In trentatré frammenti - Maldoror Press · 2012-02-19 · ment réduit son fracas et son allure,...

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RENE CHARIn trentatre frammenti

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disegni automatici diD o n a t e l l a V i t i e l l o

M a l d o r o r P r e s s 2 0 1 2

T i t o l o o r i g i n a l e :E n t r e n t e - t r o i s m o r c e a u x , G . L . M . , 1 9 5 6 .

Cvvvbvvvnvvvdz

T r a d u z i o n e :

C a r m i n e M a n g o n e

In copertina: disegno di René Char[dal manoscritto di La Sorgue]

Souvent le soir, lorsque tout ce qui s’agite et circule a sensible-ment réduit son fracas et son allure, qu’il est permis enfin de rap-procher les choses de soi avec une libre minutie, je sors de mondomicile et, par la rue de Babylone, je gagne le boulevard desInvalides. J’éprouve une délectation un peu hagarde en cet en-droit, car, de tous ses aplombs, le ciel m’entre dans les épaules.Sous une pèlerine de pluie fine, le fantôme de l’impulsion se-conde rôde par là. Rue de Varenne, j’emprunte le trottoir dumusée Rodin dont la haute porte vert-de-lierre et le joli jardin touten profondeur, derrière l’hôtel transparent, sommeillent, on le de-vine, sans appréhension. La rue Barbet-de-Jouy s’ouvre commeune allée. Dès sa première maison, tant la réussite est juste, lelong frisson de mon plaisir éclôt et remercie. Remercie MarcelProust auquel ce lieu me ramène. Site qui lui appartient commeun grain de beauté à une province écartée du corps. Il le donneà toucher, bien que le poète Marcel Proust ne le mentionne, jecrois, dans aucune de ses œuvres. Une des nuits dernières, passant ici et songeant à lui, la masseverticale et peu illuminée de mes premiers ouvrages posée enéquilibre sur ma tête, j’avançais sans prudence. De loin en loinune mèche d’arbre surgissait dans l’intervalle de deux maisons.Soudain – à la suite de quelle maladresse ? – la tour de mes poè-mes s’écroula au sol, se brisa comme verre. Sans doute, forçantl’allure et rencontrant le vide, avais-je voulu saisir, contre son gré,la main du Temps – le Temps qui choisit –, main qu’il n’était pasdécidé à me donner encore. Le Marteau sans maître, Placardpour un chemin des écoliers, Art bref, Dehors la nuit est gouver-née, n’avaient plus de livre que le nom. Je ramassai trente-troismorceaux. Après un moment de désarroi je constatai que jen’avais perdu dans cet accident que le sommet de mon visage.

Preambule,

Paris, 8 avril 1956

Sovente, di sera, quando tutto quel che s’agita e circola ha ri-dotto sensibilmente il suo fracasso e il suo andare, in modo chesia infine permesso avvicinare le cose con una libera minuziosità,io esco dal mio domicilio e, attraverso rue de Babylone, raggiungoil boulevard des Invalides. Provo un piacere un po’ strano in que-sto spazio, perché da ogni sua verticale il cielo mi entra nellespalle. Sotto una mantellina di pioggia fine, si aggira il fantasmadell’impulso secondario. In Rue de Varenne prendo il marciapiededel museo Rodin, il cui portone verde-edera e il bel giardino infuga, dietro la facciata trasparente, sonnecchiano, lo s’indovina,senz’apprensione. La rue Barbet-de-Jouy si apre a mo’ di viale.Già dalla prima casa, è talmente netto il suo impatto da far fioriree rendere riconoscente quel mio lungo brivido di piacere. Ringra-zio Marcel Proust, verso il quale questo luogo mi riconduce. Sitoche gli appartiene come un grano di bellezza ad una provinciain esilio dal corpo. Ciò mi appare lampante, benché il poeta Mar-cel Proust non lo menzioni, io credo, in nessuna delle sue opere.Una delle notti scorse, passando per di qua e pensando a lui, conla massa in verticale e poco chiara delle mie prime opere in equi-librio sulla testa, avanzavo imprudente. Di tanto in tanto, un ciuffod’albero spuntava nell’intervallo tra due case. All’improvviso – inseguito a quale malessere? – la torre delle mie poesie è crollataal suolo frantumandosi come vetro. Senza dubbio, forzando l’an-datura e facendomi incontro al vuoto, avevo voluto afferrare, suomalgrado, la mano del Tempo – il Tempo che vaglia –, mano cheancora non si era deciso a darmi. Le Marteau sans maître, Placardpour un chemin des écoliers, Art bref, Dehors la nuit est gouver-née, non avevano conservato che il titolo. Ne raccolsi trentatréframmenti. Dopo un attimo di smarrimento, constatai che avevoperso, nell’accaduto, solo la sommità del mio volto.

Preambolo

Parigi, 8 aprile 1956

Oiseau jamais interceptéTon étoile m’est douce au cœurMa route tire sur sa raieL’air s’en détourne et l’homme y meurt.

Uccello mai intercettatoLa tua stella m’è dolce al cuoreLa mia strada mira al suo raggioL’aria se ne distoglie e l’uomo vi muore.

I

Avant de te connaître, je mangeais et j’avaisfaim, je buvais et j’avais soif, bien et mal m’indif-féraient, je n’étais pas moi mais mon prochain.

Prima di conoscerti, mangiavo e avevo fame,bevevo e avevo sete, restavo indifferente albene e al male, non ero io ma il mio prossimo.

II

Des yeux purs dans le boisCherchent en pleurant la tête habitable.

Occhi puri nel boscoCercano in lacrime la testa abitabile.

III

L’homme qui emporte l’évidence sur ses épaulesGarde le souvenir des vagues dans les

[entrepôts de sel.

L’uomo che porta l’evidenza sulle spalleVigila sul ricordo delle onde nei magazzini del sale.

IV

Moi qui n’ai jamais marché mais nagé maisvolé parmi vous.

Io che mai ho camminato tra di voi bensìnuotato volato.

V

Lasse-moi me convaincre de l’éphémère qui [enchantait hier

ses yeux.

Lascia che io mi convinca dell’effimero che ieri [incantava

i suoi occhi.

VI

La paix su soir aborde chaque pierre y jettel’ancre de douleurPuis vient la nuit grosse de batailles.

La pace della sera abborda ogni pietra e vigetta l’ancora del dolorePoi viene la notte gravida di battaglie.

VII

L’air était maternelLes racines croissaient.

L’aria era maternaLe radici crescevano.

VIII

Un papillon de paille habitait un crâne de chienÔ couleurs ô jachère ô danse !

Una farfalla di paglia abitava un cranio di caneOh colori oh maggese oh danza!

IX

Seuls aux fenêtres des fleuvesLes grands visages éclairésRêvent qu’il n’y a rien de périssableDans leur paysage carnassier.

Da soli alla finestra dei fiumiI grandi volti illuminatiSognano che non v’è nulla di perituroNel loro paesaggio carnivoro.

X

Mais l’angoisse nomme la femmeQui brodera le chiffre du labyrinthe.

Ma l’angoscia nomina la donnaChe ricamerà la cifra del labirinto.

XI

La sécurité est un parfum.

La sicurezza è un profumo.

XII

Une femme suit des yeux de l’homme vivantqu’elle aime.

Una donna insegue con gli occhi l’uomo vivoche ama.

XIII

Le cœur prochain se place.

Il prossimo cuore s’insedia.

XIV

L’air qui patiente et la voile rareSœur docile de l’aigle.

L’aria che pazienta e la vela raraSorella docile dell’aquila.

XV

Veilleur éphémère du mondeÀ la lisière de la peurLance ta révolte valideElle emporte l’aigre duvetL’horizon devient rose il bougeEnfant nous fermons tes plaies.

Sentinella effimera del mondoAl limitare della pauraLancia la tua sana rivolta Essa conquista il ruvido giaciglioL’orizzonte diviene rosa si agitaBambino siam noi a cucirti le ferite.

XVI

Il faut trembler pour grandir.

Bisogna tremare per crescere.

XVII

Elle voit maigrir les oiseaux inquiets.

Lei vede smagrire gli uccelli inquieti.

XVIII

Terreur des trèfles mon égale compagne.

Terrore dei trifogli mia compagna mia pari.

XIX

Les silencieux incurablesLe figuier allaiteur de ruinesCeux qui canalisent l’écume du monde souterrain.

I silenziosi incurabiliIl fico che allatta le rovineColoro che convogliano la schiuma del mondo

[sotterraneo.

XX

Maigre terre condamnéeÀ la monnaie de bohémienneToujours restons les obligés de l’inquiétude.

Magra terra condannataAl soldo della zingaraPermangono i debitori dell’inquietudine.

XXI

Proches étoiles qui paradez dans le doublenuage de la famine et de la mort.

Stelle vicine che vi pavoneggiate nella duplicenube della fame e della morte.

XXII

Main-d’œuvre errante de moi-même.

Manodopera errante di me stesso.

XXIII

Hâte-toi de transmettreTa part de merveilleux de rébellion de bienfaisanceEffectivement tu es en retard sur la vieLa vie inexprimable.

Affréttati a trasmettereLa tua parte di meraviglioso di ribellione di

[benevolenzaÈ palese tu sei in ritardo sulla vitaLa vita inesprimibile.

XXIV

On n’enfonce pas son pied dans la sourcePour paraître l’égal de l’amandier.

Non s’affonda il piede nella sorgentePer apparire simile al mandorlo.

XXV

Ce fanatique des nuagesA le pouvoir surnaturelDe déplacer sur des distances considérablesLes paysages habituels.

Quel fanatico delle nubiHa il potere sovrannaturaleDi spostare su distanze ragguardevoliI paesaggi abituali.

XXVI

Souffrez que nous soyons vos pèlerins extrêmesSemeurs ensevelis dans le labyrinthe de votre pied.

Fate di noi i vostri pellegrini estremiSeminatori sepolti nel labirinto dei vostri passi.

XXVII

Fureur tu me traites comme la tristesseQuand elle déblaie mon chemin.

Furore tu mi tratti come la tristezzaQuando sterra il mio cammino.

XXVIII

Donnons les prodiges à l’oubli secourable.

Doniamo i prodigi all’oblio soccorrevole.

XXIX

Si l’union faisait le sommeilNon le désert.

Se l’unione facesse il sonnoNon il deserto.

XXX

Regarde sans pouvoir l’acheverLa merveille agonisanteLe portail poussé tu t’abats.

Guarda senza poterla compiereLa meraviglia agonizzanteSpinto il portale tu crolli.

XXXI

Mort minuscule de l’étéDételle-moi mort éclairanteÀ présent je sais vivre.

Morte infima dell’estateScioglimi morte splendenteOggi so vivere.

XXXII

Laissez filer les guides maintenant c’est la plaineIl gèle à la frontière chaque branche l’indiqueUn tournant va surgit prompt comme une fuméeOù flottera bonjour arqué comme une échardeL’angoisse de faiblir sous l’écorceLe couvert sera mis autour de la margelleDes êtres bienveillants se porteront vers nousLa main à votre front sera froide d’étoilesEt pas un souvenir de couteau sur les herbes.

Congedate le guide ora che siete a valleGelo alla frontiera ogni ramo lo indicaTornante sollecito che sorge come fumoOve il buongiorno fluttuerà ricurvo come spinaL’angoscia di ridursi sotto la scorzaIl pasto servito intorno al pozzoEsseri benevoli ci avvicinerannoLa mano sulla tua fronte sarà fredda di stelleE nessun ricordo del coltello sopra l’erba.

XXXIII

Nous voici de nouveau seuls en tête à tête, ôpoésie. Ton retour signifie que je dois encore unefois me mesurer avec toi, avec ta juvénile hosti-lité, avec ta tranquille soif d’espace, et tenir prêtpour ta joie cet inconnu équilibrant dont je di-spose.

Eccoci di nuovo da soli, testa a testa, oh poesia.Il tuo ritorno significa che devo ancora una voltamisurarmi con te, con la tua giovanile ostilità,con la tua tranquilla sete di spazio, e tenerpronto per la tua gioia quest’ignoto contrap-peso di cui dispongo.

Testi da cui provengono i frammenti scelti da René Char

Le Marteau sans maître (19341, 19452) = MMPlacard pour un chemin des écoliers (1937) = PLACARDArt bref (1950) = ABDehors la nuit est gouvernée (1938) = DEHORS