publiques ? Pour les intérêts économiques futurs : quel lien entre les transferts budgétaires et les opinions publiques ?

Le croisement des états des opinions publiques et de l’intensité des échanges commerciaux entre la Turquie et les pays membres pris individuellement offre un paysage en conformité, bien que disparate, avec l’hypothèse de départ selon laquelle les opinions publiques devraient être de plus en plus favorables au fur et à mesure que l’intensité des échanges augmente (cf. graphique n°1).

Graphique 1Intensité des échanges commerciaux et états des opinions

publiques à l’égard de l’adhésion de la Turquie (2005)

Intensités relatives des échanges commerciaux

Rap

ports

d’o

pini

ons

favo

ralb

es/o

pini

ons

défa

vora

bles

Sources : L’opinion publique dans l’Union européenne, Terrain : mai-juin 2005, n° 63, Bruxelles, septembre 2005 et IMF, Direction of Trade Statistics Yearbook, 2008. Pour le calcul des intensités relatives des échanges, voir l’annexe.

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La perspective de l’intégration de la Turquie concerne également les intérêts économiques futurs, notamment à travers les transferts budgétaires au bénéfice de la Turquie engendrés par son adhésion. En effet, l’importance de cette charge financière est l’un des arguments souvent avancés par les opposants à cette adhésion en Allemagne et en France. Les estimations effectuées vont de 8 milliards d’euros par an selon le Bureau central du plan du ministère de l’Économie des Pays-Bas à 14 milliards par an selon l’Ost Europa Institute de Munich, en passant par les 11 milliards de l’Institut de l’économie mondiale de Kiel (79).

Même si le calcul des soldes budgétaires par pays n’est pas exempt d’ambiguïtés, le croisement des états des opinions publiques avec les contributions nettes des pays membres offre un aperçu instructif (80). La relation attendue entre les contributions nettes au budget de l’UE et les états des opinions publiques à l’égard de l’adhésion de la Turquie devrait se présenter sous la forme d’une courbe en U inversé, avec un point de retournement à 0. Chez les contributeurs nets pour lesquels la Turquie présente une charge financière supplémentaire, l’opposition devrait diminuer au fur et à mesure que leurs contributions au budget de l’UE s’affaiblissent. À budget constant, a priori leurs opinions publiques devraient être neutres s’il n’y avait que la charge financière comme déterminant. Les écarts observés traduisent leur préférence entre la Turquie et les pays membres bénéficiaires nets, liée à d’autres motivations qu’économique. Tandis que chez les bénéficiaires pour lesquels la Turquie entre en concurrence dans l’utilisation des fonds communautaires, l’opposition à la Turquie devrait se renforcer avec l’importance des transferts budgétaires en leur faveur. La proportion d’opinion par rapport aux opinions défavorables devrait atteindre son maximum pour les pays auxquels le budget européen est neutre.

La répartition des onze contributeurs nets entre les cadrans sud-ouest et nord-ouest indique que la majorité des pays contributeurs ont

(79) Cf. A.M. Lejour, R.A. de Mooij and C.H. Capel, Assessing the economic implications of Turkish accession to the EU, CPB Netherlands Bureau for Economic Policy Analysis n° 56, The Hague, mars 2004, Quaisser, W. and A. Reppegather, EU-beitrittsreife der Turkei und konsequenzen einer EU-Mitgliedschaft, Osteuropa institut Munich, Working Paper no. 252, 2004 et Hugo Dicke, Die Beitrittsverträge der EU : eine Bilanzierung, Institut für Weltwirtschaft, Kieler Arbeitspapier Nr. 1157, Kiel, avril 2003.(80) A propos des limites que représentent les calculs des soldes budgétaires nets des pays membres voir Jacques Lecacheux, Budget européen : les mirages du juste retour, Notre Europe, Études et Recherches n°41, Paris, juin 2005.

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des opinions publiques défavorables à la Turquie, seules les opinions publiques anglaises et finlandaises sont favorables à la Turquie. Quant à la répartition des quatorze pays bénéficiaires (cadrans sud-est et nord-est), elle est moins évidente à interpréter dans la mesure où la dispersion est importante : huit pays situés dans le cadran nord-est sont favorables, alors que six qui se trouvent dans le cadran sud-est sont défavorables. Si l’on se livre à une interprétation strictement économique, les observations confirment néanmoins que la majorité des pays bénéficiaires, donc plus pauvres, sont plus généreux que les pays contributeurs nets plus riches. Car ils sont beaucoup plus nombreux à renoncer à une part plus importante de leur revenu (allant de 0,5 à 2,5% de leur PIB) que ne le sont les pays contributeurs nets avec une part moins importante de leur revenu (entre 0 et 0,5% de leur PIB) (cf. Graphique n° 2).

Graphique 2Contributions nettes au budget de l’UE (en % du PIB 2006) et états des opnions publiques à l’égard de l’adhésion de la Turquie (2005)

Contributions nettes au budget de l’UE (en % du PIB) Contributeur net : (-), Bénéficiaire net : (+)

Rap

ports

d’o

pini

ons

favo

ralb

es/o

pini

ons

défa

vora

bles

Sources : L’opinion publique dans l’Union européenne, Terrain : mai-juin 2005, n° 63, Bruxelles, septembre 2005 et Documentation française, Questions internationales, n° 31, Paris, mai-juin 2008.

Il convient toutefois de remarquer que les motifs qui se trouvent derrière l’argument de la charge financière engendrée par l’adhésion

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de la Turquie témoignent du fait que ceux-ci n’obéissent pas à un schéma de rationalité purement économique. Tout d’abord, parce que l’appréciation de l’importance de cette charge renvoie inéluctablement à des considérations d’ordre politique, voire identitaire (81). En effet, la solidarité budgétaire qui ne suscite pas d’objections entre les régions d’un même pays liées par une longue construction identitaire avec ses mythes fondateurs, devient moins évidente lorsqu’il s’agit d’une aide financière internationale, comme en témoigne l’attitude généreuse de l’Allemagne vis-à-vis de l’unification qui a suivi la chute du mur de Berlin, en contraste avec ses réserves sur la progression du budget européen. Sur le plan international, l’appréciation des aides financières s’appuie d’avantage sur des considérations d’ordre géopolitique. De plus, le calcul des transferts budgétaires ne tient compte que du coût de l’adhésion et ignore totalement le coût de l’exclusion définitive de la Turquie dont l’évaluation s’avère assez complexe, tant sont entremêlés les facteurs stratégiques et géopolitiques (82). Quelles seront les conséquences (les coûts politiques et économiques) d’une déstabilisation d’un pays dépourvu de gages de stabilité politique et économique qu’apporte l’ancrage européen ? Il convient donc de s’interroger également sur les intérêts politiques.

(81) Les propos tenus par Hugo Dicke, l’auteur de l’évaluation de l’Institut de l’économie mondiale de Kiel citée plus haut, sont à cet égard révélateurs. Après avoir énuméré ses arguments d’ordre économique pour le rejet de l’adhésion turque, il termine ses propos avec des arguments d’ordre culturel. Selon lui « les pays membres n’ont pas encore répondu clairement à la question : où sont les frontières de l’Europe ? Sont-elles morales, culturelles ou géographiques ? D’un point de vue géographique, l’essentiel du territoire de la Turquie appartient à l’Asie. D’un point de vue culturel, le régime d’Ankara a certes fait de grands efforts vers la démocratie, c’est très bien comme cela et il faut que cela continue. Mais, par exemple, lorsque l’on considère la séparation de la religion et de l’Etat, on constate qu’elle est récente, qu’elle a été décrétée par le haut et garantie par un pouvoir militaire. J’aimerais savoir comment elle est vécue au sein de la population. Bref, lorsque je regarde la Turquie, j’ai du mal à la compter au nombre des pays qui, géographiquement ou culturellement, font partie de l’Europe. » Cf. « Son entrée dans l’Union coûterait très chère », l’Express, 12 décembre 2002. (82) Dans un article paru dans le Monde, Nicolas-Jean Brehon, avant de se livrer à une évaluation de la charge financière de l’adhésion turque, soulignait que « dans ce débat, les aspects budgétaires sont évidemment secondaires ». Bien qu’il observe l’importance de cette charge qui promet de poser des problèmes, l’auteur concluait qu’« on peut sans risque avancer l’idée que la non-adhésion créerait, elle aussi, des problèmes énormes, voire insurmontables, à la construction européenne. L’Europe a toujours progressé par crises. Nul doute qu’à cette occasion, elle serait servie, encore plus que de coutume ». Cf. Nicolas-Jean Brehon « Combien cela coûterait-il à l’Union ? », le Monde, 21 avril 2004.

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En guise de conclusion

Même si dans un premier temps l’économie joue un rôle stimulant, arrivée à un certain stade de l’intégration, la dimension politique réapparaît. Un schéma en sens opposé est tout à fait valable aussi. Les dimensions économiques et politiques sont en interaction lorsqu’il s’agit d’un projet d’intégration. Comme le souligne Bela Balassa, l’un des pères fondateurs des théories de l’intégration économique, « des motifs politiques peuvent inciter à ce que l’intégration économique intervienne en premier, mais l’intégration économique réagit aussi sur la sphère politique ; de même, si les motifs initiaux sont économiques, le besoin de l’unité politique peut surgir à une étape ultérieure (83) ».

À côté de ces interactions qui rendent difficile à démêler et à pondérer les différents facteurs qui interviennent dans l’évolution, il convient de souligner que les deux types d’intérêts, économiques et politiques, obéissent à des schémas de rationalité différents. Dans le cadre de la rationalité économique, l’existence de gains mutuels suffit pour avancer dans la voie de l’intégration. Le raisonnement s’appuie donc sur des gains absolus. Alors que la rationalité politique qui raisonne dans le cadre du paradigme de puissance se réfère aux gains relatifs des États. Ceux-ci, pour maintenir, voire renforcer leur position dans l’échelle de puissance, sont attentifs à la répartition des gains de façon à ce que leurs partenaires ne soient pas trop avantagés. On s’aperçoit finalement que les deux types de rationalités peuvent tomber en contradiction : un comportement rationnel du point de vue économique peut devenir irrationnel du point de vue politique et vice versa (84). Dès lors, on comprend mieux les limites de l’instrumentalisation de l’intégration économique au service de l’intégration politique.

(83) « Political motives may prompt the first step in economic integration, but economic integration also reacts on the political sphere; similarly, if the initial motives are economic, the need for political unity can arise at a later stage. » Cf. Bela Balassa, « The Theory of Economic Integration: An Introduction », in Brent F. Nelsen & Alexander Stubb (ed.), the European Union. Readings on the theory and Practice of European Integration, Lynne Rienner Publishers, London, 2003, p. 179-191.(84) Nous utilisons ici les concepts de l’économie politique internationale qui articule les dimensions économique et politique dans les relations internationales et nous nous rangeons dans le courant réaliste selon lequel le politique est le déterminant en dernière instance, en opposition aux courants libéral et marxiste qui défendent la primauté de l’économique sur le politique. Voir à ce propos, Gérard Kébabdjian, les théories de l’économie politique internationale, le Seuil, 1999, Paris.

Vertus et limites de l’intégration économique : le cas des relations entre la Turquie et l’U.E.

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Le retour du politique signifie également celui des intérêts nationaux parmi les déterminants des comportements. Dès lors on se trouve dans la configuration internationale fondée sur la coopération entre États, comme en témoigne la diversité des opinions publiques à l’égard de la Turquie au sein de l’UE. Il serait plus judicieux de parler des intérêts de groupes de pays membres au lieu des intérêts de l’UE. La diversité observée à l’égard de la Turquie traduit aussi l’état d’avancement de l’intégration européenne qui n’a pas réussi à modérer la défense des intérêts nationaux. Ce qui tend à confirmer la thèse qui met l’accent sur l’importance des intérêts nationaux dans la construction européenne elle-même et souligne les difficultés de l’intégration politique (85).

Annexe : Calcul des intensités relatives des échanges

L’intensité relative des échanges entre deux partenaires se mesure à l’aide de l’indicateur suivant :

L’indicateur met en relation la part du flux bilatéral entre les pays i et j (Vij ) dans le commerce mondial (V..) avec le produit de la valeur des échanges totaux des deux partenaires (Vi. et V.j) rapporté au commerce mondial au carré (V 2..).

Source : M. FOUQUIN, « Le développement du régionalisme commercial », La Lettre du CEPII, n° 118, novembre 1993, Paris.

(85) Dans un ouvrage qui livre l’histoire de l’UE à travers les comportements des hommes d’État, Desmond Dinan souligne l’importance des intérêts nationaux. « There was nothing inevitable about the emergence of European integration in the form with wich we are now familiar. European politicians were (and still are) instinctively averse to sharing national sovereignty, despite rhetorical flourishes to the contrary. National leaders decided to share soverreignty in supranational organizations primarly because they perceived that it was in their countries’ (and therefore their own) interests to do so. » Cf. Desmond Dinan, Europe Recast. A History of European Union, Lynne Rienner Publishers, Boulder, 2004, p. 1.

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Bibliographie

Deniz Akagül et Semih Vaner, l’Europe, avec ou sans la turquie ?, éditions d’Organisation, Paris, 2005.

Bela Balassa, « The Theory of Economic Integration : An Introduction », in Brent F. Nelse & Alexander Stubb (ed.), the European Union. Readings on the theory and Practice of European Integration, Lynne Rienner Publishers, London, 2003, p. 179-191.

Eurobaromètre 63. l’Opinion publique dans l’Union européenne. terrain : mai-juin 2005, Bruxelles, septembre 2005.

Hugo Dicke, Die Beitrittsverträge der EU : eine Bilanzierung, Institut für Weltwirtschaft, Kieler Arbeitspapier Nr. 1157, Kiel, avril 2003.

IMF, Direction of Trade Statistics Yearbook, 2008.

Gérard Kébabdjian, les théories de l’économie politique internationale, Le Seuil, 1999, Paris.

J.M. Keynes, les Conséquences économiques de la paix, Gallimard, Paris, 2002.

Paul Krugman. Cf. « L’ALENA : des vérités difficiles à dire », in P. Krugman », la Mondialisation n’est pas coupable, la Découverte, Paris, 1998, p. 153-162.

Jacques Lecacheux, Budget européen : les mirages du juste retour, notre Europe, Études et Recherches n°41, Paris, juin 2005.

A.M. Lejour, R.A. de Mooij and C.H. Capel, Assessing the economic implications of Turkish accession to the EU, CPB Netherlands Bureau for Economic Policy Analysis n° 56, The Hague, mars 2004.

Abba Lerner, « The economics and politics of consumer sovereignty », American Economic Review, 62, n° 2, 1972.

Montesquieu, De l’esprit des lois, livre XX, chapitre II (de l’Esprit du commerce), Garnier Flammarion, Paris, 1979.

Quaisser, W. and A. Reppegather, EU-beitrittsreife der turkei und konsequenzen einer EU-Mitgliedschaft, Osteuropa institut Munich, Working Paper n° 252, 2004.

Vertus et limites de l’intégration économique : le cas des relations entre la Turquie et l’U.E.

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Annexes

Annexe I Huitième session du Conseil d’association UE-MAROC

Annexe II Conclusions de la présidence

Annexe III Rapport annuel de la Haute Représentante de l’Union pour la PESC

Annexe IV Rapport général sur l’activité de l’Union européenne

Annexe V Présidence suédoise du Conseil de l’UE 2009

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Annexe IHuitième session du

Conseil d’association UE-Maroc Bruxelles, le 7 décembre 2009

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Déclaration de l’Union européenne

1. L’Union européenne (UE) se réjouit vivement de la tenue de la huitième session du Conseil d’association qui marque une nouvelle étape dans le développement de la relation entre le Maroc et l’Union européenne. Le partenariat avec le Maroc a une valeur fondamentale pour l’UE, compte tenu du rôle qu’il joue non seulement au Maghreb et sur le continent africain, mais dans toute la région méditerranéenne. Le Maroc continue à se distinguer par sa vision et son engagement au sein de la politique européenne de voisinage comme de l’Union pour la Méditerranée. L’UE considère que l’approfondissement des relations bilatérales avec le Maroc est la concrétisation du principe de différenciation qui est l’un des fondements de la politique européenne de voisinage.

2. Le Conseil d’association du 13 octobre 2008 avait marqué une nouvelle étape dans le renforcement des relations Maroc-UE, grâce à l’adoption du document conjoint visant l’établissement du Statut Avancé du Maroc dans les relations avec l’UE. Le document conjoint forme une feuille de route ambitieuse pour le développement progressif et soutenu des relations bilatérales dans de nombreux domaines. Ce partenariat renforcé entre l’UE et le Maroc traduit la volonté de l’UE de répondre positivement aux attentes et aux besoins spécifiques du Maroc, afin de l’accompagner dans son processus courageux de modernisation et de démocratisation et constitue un approfondissement du cadre existant qu’est l’Accord d’association.

3. Le document conjoint prévoit en particulier un approfondissement de la coopération politique, une intégration plus intense au Marché Intérieur sur base d’un rapprochement réglementaire progressif avec l’acquis communautaire et de la négociation d’un accord de libre échange approfondi et global, ainsi que d’un renforcement de la coopération sectorielle. Son caractère novateur tient également aux recommandations qui visent à impliquer d’autres acteurs dans le partenariat entre l’UE et le Maroc (Parlement européen, Conseil de l’Europe, Comité économique et social, Comité des régions, associations du monde des affaires, des syndicats, représentants de la société civile et autres).

4. Conformément à ce que le document conjoint établit, le Groupe de travail ad hoc, créé par décision de la sixième session du Conseil

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d’association, a procédé à une évaluation générale sur la mise en œuvre du document conjoint. L’UE considère que les efforts qui ont été déployés dans le cadre de la mise en œuvre du document conjoint, surtout en matière de dialogue politique, stratégique, économique, ainsi qu’en matière financière et sociale sont à souligner. Le renforcement de la coopération avec le Conseil de l’Europe est également prometteur. Dans ce contexte, l’UE félicite le Maroc pour être le premier pays non-européen à devenir membre du Centre Nord-Sud du Conseil de l’Europe.

5. Le Parlement européen a considéré de manière positive les recommandations du document conjoint en matière de coopération parlementaire et la création de la Commission Parlementaire mixte Maroc-UE est en cours. La Commission a établi des contacts avec le Comité économique et social et avec le Comité des Régions et l’UE souhaite qu’une coopération entre ces deux organes communautaires et les instances marocaines équivalentes soit initiée bientôt.

6. L’UE estime qu’il est important d’intensifier le travail conjoint dans les domaines de la coopération sécuritaire, judiciaire et de la dimension humaine. Par ailleurs, l’UE attache une grande importance à la finalisation des négociations commerciales afin de passer à l’étape suivante du lancement des négociations sur l’Accord de Libre échange approfondi et global. S’agissant du rapprochement du cadre législatif, l’UE considère également d’une importance primordiale l’établissement d’une instance marocaine de coordination interministérielle de la convergence réglementaire et l’élaboration d’un programme national de convergence réglementaire, qui sont des éléments essentiels pour la mise en œuvre du document conjoint sur le statut avancé. L’UE estime que le 1er Sommet Maroc-UE qui aura lieu pendant le premier semestre 2010, traduira certainement l’importance politique que les deux parties attachent à leurs relations bilatérales et contribuera à leur renforcement.

7. L’UE se félicite de la tenue régulière des réunions des différents sous-comités prévus par l’Accord. Elle se félicite également du nouveau format agréé pour certains sous-comités sectoriels qui permettra un suivi plus opérationnel des la mise en œuvre du Statut avancé et l’orientation du travail. Ce nouveau format a commencé à être utilisé et pourrait être maintenu ou modifié à la lumière des résultats obtenus.

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8. Conformément à ce qui est prévu par le document conjoint l’UE et le Maroc ont initié une réflexion sur le nouvel instrument qui prendra le relais du Plan d’action Maroc qui arrive à son échéance en 2010. Dans ce contexte le groupe de travail ad hoc s’est penché sur les objectifs, la méthodologie à suivre, les grands principes et la structure du document qui remplacera le Plan d’action Maroc. L’UE confirme son engagement à travailler sur ce document avec le Maroc afin que les deux Parties puissent l’adopter en 2010 et le mettre en œuvre sans délai.

9. En conformité avec la vocation et les principes de la PEV, le Plan d’action voisinage UE-Maroc et les conclusions du Conseil d’association de juillet 2007, le groupe de travail ad hoc a convenu de poursuivre la réflexion concernant la nature et la forme de l’instrument qui prendra le relais du plan d’action et éventuellement, du lien contractuel qui remplacerait l’accord d’association.

10. L’UE se félicite des progrès dans la mise en œuvre par le Maroc du Plan d’action voisinage UE-Maroc, comme en témoignent les rapports de suivi élaborés par la Commission européenne, ce qui a permis l’octroi au Maroc de financements additionnels au titre de la Facilité de Gouvernance de l’Instrument Européen de Voisinage et Partenariat tant en 2007 qu’en 2008 et 2009.

11. L’UE reste pleinement engagée en faveur d’un développement réussi de l’Union pour la Méditerranée (UpM). L’UpM donne une nouvelle impulsion à la coopération de l’UE avec les pays partenaires méditerranéens, notamment en relevant le dialogue politique, en renforçant les mécanismes de décision conjoints et en augmentant la visibilité du partenariat à travers le lancement de grands projets régionaux et sous-régionaux. L’UE accueille favorablement la reprise des réunions de l’UpM et les efforts en vue de finaliser les Statuts de son Secrétariat. Dans ce contexte, elle remercie le Maroc pour avoir accueilli la deuxième conférence ministérielle sur le rôle de la femme dans la société tenue les 11-12 novembre à Marrakech et pour tous les efforts déployés pour assurer le succès de celle-ci. Il est maintenant essentiel que l’UpM, fondée sur les acquis du Processus de Barcelone, soit capable de fournir des résultats le plus rapidement possible. L’UE considère qu’il est fondamental de faire des progrès pour atteindre les objectifs communs agréés à Paris et à Marseille, avant toute chose en mettant en place l’architecture institutionnelle de l’UpM et en particulier son Secrétariat. Des progrès concrets et des efforts

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conjoints sont aussi nécessaires dans le domaine des projets destinés à renforcer l’intégration régionale dans la Méditerranée. A cet égard, l’UE salue l’attitude positive et constructive du Maroc et son engagement à développer cette initiative conjointe.

12. Dans le contexte du renforcement de la coopération euro-méditerranéenne, l’Union européenne attache une importance particulière à la coopération sous-régionale. Elle salue l’accélération de la coopération technique entre les pays maghrébins et la multiplication des initiatives au niveau des chefs d’entreprises ou des organisations de la société civile. Elle se félicite de la reprise du dialogue entre l’UE et l’Union du Maghreb arabe (UMA) et encourage celle-ci à poursuivre les efforts d’intégration sous-régionale.

13. L’UE se félicite de l’intérêt marqué du Maroc pour la Politique étrangère et de sécurité commune (PESC) et la Politique européenne de sécurité et de défense (PESD). Elle apprécie la volonté du Maroc de renforcer les liens dans ces domaines et notamment sa participation active dans la coopération avec les partenaires méditerranéens. Le dialogue politique renforcé, dont les réunions se tiennent à intervalles réguliers, constitue un excellent cadre pour progresser dans la coopération et la compréhension mutuelle. L’UE se félicite de la réunion entre le Maroc et les représentants du Comité Politique et de Sécurité (COPS) qui a eu lieu en 2009. Elle estime que ces réunions devraient se poursuivre dans l’avenir sur une base ad hoc.

14. La participation du Maroc à l’opération ALTHEA de l’UE en Bosnie-Herzégovine fut un signal important du soutien pratique du Maroc au développement de la PESD. L’UE exprime sa reconnaissance aux autorités marocaines pour leur contribution précieuse à cette opération et espère que cela constituera un précédent à la participation du Maroc à d’autres opérations futures ou en cours de l’UE. Il serait utile de bâtir sur cette première expérience de coopération entre l’UE et le Maroc en matière de gestion de crise pour explorer la possibilité de réfléchir au moyen d’organiser de manière plus structurée nos relations dans le domaine de la PESD, en particulier en envisageant de conclure avec l’UE un accord cadre pour la participation du Maroc aux opérations civiles et militaires de gestion de crises et un accord permanent sur la sécurité des informations classifiées.

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15. L’UE se félicite également de la participation des représentants du Maroc aux activités de formation offertes par le Collège européen de sécurité et de défense, ainsi qu’aux réunions d’information organisées pendant les exercices de gestion de crises de l’UE.

16. L’UE salue les avancées réalisées par le Maroc dans les chantiers de grande envergure, notamment dans les domaines de l’éducation, de la mise en place d’un nouveau filet social pour les plus pauvres et de l’agriculture, et encourage le Maroc à les poursuivre. L’UE se félicite que ses programmes d’appui sectoriels ont permis d’accompagner des réformes structurantes dans les domaines sociaux et de la gouvernance, et encore dans des secteurs-clés pour le développement socio-économique du Maroc. Toutefois, d’importantes réformes restent encore à mener. Même si le taux de pauvreté est en baisse, les défis sociaux restent encore importants, et nécessiteront une action soutenue et cohérente de redistribution sociale sur le long terme. Par ailleurs, un système judiciaire indépendant et transparent est essentiel tant pour le respect des droits de l’homme que pour le climat des affaires, conditions clés d’un rapprochement véritable avec l’UE, et il est urgent de poursuivre vigoureusement la réforme de la justice pour asseoir durablement l’Etat de droit. Dans ce contexte, l’UE réitère sa disposition à accompagner le Maroc sur le chemin qu’il a déjà entamé.

17. A la lumière de ces résultats positifs, l’UE encourage le Maroc à poursuivre et à accentuer les investissements dans les secteurs sociaux, en particuliers l’éducation, la santé, la formation professionnelle et la couverture médicale, afin d’assurer un développement social harmonieux et de réduire la pauvreté. La poursuite de la croissance dans les secteurs porteurs nécessite des ressources humaines bien formées et adaptées aux besoins du marché du travail. A cet égard, l’UE appelle à de nouvelles réformes sociales et économiques afin d’assurer une plus forte création d’emplois et une inclusion sociale plus efficace. Dans ce contexte, l’UE se félicite que le Maroc ait fait de la réforme de l’éducation l’une des principales réformes à entreprendre dans les années à venir. L’UE encourage le Maroc à redoubler d’efforts en vue d’éradiquer le travail des enfants, qui reste encore répandu dans certains secteurs.

18. L’UE salue l’intention du Maroc de lancer un large processus de régionalisation et à promouvoir le développement régional. L’UE attache une grande importance au développement régional équilibré dans un souci

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de cohésion sociale. Elle appelle les autorités marocaines à renforcer les moyens et les prérogatives dont bénéficient les régions, afin qu’elles élaborent les stratégies de développement reflétant leurs besoins.

19. Depuis la dernière session du Conseil d’Association, la coopération entre le Maroc et l’Union européenne en matière de droits de l’homme et des libertés fondamentales s’est renforcée. L’UE apprécie la tenue régulière du Sous-comité «Droits de l’homme, démocratisation et gouvernance» dont quatre réunions se sont tenues jusqu’à présent. Ce dialogue continu et l’échange soutenu d’informations témoigne de l’approfondissement de la confiance mutuelle.

20. L’UE reconnaît que les réformes lancées ces dernières années ont permis de consolider les droits de l’homme et d’élargir le champ des libertés individuelles. L’UE reconnaît le rôle important du Maroc au sein du Conseil des droits de l’Homme des Nations Unies, particulièrement en tant que médiateur entre les différents groupes régionaux et elle l’encourage à poursuivre ses efforts en la matière. L’UE se félicite également de sa coopération plus étroite avec le Maroc au sein de cette instance. Dans le contexte de l’Examen Périodique Universel du Maroc, l’UE estime que la ratification par le Maroc du Statut de la Cour Pénale Internationale ainsi que le dépôt, annoncé depuis plusieurs années, de déclarations auprès du Secrétariat Général des Nations Unies concernant la levée de certaines réserves à des Conventions internationales et l’adhésion à certains Protocoles facultatifs, constitueraient des avancées significatives. Celles-ci permettraient de renforcer l’application de plusieurs instruments internationaux en matière de droits de l’homme

21. L’Union européenne estime que la mise en œuvre de toutes les recommandations de l’Instance Equité et Réconciliation (IER) permettra au Maroc de consolider les acquis réalisés et de progresser dans l’instauration d’une nouvelle culture de respect et de promotion des droits de l’homme. L’UE se félicite de pouvoir accompagner la mise en œuvre de certaines des recommandations de l’IER. Par ailleurs, l’UE rappelle l’importance qu’elle attache à la consolidation de la liberté d’expression et de la protection des sources. L’UE rappelle également l’importance qu’elle accorde à une liberté de la presse qui soit garantie dans le cadre de la législation nationale et qui s’inscrive dans le cadre général de la protection de la liberté d’expression, droit fondamental consacré par la Déclaration universelle des droits de l’homme. Dans ce contexte, l’UE encourage l’adoption d’un nouveau

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Code de la presse qui soit en conformité avec les normes internationales en la matière, et ne prévoie plus aucune peine privative de liberté à l’encontre des journalistes. Elle invite par ailleurs le Maroc à sauvegarder la liberté d’association et de rassemblement ainsi qu’à la protection des défenseurs des droits de l’homme, notamment dans le territoire du Sahara Occidental. Elle appelle les forces de l’ordre à faire preuve de retenue dans le recours à la force. L’UE salue le maintien du moratoire sur la peine de mort et encourage le Maroc à abolir la peine capitale.

22. L’UE félicite le Maroc pour l’amélioration des conditions de transparence et la bonne organisation des élections communales du 12 juin 2009. Ces élections marquent un nouveau progrès dans le processus de démocratisation. L’UE salue aussi l’augmentation remarquable du nombre de femmes élues dans ces élections, grâce entre autres à un changement législatif, par rapport aux élections communales de 2003.

23. L’UE rappelle sa condamnation ferme et sans équivoque de toutes les formes et manifestations de terrorisme, quels qu’en soient l’origine, la cause ou les motifs invoqués. L’UE souligne l’importance de la mise en œuvre des résolutions 1267 (1999), 1373 (2001) et 1822 (2008) du Conseil de sécurité, ainsi que des autres résolutions pertinentes des Nations Unies et des instruments internationaux en matière de lutte contre le terrorisme, en particulier de la Stratégie globale des Nations Unies contre le terrorisme qui joue un rôle-clé dans la mobilisation internationale dans la lutte contre le terrorisme. L’UE réitère par ailleurs son souhait de voir la négociation sur le projet de la Convention globale contre le terrorisme aboutir rapidement.

24. L’UE rappelle son attachement au respect du droit international dans la lutte contre le terrorisme, en particulier du droit international des droits de l’homme, du droit international des réfugiés et du droit humanitaire. La lutte contre le terrorisme et le respect des droits de l’homme ne sont pas contradictoires mais, au contraire, complémentaires et se renforcent mutuellement.

25. L’UE accorde une grande importance à la coopération avec le Maroc en matière de lutte contre le terrorisme qu’elle est prête à développer et approfondir. Elle apprécie le dialogue entamé avec le Maroc, y compris dans le cadre des réunions avec la Troïka de l’UE, qui a permis

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de discuter des moyens de renforcer la coopération dans les enceintes internationales.

26. L’UE considère que l’Afrique du Nord représente une zone prioritaire de la lutte contre le terrorisme et la radicalisation. Elle salue les efforts du Maroc en matière de lutte contre la radicalisation. Elle estime qu’une coopération peut être développée avec le Maroc en matière de prévention et de lutte contre la radicalisation en Afrique du Nord et en Europe. Elle considère que la coopération entre l’UE, le Maroc et les pays de la région sahélo-saharienne doit se développer afin de lutter plus efficacement contre les réseaux terroristes.

27. L’UE salue également les efforts du Maroc dans la lutte contre le trafic de drogues et le crime organisé ainsi que les résultats positifs qui ont été atteints. L’UE félicite le Maroc par son association au MAOC-N (Maritime Analysis Center-Narcotics) à titre d’observateur.

28. L’UE se félicite que le Maroc joue un rôle actif dans la mise en œuvre de la stratégie commune Afrique-UE, notamment dans le domaine du partenariat ‘changement climatique’. En perspective du sommet Afrique-UE en 2010, l’UE considère qu’un renforcement du dialogue avec l’Union africaine ainsi qu’un développement dynamique de l’Union du Maghreb Arabe puissent jouer un rôle important dans la mise en œuvre de cette stratégie.

29. L’UE reste préoccupée par le conflit du Sahara occidental et ses conséquences et implications régionales. Elle soutient pleinement les efforts du Secrétaire Général des Nations Unies et de son Envoyé personnel en vue de trouver une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable qui permettra l’autodétermination du peuple du Sahara occidental comme le disposent les résolutions des Nations Unies. Elle encourage les parties à continuer de travailler avec l’Envoyé personnel en vue de progresser dans la recherche d’une solution politique négociée entre les parties, sous les auspices des Nations Unies. L’UE apporte son plein soutien aux négociations en cours et se félicite des pourparlers informels à Dürnstein les 10 et 11 août 2009 en vue de préparer la cinquième session des négociations. L’UE se félicite de l’engagement des parties de poursuivre de manifester leur volonté politique et de travailler dans une atmosphère propice au dialogue afin d’entrer dans une phase plus intensive des négociations de bonne foi et sans préconditions, prenant

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Déclaration de l’Union européenne 169

note des efforts et des développements depuis 2006 ce qui permettra la mise en œuvre des résolutions 1754 (2007), 1783 (2007), 1813 (2008) et 1871 (2009) du Conseil de Sécurité et le succès des négociations. L’UE se félicite également de la visite dans la région du Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, M António Guterres. Elle encourage les parties à continuer à collaborer avec le HCR dans la mise en œuvre des mesures de confiance. Elle se félicite de la disponibilité du Maroc à développer ces mesures de confiance, notamment en favorisant les échanges par la voie terrestre, dans le cadre de visites familiales. L’UE exprime son attachement à l’amélioration de la situation des droits de l’homme au Sahara occidental ; elle rappelle les obligations qui incombent à chaque partie.

30. En matière migratoire, l’UE salue les efforts du Maroc pour faire face à l’immigration illégale, qui ont conduit à une réduction substantielle de ces flux en provenance de ce pays. L’UE réaffirme l’importance qu’elle attache à la conclusion d’un accord de réadmission, qui permettra d’entamer un dialogue en matière de migration et de facilitation des visas.

31. Par ailleurs, l’UE encourage le Maroc à améliorer le cadre législatif et réglementaire dans les domaines de l’asile afin de mettre en place dans les meilleurs délais un système national de prise en charge des demandeurs d’asile et des personnes nécessitant une protection internationale.

32. Sur le plan économique, l’économie marocaine continue d’enregistrer des performances positives, avec une consolidation de la stabilité des prix, un renforcement de sa position extérieure et un programme de réformes structurelles rendu nécessaire par l’ouverture économique et les privatisations.

33. Le fait que le Maroc possède une structure d’endettement solide, une épargne considérable et un système financier peu internationalisé, a mis le pays pour l’essentiel à l’abri de la crise financière mondiale. Cependant le Maroc n’a pu échapper aux conséquences, ces derniers mois, du ralentissement économique vérifié auprès des ses principaux partenaires européens qu’il s’agisse des exportations, ou encore de la forte baisse des transferts des Marocains de l’étranger ou du tourisme.

34. En matière commerciale, l’Union se félicite de la poursuite des négociations bilatérales concernant la libéralisation du commerce des produits agricoles, produits agricoles transformés et produits de la

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pêche qui sont parvenues à la phase finale et espère qu’il sera possible d’arriver à la conclusion d’un accord dans les plus brefs délais. En ce qui concerne les négociations concernant la libéralisation du commerce des services et du droit d’établissement, l’Union considère qu’une impulsion devrait être donnée afin d’arriver à un accord dans les plus brefs délais dans ce secteur clé pour le développement d’une économie moderne. L’UE estime également qu’il est possible de trouver rapidement un accord mutuellement avantageux en ce qui concerne les négociations sur le mécanisme de règlement des différents. L’UE salue les efforts marocains de modernisations des entreprises nationales afin d’augmenter la diversification sectorielle et géographique des exportations. Dans ce contexte, les préparations pour la négociation d’un accord sur l’évaluation de la conformité et l’acceptation des produits industriels se poursuivent. L’UE encourage le Maroc à accélérer son processus d’alignement de sa réglementation technique avec le système communautaire dans les secteurs prioritaires identifiés.

35. En matière de coopération industrielle, l’UE se félicite du rôle moteur du Maroc dans l’activité d’examen et d’étalonnage de la politique de l’entreprise conduit dans les neuf pays partenaires méditerranéens en référence à la Charte euro-méditerranéenne pour l’entreprise, ainsi que dans la poursuite du dialogue euro-méditerranéen sur l’avenir du secteur du textile/habillement.

36. La mise en œuvre de l’accord de libéralisation du transport aérien a démontré les bénéfices que les deux parties attendaient de cet accord. Cet accord permet de rapprocher les populations et de fournir des opportunités de croissance au secteur du tourisme au Maroc. L’UE encourage le Maroc à poursuivre le rapprochement réglementaire prévu par l’accord aérien et soutient les projets de jumelage prévus à cet effet. Plus généralement, elle salue les importantes réformes engagées dans le secteur des transports. Elle prend note avec intérêt du dossier concernant la liaison fixe sous le détroit de Gibraltar présenté par le Maroc et l’Espagne.

37. L’UE se félicite de la mise en œuvre satisfaisante de l’accord de partenariat dans le secteur de la pêche, qui produit des résultats positifs pour le secteur de la pêche des deux parties et qui contribue à l’approfondissement des relations et du dialogue sectoriel entre les autorités responsables marocaines et européennes, notamment dans le cadre des réunions régulières de la Commission mixte. L’UE se félicite également du

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lancement de la nouvelle stratégie de modernisation du secteur de la pêche au Maroc qui devra maintenant être mise en œuvre en concertation avec le secteur et avec l’appui financier de l’UE. Dans ce contexte, l’UE porte une attention particulière aux efforts récents du Maroc en vue de l’élimination définitive des filets maillants dérivants. L’UE invite le Maroc à utiliser les fonds disponibles à cette fin dans le cadre de l’accord.

38. L’UE estime que la coopération internationale est essentielle afin d’assurer une gestion durable des ressources marines et une meilleure gouvernance des océans. Dans ce contexte, l’UE entend intensifier ses relations avec le Maroc dans le domaine de la lutte contre la pêche illégale, non déclarée et non réglementée (INN). L’UE invite le Maroc à ratifier l’Accord relatif à la conservation et à la gestion des stocks de poissons dont les déplacements s’effectuent tant à l’intérieur qu’au-delà de zones économiques exclusives (stocks chevauchants) et des stocks de poissons grands migrateurs (Accord de New York).

39. L’UE souligne l’importance de mettre en œuvre des politiques et des actions qui peuvent assurer le développement durable du Maroc du point de vue environnemental, social et économique. La mise en œuvre de la Stratégie Méditerranéenne du Développement Durable agréée en 2005 dans le cadre de la Convention de Barcelone pourrait contribuer à la réalisation de cet objectif. L’UE encourage le Maroc à poursuivre le processus de ratification des protocoles de la Convention de Barcelone et la mise en œuvre des obligations légales inscrites dans la Convention et ses Protocoles.

40. L’UE se félicite de la bonne coopération établie avec le Maroc en matière énergétique à la suite de la déclaration commune signée en 2007. L’UE réaffirme sa disponibilité à coopérer avec le Maroc dans les domaines de la sûreté et de la sécurité nucléaire mais également dans le développement des énergies renouvelables (en particulier les énergies solaire et éolienne), l’efficacité énergétique, la réforme du secteur de l’électricité, le développement des infrastructures (y compris les interconnections régionales), le renforcement des institutions de régulation du secteur. En particulier, l’UE se félicite de la participation active du Maroc au développement du Plan Solaire Méditerranéen.

41. L’UE souligne l’importance qu’elle attache au renforcement de la coopération bilatérale dans le domaine de l’environnement. Au niveau

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régional, la coopération peut être renforcée dans le cadre de la mise en œuvre des activités de l’initiative Horizon 2020, de la composante méditerranéenne de l’Initiative Eau de l’UE et de la préparation de la Stratégie méditerranéenne sur l’Eau. L’UE invite le Maroc à contribuer activement à ses propositions sur le développement d’un régime post 2012 en matière de changement climatique. L’UE attache une grande importance à un dialogue approfondi sur les différents aspects de ce phénomène, y inclus l’adaptation, la réduction des CO2 et le transfert des technologies.

42. En matière d’assistance financière, l’UE souligne la bonne performance du Maroc dans la mise en œuvre des programmes de coopération. La capacité d’absorption de l’aide communautaire et la progression constante des réformes structurantes ont été jugées satisfaisantes, comme en témoigne le niveau élevé des paiements. L’importance croissante de l’appui budgétaire sectoriel en tant que modalité de l’assistance a permis une appropriation accrue par le Maroc du processus de réformes, et continuera donc à être un instrument de coopération privilégié, au même titre que les jumelages.

43. L’UE se félicite de l’excellente collaboration avec le Maroc pour la préparation du nouveau Programme indicatif National (PIN) 2011-2013 qui sera soumis sous peu aux instances compétentes de l’UE pour adoption.

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Annexe II

Conclusions de la présidence du Conseil européen - Bruxelles

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Conseil de l’Union européenne, Bruxelles

Conclusion des 29 et 30 octobre 2009

Soulignant qu’une prompte clarification du cadre institutionnel est nécessaire pour assurer le bon fonctionnement de l’Union, le Conseil européen espère que le processus de ratification sera rapidement achevé, de façon à ce que le traité entre en vigueur d’ici la fin de l’année. Le Conseil européen a arrêté la position de l’UE en ce qui concerne la Conférence de Copenhague sur le changement climatique, qui se tiendra prochainement, ce qui permettra à l’UE de jouer un rôle constructif pendant la phase finale du processus de négociation, en particulier sur des questions clés telles que le financement, le transfert de technologies, l’adaptation, l’atténuation du changement climatique et la bonne gouvernance. Le Conseil européen a fait le point de la situation économique, financière et de l’emploi, en soulignant notamment la nécessité d’élaborer une stratégie coordonnée de sortie des politiques de relance généralisées une fois la reprise assurée. Il a adopté la stratégie de l’UE pour la région de la mer Baltique, qui constitue un cadre intégré devant permettre de relever des défis communs. Il a fait le point des progrès accomplis dans la mise en œuvre des mesures concernant l’immigration clandestine et a demandé que de nouveaux efforts soient consentis, notamment en ce qui concerne le renforcement de l’agence Frontex. Enfin, le Conseil a examiné la situation en Afghanistan et au Pakistan.

La stratégie de l’UE pour la région de la mer Baltique

Le Conseil européen adopte la stratégie de l’UE pour la région de la mer Baltique et approuve les conclusions du Conseil en la matière (doc. 13744/09). Cette stratégie constitue un cadre intégré devant permettre de relever des défis communs, parmi lesquels les problèmes environnementaux urgents liés à la mer Baltique, et de contribuer à la réussite économique de

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la région et à sa cohésion économique, sociale et territoriale, ainsi qu’à la compétitivité de l’UE.

Le Conseil européen engage toutes les parties concernées à agir promptement et à veiller à ce que la stratégie, qui pourrait constituer un exemple de macro-stratégie régionale, soit pleinement mise en œuvre. Il invite la Commission à présenter au Conseil un rapport sur l’état d’avancement des travaux d’ici juin 2011.

L’immigration et l’asile

Le Conseil européen note avec satisfaction les progrès qui ont été réalisés dans la mise en œuvre des mesures qu’il avait indiquées lors de sa réunion de juin 2009 en ce qui concerne l’immigration clandestine en Méditerranée. Une réponse européenne déterminée, fondée sur la fermeté, la solidarité et la responsabilité partagée, reste essentielle, conformément au Pacte européen sur l’immigration et l’asile et à l’approche globale sur la question des migrations.

Le Conseil européen préconise que l’on continue de mener une action concertée pour lutter contre ce problème selon une approche globale et pour éviter de nouvelles tragédies en mer.

Le Conseil européen prend acte du lancement du projet pilote concernant la répartition, sur une base volontaire, des bénéficiaires d’une protection internationale présents à Malte, et il invite instamment les autres États membres à participer au projet. Il note aussi que les travaux en vue de la création du Bureau européen d’appui en matière d’asile ont bien progressé et demande qu’un accord soit dégagé à ce sujet avant la fin 2009. En outre, il prend acte des travaux en cours relatifs au renforcement de l’agence Frontex. Il se félicite qu’une intensification du dialogue avec la Turquie sur les questions de migration ait été engagée et demande que des mesures concrètes soient prises rapidement, notamment en ce qui concerne la réadmission et les contrôles aux frontières, conformément à ses conclusions de juin 2009.

Toute action visant une gestion viable à moyen et à long terme des migrations doit s’appuyer sur une politique de l’UE vaste et globale, inscrite dans une perspective d’avenir et conforme au droit international.

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Conclusion des 29 et 30 octobre 2009 177

C’est ce qui ressortira du programme pluriannuel de Stockholm, qui doit être adopté en décembre.

Dans ce contexte, le Conseil européen :

– plaide en faveur d’efforts supplémentaires visant à adopter, mettre en œuvrai et évaluer des instruments et à poursuivre la réalisation du régime d’asile européen commun, le problème des mouvements secondaires internes devant être abordé, de même que celui de la solidarité concrète et effective dont doivent bénéficier les États membres qui subissent des pressions particulières ;

– demande un renforcement des capacités opérationnelles de l’agence Frontex, dont le développement doit se poursuivre, et invite la Commission à présenter des propositions à cet effet au début de 2010 ; ce renforcement pourrait être basé sur les éléments suivants :

i) l’élaboration de procédures opérationnelles communes claires qui énoncent des règles claires concernant la participation à des opérations conjointes en mer, tenant dûment compte de la nécessité d’assurer la protection des personnes démunies qui se déplacent en flux mixtes, conformément au droit international ;

ii) une coopération opérationnelle accrue entre l’agence Frontex et les pays d’origine et de transit ;

iii) l’examen de la possibilité d’affréter régulièrement des vols de retour communs financés par l’agence Frontex ;

– invite la Commission et les États membres à accélérer la mise en œuvre de l’approche globale sur la question des migrations, en mettant l’accent sur son application stratégique et effective, y compris les programmes de protection régionaux. Dans ce contexte, il sera essentiel de veiller à mettre efficacement à profit l’ensemble des instruments financiers existants qui sont pertinents en la matière ;

– invite la présidence et la Commission à intensifier le dialogue avec la Libye sur la gestion des migrations et sur les mesures à prendre par rapport à l’immigration clandestine, y compris la coopération en mer, les contrôles aux frontières et la réadmission ;

– insiste sur l’importance que revêtent les accords de réadmission comme moyen de lutter contre l’immigration clandestine.

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Les relations extérieures

Le Conseil européen approuve les conclusions de la session du Conseil du 27 octobre sur l’Afghanistan et le Pakistan et salue l’adoption du plan pour une action renforcée de l’UE dans la région. Ce plan d’action renforcera la capacité civile de l’appareil d’État de ces deux pays.

L’Union européenne est désormais mieux à même de répondre aux problèmes auxquels la région est confrontée.

L’UE salue le travail accompli par les institutions électorales en Afghanistan, qui a permis de sauvegarder la crédibilité du processus électoral. Le Conseil européen souligne que le deuxième tour de l’élection présidentielle doit être crédible, ouvert à tous, sûr et refléter la volonté du peuple afghan. Le Conseil européen rappelle sa confiance dans la capacité des Nations unies à diriger la coordination des efforts consentis par la communauté internationale

Le Conseil européen est lui aussi préoccupé par la détérioration de la sécurité au Pakistan, et il apporte son soutien au gouvernement du Pakistan dans les efforts qu’il déploie pour reprendre le contrôle de toutes les régions du pays. L’Union européenne est prête à venir en aide à la population touchée.

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Conseil de l’Union européenne, Bruxelles

Conclusion du 10 juillet 2009

Face à la récession la plus profonde qu’ait connue le monde depuis la deuxième guerre mondiale, le Conseil européen a de nouveau montré que l’Union était déterminée à dépasser les difficultés actuelles et à se tourner vers l’avenir en prenant une série de décisions afin de résoudre rapidement et efficacement une vaste gamme de problèmes.

Convaincu que le traité de Lisbonne offrira un cadre plus efficace à l’action de l’Union dans un grand nombre de domaines, les chefs d’État ou de gouvernement se sont mis d’accord sur des garanties juridiques destinées à répondre aux préoccupations du peuple irlandais, préparant ainsi la voie d’une nouvelle consultation de celui-ci au sujet de ce traité. Les chefs d’État ou de gouvernement ont également entrepris les premières démarches du processus de désignation du président de la prochaine Commission.

La crise économique continue de revêtir une importance capitale pour les citoyens. Les mesures d’envergure prises jusqu’ici pour soutenir le secteur bancaire et, plus généralement, l’économie réelle ont permis d’éviter un effondrement financier et de laisser entrevoir la perspective d’une croissance réelle. Le Conseil européen a pris un certain nombre de décisions en vue d’aboutir à la création d’une nouvelle architecture de surveillance financière dont le but sera deprotégerle système financier européen contre les risques futurs et de faire en sorte que les erreurs du passé ne puissent jamais se reproduire. Il convient de s’attaquer avec une priorité absolue aux effets de la crise sur l’emploi en aidant les personnes à conserver leur emploi ou à en trouver un nouveau.

Lutter avec succès contre le changement climatique permettra également d’évoluer vers une économie durable et de créer de nouveaux emplois. Le

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Conseil européen a réalisé de nouveaux progrès dans la mise au point de la position de l’UE en vue de la Conférence de Copenhague sur le changement climatique qui se tiendra à la fin de l’année. Il a marqué clairement son intention de conserver un rôle moteur dans ce processus et a appelé le reste de la communauté internationale à jouer pleinement son rôle afin de parvenir à un résultat fructueux et ambitieux à Copenhague.

Les dirigeants européens ont exprimé la vive préoccupation que leur inspire la situation dramatique dans la région méditerranéenne et se sont mis d’accord sur un certain nombre de mesures visant à aider les États membres qui sont en première ligne à faire face à l’afflux d’immigrants clandestins et à prévenir de nouvelles tragédies humaines.

Les dirigeants européens continuent à s’intéresser tout particulièrement au rôle de l’UE dans le monde. Ils ont insisté sur l’importance stratégique des relations transatlantiques et salué le lancement du Partenariat oriental. Les dirigeants européens ont également souligné que le processus de paix au Proche-Orient demeure une priorité essentielle de l’UE en 2009. Le Conseil européen a confirmé une nouvelle fois qu’il attache une grande importance à la stabilité et à la sécurité en Afghanistan, au Pakistan, ainsi que dans l’ensemble de la région. Il a adopté des déclarations sur l’Iran et la République populaire démocratique de Corée. Dans une déclaration concernant la Birmanie / le Myanmar, les dirigeants européens ont demandé la libération immédiate et inconditionnelle de Mme Aung San Suu Kyi.

Mise en place d’un nouvel ordre financier

Le rapport du Conseil sur l’efficacité des mécanismes de soutien financier (doc. 10772/09 + ADD souligne à quel point les opérations de recapitalisation et les systèmes de garantie publics ont joué un rôle primordial pour prévenir l’effondrement du secteur financier et ont contribué à protéger les intérêts des déposants. En favorisant l’octroi de crédits à l’économie réelle, ces mesures ont également permis de préserver des emplois.

Si cette stratégie coordonnée à l’échelle de l’UE a permis de stabiliser les marchés financiers, le contexte dans lequel les établissements financiers mènent leurs activités reste difficile et le resserrement des flux de crédit persiste. Il s’ensuit que les gouvernements doivent rester vigilants et être

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prêts à prendre les mesures supplémentaires qui pourraient être nécessaires en vue de recapitaliser ou d’assainir les bilans. Les tests de résistance en cours dans toute l’UE aideront à mieux évaluer la résilience du système financier de l’UE, contribueront à améliorer la confiance des marchés financiers et faciliteront la coordination des actions engagées au niveau de l’UE. Toutes les mesures doivent être compatibles avec les principes du marché unique, assurer des conditions équitables et tenir compte d’une stratégie de sortie crédible.

La Commission est invitée à continuer de surveiller les mesures prises pour soutenir le secteur financier et à formuler de nouvelles orientations sur le retour à la viabilité du secteur bancaire.

La crise financière a fait apparaître clairement la nécessité d’améliorer la réglementation et la surveillance des établissements financiers, tant en Europe qu’à l’échelle mondiale. Remédier aux défaillances qui ont été mises au jour par la crise actuelle concourra à en prévenir de nouvelles. Cela contribuera également à rétablir la confiance dans le système financier, notamment en renforçant la protection des déposants et des consommateurs, et facilitera le redressement de l’économie européenne.

Des progrès considérables ont d’ores et déjà été accomplis en ce qui concerne le renforcement du cadre réglementaire de l’UE, en particulier un accord a été dégagé concernant la directive sur l’adéquation des fonds propres, le règlement relatif aux agences de notation de crédit et la directive «Solvabilité II». Le Conseil européen appelle à réaliser de nouveaux progrès en ce qui concerne la réglementation des marchés financiers, notamment la réglementation concernant les fonds d’investissement alternatifs, le rôle et les responsabilités des dépositaires, ainsi que la transparence et la stabilité des marchés des dérivés. Le Conseil européen invite également la Commission et les États membres à accélérer leurs travaux et à réaliser des progrès rapides en vue de contrer les effets procycliques des normes réglementaires, en ce qui concerne par exemple les exigences en matière de fonds propres et les actifs dépréciés. Il invite également les États membres à prendre sans tarder des mesures en ce qui concerne les salaires des dirigeants et les rémunérations dans le secteur financier, en tenant compte des recommandations formulées par la Commission.

La communication présentée par la Commission le 27 mai 2009 et les conclusions du Conseil du 9 juin 2009 indiquent la voie à suivre

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en vue de la mise en place d’un nouveau cadre pour la surveillance macroprudentielle et microprudentielle. Le Conseil européen est favorable à la création d’un comité européen du risque systémique, qui sera chargé de surveiller et d’analyser les risques potentiels pour la stabilité financière et, le cas échéant, émettra des alertes sur les risques, formulera des recommandations quant aux mesures à prendre et en surveillera la mise en œuvre. Les membres du conseil général de la BCE éliront le président du comité européen du risque systémique.

Le Conseil européen recommande également qu’un système européen de surveillance financière constitué de trois nouvelles autorités européennes de surveillance soit mis en place afin d’améliorer la qualité et la cohérence de la surveillance au niveau national, de renforcer la surveillance des groupes transnationaux par la mise en place de collèges des autorités de surveillance et d’élaborer un «règlement uniforme» applicable à tous les établissements financiers exerçant des activités sur le marché unique. Eu égard aux charges éventuelles qui peuvent en découler pour les États membres, le Conseil européen souligne que les décisions adoptées par les autorités européennes de surveillance ne devraient empiéter en rien sur les compétences budgétaires des États membres. Pour autant que ces conditions soient réunies et en complément des conclusions du Conseil du 9 juin 2009, le Conseil européen estime que le système européen de surveillance financière devrait disposer de pouvoirs de décision contraignants et proportionnés lui permettant d’établir si les autorités de surveillance se conforment aux exigences fixées dans un règlement uniforme et dans la législation communautaire pertinente, et de trancher en cas de désaccord entre les autorités de surveillance de l’État d’origine et de l’État hôte, y compris au sein des collèges des autorités de surveillance. Les autorités européennes de surveillance devraient également disposer de pouvoirs de surveillance à l’égard des agences de notation de crédit. Le Conseil européen souligne en outre qu’il importe de veiller à ce que le nouveau cadre favorise des marchés financiers européens sains et compétitifs.

Le Conseil européen se félicite de l’intention de la Commission de présenter, au plus tard d’ici le début de l’automne 2009, des propositions législatives en vue de l’établissement du nouveau cadre de surveillance financière dans l’UE, en respectant parfaitement l’équilibre des compétences et la responsabilité financière et en tenant pleinement compte des conclusions du Conseil du 9 juin 2009. Ces propositions devront

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être adoptées sans tarder afin que la mise en place du nouveau cadre soit entièrement achevée dans le courant de 2010. Le Conseil européen fera le point des progrès réalisés lors de sa réunion d’octobre 2009 et, si nécessaire, fournira des orientations supplémentaires.

Il est également important de progresser encore dans la mise en place d’un cadre transfrontière global pour la prévention et la gestion des crises financières. Le Conseil européen invite la Commission à présenter des propositions concrètes sur la manière dont le système européen de surveillance financière pourrait, en cas de crise, jouer un rôle important de coordination des autorités de surveillance, dans le plein respect de la compétence des autorités nationales en matière de maintien de la stabilité financière et de gestion des crises pour ce qui est des conséquences budgétaires potentielles et en respectant pleinement les attributions des banques centrales, s’agissant notamment de la fourniture d’une aide d’urgence en cas de crise de liquidité.

L’Union européenne continuera à jouer un rôle de premier plan au niveau mondial, en particulier au sein du G20. Elle invite ses partenaires internationaux à mettre pleinement en œuvre les engagements pris à Washington et à Londres, notamment en ce qui concerne l’augmentation des ressources allouées aux institutions financières internationales et l’accélération de la réforme du cadre réglementaire et financier. Le Conseil européen invite le Conseil et la Commission à veiller à ce que soit élaborée minutieusement une position coordonnée de l’UE avant le sommet du G20 qui se tiendra les 24 et 25 septembre 2009.

Il engage également la présidence et la Commission à évoquer systématiquement la question de la réglementation et de la surveillance mondiales lors de leurs contacts avec leurs partenaires internationaux, y compris au plus haut niveau.

En ce qui concerne les ressources du FMI, les États membres se sont déjà déclarés disposés à apporter rapidement et à titre temporaire un soutien d’un montant total de 75 milliards d’euros. En principe, les États membres sont prêts à assumer leur part des nouveaux besoins de financement, au fur et à mesure que ceux-ci se présenteront à moyen terme, en fonction de leur poids économique, tel qu’il ressort de leur quote-part, dans le cadre des nouveaux accords d’emprunt, dans le contexte d’une répartition équitable de la charge au niveau mondial, en tenant compte du

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lien nécessaire entre contribution et représentation. Afin de garantir une reprise équitable et durable pour tous, l’UE réaffirme sa détermination à aider les pays en développement à réaliser les objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) et à honorer nos engagements respectifs en matière d’aide publique au développement (APD).

Immigration clandestine

Les événements survenus récemment à Chypre, en Grèce, en Italie et à Malte montrent qu’il est urgent d’intensifier les efforts pour prévenir et combattre efficacement l’immigration clandestine aux frontières maritimes méridionales de l’UE et éviter ainsi que des tragédies humaines ne se produisent à l’avenir. Une réponse européenne déterminée, fondée sur la fermeté, la solidarité et la responsabilité partagée, est essentielle, conformément au Pacte européen sur l’immigration et l’asile et à l’Approche globale sur la question des migrations. La mise en œuvre de ces instruments doit être accélérée, notamment en ce qui concerne la coopération avec les pays d’origine et de transit. Toutes les activités menées dans la région occidentale de la Méditerranée, ainsi qu’aux frontières est et sud-est, doivent se poursuivre.

Compte tenu de la situation actuelle d’urgence humanitaire, il est nécessaire de mettre en place et d’appliquer rapidement des mesures concrètes. Le Conseil européen appelle à la coordination de mesures volontaires concernant la répartition interne des bénéficiaires d’une protection internationale qui se trouvent dans les États membres exposés à des pressions particulières et disproportionnées ainsi que des personnes particulièrement vulnérables. Il se félicite de l’intention de la Commission de prendre des initiatives dans ce domaine, en commençant par un projet pilote concernant Malte. Il prie instamment le Conseil et le Parlement européen de parvenir à un accord permettant la création rapide du Bureau européen d’appui en matière d’asile. Le Conseil européen souligne également qu’il est nécessaire de renforcer les opérations de contrôle aux frontières coordonnées par FRONTEX, d’établir des règles d’engagement claires pour les patrouilles communes et des dispositions précises pour le débarquement des personnes sauvées, et de recourir davantage à des vols de retour communs. Dans ce contexte, il plaide en faveur d’une action résolue visant à lutter efficacement contre la criminalité organisée et les réseaux criminels se livrant à la traite d’êtres humains.

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Conclusion du 10 juillet 2009 185

Le Conseil européen souligne la nécessité de renforcer nettement la coopération avec les principaux pays d’origine et de transit. Il invite la Commission à étudier les possibilités de coopération concrète avec les pays tiers conformément aux mandats antérieurs adoptés par le Conseil. L’efficacité des accords de réadmission de l’UE doit être renforcée dans le cadre des politiques extérieures générales de l’UE. Il convient de s’employer en priorité à mener à bien les négociations en vue de la conclusion d’accords de réadmission avec les principaux pays d’origine et de transit, tels que la Libye et la Turquie; d’ici là, les accords bilatéraux existants devraient être mis en œuvre de manière appropriée.

Le Conseil européen invite le Conseil à tenir dûment compte de ce qui précède lors de l’élaboration du nouveau programme-cadre pluriannuel dans le domaine de la liberté, de la justice et de la sécurité. Le Conseil européen invite la Commission à présenter, lors de la prochaine réunion du Conseil européen, de nouvelles propositions reposant sur une réponse appropriée à ces problèmes.

Relations extérieures

Le Conseil européen a adopté des déclarations sur le Pakistan et l’Afghanistan (Annexe 5), sur la Birmanie/le Myanmar (annexe 6), sur la République populaire démocratique de Corée (annexe 7) et sur l’Iran (annexe 8).

Le Conseil européen se félicite du lancement du partenariat oriental. Il rappelle que la poursuite de la mise en œuvre de cette initiative dans ses dimensions tant bilatérales que multilatérales est importante et mutuellement bénéfique pour l’UE et les partenaires d’Europe orientale, et qu’elle contribue à apporter la prospérité et la stabilité aux citoyens de tous les pays concernés. Il appelle la Commission et les prochaines présidences à poursuivre leurs travaux, conformément à la déclaration commune du sommet qui s’est tenu à Prague le 7 mai 2009.

Le processus de paix au Proche-Orient demeure une priorité absolue pour l’UE en 2009.

Le Conseil européen entérine les conclusions adoptées lors de la session du Conseil du 15 juin.

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Le statut avancé à l’épreuve de l’Union pour la Méditérrannée186

Le Conseil européen réaffirme l’importance stratégique des relations transatlantiques, comme cela a été souligné lors du sommet informel UE Etats-Unis qui s’est tenu le 5 avril 2009 à Prague. Le Conseil européen se félicite de la déclaration conjointe du 15 juin 2009 concernant la fermeture du centre de détention de Guantanamo, qui marque un nouveau départ en matière de coopération dans le domaine de la lutte contre le terrorisme, fondée sur les valeurs communes, le droit international et le respect des droits de l’homme et de l’État de droit. De plus, le Conseil européen salue la proposition des États-Unis de renforcer la coopération avec l’UE sur les questions énergétiques. Il se réjouit en outre à la perspective d’un approfondissement de la coopération avec les États-Unis en ce qui concerne le changement climatique, les questions régionales, les affaires économiques et le développement.

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Conseil de l’Union européenne, Bruxelles

Conclusiondes 19 et 20 mars 2009

Travailler ensemble au niveau mondial

Une crise d’ampleur mondiale appelle des réponses au niveau mondial. Il faut agir de manière coordonnée et au bon moment si l’on veut remettre l’économie mondiale sur la voie de la relance. Conformément aux conclusions du sommet de Berlin et de la réunion ministérielle du G20, l’UE assume sa part de responsabilité pour soutenir la demande et prendra toutes les initiatives nécessaires. Nos efforts doivent trouver un écho approprié au niveau international.

L’Union européenne jouera un rôle de premier plan au niveau mondial pour ce qui est de favoriser un retour rapide à une croissance économique durable, de renforcer notre capacité à gérer les crises, de faire progresser la réforme des marchés financiers et de soutenir les pays en développement afin d’éviter de compromettre les progrès réalisés ces dernières années, ce qui nuirait à la stabilité économique et politique de ces pays. Le sommet du G20, qui se tiendra à Londres, a un rôle essentiel à jouer dans la réorganisation du système financier mondial et le rétablissement de la confiance des acteurs économiques à travers le monde. Dès lors, le Conseil européen adopte d’un commun accord le texte figurant à l’annexe 1 et invite le Conseil et la Commission à donner au sommet du G20 la suite voulue.

Dans ce domaine, l’Union européenne s’efforcera de promouvoir des mécanismes consultatifs multilatéraux auxquels des groupes régionaux pourraient participer.

Politique européenne de voisinage

Partenariat orientalPromouvoir la stabilité, la bonne gouvernance et le développement

économique à ses frontières orientales revêt une importance stratégique pour l’Union européenne. Dans le prolongement de la communication de

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Le statut avancé à l’épreuve de l’Union pour la Méditérrannée188

la Commission du 3 décembre 2008, le Conseil européen se félicite de l’établissement d’un Partenariat oriental ambitieux et adopte la déclaration figurant à l’annexe des présentes conclusions. Il demande que l’ensemble des dispositions nécessaires soient prises en vue de préparer le sommet inaugural du Partenariat oriental qui se tiendra avec les pays partenaires le 7 mai 2009.

Le Partenariat oriental a pour objectif de promouvoir la stabilité et la prospérité parmi les partenaires orientaux de l’UE concernés par la politique européenne de voisinage. Le Conseil européen affirme, selon les termes figurant dans la déclaration, sa volonté de promouvoir un engagement bilatéral renforcé et un nouveau cadre multilatéral associant l’UE, l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Biélorussie, la Géorgie, la République de Moldavie et l’Ukraine, en vue d’accélérer les réformes et le rapprochement des législations et de poursuivre l’intégration économique.

Le Conseil européen invite en outre la Commission ainsi que les présidences actuelle et future à faire progresser rapidement la mise en œuvre pratique du Partenariat, en liaison avec les partenaires, et demande à la Commission de présenter le moment venu un rapport sur la première année de mise en œuvre du Partenariat oriental.

Union pour la Méditerranée

Le Conseil européen réaffirme sa volonté de renforcer son partenariat avec ses partenaires de la rive sud du bassin méditerranéen. Il souhaite que la mise en œuvre des projets définis lors du Sommet de Paris soit relancée. À cet égard, il importe d’accélérer les travaux relatifs à la mise en place du secrétariat permanent de l’Union pour la Méditerranée à Barcelone.

Aider les pays en développement à réagir aux effets de la crise

Œuvrer en faveur du développement mondial, qui fait partie de la solution à la crise mondiale et contribue à la paix et à la stabilité.

Respecter les engagements visant à accroître l’aide au développement. Réaffirmer la volonté d’atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement. Tenir les promesses qui ont été faites en matière d’aide pour le commerce et accorder un accès aux marchés en franchise de droits et sans contingent aux pays les moins développés.

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Conclusion des 19 et 20 mars 2009 189

Mettre pleinement à profit les autres sources publiques de financement, telles que les crédits à l’exportation et les garanties d’investissement, ainsi que le soutien axé sur le développement dans les domaines de la recherche et de la technologie, de la paix et de la sécurité, de la migration et du changement climatique. Renforcer l’efficacité et la coordination des instruments et des ressources.

Permettre aux banques multilatérales de développement de contribuer à pallier les effets de la crise dans les pays en développement, en particulier en ce qui concerne les populations les plus pauvres et les plus vulnérables.

Relations UE Etats-Unis

Le Conseil européen a été informé par la présidence de l’état d’avancement des préparatifs du sommet informel UE–États-Unis, qui se tiendra le 5 avril 2009 à Prague. Le Conseil européen réaffirme l’importance stratégique des relations transatlantiques. Il convient que les discussions devraient porter en particulier sur les questions économiques, la sécurité énergétique, le changement climatique et l’approche stratégique à adopter à l’égard de la région située entre la mer Méditerranée et la mer Caspienne.

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Le statut avancé à l’épreuve de l’Union pour la Méditérrannée190

Texte adopté d’un commun accord en vue du sommet du G20 qui se tiendra à Londres

Annexe à la conclusion de mars

Conduire l’action nécessaire sur le plan international pour favoriser un retour rapide à une croissance économique durable

Sur la base des résultats du sommet de Berlin et de la réunion ministérielle du G20, poursuivre la coordination, au niveau international, des mesures de relance budgétaire. Mettre rapidement en œuvre les programmes de relance budgétaire prévus. Se préparer à mettre fin aux mesures de relance macroéconomique sans créer de perturbations.

S’attacher en priorité à rétablir le fonctionnement des marchés du crédit et à en faire bénéficier l’économie, ce qui est essentiel pour garantir l’efficacité des mesures de relance budgétaire. Agir en temps utile et d’une manière coordonnée en veillant à ce que les règles du jeu restent les mêmes pour tous.

Veiller à ce que les mesures budgétaires soient compatibles avec des objectifs à plus long terme tels que la viabilité des finances publiques, le renforcement de la productivité et la nécessité de faire face aux problèmes que représentent le vieillissement de la population et le changement climatique.

Préserver l’ouverture des marchés et éviter toute forme de mesures protectionnistes (pas de nouvelles entraves aux investissements ni aux échanges commerciaux et pas de nouvelles restrictions à l’exportation). S’efforcer de parvenir rapidement à un accord sur les modalités du Programme de Doha pour le développement, en vue d’obtenir des résultats ambitieux et équilibrés.

Soutenir une initiative multilatérale relative aux crédits commerciaux, le tassement de ces crédits contribuant à aggraver la contraction du commerce mondial. Appuyer les actions visant à ce que l’ensemble des entreprises, et notamment les PME, aient accès, dans les pays développés comme dans les pays en développement, aux crédits commerciaux, rapidement et sans qu’il en résulte de distorsions.

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Conclusion des 19 et 20 mars 2009 191

Aider les pays en développement à réagir aux effets de la crise

Œuvrer en faveur du développement mondial, qui fait partie de la solution à la crise mondiale et contribue à la paix et à la stabilité.

Respecter les engagements visant à accroître l’aide au développement. Réaffirmer la volonté d’atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement. Tenir les promesses qui ont été faites en matière d’aide pour le commerce et accorder un accès aux marchés en franchise de droits et sans contingent aux pays les moins développés.

Mettre pleinement à profit les autres sources publiques de financement, telles que les crédits à l’exportation et les garanties d’investissement, ainsi que le soutien axé sur le développement dans les domaines de la recherche et de la technologie, de la paix et de la sécurité, de la migration et du changement climatique. Renforcer l’efficacité et la coordination des instruments et des ressources.

Permettre aux banques multilatérales de développement de contribuer à pallier les effets de la crise dans les pays en développement, en particulier en ce qui concerne les populations les plus pauvres et les plus vulnérables.

Renforcer notre capacité à gérer et à éviter les crises au niveau mondial

Charger le FMI de suivre et de faire progresser, en étroite coopération avec le Forum sur la stabilité financière (FSF), la mise en œuvre du plan d’action concernant la réglementation financière adopté lors du sommet du G20 à Washington en novembre 2008.

Améliorer les instruments de surveillance dont dispose le FMI afin de renforcer le rôle important qu’il joue dans la prévention des crises. Renforcer la coopération entre le FMI et le FSF afin de recenser les risques et les faiblesses systémiques provenant du secteur financier et de sa réglementation et veiller à ce que les membres prennent des mesures visant à y remédier.

Accroître de manière très substantielle les ressources du FMI afin que celui-ci puisse venir en aide à ses membres d’une manière rapide et souple s’ils connaissent des difficultés en matière de balance des paiements.

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Le statut avancé à l’épreuve de l’Union pour la Méditérrannée192

Le cadre régissant l’octroi des prêts accordés par le FMI doit être réorganisé et adapté afin de renforcer la capacité du Fonds à éviter les crises et à y réagir. Dans le contexte spécifique de la crise, les États membres de l’UE sont disposés à apporter, sur une base volontaire, rapidement et à titre temporaire, un soutien à la capacité de financement du FMI sous la forme d’un prêt d’un montant total de 75 milliards d’euros.

Appuyer la réforme de la gouvernance des institutions financières internationales (IFI). Mettre rapidement en œuvre la réforme des quotes-parts et de la représentation au FMI, qui a été adoptée en avril 2008. Réformer le FMI afin qu’il reflète mieux le poids économique relatif des acteurs de l’économie mondiale et revoir le processus de sélection des dirigeants des IFI en améliorant sa transparence et en le fondant davantage sur les mérites. Saluer le fait que le FSF comprenne désormais tous les membres du G20, l’Espagne et la Commission européenne, et appuyer le renforcement institutionnel du FSF.

Œuvrer à un consensus sur une charte pour une gouvernance économique durable, fondée sur les mécanismes du marché mais évitant les excès, et l’adopter, ce qui constituerait un premier pas vers un ensemble de normes en matière de gouvernance mondiale.

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Annexe III

Rapport annuel de la Haute Représentante de l’Union pour la PESC

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Politique étrangère et de sécurité commune (PESC)

Rapport annuel de la Haute Représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité au Parlement européen sur les principaux aspects et les choix fondamentaux de la PESC-2009

Introduction

L’Union européenne joue aujourd’hui un rôle majeur sur la scène internationale. Forte d’une population de près de 500 millions d’habitants, l’UE représente plus de 25 % du produit intérieur brut (PIB) mondial, fournit la moitié de l’ensemble de l’aide au développement et contribue pour un cinquième aux importations et exportations mondiales; elle est donc un acteur politique de premier plan, qui doit concilier ses intérêts en matière de sécurité au niveau régional mais aussi mondial avec les responsabilités qui en découlent. C’est un rôle que les Européens comme les non-Européens souhaitent lui voir jouer.

L’Union européenne s’est dotée d’une politique étrangère commune, par laquelle elle s’exprime d’une seule voix sur les grandes questions internationales. Elle joue un rôle essentiel dans le processus de paix au Proche-Orient, dans les relations diplomatiques avec l’Iran et pour renforcer la stabilité dans les Balkans occidentaux, y compris au Kosovo. Partout dans le monde, les soldats, les policiers et les juges qu’elle déploie aident à sauver des vies et à stabiliser les pays et régions qui sortent d’un conflit, du Kosovo à l’Afghanistan et des Territoires palestiniens au Tchad. Quand survient une catastrophe, l’UE apporte une aide d’urgence. Elle a désigné un Haut Représentant, M. Javier Solana, qui est le visage et la voix de l’UE à l’étranger. La stratégie de sécurité qu’elle a adoptée oriente son action face aux menaces auxquelles le monde est confronté et sert de base aux relations stratégiques qu’elle entretient avec les pays et régions partenaires clés, avec qui elle tient régulièrement des sommets. Aux quatre coins du monde, les représentants spéciaux de l’UE œuvrent à la réalisation des objectifs de l’UE en matière de politique étrangère.

L’Union européenne a noué des relations privilégiées avec ses voisins les plus proches dans les Balkans occidentaux et dans la région

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Le statut avancé à l’épreuve de l’Union pour la Méditérrannée196

méditerranéenne. Elle a tissé avec le reste du monde un vaste réseau de relations complexes dans les domaines de la coopération politique, des échanges et de l’aide au développement, et elle joue un rôle essentiel dans les accords internationaux sur le commerce, l’environnement et les droits de l’homme. Depuis janvier 2007, à la suite du dernier élargissement, qui a vu l’adhésion de 12 nouveaux pays et a mis fin aux divisions qu’a connues le continent au XXe siècle, l’Union compte 27 États membres.

La Politique étrangère et de sécurité commune (PESC)

Les bouleversements géopolitiques qui ont suivi la chute du communisme à la fin des années 80, la réunification de l’Allemagne, les conflits dans l’ex-Yougoslavie durant les années 90 et la menace que constitue le terrorisme international ont amené les dirigeants de l’UE à créer et à développer, dans le cadre du traité de Maastricht en 1993 et du traité d’Amsterdam en 1999, des instruments formels de diplomatie et d’intervention. Ces traités ont donné à l’Union les moyens de réagir face aux crises auxquelles elle s’est trouvée confrontée à ses portes et de projeter ses valeurs à travers le monde entier; ils ont remplacé la coopération politique européenne (lancée en 1970 puis officialisée en 1986), qui prévoyait simplement que les États membres se consultent en vue de coopérer sur les grandes questions de politique internationale.

La Politique étrangère et de sécurité commune (PESC) a été instituée par le traité de Maastricht, adopté en 1992 et entré en vigueur en 1993, et elle a été renforcée par le traité d’Amsterdam, adopté en 1997 et entré en vigueur en 1999. Avec la Politique européenne de sécurité et de défense (PESD), le traité d’Amsterdam a doté la PESC d’un volet opérationnel et susceptible de conduire ultérieurement à une structure de défense commune. La PESC a encore été renforcée dans le cadre du traité de Nice, adopté en 2001 et entré en vigueur en 2003.

Le traité sur l’Union européenne a fixé comme objectifs à la PESC la sauvegarde des valeurs communes, des intérêts fondamentaux, de l’indépendance et de l’intégrité de l’Union, le renforcement de la sécurité de l’Union, le maintien de la paix et le renforcement de la sécurité internationale, la promotion de la coopération internationale et le développement et le renforcement de la démocratie et de l’État de droit, ainsi que le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

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Politique étrangère et de sécurité commune (PESC) 197

Depuis le traité d’Amsterdam, le rôle du Conseil n’a cessé de prendre de l’importance. Ce traité a créé le poste de Haut Représentant pour la politique étrangère et de sécurité commune, destiné à être occupé par «une personnalité ayant une stature importante sur le plan politique» afin de conférer un poids diplomatique à la PESC et d’en assurer la continuité. Cette fonction est associée à celle de Secrétaire général du Conseil. Le Conseil européen de Cologne, en 1999, a nommé Secrétaire général/Haut Représentant M. Javier Solana, qui est le premier à occuper ce poste et dont le mandat a été reconduit en 2004 pour une nouvelle période de cinq ans.

Le Haut Représentant a pour rôle, selon le traité, d’assister la présidence dans la formulation des décisions de politique. Il agit aussi au nom du Conseil en conduisant le dialogue politique avec des tiers et il est le chef de l’Agence européenne de défense. Aux côtés de la présidence et du commissaire chargé des relations extérieures, M. Javier Solana représente l’UE dans le Quatuor, chargé du processus de paix au Proche-Orient. Il a reçu mandat de la communauté internationale pour la représenter dans les pourparlers menés avec l’Iran sur la question de son programme nucléaire. Il a incarné le rôle actif joué par l’UE dans un certain nombre de pays des Balkans occidentaux, y compris l’ancienne République yougoslave de Macédoine, où il a conduit les négociations relatives à l’accord d’Ohrid, ainsi qu’en Serbie et au Monténégro, entre lesquels il a facilité la conclusion de l’accord de Belgrade, et encore au Kosovo. Il a également joué un rôle actif auprès des pays d’Europe centrale et orientale, y compris l’Ukraine et la Moldavie.

Un certain nombre de représentants spéciaux de l’Union européenne, nommés par le Conseil sur recommandation du Haut Représentant, assistent celui-ci dans son action et sont chargés de développer et de contribuer à mettre en œuvre les objectifs de l’Union en matière de politique étrangère à travers le monde. Il y a actuellement 11 représentants spéciaux (RSUE). Le Haut Représentant a également nommé plusieurs représentants personnels chargés de questions spécifiques, telles que la non-prolifération des armes de destruction massive, les droits de l’homme et les affaires parlementaires.

Les représentants spéciaux de l’UE Le traité d’Amsterdam a créé un ensemble de structures de soutien au

travail du Haut Représentant. L’unité de planification de la politique et

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Le statut avancé à l’épreuve de l’Union pour la Méditérrannée198

d’alerte rapide, au sein du Secrétariat général du Conseil, est composée de diplomates nationaux et d’experts du Conseil et de la Commission. Elle suit l’évolution de la situation politique internationale, avertit le Haut Représentant et le Conseil des crises susceptibles de se produire et examine leurs conséquences éventuelles pour l’Union, ainsi que les lignes de conduite à envisager, permettant ainsi à l’Union d’agir avec plus de rapidité et d’efficacité.

Le traité de Nice a institué une structure permanente, le Comité politique et de sécurité (COPS), qui est composé de représentants des États membres ayant le rang d’ambassadeurs. Le COPS est au cœur du fonctionnement de la PESC. Il suit l’évolution de la situation internationale dans les domaines relevant de la PESC et de la PESD et contribue à la définition des politiques. Il se réunit au moins deux fois par semaine et exerce, sous la responsabilité du Conseil, le contrôle politique et la direction stratégique des opérations de gestion de crise.

Le Centre de situation conjoint de l’UE (SItCEN), créé en 2002, assure l’alerte précoce et une veille internationale et analyse le renseignement pour le Haut Représentant de l’UE et et son équipe, ainsi que pour les divers organes de décision de l’Union européenne dans le domaine de la PESC, de la PESD et de la lutte contre le terrorisme. Le SITCEN assure la surveillance et l’évaluation des événements internationaux 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Les informations et les analyses fournies par le SITCEN sont de nature civile et militaire et portent sur tous les aspects de la gestion de crises par l’UE.

Formulation et conduite de la politique étrangère

Le Conseil européen (composé des chefs d’État ou de gouvernement des 27 États membres et du président de la Commission) fixe les principes généraux et les orientations générales de la PESC, y compris pour les questions ayant des implications en matière de défense. Il se réunit en principe quatre fois par an.

La présidence du Conseil, assurée à tour de rôle pour une période de six mois par chacun des États membres, représente l’Union pour les matières qui relèvent de la PESC et exprime la position de l’Union dans les organisations internationales et au sein des conférences internationales. Elle est assistée par le Haut Représentant, qui contribue à la formulation, à

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Politique étrangère et de sécurité commune (PESC) 199

l’élaboration et à la mise en œuvre des décisions de politique européennes. La présidence, le Haut Représentant et le président de la Commission européenne tiennent des réunions au sommet avec les pays et régions partenaires de l’UE.

Le Conseil - réuni en formation «Affaires générales et relations extérieures» (CAGRE) composée des ministres des affaires étrangères des États membres - se réunit une fois par mois et examine les questions relevant des relations extérieures ainsi que les questions institutionnelles. Il définit et met en œuvre la politique étrangère et de sécurité commune de l’UE sur la base des orientations définies par le Conseil européen. La ligne politique est formulée sur la base du consensus et de la résolution collective des problèmes. Les positions officielles du Conseil sont diffusées sous la forme de «conclusions» ou de «déclarations» du Conseil. Des déclarations sont également faites par la présidence et par le Haut Représentant. Depuis la fin des années 90, les ministres de la défense de l’UE se réunissent régulièrement. Bien qu’il n’y ait pas de session du Conseil formellement consacrée à la défense en tant que telle, il se tient durant chaque présidence au moins une réunion informelle des ministres de la défense et ceux-ci participent à une session du Conseil «Relations extérieures» consacrée aux questions politico-militaires.

Les travaux du Conseil sont préparés par le Comité des représentants permanents (Coreper), pour ce qui concerne les travaux dans leur ensemble, et par le Comité politique et de sécurité (COPS), pour ce qui est des questions politiques et de sécurité. Les groupes de travail dans le domaine de la PESC, composés d’experts des États membres de l’UE et de la Commission, se réunissent sur une base géographique (Proche-Orient, Balkans occidentaux, par exemple) ou thématique (droits de l’homme, Nations unies, lutte contre le terrorisme, par exemple). Ils préparent les réunions du COPS et du Coreper. Ils procèdent à des analyses communes de la situation dans les pays tiers et de questions multilatérales et établissent des positions communes possibles. Ils élaborent des propositions de mesures de mise en œuvre de la PESC, telles que les déclarations de la présidence au nom de l’UE, en vue de leur approbation par le COPS puis par le Conseil. Ils formulent également à l’intention du COPS des recommandations en vue de futures initiatives dans le domaine de la PESC.

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Annexe IVRapport général sur l’activité de

l’Union européenne

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Les changements apportés au cadre institutionnel

Certains des changements apportés aux institutions en 2009 relevaient du fonctionnement normal de l’UE : tel était par exemple le cas de l’élection du Parlement européen et des préparatifs liés à la mis en place d’une nouvelle Commission. En revanche, la ratification du traité de Lisbonne et l’attribution des nouveaux mandats qu’il crée ont été le point d’orgue d’un processus particulier entamé alors que l’UE ne comptait encore que 15 États membres.

Un nouveau traité pour une Union plus efficace. Le traité de Lisbonne est entré en vigueur le 1er décembre 2009.

Avec le traité de Lisbonne, qu’est-ce qui change ?

Les citoyens peuvent mieux faire entendre leur voix et, pour la première fois, contribuer directement au processus législatif de l’Union européenne: une nouvelle « initiative citoyenne » leur permet en effet d’attirer l’attention des législateurs sur des préoccupations partagées par un grand nombre d’entre eux. Les parlements nationaux ont quant à eux la possibilité d’intervenir davantage dans le processus de prise de décision de l’UE, et de mieux orienter ses domaines d’action grâce au dispositif de consultation précoce au sujet des propositions législatives de l’UE. Le processus législatif de l’UE devient beaucoup plus transparent: en effet, le Conseil de ministres doit ouvrir ses réunions au public lorsqu’il adopte de nouveaux textes législatifs. Et les députes européens, qui sont les représentants directement élus des citoyens, ont davantage leur mot a dire sur les actes législatifs de l’UE et sur son budget, car de nouveaux domaines sont désormais soumis a la procédure de codécision, qui implique la participation du Parlement européen.

Dans le même temps, l’UE elle-même se voit dotée d’un nouveau statut juridique. Ses compétences sont plus étendues que jamais et ses processus de prise de décision ont été simplifies. Le Conseil adoptera ses décisions à la majorité qualifiée -et non plus à l’unanimité- dans de nouveaux domaines particulièrement importants comme la lutte contre le changement climatique, la sécurité énergétique et l’aide d’urgence, ce

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qui rendra l’action de l’UE plus rapide et plus efficace. A partir de 2014, les décisions du Conseil devront être approuvées par au moins 55 % des Etats membres (au moins 15 d’entre eux) représentant au moins 65 % de la population de l’UE.

Les institutions chargées de faire fonctionner l’UE sont modifiées et les procédures sont devenues plus démocratiques. Le Conseil européen élit un président du Conseil européen pour un mandat de deux ans et demi, afin de donner davantage de visibilité et de cohérence a l’action de l’UE. Le haut représentant pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, qui est aussi l’un des vice-présidents de la Commission, assurera la promotion de l’action de l’UE sur la scène internationale et défendra ses intérêts et ses valeurs a l’étranger ; il pourra s’appuyer sur un nouveau service européen pour l’action extérieure, compose de diplomates et de fonctionnaires. Le traite confirme également le pouvoir confie au Parlement européen d’élire le président de la Commission sur proposition du Conseil européen.

L’euro est confirmé comme la monnaie de l’UE

Le rôle international de l’UE est confirme tant pour sa contribution a la paix et a la sécurité que pour la promotion de ses valeurs que sont le développement durable, la solidarité et le respect mutuel entre les peuples, le commerce libre et équitable, l’éradication de la pauvreté, la défense des droits de l’homme et le respect du droit international.

Le rôle de l’UE ne se limite plus au maintien de la paix, a la prévention des conflits et au renforcement de la sécurité internationale, mais s’étend désormais aux opérations de désarmement, aux missions de conseil et d’assistance en matière militaire, et aux opérations de stabilisation a l’issue des conflits.

La capacité de l’UE à lutter contre la criminalité transfrontalière, l’immigration illégale, la traite des êtres humains et le Trafic d’armes et de drogues est accru, le Parlement européen et la Cour de justice voyant leurs rôles respectifs renforcés.

Les objectifs sociaux de l’UE sont renforces, puisque toutes les politiques et les mesures de l’UE doivent tenir compte de la promotion d’un niveau d’emploi élève, et que les services de base sont reconnus comme étant d’intérêt public.

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Les changements apportés au cadre institutionnel 205

La promotion du développement durable, la lutte contre le changement climatique, le développement des énergies durables et la garantie du bon fonctionnement du marche de l’énergie deviennent des priorités.

En ce qui concerne la législation de l’UE, force de loi est donnée aux droits et aux libertés énonces dans la charte des droits fondamentaux, tels que la protection des données a caractère personnel, le droit d’asile, l’égalité devant la loi et l’absence de discrimination, l’égalité entre les hommes et les femmes, les droits des enfants et des personnes âgées, la protection contre le licenciement abusif et l’accès a la sécurité sociale et a l’aide sociale. L’Union adhérera également à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

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Sommet de Copenhague« Ce qui s’est passé et ce qui ne s’est pas passé »

Les résultats de la conférence des Nations unies sur les changements climatiques qui s’est tenue en décembre dernier à Copenhague sont décevants. Après deux semaines d’intenses négociations, une trentaine de pays dont les États-Unis, la Chine, l’Inde et le Brésil ainsi que certains États membres de l’Union européenne et la Commission européenne sont parvenus, le dernier jour, à un accord limité. Cet accord contient un certain nombre d’éléments positifs; notamment, il confirme — au niveau mondial, pour la première fois — l’objectif de limitation à 2° C de la hausse des températures, et les engagements pris quant au montant de l’aide financière à accorder aux pays en développement pour faciliter leur adaptation au changement climatique sont conformes aux propositions de la Commission. Globalement toutefois, l’accord de Copenhague est bien loin de répondre au niveau d’ambition de l’UE. De surcroît, du fait de l’opposition d’une poignée de parties, la conférence s’est contentée de prendre note de l’accord sans l’entériner formellement. En conséquence, de nouveaux efforts devront être déployés pour parvenir à un accord global juridiquement contraignant lors de la prochaine conférence des Nations unies sur les changements climatiques qui se tiendra à Mexico en novembre 2010.

La préparation de Copenhague

En dépit des maigres résultats de Copenhague, le travail accompli, durant la conférence et au cours des mois qui l’ont précédés, pour rapprocher les textes de négociation constitue un bon point de départ pour parvenir un accord global juridiquement contraignant d’ici à la fin de l’année 2010. L’UE a joué un rôle décisif à cet égard.

Avec en point d’orgue la conférence de Copenhague, l’année 2009 est une année cruciale pour la lutte contre le changement climatique, mais c’est en fait le changement climatique qui a façonné cette Commission, et je suis convaincu que c’est cette même question qui définira les orientations

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de la prochaine Commission. Pourquoi cela ? Parce que la politique de l’environnement, en général, et la politique climatique, en particulier, sont des questions européennes par essence. Aucune frontière nationale n’arrête les émissions de carbone. Les décisions que nous prenons — ou que nous ne prenons pas — au sein de l’Union ont une incidence directe sur les forêts pluviales du Brésil et de Bornéo, ainsi que sur l’épaisseur de la calotte glaciaire au Groenland, a déclaré Jose Manuel Barrios à l’occasion de la conférence de la Semaine verte de la Commission, à Bruxelles, en juin dernier.

Tout au long de la période qui a précédé la conférence de Copenhague, l’Union européenne a adressé des messages vigoureux et clairs aux autres pays et a ainsi fait preuve de l’autorité politique nécessaire pour réussir à contenir le réchauffement de la planète en dessous de 2°C. Afin d’encourager les autres grands émetteurs à prendre des mesures énergiques et ce faisant augmenter les chances de parvenir a un accord global suffisamment ambitieux, l’UE s’est engagée à porter ses réductions d’émissions à 30 % à condition que les autres pays industrialisés s’engagent collectivement à obtenir des réductions comparables et que les pays en développement qui connaissent un développement économique rapide contribuent à l’accord global dans la limite de leurs possibilités.

L’Union européenne a arrêté sa position pour les négociations internationales sur le climat dans le cadre de réunions des ministres de l’Environnement et des Finances ainsi que du Conseil européen, et plus particulièrement à l’issue d’une réunion ministérielle informelle tenue à Are en juillet, du Conseil Environnement d’octobre au Luxembourg et du Conseil européen d’octobre. En octobre, le Conseil Environnement a en effet donné un coup d’accélérateur en approuvant un cadre de négociation pour l’UE. L’Europe a là encore affirmé son rôle de chef de file dans la lutte contre le changement climatique en se déclarant favorable à des réductions à long terme des émissions de gaz a effet de serre allant encore plus loin que les 80 % dont faisait état le communiqué adopté en juillet au sommet du G8 à L’Aquila, en Italie. Elle a également préconisé des objectifs de réduction des émissions pour les transports aériens et maritimes internationaux, auxquels le protocole de Kyoto ne s’applique pas mais qui constituent une source d’émissions qui croit rapidement. L’UE a fait une dernière fois le point sur ses positions et stratégies avant la conférence de Copenhague lors d’une session extraordinaire du Conseil

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Environnement tenue le 23 novembre à Bruxelles, au cours de laquelle Yvo de Boer, secrétaire exécutif de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, a présenté l’état d’avancement des négociations et les propositions des autres parties.

Les grandes lignes de la position de l’UE sont les suivantes :

Les mesures prises pour réduire les émissions globales doivent avoir pour objectif de maintenir le réchauffement de la planète sous la barre des 2 °C. Cela implique que les émissions globales culminent d’ici à 2020 au plus tard, qu’elles soient réduites d’au moins 50 % par rapport à leur niveau de 1990 d’ici à 2050 et qu’elles continuent de décroître par la suite ; à long terme, l’UE et les autres pays développés devront réduire leurs émissions de 80 à 95 % par rapport aux niveaux de 1990 d’ici à 2050 ; les émissions des transports aériens et maritimes internationaux devront être réduites de 10 et 20 % respectivement par rapport aux niveaux de 2005 d’ici à 2020, dans le cadre d’accords internationaux ; précisions sur les exigences de l’UE : les pays industrialisés devront réduire leurs émissions de 25 à 40 % d’ici à 2020, et les pays en développement devront réduire les leurs de 15 à 30 %, par rapport aux niveaux qui auraient été atteints en l’absence de toute mesure ; l’objectif d’une hausse maximale des températures de 2°C reste le référentiel pour l’évaluation des réductions des émissions des autres pays ; explicitation de la position de l’UE en ce qui concerne la manière de lutter contre la déforestation et de mener une politique de gestion forestière durable, ainsi que sur les contributions des secteurs de l’agriculture et de la foresterie à la réalisation des objectifs en matière de climat : il faut agir rapidement pour réduire la déforestation de moitié d’ici à 2020 et pour y mettre un terme d’ici à 2030 ; les coûts supplémentaires que les pays en développement devraient supporter, dans le cadre d’un accord mondial ambitieux, pour atténuer le changement climatique et s’y adapter sont estimés à 100 milliards d’euros par an d’ici à 2020. Une partie de cette somme, de l’ordre de 22 à 50 milliards d’euros, devra provenir d’un financement public international auquel l’UE est prête à contribuer pour une part honorable. Pour la période 2010-2012, un financement a mise en œuvre rapide de l’ordre de 5 à 7 milliards d’euros par an à l’échelle mondiale est nécessaire pour aider les pays en développement à renforcer leurs capacités de lutte contre le changement climatique ; des règles comptables doivent être établies pour les émissions liées à la foresterie et à l’utilisation des terres ; développement du mécanisme

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sectoriel d’échange des droits d’émissions et réforme du mécanisme de développement propre ; précisions concernant la position de l’UE sur la gestion des excédents de quotas d’émission pour la période 2008-2012, qui peuvent aller à l’encontre des ambitions environnementales de l’UE ; calendrier serré et orientations précises pour la mise en place du cadre réglementaire juridiquement contraignant.

Le Parlement européen s’est résolument associé aux efforts mis en œuvre pour parvenir à un accord ambitieux et juridiquement contraignant lors de la conférence de Copenhague. En octobre, sa commission de l’environnement a appelé les chefs d’Etat ou de gouvernement à faire figurer la question du changement climatique au premier rang des priorités et à préserver le rôle de chef de file de l’UE lors des négociations de Copenhague. Elle a précisé qu’un accord international devrait garantir que les pays développés réduisent leurs émissions collectivement de manière significative (dans une proportion correspondant au haut de la fourchette comprise entre 25 et 40 %, avec un objectif de réduction à long terme d’au moins 80 % par rapport à 1990 d’ici à 2050) et que les pays en développement, considérés globalement, limitent la croissance de leurs émissions de sorte que celles-ci se situent entre 15 et 39 % en deçà du niveau qui serait atteint dans un scénario de statu quo. Une résolution adoptée lors de la session plénière de novembre a entériné ces recommandations et enjoint aux dirigeants de l’UE de prendre des initiatives politiques pour que le sommet soit un succès. Forte de son propre train de mesures sur le climat et l’énergie, l’UE s’est affirmée en faisant preuve d’initiative à l’approche des négociations. En mai, la Commission a proposé que l’UE soumette une modification du protocole de Kyoto. L’idée a été rapidement approuvée par le Conseil, et, le 10 juin, la présidence tchèque et la Commission européenne, au nom des Etats membres de l’UE et de l’Union européenne, soumettaient conjointement la proposition de modification au secrétariat des Nations unies responsable de la conférence de Copenhague.

La proposition concernait le traitement à réserver au changement d’affectation des terres, les améliorations à apporter aux mécanismes de la marche du carbone et les approches possibles pour cibler les émissions sectorielles. L’une des principales contributions de l’UE aux négociations de Copenhague a été son insistance afin d’obtenir un accord sur le financement de l’aide à apporter aux pays en développement en vue de lutter contre le

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changement climatique, question cruciale pour l’obtention d’un accord à Copenhague. En septembre, la Commission à présenté une communication visant à augmenter le financement international destiné à aider les pays en développement à lutter contre le changement climatique. Elle y expliquait que, d’ici à 2020, les pays en développement devraient probablement supporter des coûts annuels d’environ 100 milliards d’euros pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre et s’adapter aux conséquences du changement climatique. La majeure partie du financement nécessaire proviendra de sources nationales et d’une marche du carbone international élargi, mais un financement public international de quelque 22 à 50 milliards d’euros devrait également se révéler nécessaire. La Commission a proposé que les pays industrialisés et les pays en développement les plus avancés sur le plan économique apportent ce financement public en fonction de leur part de responsabilité dans les émissions et de leur capacité contributive. Dans ces conditions, la contribution de l’UE pourrait être comprise entre 2 et 15 milliards d’euros par an d’ici à 2020. Parallèlement, les représentants des institutions européennes se sont tournés vers les autres partenaires. La Commission et les présidences tchèque et suédoise ont consacré beaucoup de temps et d’énergie aux dialogues bilatéraux sur le changement climatique avec leurs grands partenaires comme le Canada, la Chine, le Japon, la Corée du Sud, la Russie, les Etats-Unis, l’Inde, le Brésil et l’Afrique du Sud. Une délégation de la commission de l’environnement du Parlement européen s’est rendue à Washington à la fin d’octobre pour y rencontrer des membres du Congrès américain et s’entretenir avec eux de la conférence de Copenhague, et le Parlement européen a envoyé des représentants officiels à la conférence des Nations unies en décembre. L’année a été ponctuée de cinq réunions à haut niveau pour préparer la conférence de Copenhague, et l’UE a activement participé à chacune d’elles, exhortant sans relâche les pays développés à s’engager à réduire de façon significative leurs émissions de gaz à effet de serre. Lorsqu’à seulement quelques semaines de la conférence de Copenhague, les Etats-Unis et la Chine ont fait de nouvelles propositions, le Premier ministre suédois, Fredrik Reinfeldt, et le président de la Commission européenne, Jose Manuel Barroso, les ont accueillies par une déclaration conjointe : « Nous nous réjouissons d’apprendre — il y a tout juste 24 heures — que les Etats-Unis et la Chine ont indiqué chacun, à l’aide de chiffres concrets, ce qu’ils étaient disposés à faire en matière de réduction des émissions. Les Etats-Unis et la Chine sont des partenaires essentiels

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dans ces négociations. Nous ne pouvons pas nous permettre d’échouer à Copenhague… Nous continuerons d’exhorter les Etats-Unis, la Chine et tous nos autres partenaires dans ces négociations à aller jusqu’aux limites de ce qui est possible pour parvenir à un accord à Copenhague… » Le fait qu’un autre grand pays en développement, à l’instar du Brésil et de l’Indonésie, soit prêt à faire des propositions chiffrées concrètes est un signe encourageant. En plus de leurs engagements antérieurs, les dirigeants européens sont convenus, lors de leur sommet de décembre, d’allouer 2,4 milliards d’euros par an sous la forme d’un financement a mise en œuvre rapide entre 2010 et 2012 pour faciliter la mise en place de mesures d’adaptation au changement climatique dans les pays en développement. Ce niveau de financement dépasse les engagements initialement pris par les Etats membres au début de l’année.

Un accord limité

Néanmoins, le résultat est bien en deçà des attentes de l’UE. La présidence du Conseil et la Commission européenne n’ont pas ménagé leurs efforts pour faire avancer les négociations tout au long des deux semaines durant lesquelles s’est déroulée la conférence de Copenhague, en maintenant les engagements de l’UE et en enjoignant les parties dans les négociations de s’engager plus fermement. Pourtant, les résultats obtenus — sous la forme de l’accord non contraignant — ne sont pas à la hauteur des espérances de l’UE.

L’accord obtenu prévoit :

– le maintien de l’objectif d’une hausse maximale des températures inferieure à 2 °C ;

– l’engagement de dresser la liste des objectifs de réduction des émissions des pays développés et des mesures d’atténuation à prendre par les pays en développement d’ici à 2020 ;

– un financement a mise en œuvre rapide, de 20,685 milliards d’euros d’ici à 2012, de la part des pays industrialisés, pour aider les pays en développement à prendre des mesures immédiates en faveur de l’adaptation, de la réduction des émissions, de la recherche et du renforcement des capacités, y compris pour la prévention de la déforestation ;

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– un financement à long terme de 68,95 milliards d’euros par an d’ici à 2020, ainsi que des mécanismes pour soutenir le transfert de technologie et la foresterie. L’accord comporte en annexe une liste sur laquelle les pays, ou les groupes de pays, pourront indiquer leurs engagements en matière de réduction des émissions ou les mesures de lutte contre le changement climatique envisagées. Cependant, l’accord n’est pas juridiquement contraignant. Il n’est pas suffisamment ambitieux pour que l’UE ait été amenée à modifier son objectif de réduction des émissions en le portant à 30 % d’ici à 2020.

« Nous sommes venus ici, à Copenhague, pour sortir de l’impasse. Ou nous agissons, ou nous n’arriverons à rien. Or, nous voyons à présent certains pays faire des efforts et fixer des objectifs ; même des pays qui avaient annoncé qu’ils ne prendraient pas d’engagements ont avancé des chiffres », a indiqué le président du Conseil, Fredrik Reinfeldt.

Le président de la Commission européenne, Jose Manuel Barroso, a déclaré quant à lui : « Cet accord vaut mieux que pas d’accord du tout, mais il n’est clairement pas à la hauteur de l’objectif que nous nous étions fixés, et je ne cacherai pas ma déception ». Il a toutefois ajouté : « c’est la première étape d’un processus très important ».

Les prochaines étapes internationales ont été renvoyées aux conférences des Nations unies de Bonn et de Mexico en 2010. Les engagements pris par l’Union européenne durant l’année restent toutefois valables et ils seront honorés. Ils sont en effet contraignants pour tous les Etats membres de l’Union européenne.

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Une politique de bon voisinage

La politique européenne de voisinage, l’Union pour la Méditerranée et le partenariat oriental, qui permettent de nouer des relations spéciales sur la base de valeurs et d’objectifs partagés, ont continué d’apporter des bénéfices mutuels à l’UE et aux pays situés à ses frontières orientales et méridionales.

Politique européenne de voisinage

En avril, une étude de la Commission a confirmé un approfondissement des relations de l’UE avec les pays couverts par la politique européenne de voisinage, malgré la récession mondiale et les conflits au Caucase et au Moyen-Orient. Cette politique avait pour but de consolider le processus de modernisation et de reforme à travers des accords politiques et des liens économiques plus étroits pouvant rapprocher ces voisins du marché intérieur et accroitre la coopération dans des domaines sortant du cadre ordinaire des relations diplomatiques. Elle s’est révélée particulièrement efficace sur les questions économiques et réglementaires.

Partenariat et Union

La guerre de 2008 en Géorgie et le différend au sujet des fournitures de gaz entre la Russie et l’Ukraine au début de l’année 2009 ont mis en lumière la fragile stabilité des frontières orientales de l’UE et ont souligné combien la sécurité de l’UE dépend de la sécurité de ses voisins. L’importance des liens entre l’UE et nombre de ses voisins orientaux a été démontrée au cours de l’année par le lancement du partenariat oriental lors d’une cérémonie organisée à Prague en mai sous la présidence tchèque. Ce nouveau partenariat oriental vise à renforcer les relations générales de l’UE avec ses six voisins orientaux — Arménie, Azerbaïdjan, Belarus, Géorgie, Moldavie et Ukraine. Il envisage des accords qui pourraient déboucher sur des zones de libre-échange étendues, une association politique plus approfondie et une intégration progressive dans l’économie de l’UE. Il prévoit aussi de simplifier les formalités de voyage vers l’UE et

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encourage la démocratie et la bonne gouvernance, la sécurité énergétique, les reformes économiques et la protection de l’environnement. Le forum de la société civile du partenariat oriental a vu le jour en novembre 2009 à la suite d’une recommandation du Parlement selon laquelle la Commission et les gouvernements partenaires devraient consulter plus étroitement les pouvoirs locaux et la Société civile.

En février 2009, le Parlement européen avait déjà plaidé pour la création accélérée d’une zone de libre-échange entre l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Géorgie, la Moldavie et l’Ukraine, ainsi que pour une coopération renforcée avec la Turquie et la Russie. Le Parlement a également déclaré qu’il était favorable à une assemblée parlementaire (Euronext) associant le Parlement européen aux parlements des pays du partenariat oriental. En bordure méridionale, l’Union pour la Méditerranée a accompli des progrès supplémentaires en 2009, en axant ses efforts sur les contacts politiques et les projets d’assistance concrets, et ce malgré le contexte politique difficile.

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Présidence suédoise du Conseil de l’Union européenne 2009

I. Les questions d’intégration sous la Présidence suédoise de l’Union européenne

Sous la Présidence suédoise, un nouveau programme de travail, appelé programme de Stockholm, a été négocié dans les domaines de la liberté, de la sécurité et de la justice. L’une des nombreuses questions abordées dans le cadre de ce programme est la coopération européenne en matière de politique d’intégration, pour laquelle l’objectif de la Présidence est de renforcer l’échange de connaissances et d’expériences.

Dans le domaine des politiques d’intégration, la coopération de l’UE repose sur le principe de subsidiarité, ainsi que sur une vision commune selon laquelle une politique d’intégration efficace est nécessaire pour protéger les droits de l’individu et optimiser le potentiel des migrations. Les politiques nationales d’intégration pourraient être améliorées au moyen d’échanges actifs fondés sur les principes fondamentaux partagés de connaissance et de d’expérience au sein de l’Europe. La coopération de l’UE devrait épauler les Etats membres dans le développement de politiques ambitieuses, conformément aux conclusions du Conseil concernant l’intégration en novembre 2008.

Le programme de Stockholm couvre diverses questions en relation à la liberté, la sécurité et la justice, ainsi que l’intégration.

Dans le cadre des efforts déployés pour consolider le corpus de connaissances sur l’intégration et le développement urbain, la Présidence suédoise a organisé une directive visant à offrir aux femmes plus de facilités pour démarrer et gérer une activité économique ainsi qu’à améliorer la situation des conjointes collaboratrices. A la fin de l’année 2009, le Conseil a également discuté de la manière dont la dimension de l’égalité entre les femmes et les hommes peut être renforcée dans la suite de la coopération

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européenne en faveur de la croissance économique, d’une augmentation du taux d’emploi et d’un renforcement de la compétitivité.

Les 16 et 17 novembre s’est tenu le Sommet européen sur l’égalité auquel ont participé environ 300 personnes, dont des ministres, des représentants d’organismes officiels nationaux agissant pour l’égalité et d’organisations non gouvernementales européennes, ainsi que des partenaires sociaux. Le Sommet sur l’égalité – initié par la Commission de l’UE en juin 2005 et dont les précédentes éditions ont été organisées à Berlin et Paris – est un événement annuel qui se tenait pour la troisième fois.

Ce sommet visait, par un échange de savoirs et d’expériences, à renforcer et rendre plus performantes les activités engagées pour lutter contre toutes les formes de discriminations, ainsi qu’à promouvoir une égalité de droits et de chances pour tous au sein de l’Union. Cette rencontre avait pour thème principal la coopération au service de l’égalité et a également permis des discussions approfondies, notamment sur l’intégration des questions d’égalité, la discrimination multiple et les législations en la matière.

II. Conférence sur la future coopération européenne sur une politique en faveur de la jeunesse

Les 12 et 14 septembre 2009 s’est tenue à Stockholm une conférence sur la future coopération européenne sur une politique en faveur de la jeunesse. Pendant trois jours, 250 représentants de la jeunesse des Etats membres de l’UE et des pays candidats à l’adhésion ont discuté, avec les directeurs généraux de la jeunesse, des décisionnaires et des experts, des bases du futur cadre stratégique de la coopération de l’Union européenne en matière de politique de jeunesse pour la période 2010-2018.

Dans son allocution de clôture, le dernier jour de conférence, Mme Nyamko Sabuni, ministre suédoise des questions de jeunesse, a déclaré : « La politique en faveur de la jeunesse touche aux problèmes les plus préoccupants de notre époque : le chômage des jeunes et la nécessité d’améliorer les systèmes d’éducation et de santé. Cette conférence a prouvé que les jeunes, les organisations de jeunesse et les fonctionnaires peuvent travailler ensemble. Je suis convaincue que nous avons fait un pas supplémentaire vers l’instauration du nouveau cadre stratégique de coopération en faveur de la jeunesse. Nous devons nous assurer que le

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futur de l’Europe se trouve entre de bonnes mains. Nous sommes face à une mission d’une importance capitale, à laquelle nous ne pouvons faillir. »

Mme Sabuni a souligné que la crise économique risquait fort d’aggraver la situation pour les jeunes, à moins que quelque chose ne soit fait au niveau de l’UE. Les jeunes font partie des groupes de population les plus affectés en des temps difficiles. Avant même l’explosion de la crise, plus d’un tiers de l’ensemble des citoyens de l’UE entre 15 et 24 ans n’étaient ni sur le marché du travail ni dans l’éducation.

M. Tine Radinja, Président du Forum européen de la jeunesse, s’est dit satisfait d’une approche plus participative et plus inclusive de la politique de jeunesse :

« Nous œuvrons depuis longtemps et sans relâche pour la mise en place d’un dialogue structuré qui ne divise pas artificiellement les jeunes mais qui, au contraire, les rapproche des institutions et des gouvernements. Cette conférence est un bel exemple de la façon dont les choses doivent se passer si nous voulons continuer à aller de l’avant. »

M. Pierre Mairesse, directeur à la DG Education et Culture de la Commission européenne, a affirmé : « J’estime que nous sommes à deux doigts d’un accord sur ce que sera la politique européenne de la jeunesse au cours des prochaines années. J’ai le sentiment que nous sommes parvenus à un consensus sur toutes les grandes questions, mais également sur l’importance du travail de jeunesse en général. Par conséquent, je pense qu’un accord sur le cadre de la politique sera trouvé pendant la Présidence suédoise. »

Conférence sur le thème « L’intégration des nouveaux immigrants – pleins phares sur les incitations et le travail », les 14 et 16 décembre 2009. L’objectif principal en était de souligner l’importance de l’échange de connaissances et d’expériences sur l’intégration des nouveaux immigrants, en mettant l’accent sur l’importance d’incitations pour accélérer l’accès au marché du travail. La conférence s’adressait à tout un éventail d’acteurs : chercheurs, responsables politiques, praticiens, représentants des organisations non gouvernementales et employeurs. Quelque 200 personnes y ont participé.

La conférence a examiné l’intégration des nouveaux arrivants, sous divers angles : les différents chemins vers l’emploi, le rôle des employeurs, l’économie sociale et l’importance de l’éducation, de même que l’impact du logement sur l’intégration.

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Sélection bibliographique

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Pistes bibliographiques

I. Rapports, cahiers, statistiques et catalogues de la Méditerranée

1. Rapports• Rapport annuel de la FEMIP 2009Inscrite dans le cadre de la politique européenne de voisinage et de

l’Union pour la Méditerranée, la FEMIP favorise la modernisation et l’ouverture des économies des pays partenaires méditerranéens. La FEMIP regroupe l’ensemble des instruments d’intervention de la BEI en faveur du développement économique et de l’intégration des pays partenaires méditerranéens.

• Rapport annuel de la Banque mondiale 2009 (septembre 2009) Le Rapport annuel est préparé par les administrateurs de la Banque

internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD) et de l’Association internationale de développement (IDA), conformément aux règlements des deux institutions.

• Rapport de suivi mondial 2009 (avril 2009) La crise financière mondiale compromet la réalisation des objectifs de

développement pour le Millénaire (ODM) à l’horizon 2015 et crée une situation d’urgence en matière de développement, selon un rapport de la Banque mondiale et du FMI.

• Rapport annuel 2009 de la FEMDHLa Fondation euro-méditerranéenne de soutien aux défenseurs des

droits de l’Homme (FEMDH) qui a pour objectif de soutenir les défenseurs dans les pays du sud de la Méditerranée a publié son rapport annuel 2009. Le rapport met l’accent sur les actions entreprises par la FEMDH au cours de l’année 2009.

• Mediterra 2009 : repenser le développement rural en Méditerranée Changement climatique, gestion responsable des ressources hydriques,

dynamiques foncières, diversification économique, tels sont les défis pour la durabilité et la compétitivité des agricultures méditerranéennes. Mediterra 2009 fait ici le bilan des mises en œuvre agricoles et rurales de la Stratégie méditerranéenne de développement durable (SMDD) et apporte un regard neuf sur les politiques déployées en milieu rural.

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2. Cahiers de la MéditerranéeRevue d’études sur la Méditerranée sur une longue période (XVIe-XXIe

siècles) - au sens braudélien, et privilégiant les recherches pluridisciplinaires.

• Migration et religion en France en texte intégral, mise en ligne du vol. 78 (2009).

• Les Morisques. D’un bord à l’autre de la Méditerranée, Parution du n° 79 (2009).

• Migration et religion en France (tome 2), Parution du vol. 78 (2009).

3. Catalogue du Centre de documentation méditerranéen

• Indicators and framework for analysing the technical and economic performance of irrigation systems at farm level. Irrigation and Drainage. 2009/07, Le Grusse P., Mailhol J.-C., Bouaziz A., Zaïri A., Raki M., Chabaca M., Djebbara M., Ruelle P. (2009).

• Efficiences économiques comparées des systèmes de production dans différentes situations d'accès à la ressource en eau : application dans le périmètre irrigué du Gharb (Maroc). Harbouze R., Le Grusse P., Belabes K., Raki M., Bouaziz A., Ruelle P. (2009).

• Le SIG, un outil de gestion de l'eau dans un périmètre irrigué: cas du secteur S7 au Gharb, Maroc. Omari S., Bord J.-P., Bouaziz A., Le Grusse P., Poussin J.-C., Ruelle P. (2009).

4. Statistiques du Catalogue des publications et de la documentation (MEDSTAT)

Statistiques sociales

• La croissance de la population ralentit et l’espérance de vie augmente dans la région euro-méditerranéenne, 2000-2007 ; numéro 66/2009, date de sortie : 24/08/09, nombre de pages : 8, code produit :KS-SF-09-066

• L’observation des changements démographiques dans la région euro-méditerranéenne au cours de la période 2000-2007. La publication est disponible en anglais, en français et en arabe.

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Statistiques de l’énergie

L’Energie : un secteur-clé pour les pays partenaires méditerranéens, numéro 57/2009, date de sortie : 30/07/09, nombre de pages : 8, code produit : KS-SF-09-057.

Le secteur de l’énergie constitue un des axes fondamentaux du partenariat euro-méditerranéen. Le renforcement des infrastructures énergétiques méditerranéennes (projets d’interconnexion des réseaux électrique et gazier, projets de raffineries et d’oléoducs ; projets de production d’électricité et de gaz naturel), les échanges entre les PPM et l’UE et surtout l’ouverture du secteur énergétique dans les pays méditerranéens nécessitent un suivi que seules des statistiques de l’énergie répondant aux normes et standards internationaux sont en mesure d’assurer. La publication est disponible en anglais, en français et en arabe.

Guide sur la compilation de statistiques sur les migrations internationales dans la région euro-méditerranéenne (septembre 2009)Ce guide présente un résumé des concepts et des cadres de travail sous-

jacents à la migration internationale, notamment des stocks et des flux, ainsi que des différentes sources administratives et statistiques disponibles qui fournissent ou apportent des estimations relatives à la migration internationale. La publication est disponible en anglais et en français.

Forum final MEDSTAT II : diffuser les bonnes pratiques statistiques (juillet 2009)

La publication présente en détail le travail qui a été fait durant les derniers mois du programme MEDSTAT II pour améliorer la visibilité des données et des bonnes pratiques statistiques dans les pays partenaires méditerranéens (PPM) et revient sur les différentes étapes qui ont conduit à l’organisation d’événements et d’activités techniques au niveau de certains PPM.

Tendances socio-économiques dans la région euro-méditerranéenne, 2000-2007

Elle présente une analyse comparative de données souvent inédites relatives aux changements socioéconomiques observés entre les pays partenaires méditerranéens (PPM) et les 27 pays de l’Union européenne au cours de la période 2000-2007.

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Tendances socio-économiques dans la région euro-méditerranéenne, 2000-2007

Cette publication présente une analyse de l’évolution des équipements et des flux de transport dans les pays partenaires méditerranéens entre 2000 et 2007.

II. Articles

• Terres agricoles et eau en Méditerranée : la coopération contre la rareté (avec Sébastien Abis) Géopolitique-PUF, n°107, 2009, p.92-97

• Faim des villes, faim des campagnes, le retour du politique, IRIS, http://www.affaires-strategiques.info/spip.php ? article 2130, 20 octobre 2009.

• Islam, développement, démocratie : les limites de l’instrumentalisation religieuse, Futuribles, septembre 2009, p. 57-67

• Monde arabe : sortir de l’essentialisme islamique, revue New Medit, volume VIII n°2, 2009.

• Le Liban, un pays d’eau : pour combien de temps ? Un dossier de l’IRIS (institut de recherches internationales et stratégiques) dans le cadre des législatives de 2009 (http://www.affaires-strategiques.info/spip.php ?article1262). Mai 2009.

• Les enjeux agricoles et alimentaires en Méditerranée, in Questions internationales (La découverte), n° 36, mars 2009, p.78-80.

III. Ouvrages et chapitres d’ouvrages

• Maghreb face aux défis de l’ouverture en Méditerranée, Histoire et perspectives méditerranéennes. Développement, Tiers monde, Economie Maghreb, Monde Arabe, Moyen Orient et Méditerranée.

Editions l’Harmattan, Sous la direction de Lahsen Abdelmalki, Karima Bounemra Ben Soltane et Mustapha Sadni-Jallab.

• Discours et savoirs sur les langues dans l’aire de la Méditerranée.Edition l’Harmattan, Teddy Arnavielle et Christian Camps (Ed.) Langue

et parole

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Pistes bibliographiques 227

• Nouvelle Méditerranée, Conflits et coexistence pacifique. Il nuovo Mediterraneo conflitti e coesistenza pacifica. Bilingue français-italien.

Edition l’Harmattan, sous la direction de Dominique Bendo-Soupou Géopolitique, Relations internationales, Diplomatie Méditerranée.

• Emergence en Méditerranée, investissements internationaux et délocalisations

Edition l’Harmattan, Hakim Ben Hammouda, Nassim Oulmane, René Sandretto, Histoire et perspectives méditerranéennes.

• Europe pour la Méditerranée, de Barcelone à Barcelone (1995-2008)Edition l’Harmattan, Bichara Khader, actualité sociale et politique.

Géopolitique, Relations internationales, Diplomatie Maghreb, Monde arabe, Moyen-Orient Géopolitique.

• Chypre : un enjeu géopolitique actuelEdition l’Harmattan, Emel Akcali, Histoire et perspectives

méditerranéennes Géopolitique, Relations internationales, Diplomatie, Diplomatie Europe, Chypre Grèce Turquie.

• Influence juridique islamique au Maghreb : Algérie-Libye-Maroc-Mauritanie-Tunisie

Edition l’Harmattan, Stéphane Papi Préface de Robert Charvin, Histoire et perspectives méditerranéennes. Droit, Justice, Religion, Maghreb, Monde arabe, Moyen-Orient.

• L’Europe au miroir de la TurquiePolitique européenne, n° 29, automne 2009.Edition l’Harmattan, Auteur : Nicolas Monceau et Collectif.

IV. Liens utiles

• Site de MEDSTAT II – Final Forum : http://www.medstat-finalforum.org

• Site officiel du programme MEDSTAT II :http://epp.eurostat.ec.europa.eu/portal/page/portal/medstat/introduction/

• Direction générale de la concurrence :http://ec.europa.eu/dgs/competition/index_fr.htm

• Direction générale de la recherche:http://ec.europa.eu/research/index.cfm?lg=fr

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Le statut avancé à l’épreuve de l’Union pour la Méditérrannée228

• Centre commun de recherche :http://ec.europa.eu/dgs/jrc/index.cfm

• Direction générale de la société de l’information et des médias :http://ec.europa.eu/dgs/information_society/index_fr.htm

• Éducation: http://ec.europa.eu/education/index_fr.htm

• Direction générale de l’énergie et des transports:http://ec.europa.eu/dgs/energy_transport/index_en.htm

• Marché intérieur : http://ec.europa.eu/internal_market/index_fr.htm

• Direction générale de l’élargissement: http://ec.europa.eu/enlargement/index_fr.htm

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G R O U P E M E N T D ’ E T U D E S

E T D E R E C H E R C H E S S U R L A M E D I T E R R A N E E

GERM